Un jour, un poème, un auteur
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coline dé
lol47
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Un jour, un poème, un auteur
Nazım Hikmet
Peut-être que moi
Peut-être que moi
de ce jour
bien plus avant :
me balançant pendu place du Pont
je laisserai un matin tomber mon ombre sur l’asphalte
Peut-être que moi
de ce jour
bien plus après :
une trace de barbe blanche sur ma mâchoire rasée
je serai encore vivant…
Et moi
de ce jour
bien plus après :
si je suis encore vivant,
aux coins des places vides m’adossant
aux murs.
à ceux qui comme moi à la dernière tourmente survécurent
aux vieillards
je vais jouer les soirs des fêtes
du violon…
Tout autour, d’une nuit merveilleuse
les trottoirs illuminés
et des hommes nouveaux
chantant des nouvelles chansons
les pas…
1930
Traduit du turc par Fikret Adil
Revue « Bifur, N° 8 »
Editions du Carrefour, 1931
https://fr.wikipedia.org/wiki/Nâzım_Hikmet
Peut-être que moi
Peut-être que moi
de ce jour
bien plus avant :
me balançant pendu place du Pont
je laisserai un matin tomber mon ombre sur l’asphalte
Peut-être que moi
de ce jour
bien plus après :
une trace de barbe blanche sur ma mâchoire rasée
je serai encore vivant…
Et moi
de ce jour
bien plus après :
si je suis encore vivant,
aux coins des places vides m’adossant
aux murs.
à ceux qui comme moi à la dernière tourmente survécurent
aux vieillards
je vais jouer les soirs des fêtes
du violon…
Tout autour, d’une nuit merveilleuse
les trottoirs illuminés
et des hommes nouveaux
chantant des nouvelles chansons
les pas…
1930
Traduit du turc par Fikret Adil
Revue « Bifur, N° 8 »
Editions du Carrefour, 1931
https://fr.wikipedia.org/wiki/Nâzım_Hikmet
Re: Un jour, un poème, un auteur
Très sympa! J'aime beaucoup l'idée de laisser tomber son ombre...
coline dé- Nombre de messages : 353
Age : 24
Date d'inscription : 24/12/2019
Re: Un jour, un poème, un auteur
J'aime beaucoup Nazim Hikmet, quasi inconnu en occident, qui n'a pas eu la chance comme Mandelstam d'être persécuté par les pouvoirs communistes, au contraire.
J'aime beaucoup Nazim Hikmet, et je ne connaissais pas ce poème (ni la revue Bifur). Donc grand merci.
Cette rubrique -Un jour, un poème, un auteur- est-elle régulière ?
J'aime beaucoup Nazim Hikmet, et je ne connaissais pas ce poème (ni la revue Bifur). Donc grand merci.
Cette rubrique -Un jour, un poème, un auteur- est-elle régulière ?
danie- Nombre de messages : 149
Age : 74
Date d'inscription : 10/02/2020
Re: Un jour, un poème, un auteur
Oui, mais limitée à une participation par jour et par personne, comme la rubrique "un jour, une phrase". Merci d'en tenir compte.danie a écrit:Cette rubrique -Un jour, un poème, un auteur- est-elle régulière ?
Sahkti- Nombre de messages : 31659
Age : 50
Localisation : Suisse et Belgique
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Un jour, un poème, un auteur
Merci, je compte y participer, de temps à autre.
danie- Nombre de messages : 149
Age : 74
Date d'inscription : 10/02/2020
Re: Un jour, un poème, un auteur
danie a écrit:J'aime beaucoup Nazim Hikmet, quasi inconnu en occident, qui n'a pas eu la chance comme Mandelstam d'être persécuté par les pouvoirs communistes, au contraire.
J'aime beaucoup Nazim Hikmet, et je ne connaissais pas ce poème (ni la revue Bifur). Donc grand merci.
Cette rubrique -Un jour, un poème, un auteur- est-elle régulière ?
Non, c'était une très ancienne revue surréaliste des années 30. Par l'intermédiaire de quelqu'un j'ai pu avoir ce texte, sinon je ne l'aurais jamais trouvé. Pièces de collection !
Poésie yiddish
Avrom Sutzkever (1913 – 2010) /
Les gazelles de Yamsuf
S’obstine le soleil couchant, astre tenace,
Demeurer à Yamsuf, quand surgissent le soir
Vers le palais des eaux les gazelles, de grâce
Et de rose innocent, pour apaiser leur soif.
De leurs ombres de soie se défont sur la rive
Et lèchent à Yamsuf des anneaux de fraîcheur.
Longs visages de violons. Il leur arrive
D’épouser le silence en noces de douceur.
A la fin elles fuient. Des taches roses sèchent
Dans le sable, un regret qui survit au reflux
Suit les gazelles du couchant, celles qui lèchent
Le silence de ceux qui déjà ne sont plus.
Traduit du yiddish par Charles Dobzynski,
in « Anthologie de la poésie yiddish, Le miroir d’un peuple »,
Éditions Gallimard, 2000.
Re: Un jour, un poème, un auteur
Tristan Tzara
(1896-1963)
DIMANCHE
Le vent pleure dans les cheminées avec tout le désespoir d’un orphelinat
Viens près de moi comme une barque dans les roseaux
Étale tes paroles comme les draps des lits blancs de l’infirmerie
Parce que là-bas on peut pleurer tranquillement et que ça s ent les
coings et le sapin.
Parle-moi de pays lointains
De gens étranges
De l’île aux perroquets
Mon âme est gaie et étonnée
Comme un ami qui vient de rentrer de l’hôpital.
Dans ta voix il y a des femmes vieilles et bonnes
Ton bras court sur ma poitrine comme un ruisseau
J’aime les animaux domestiques
Dans la ménagerie de ton âme.
Sur le pont un homme se penche, siffle vers l’eau ne pensant à rien
Chez nous il fait chaud, il y a de la joie comme lorsque à la bergerie
naissent les agneaux
Ton histoire s’endort ainsi qu’un enfant qui berce un éléphant de laine
Chez nous tout est calme comme lorsque les chevaux boivent à la
fontaine.
En longues files passent dans la rue les internes du pensionnat
Et dans chaque regard il y a une maison paternelle
Avec une bonne table et des soeurs cadettes
Avec des pots de fleurs à la fenêtre.
Quand le soir tombe le froid glisse dans les couloirs
Comme un serpent très long traînant sa queue sur les dalles
Le lac est cousu de fil blanc
Les noyés remontent à la surface — les canards s’en éloignent.
Chez les voisins le père embrasse sa fille indifférent.
Il lui fait la morale quand elle s’en va
Le lac s’est refermé comme derrière une fille les portes du couvent
16
Le glouglou de la suicidée a fait peur — les grenouilles se sont tues un
moment.
Je m’en vais rencontrer un poète triste et sans talent.
Poésies complètes, Flammarion. 2011
(1896-1963)
DIMANCHE
Le vent pleure dans les cheminées avec tout le désespoir d’un orphelinat
Viens près de moi comme une barque dans les roseaux
Étale tes paroles comme les draps des lits blancs de l’infirmerie
Parce que là-bas on peut pleurer tranquillement et que ça s ent les
coings et le sapin.
Parle-moi de pays lointains
De gens étranges
De l’île aux perroquets
Mon âme est gaie et étonnée
Comme un ami qui vient de rentrer de l’hôpital.
Dans ta voix il y a des femmes vieilles et bonnes
Ton bras court sur ma poitrine comme un ruisseau
J’aime les animaux domestiques
Dans la ménagerie de ton âme.
Sur le pont un homme se penche, siffle vers l’eau ne pensant à rien
Chez nous il fait chaud, il y a de la joie comme lorsque à la bergerie
naissent les agneaux
Ton histoire s’endort ainsi qu’un enfant qui berce un éléphant de laine
Chez nous tout est calme comme lorsque les chevaux boivent à la
fontaine.
En longues files passent dans la rue les internes du pensionnat
Et dans chaque regard il y a une maison paternelle
Avec une bonne table et des soeurs cadettes
Avec des pots de fleurs à la fenêtre.
Quand le soir tombe le froid glisse dans les couloirs
Comme un serpent très long traînant sa queue sur les dalles
Le lac est cousu de fil blanc
Les noyés remontent à la surface — les canards s’en éloignent.
Chez les voisins le père embrasse sa fille indifférent.
Il lui fait la morale quand elle s’en va
Le lac s’est refermé comme derrière une fille les portes du couvent
16
Le glouglou de la suicidée a fait peur — les grenouilles se sont tues un
moment.
Je m’en vais rencontrer un poète triste et sans talent.
Poésies complètes, Flammarion. 2011
Re: Un jour, un poème, un auteur
Magnifique, encore une fois merci
danie- Nombre de messages : 149
Age : 74
Date d'inscription : 10/02/2020
Re: Un jour, un poème, un auteur
Joë Bousquet
(1897-1950)
L’hirondelle blanche
IL ne fait pas nuit sur la terre ; l’obscurité rôde, elle erre autour du noir.
Et je sais des ténèbres si absolues que toute forme y promène une lueur
et y devient le pressentiment, peut-être l’aurore d’un regard.
Ces ténèbres sont en nous. Une dévorante obscurité nous habite.
Les froids du pôle sont plus près de moi que ce puant enfer
où je ne pourrais pas me respirer moi-même.
Aucune sonde ne mesurera ces épaisseurs : parce que mon apparence est dans un espace
et mes entrailles dans un autre ; je l’ignore parce que mes yeux, ni ma voix, ni le voir, ni l’entendre
ne sont dans l’un ni l’autre.
Il fait jour ton regard exilé de ta face
Ne trouve pas tes yeux en s’entourant de toi
Mais un double miroir clos sur un autre espace
Dont l’astre le plus haut s’est éteint dans ta voix.
Sur un corps qui s’argente au croissant des marées
Le jour mûrit l’oubli d’un pôle immaculé
Et mouille à tes longs cils une étoile expirée
De l’arc-en-ciel qu’il draine aux racines des blés.
Les jours que leur odeur endort sous tes flancs roses
Se cueillent dans tes yeux qui s’ouvrent sans te voir
Et leur aile de soie enroule à ta nuit close
La terre où toute nuit n’est que l’ouvre d’un soir.
L’ombre cache un passeur d’absences embaumées
Elle perd sur tes mains le jour qui fut tes yeux
Et comme au creux d’un lis sa blancheur consumée
Abîme au fil des soirs un ciel trop grand pour eux.
Il fait noir en moi, mais je ne suis pas cette ténèbre bien qu’assez lourd
pour y sombrer un jour.
Cette nuit est : on dirait qu’elle a fait mes yeux d’aujourd’hui et me ferme à ce qu’ils voient.
Couleurs bleutées de ce que je ne vois qu’avec ma profondeur,
rouges que m’éclaire mon sang, noir que voit mon cœur...
Nuit du ciel, pauvre ombre éclose, tu n’es la nuit que pour mes cils.
Bien peu de cendre a fait ce bouquet de paupières
Et qui n’est cette cendre et ce monde effacé
Quand ses poings de dormeur portent toute la terre
Où l’amour ni la nuit n’ont jamais commencé.
Extrait de "Sème-Chemins", 1968, oeuvre posthume.
(1897-1950)
L’hirondelle blanche
IL ne fait pas nuit sur la terre ; l’obscurité rôde, elle erre autour du noir.
Et je sais des ténèbres si absolues que toute forme y promène une lueur
et y devient le pressentiment, peut-être l’aurore d’un regard.
Ces ténèbres sont en nous. Une dévorante obscurité nous habite.
Les froids du pôle sont plus près de moi que ce puant enfer
où je ne pourrais pas me respirer moi-même.
Aucune sonde ne mesurera ces épaisseurs : parce que mon apparence est dans un espace
et mes entrailles dans un autre ; je l’ignore parce que mes yeux, ni ma voix, ni le voir, ni l’entendre
ne sont dans l’un ni l’autre.
Il fait jour ton regard exilé de ta face
Ne trouve pas tes yeux en s’entourant de toi
Mais un double miroir clos sur un autre espace
Dont l’astre le plus haut s’est éteint dans ta voix.
Sur un corps qui s’argente au croissant des marées
Le jour mûrit l’oubli d’un pôle immaculé
Et mouille à tes longs cils une étoile expirée
De l’arc-en-ciel qu’il draine aux racines des blés.
Les jours que leur odeur endort sous tes flancs roses
Se cueillent dans tes yeux qui s’ouvrent sans te voir
Et leur aile de soie enroule à ta nuit close
La terre où toute nuit n’est que l’ouvre d’un soir.
L’ombre cache un passeur d’absences embaumées
Elle perd sur tes mains le jour qui fut tes yeux
Et comme au creux d’un lis sa blancheur consumée
Abîme au fil des soirs un ciel trop grand pour eux.
Il fait noir en moi, mais je ne suis pas cette ténèbre bien qu’assez lourd
pour y sombrer un jour.
Cette nuit est : on dirait qu’elle a fait mes yeux d’aujourd’hui et me ferme à ce qu’ils voient.
Couleurs bleutées de ce que je ne vois qu’avec ma profondeur,
rouges que m’éclaire mon sang, noir que voit mon cœur...
Nuit du ciel, pauvre ombre éclose, tu n’es la nuit que pour mes cils.
Bien peu de cendre a fait ce bouquet de paupières
Et qui n’est cette cendre et ce monde effacé
Quand ses poings de dormeur portent toute la terre
Où l’amour ni la nuit n’ont jamais commencé.
Extrait de "Sème-Chemins", 1968, oeuvre posthume.
Re: Un jour, un poème, un auteur
tu nous gâtes !
j'avais l'habitude de consulter chaque jour la page Beauty will Save the World : https://schabrieres.wordpress.com/
aujourd'hui : Alain Marc – Avec ce virus rendu planétaire •mai 5, 2020 •
j'avais l'habitude de consulter chaque jour la page Beauty will Save the World : https://schabrieres.wordpress.com/
aujourd'hui : Alain Marc – Avec ce virus rendu planétaire •mai 5, 2020 •
danie- Nombre de messages : 149
Age : 74
Date d'inscription : 10/02/2020
Re: Un jour, un poème, un auteur
Derrière la lune, il y a la nuit.
Je prends ta main, il est temps encore
Je te parle de
tout ce qui
est devant :
Des toits bleus, des luisances
sous la pluie qui peut
vieillir et disparaître. De notre ville, et d’un futur voyage.
Tandis que mon étonnement ne faiblit pas
de mêler tes doigts à ma vie
tout doucement s’avance
derrière nous
un noir plus obscur que la nuit. Nous le savons.
La minute en est de saveur plus douce.
↢↣↞↠◈↞↠↢↣⇋⇌↢↣↞↠◈↞↠↢↣⇋⇌↢↣↞↠
MARIE-CLAIRE BANCQUART
In Entre marge et présence, éd. Les Ecrits du Nord, 2009
https://www.editionshenry.com/
Je prends ta main, il est temps encore
Je te parle de
tout ce qui
est devant :
Des toits bleus, des luisances
sous la pluie qui peut
vieillir et disparaître. De notre ville, et d’un futur voyage.
Tandis que mon étonnement ne faiblit pas
de mêler tes doigts à ma vie
tout doucement s’avance
derrière nous
un noir plus obscur que la nuit. Nous le savons.
La minute en est de saveur plus douce.
↢↣↞↠◈↞↠↢↣⇋⇌↢↣↞↠◈↞↠↢↣⇋⇌↢↣↞↠
MARIE-CLAIRE BANCQUART
In Entre marge et présence, éd. Les Ecrits du Nord, 2009
https://www.editionshenry.com/
Pussicat- Nombre de messages : 4846
Age : 57
Localisation : France
Date d'inscription : 17/02/2012
Re: Un jour, un poème, un auteur
poésie de la pluie
au faîte de l'épicéa
foret de l'âme
vert sans fioriture
nature atavique
mots libérés
du carcan arbitraire
temps qui agonise
le jour se lève
l'impression subtile
de la bruyère
nageant dans l'opulence
il pleut au ralenti
des gouttes salutaires
larmes de vie
que sont devenues
les âmes
la langueur estivale
l'odeur passagère
du bolet flamboyant
sous la mousse
So-Back, merci d'indiquer sous le texte les références (auteur, recueil, etc). Si il s'agit d'un de vos textes, il n'a pas sa place dans ce fil, dédié aux poètes que les Véliens font découvrir aux autres.
au faîte de l'épicéa
foret de l'âme
vert sans fioriture
nature atavique
mots libérés
du carcan arbitraire
temps qui agonise
le jour se lève
l'impression subtile
de la bruyère
nageant dans l'opulence
il pleut au ralenti
des gouttes salutaires
larmes de vie
que sont devenues
les âmes
la langueur estivale
l'odeur passagère
du bolet flamboyant
sous la mousse
So-Back, merci d'indiquer sous le texte les références (auteur, recueil, etc). Si il s'agit d'un de vos textes, il n'a pas sa place dans ce fil, dédié aux poètes que les Véliens font découvrir aux autres.
So-Back- Nombre de messages : 3652
Age : 101
Date d'inscription : 04/04/2014
LES QUATRE TEMPS CARDINAUX (René Daumal)
La poule noire de la nuit
vient encore de pondre une aurore.
Salut le blanc, salut le jaune,
Salut, germe qu’on ne voit pas.
Seigneur midi, roi d’un instant,
au haut du jour frappe le gong.
Salut à l’œil, salut aux dents,
Salut au masque dévorant, toujours !
Sur les coussins de l’horizon,
le fruit rouge du souvenir.
Salut soleil qui sait mourir
Salut, brûleur de nos souillures.
Mais en silence je salue la grande Minuit,
Celle qui veille quand les trois s’agitent.
Fermant les yeux je la vois sans rien voir par-delà les ténèbres
Fermant l’oreille j’entends son pas qui ne s’éloigne pas.
danie- Nombre de messages : 149
Age : 74
Date d'inscription : 10/02/2020
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