Une petite toile de Patagonie.

Bonjour à tous, je viens juste de vous trouver sur le net et je m'empresse donc à vous faire part d'un de mes premiers écrits. Pour vous mettre en situation, je l'ai écrit il y a quelques mois sur le bord d'une route en Patagonie argentine. Mes yeux s'ouvraient sur l'immense Pampa que le soleil commençait à caresser de ses rayons. Voici ce que j'en ai tiré.


Au grand dam d’Hélios, Uranus n’a toujours pas levé sa brise-bise et les rais peinent encore à faire chatoyer les oripeaux de la plaine. Balayés par le borée matutinal, les fétus frétillent de-ci de-là et escomptent avec empressement cet instant magique où la chaleur de l’astre jaunira leur brocart doré.
En attendant l’entrée du Grand Peintre, il faut se plier à la maladresse de son disciple impétueux qui pour les mettre en scène exige d’eux qu’ils se ploient, qu’ils se courbent et se prosternent sur cette scène altérée et rocailleuse où il ne cesse de bouffer.
Même si la féerie ne fait que commencer, les spectateurs se pressent et prennent place. Le balcon est pris d’assaut et les ramages des conures de Patagonie couvrent peu à peu le souffle du zéphyr.
Tout est bouleversé. Ça tournoie. Ça virevolte. Même mes pensées se laissent aller à l’anarchie quand mon corps est caressé par la main d’Eole qui me ramène à ma propre existence. Existence, un bien grand mot quand on se trouve perdu dans cette nature indomptable, intouchable, impénétrable et presque innommable. Exister signifierait-il être rien au milieu du néant ou être le néant au milieu de rien ? A vrai dire, Si Descartes eût connu l’Argentine, je suis certain que son « je pense donc je suis » aurait acquis un autre sens.
Je ne serai donc rien pendant la traversée de cette pampa déconcertante. Une plaine d’or à la fois si proche et si distante de cet océan d’argent, simplement endiguée par les lointaines aiguilles de ces Andes enneigées. Même elles, si souvent majestueuses, si souvent maîtresses des lacs et des salines, elles ne semblent jouer ici qu’un second rôle, un rôle de second plan pourrait-on dire. Alors que l’homme, pour montrer sa puissance, et parfois même sa mégalomanie, s’est toujours efforcé et s’efforcera toujours d’élever ses créations au plus haut, même Eiffel, Napoléon, Ramsès ou Shah Jahan n’auraient trouvé ici les moyens de satisfaire leur orgueil démesuré tant l’immensité de la platitude l’emporte sur cette verticalité pourtant colossale.
Soudain, les poils du premier pinceau solaire viennent effleurer les brindilles qui ne demandent que cette dorure pour couvrir leur nudité. Elles se redressent, s’extasient avec fierté et émerveillement pour remercier le soleil de leur apporter un peu de chaleur dans cet univers hostile. Et si elles ploient encore un peu c’est juste pour accueillir avec égard ce nandou désireux de participer au spectacle de la vie.
Nonobstant, le spectacle est pour moi terminé. Un bruit sourd, un ronronnement grave et agressif me donne juste envie de me lever et de foncer vers cette pourpre plaine qui bien qu’inhospitalière est bien plus amène que ce bus.
Il aura fallu quelques mois pour que tout soit désormais figé et que le Grand Peintre puisse me présenter son œuvre achevée. Ce Maître, ce n’est pas le soleil dont le travail ne fut qu’éphémère mais simplement ma mémoire qui, bien que défaillante parfois, est porteuse de toutes ces émotions que j’espère vous faire partager.

Qu'en dire? A vous de juger et merci!!!

Je trouve ce texte intéressant, au style très marqué dans le genre vieillot (je précise que pour moi ce n'est pas forcément un défaut).

Au début il m'a paru trop maniéré, mais il s'est imposé à moi, j'en ai aimé le rythme et l'expressivité. Il a su dépasser mes défenses, et cette écriture soignée, qu'on peut trouver trop chargée, m'a conquise.

En revanche, je n'aime pas beaucoup le dernier paragraphe ("Il aura fallu"...), car je préfère toujours l'effacement de l'auteur. Le rappel des circonstances où l'écrit a été conçu me paraît inutile.

Bienvenue sur Vos Ecrits, à vous lire bientôt !

Objectivement on ne peut que reconnaître une écriture belle, précieuse, surannée, qui force l'admiration, même si je n'ai en ce qui me concerne plus trop le goût de ce style. Peut-être que l'attention portée à une écriture techniquement parfaite nuit aux émotions que le lecteur aimerait ressentir à la lecture de cette description. Ceci dit, il y a un passage que j'aime vraiment beaucoup pour les images qu'il évoque :

Soudain, les poils du premier pinceau solaire viennent effleurer les brindilles qui ne demandent que cette dorure pour couvrir leur nudité. Elles se redressent, s’extasient avec fierté et émerveillement pour remercier le soleil de leur apporter un peu de chaleur dans cet univers hostile. Et si elles ploient encore un peu c’est juste pour accueillir avec égard ce nandou désireux de participer au spectacle de la vie.

Je vous remercie pour vos réponses qui se rejoignent sur le style un peu classique de l'écriture. Apparemment, mes professeurs aimaient un peu trop nos Grands Hommes! C'est vraiment avec un énorme plaisir que je reçois ces critiques si constructives et je vais désormais tenter d'actualiser un peu tout ça dans le but de ne pas trop "agresser" le lecteur et le laisser s'imprègner du flot des émotions.
Bonne journée et bonne lecture à tous.

Le style perruque-poudrée et dentelles-jaunies m'a amusée, Pourquoi pas!
Mais alors certains mots me choquent sur la scène de ce théatre baroque:
cette scène altérée et rocailleuse où il ne cesse de bouffer ce dernier mot prête à confusion. Dans un premier temps j'ai eu tendance à y voir un synonyme un peu vulgaire de s'empiffrer.
foncer vers cette pourpre plaine me fait un peu le même effet n'étant pas ici à sa place.
Une joile carte postale, toutefois, originale en tout cas!
Bienvenue Sébastien, j'attends d'autres nouvelles de toi dans cette Argentine qui semble t'avoir envoûté.

Bonjour Arielle,

En grand merci pour avoir répondu à cet "archaisme" que je représente apparemment. C'est vraiment sympathique de passer un peu de temps pour nous donner ton avis.
J'ai bien aimé ton interprétation de "théâtre baroque" puisque c'était vraiment le message que je voulais faire passer!! Mon but était en effet de retranscrire le spectacle anarchique de la nature en Argentine qui en déconcerte plus d'un. Par contre, là où je me suis trompé c'est sur le résultat final. En aucun cas, je n'ai voulu jouer le comique! Je viens donc de découvrir que des mots un peu trop maniérés peuvent transformer la mélancolie en hilarité. Pourquoi ne pas profiter de cette réflexion pour trouver une nouvelle piste?!
Pour "bouffer", effectivement, il faut le prendre au sens classique du terme donc "souffler."
"Foncer" oui ça me dérange aussi énormément!
Apparemment, il faut vraiment que je me plonge dans un lexique du français contemporain qui me paraît quand même plus plat et beaucoup moins expressif, certainement parce que je le manie assez mal à l'écrit.
Sinon, l'Argentine est effectivement envoûtante, déroutante, somptueuse et grandiose et j'espère bien y rester encore une bonne partie de ma vie.
Un grand merci
Sébastien

Le style ampoulé me plait, jusqu'à une certaine limite.

Tu as réussi un bon tour de force, qui demanderait quelques corrections (minimes).
... En attendant l’entrée du Grand Peintre, il faut se plier à la maladresse de son disciple impétueux qui pour les mettre en scène exige d’eux qu’ils se ploient, qu’ils se courbent et se prosternent sur cette scène altérée et rocailleuse où il ne cesse de bouffer.... Qui sont-ils eux ?

Relevé :... empressement... se pressent... puis... prennent place. Le balcon est pris... à travailler.

... Même elles, si souvent majestueuses, si souvent maîtresses des lacs et des salines, elles ne semblent... Au risque de couper court, je vote pour la suppression des secondes elles.

... ses créations au plus haut, même Eiffel, Napoléon, Ramsès... Proposition donnant un peu d'air :
... ses créations au plus haut. Eiffel, Napoléon, Ramsès...

je l'ai écrit il y a quelques mois sur le bord d'une route en Patagonie argentine

On peut écrire comme ça dans ces conditions là ? Vrai ? Vrai de vrai ? Ben !
C'est beau, bravo, riche vocabulaire

Bonjour à tous,
Merci bertrand-môgendre. Apparemment je n'ai pas atteint ta limite Ouf!!!!
En le relisant, j'avoue que je me suis calmé après le premier paragraphe et heureusement!!!
Merci Mentor pour votre beau message! Oui c'est vrai et c'est encore beaucoup plus fort que ça!!! De buenos Aires à Bariloche (Patagonie andine), il faut compter 23 heures de bus. En partant le soir de la capitale, la nuit est très longue et la pensée (du moins la mienne!!!) déraille et s'enferme elle aussi peut à peu dans l'obscurité et n'attend qu'un rayon pour renaître et en profiter. Ce fut chose faite quand le bus tomba en panne au milieu de la Pampa et me fit réfléchir sur ce spectacle de la nature. Si vous voulez également les photos qui illustrent ce texte, je l'ai publié sur le blog.

Encore un grand merci à vous tous et à bientôt

sebastien a écrit:Si vous voulez également les photos qui illustrent ce texte, je l'ai publié sur le blog.

ha je veux bien ! tu as déjà donné l'adresse de ce blog ? L'ai pas vue, désolé

Non, je ne l'ai pas donnée car je ne pense pas avoir le droit de la transmettre sur ce site. Apparemment, en bas de ce message, en cliquant sur "blog" tu y accèdes directement.
Il y a de la lecture, je te préviens et des corrections aussi!!!!
Tiens-moi au courant et encore merci pour ton intérêt.
A bientôt

sebastien a écrit:Non, je ne l'ai pas donnée car je ne pense pas avoir le droit de la transmettre sur ce site. Apparemment, en bas de ce message, en cliquant sur "blog" tu y accèdes directement.

si si, tu as le droit ! ;-)
j'y vais
c'est là ?

http://www.notre-amerique-latine.com

;-)

oh, ton émeu m'émeut ;-)
ben dis, c'est rio secco !
je peux te montrer des photos de par chez moi, je vais te dire : je préfère !! :-)))

Oui avec plaisir je veux voir ça!!!
Oui c'est très sec et balayé par les vents!!!
heureusement que le reste de l'argentine n'est pas comme ça

ben... arrivé en bas d'écran, je n'arrive pas à tourner les pages, zarbi

Tu cliques sur suivant ou "2" !!!!! Apparemment plus doué en jeux de mots!

Après "2" si tu veux, tu cliques sur "3" et ça marche aussi. c'est magique tu verras.
je rigole mais ne me moque pas. Je préfère préciser.
Bonne lecture

Mince, je ne plaisante plus car effectivement ça ne fonctionne pas. Je vais tenter de remédier à cela. En allant dans "dernières nouvelles" tu as accès aux autres articles.
Désolé

sebastien a écrit:Mince, je ne plaisante plus car effectivement ça ne fonctionne pas. Je vais tenter de remédier à cela. En allant dans "dernières nouvelles" tu as accès aux autres articles.
Désolé

Mouarf ! à moqueur moqueur et demi :-)))

L'ironie n'a jamais été trop mon truc!!!

sebastien a écrit:L'ironie n'a jamais été trop mon truc!!!

tu vois, pour moi l'ironie c'est un zeste méchant;
mettons humour, c'est mieux
donc c'est bien de pas abuser de l'ironie
surtout injustifiée
ahahahahah !!! (ça c'est carrément méchant)

Bon, ce n'était donc pas ironique et certainement pas méchant
En tous cas, merci de m'avoir averti de ce problème qui est désormais résolu.
Je te souhaite une bonne soirée et à bientôt

J'ai beaucoup aimé le paragraphe qui va de "je ne serais donc rien" à "colossale". J'ai moins aimé le reste. C'est formidable ce style, ces images, tous ces adjectifs, c'est formidable décrire comme cela. Mais moi, j'ai eu du mal à visualiser le texte. J'y arrive d'avantage avec quelque chose de plus sobre. Et justement, le paragraphe que j'ai cité m'a vraiment parlé, je suis entrée dans le texte à ce moment là.
Ce que je dis ne met pas du tout en cause la valeur de ton texte. C'est juste mon ressenti de lecteur, un parmi d'autres.

PS : je suis allée voir ton blog. Superbes photos.

Merci beaucoup pour ce petit mot très constructif lui aussi. Je sais que ce n'est pas facile de finir la lecture d'un texte qui semble hermétique et je vous remercie de l'avoir fait.
J'espère à bientôt
Sébastien

Au grand dam d’Hélios, Uranus n’a toujours pas levé sa brise-bise et les rais peinent encore à faire chatoyer les oripeaux de la plaine. Balayés par le borée matutinal, les fétus frétillent de-ci de-là et escomptent avec empressement cet instant magique où la chaleur de l’astre jaunira leur brocart doré.
En attendant l’entrée du Grand Peintre, il faut se plier à la maladresse de son disciple impétueux qui pour les mettre en scène exige d’eux qu’ils se ploient, qu’ils se courbent et se prosternent sur cette scène altérée et rocailleuse où il ne cesse de bouffer.

J'ai eu du mal à digérer ce passage... Les tournures font des manières, ça à tendance à me décourager de poursuivre mais j'ai continué...

La suite m'a transporté. Tu as un grand potentiel dans la plume. Tu te fais plaisir et tu as raison...On écrit avant tout pour soi, mais un petit conseil qui vaut ce qu'il vaut: ne charge pas trop tes textes d'effets "précieux" qui risquent de te couper d'un lectorat qui ne maîtrise pas forcément tout le vocabulaire (les dico existent cependant!) et qui risque de s'endormir avant la fin malgré la cacophonie d'adjectifs...

Suis allée faire un petit tour sur ton blog, avec grand plaisir, pas assez de temps aujourd'hui pour faire plus, mais j'y retournerai. On comprend mieux l'usage que tu fais de mots un peu grandiloquents ( ce n'est pas exactement le terme que je voulais employer, mais je n'ai vraiment pas le temps de chercher mieux ce matin... STP, enlève la connotation péjorative !) lorsqu'on voit la démesure de ce pays !

Bonjour Cyclid, bonjour Coline De,

Un grand merci pour vos commentaires.
Cyclid, tu as effectivement raison au sujet de la surcharge du début du texte et il est vrai que je devrais tenter de mettre un peu moins d'emphase dans mes propos pour ne pas dérouter le lecteur.
Coline De, merci d'avoir consulté le blog et c'est vrai que les photos expriment elles aussi la grandeur des espaces où peut se perdre l'esprit.
Merci encore à vous tous et à bientôt

Le troisième texte que je lis où il est question de paysage. Trois peintures différentes. Voilà que je voyage, assise sur un vilain petit fauteuil orange ( mais confortable en maudit ! ). Peinture agréable, je dirais.
Et bienvenue à toi, Sébastien !

sebastien a écrit:Merci beaucoup pour ce petit mot très constructif lui aussi. Je sais que ce n'est pas facile de finir la lecture d'un texte qui semble hermétique et je vous remercie de l'avoir fait.
J'espère à bientôt
Sébastien

Hermétique est un mot un peu fort...
De toute façon, je ne regrette absolument pas d'avoir lu ce texte jusqu'au bout, ne serais-ce que pour le paragraphe que j'ai cité plus haut. Je le trouve vraiment très beau.

Récemment, mon voisin genevois a monté une expo photo relative à son dernier voyage en Patagonie. Paysages superbes, on le sait mais il y aussi toute le reste. Une forme de nonchalance, des impressions de bout du monde et puis ce sentiment d'ailleurs visible dans pratiquement chaque cliché, même lorsqu'il s'agissait d'un bistrot paumé.
Ces impressions, je trouve qu'elles ressortent plutôt bien de ton texte et sont particulièrement mises en avant par ta manière théâtrale de raconter tout cela. Cette grandiloquence des mots se marie à celle des espaces.
Sur ce point c'est réussi.
Toutefois, je me demande si dès lors ça n'empêche pas de ressentir les palpitations de ce territoire qui se retrouvent noyées sous le reste et l'avalanche des mots. Il devrait y avoir des silences, des respirations, le bruit du vent et de rien d'autre, bref de temps en temps une touche de sobriété qui collerait à l'ensemble géographique tout autant que le démesure.

Bonjour à vous tous,
Merci beaucoup pour vos avis et conseils très intéressants.
Lucy, si ce maudit fauteuil te fait voyager, ne lui fais pas défaut!! Les rêves, l'évasion mentale sont des voyages d'une splendeur incomparable.
Anne Veillac, merci pour cet enthousiasme qui fait plaisir
Sahkiti. Je n'avais pas du tout pensé à cette idée et j'avoue qu'elle est très intéressante. Il est vrai que j'étais plutôt parti sur l'aspect baroque de la scène d'où le style et la mise en forme. Je vais vraiment suivre ton conseil. Encore merci.

Je pense au Chant du monde des Kaweskars et des Alakalufs. Pour avoir lu plusieurs ouvrages sur ces peuples décimés sans honte ni regrets par la folie de l'humain, je crois que j'aurais préféré un langage plus âpre, plus cru. Le paysage et son atmosphère le vaudraient bien. Moins poétique, et cependant, disant cela, envie d'ajouter "forcément plus poétique".

Un jour, j'irai là-bas.

Merci Romane,
Venez donc et profitez de ces espaces grandioses qui vous déstabiliseront. Merci pour votre intérêt et votre avis