Itinéraires ordinaires : Mademoiselle Truchet
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Itinéraires ordinaires : Mademoiselle Truchet
Voilà l'idée de départ.
Austérité de rigueur, telle était la devanture du cabinet comptable recouvrant de peinture sombre, l'ancienne échoppe de barbier. Le sérieux de l'établissement studieux garantissait sa notoriété qui se prévalait d'avoir pignon sur rue depuis l'année de sa fondation et de sa reconversion : 1887.
Mademoiselle Truchet pénétrait chaque matin par la porte vitrée ayant gardé son timbre, comme souvenir aérien des anciens propriétaires spécialistes du cheveu coupé frisé, bouclé ou rasé. La femme retournait le panneau indiquant les heures d'ouverture au public.
Le respect régnait entre ces murs et ce n'est pas peu fière qu'elle passait devant le bureau du directeur dont l'entrebâillement laissait suffisamment la place pour qu'elle puisse lancer son invariable :
— Bonjour monsieur le directeur ! Dans la position de l'équilibriste, une jambe en appui l'autre en extension, elle attendait la répartie, le buste tourné face à l'endroit d'où s'échappait l'invariable réponse de l'interpellé :
— Bonjour mademoiselle Truchet ! Bonne journée mademoiselle Truchet !
— Bonne journée monsieur le directeur !
Ainsi parée de cet échange de politesses quotidiennes, elle accrochait sur l'unique patère, son manteau à la place de sa blouse. C'était un simple vêtement de nylon austère dans sa coupe, boutonnée sur le devant, indémodable dans l'unicité de son coloris, infroissable par la qualité du polyamide. Ainsi protégé des poussières et autres taches d'encre, son tailleur coupé strict durait une bonne paire d'années.
Protégées aux manches par des coudières plus sombres que le bleu de sa blouse, la travailleuse de l'agence comptable se murait dans un silence profond du début à la fin de la journée. Avant de pénétrer dans son étrange bureau et pour s'y encourager, elle imaginait d'autres comptables de l'agence rivaliser de discipline, car dès le matin, la précision était de mise. Le seuil de la pièce spéciale franchi, se présentait la file des filles attentives au bon accomplissement du rituel. Dans cette immensité remarquable, s'alignaient les objets : stylos, règles, gomme et autres accessoires ne semblant, dans l'enfilade parfaite ne former qu'un. Un pas en avant pas deux, un de côté mesuré, saisi du siège à dossier droit (je ne sais si droit définit suffisamment la rigidité de l'assise), pose du séant séance tenante, prise en main de la calculette, pendant que l'autre attrape la première fiche de la pile déposée sur le coin opposé à celui vers lequel le soir, les fiches validées par la mention vérifiée, occuperont la corbeille affublée d'une étiquette pleine de promesses : à classer.
Mademoiselle Truchet se pinça la lèvre inférieure entre le pouce et l'index de la main gauche, geste habituel destiné à freiner son envie de prononcer à voix haute son exaspération vis-à-vis de l'attitude de sa collègue qui, à l'inverse d'elle, se pinçait la lèvre inférieure entre le pouce et l'index de la main droite rendant impossible toute forme de travail de gratte papier pour lequel elle et la multitude d'autres employées avaient toutes été embauchées depuis vingt-huit ans dans cette entreprise.
Toutes, était-ce exact ? Était-ce suffisant pour quantifier le nombre impressionnant de femmes installées comme elles, l'une en face de l'autre derrière un bureau identique alignés au cordeau dans cette immense pièce reculant le fond du décor jusqu'à l'infini ?
Tête penchée, œil scrutateur, dissimulé sous ses cils, mademoiselle Truchet, l'employée modèle soupçonnait sa voisine qui tête penchée œil inquisiteur, exerçait à son égard une surveillance rapprochée, à l'affut du moindre manquement aux faits et gestes répertoriés dans le catalogue des faits et gestes à accomplir dans un ordre préétabli.
Cette impression d'image harmonieuse, encourageait chaque individu à parfaire la compétition donnant droit de détrôner mademoiselle Truchet, de sa place d'honneur d'employée modèle. Ainsi avaient-elles décidé de l'imiter en tout point pour lui ravir LE diplôme, cette distinction encadrée, sous-verre, décorant son mur depuis vingt-huit ans déjà.
L’horloge tentait d'achever par surprise les sept coups du soir lorsque "comme un seul homme" la multitude de comptables se levait à l'identique quittait la pièce ne laissant au décor libéré cette étrange profondeur répétée indéfiniment.
Étaient-ce un souci de discrétion, de respect ou simple retour d'intimidation, toujours est-il qu'en dehors du bureau, Mademoiselle Truchet ne rencontrait jamais personne dans le ridicule petit couloir qui menait à la sortie? Il lui plaisait d'imaginer que la troupe des autres salariées, les compétitrices non diplômées avaient accès à une autre partie du bâtiment inconnue d'elle.
Sur l'unique patère, elle accrochait sa blouse à la place de son manteau, simple imperméable capable de passer entre toutes les saisons, sauf l'hivernale. Ainsi protégé des intempéries, son tailleur coupé strict durait une bonne paire d'années. Le respect régnait entre ces murs et ce n'est pas peu fière qu'elle seule passait devant le bureau du directeur dont la porte entrouverte laissait la place pour qu'elle puisse lancer son invariable
— Bonjour monsieur le directeur !
Attendant une jambe en appui l'autre en extension et eut égard à la discipline empruntée de politesse, elle tournait son buste face à l'ouverture d'où s'échappait l'invariable réponse de celui-ci :
— Bonsoir mademoiselle Truchet ! À demain mademoiselle Truchet !
— À demain monsieur le directeur.
Ainsi parée de cette attention quotidienne, elle pouvait sortir de l'ancienne échoppe de barbier par la porte vitrée sur laquelle elle retournait le panneau indiquant les heures de fermeture au public. Le carillon réactivait son retour dans les soucis et tracas de la vie ordinaire, son angoisse.
Parfois, il lui arrivait de croiser sur le trottoir mademoiselle Ronchon. Depuis sa mise à la retraite, son ancienne voisine prenait le temps de se promener sur ce Cours de la Liberté qu'elle avait maintes fois remonté en ayant la peur au ventre d'arriver en retard. De cette dame elle avait appris la ponctualité, la discipline dans ce travail où le mot vérification chapeautait toute action quotidienne. Devant une boisson chaude, les demoiselles se racontaient leurs écarts de centimes, leurs performances liées au modernisme des ordinateurs. Elles se plaisaient à trouver dans les yeux de chacune d'elle le caractère qui leur ressemblait le plus, la jeunesse perdue ou le professionnalisme absolu.
À dix-neuf heures trente, Générosa la femme de ménage commençait son service dans le cabinet des comptables. Nettoyage succinct des sols, vidage des poubelles peu encombrées, et surtout le vendredi soir elle passait un temps supplémentaire dans le bureau de mademoiselle Truchet. Scellés l'un en face de l'autre, deux miroirs monumentaux occupaient les murs diamétralement opposés. Ils donnaient à la pièce cette profondeur digne des grands salons de coiffure. Générosa fut impressionnée au début, car elle se sentait surveillée par une multitude de femmes de ménage lui ressemblant. Cette étrangeté renforçait son envie d'accomplir son travail de nettoyage au mieux, au plus vite nécessitant pourtant une bonne vingtaine de minutes. Parfois, elle s'amusait avec son propre reflet, disparaissait de la surveillance des ses clones, réapparaissait brusquement en lançant un coucou ! gonflé de rire et de bonne humeur. Un sourire, une grimace, un geste, toute action étaient multipliés à l'infini.
Même un soir, il lui prit l'envie d'imiter avec l'aide de son balai serpillère, la scène de retrouvailles d'avec sa chienne Pépette, qui trop heureuse de revoir sa maitresse lui manifestait une joie sans limites et c'est seulement sur le ton autoritaire que Générosa arrivait à calmer ses ardeurs démonstratives. Un réalisateur de caméra cachée aurait eu grand succès en diffusant ce jeu de rôle improvisé.
Pour finir, d'un bref coup de chiffon elle dépoussiérait le cadre protégeant le diplôme d'honneur de mademoiselle Truchet, en ayant cette réflexion. Ça doit être triste de travailler toute seule ici, devant ces miroirs qui vous surveillent sans cesse.
Porte fermée, lumières éteintes, les miroirs au repos s'abimaient de vide.
Ça se passe toujours comme ça pour mademoiselle Truchet.
Mademoiselle Truchet
Austérité de rigueur, telle était la devanture du cabinet comptable recouvrant de peinture sombre, l'ancienne échoppe de barbier. Le sérieux de l'établissement studieux garantissait sa notoriété qui se prévalait d'avoir pignon sur rue depuis l'année de sa fondation et de sa reconversion : 1887.
Mademoiselle Truchet pénétrait chaque matin par la porte vitrée ayant gardé son timbre, comme souvenir aérien des anciens propriétaires spécialistes du cheveu coupé frisé, bouclé ou rasé. La femme retournait le panneau indiquant les heures d'ouverture au public.
Le respect régnait entre ces murs et ce n'est pas peu fière qu'elle passait devant le bureau du directeur dont l'entrebâillement laissait suffisamment la place pour qu'elle puisse lancer son invariable :
— Bonjour monsieur le directeur ! Dans la position de l'équilibriste, une jambe en appui l'autre en extension, elle attendait la répartie, le buste tourné face à l'endroit d'où s'échappait l'invariable réponse de l'interpellé :
— Bonjour mademoiselle Truchet ! Bonne journée mademoiselle Truchet !
— Bonne journée monsieur le directeur !
Ainsi parée de cet échange de politesses quotidiennes, elle accrochait sur l'unique patère, son manteau à la place de sa blouse. C'était un simple vêtement de nylon austère dans sa coupe, boutonnée sur le devant, indémodable dans l'unicité de son coloris, infroissable par la qualité du polyamide. Ainsi protégé des poussières et autres taches d'encre, son tailleur coupé strict durait une bonne paire d'années.
Protégées aux manches par des coudières plus sombres que le bleu de sa blouse, la travailleuse de l'agence comptable se murait dans un silence profond du début à la fin de la journée. Avant de pénétrer dans son étrange bureau et pour s'y encourager, elle imaginait d'autres comptables de l'agence rivaliser de discipline, car dès le matin, la précision était de mise. Le seuil de la pièce spéciale franchi, se présentait la file des filles attentives au bon accomplissement du rituel. Dans cette immensité remarquable, s'alignaient les objets : stylos, règles, gomme et autres accessoires ne semblant, dans l'enfilade parfaite ne former qu'un. Un pas en avant pas deux, un de côté mesuré, saisi du siège à dossier droit (je ne sais si droit définit suffisamment la rigidité de l'assise), pose du séant séance tenante, prise en main de la calculette, pendant que l'autre attrape la première fiche de la pile déposée sur le coin opposé à celui vers lequel le soir, les fiches validées par la mention vérifiée, occuperont la corbeille affublée d'une étiquette pleine de promesses : à classer.
Mademoiselle Truchet se pinça la lèvre inférieure entre le pouce et l'index de la main gauche, geste habituel destiné à freiner son envie de prononcer à voix haute son exaspération vis-à-vis de l'attitude de sa collègue qui, à l'inverse d'elle, se pinçait la lèvre inférieure entre le pouce et l'index de la main droite rendant impossible toute forme de travail de gratte papier pour lequel elle et la multitude d'autres employées avaient toutes été embauchées depuis vingt-huit ans dans cette entreprise.
Toutes, était-ce exact ? Était-ce suffisant pour quantifier le nombre impressionnant de femmes installées comme elles, l'une en face de l'autre derrière un bureau identique alignés au cordeau dans cette immense pièce reculant le fond du décor jusqu'à l'infini ?
Tête penchée, œil scrutateur, dissimulé sous ses cils, mademoiselle Truchet, l'employée modèle soupçonnait sa voisine qui tête penchée œil inquisiteur, exerçait à son égard une surveillance rapprochée, à l'affut du moindre manquement aux faits et gestes répertoriés dans le catalogue des faits et gestes à accomplir dans un ordre préétabli.
Cette impression d'image harmonieuse, encourageait chaque individu à parfaire la compétition donnant droit de détrôner mademoiselle Truchet, de sa place d'honneur d'employée modèle. Ainsi avaient-elles décidé de l'imiter en tout point pour lui ravir LE diplôme, cette distinction encadrée, sous-verre, décorant son mur depuis vingt-huit ans déjà.
L’horloge tentait d'achever par surprise les sept coups du soir lorsque "comme un seul homme" la multitude de comptables se levait à l'identique quittait la pièce ne laissant au décor libéré cette étrange profondeur répétée indéfiniment.
Étaient-ce un souci de discrétion, de respect ou simple retour d'intimidation, toujours est-il qu'en dehors du bureau, Mademoiselle Truchet ne rencontrait jamais personne dans le ridicule petit couloir qui menait à la sortie? Il lui plaisait d'imaginer que la troupe des autres salariées, les compétitrices non diplômées avaient accès à une autre partie du bâtiment inconnue d'elle.
Sur l'unique patère, elle accrochait sa blouse à la place de son manteau, simple imperméable capable de passer entre toutes les saisons, sauf l'hivernale. Ainsi protégé des intempéries, son tailleur coupé strict durait une bonne paire d'années. Le respect régnait entre ces murs et ce n'est pas peu fière qu'elle seule passait devant le bureau du directeur dont la porte entrouverte laissait la place pour qu'elle puisse lancer son invariable
— Bonjour monsieur le directeur !
Attendant une jambe en appui l'autre en extension et eut égard à la discipline empruntée de politesse, elle tournait son buste face à l'ouverture d'où s'échappait l'invariable réponse de celui-ci :
— Bonsoir mademoiselle Truchet ! À demain mademoiselle Truchet !
— À demain monsieur le directeur.
Ainsi parée de cette attention quotidienne, elle pouvait sortir de l'ancienne échoppe de barbier par la porte vitrée sur laquelle elle retournait le panneau indiquant les heures de fermeture au public. Le carillon réactivait son retour dans les soucis et tracas de la vie ordinaire, son angoisse.
Parfois, il lui arrivait de croiser sur le trottoir mademoiselle Ronchon. Depuis sa mise à la retraite, son ancienne voisine prenait le temps de se promener sur ce Cours de la Liberté qu'elle avait maintes fois remonté en ayant la peur au ventre d'arriver en retard. De cette dame elle avait appris la ponctualité, la discipline dans ce travail où le mot vérification chapeautait toute action quotidienne. Devant une boisson chaude, les demoiselles se racontaient leurs écarts de centimes, leurs performances liées au modernisme des ordinateurs. Elles se plaisaient à trouver dans les yeux de chacune d'elle le caractère qui leur ressemblait le plus, la jeunesse perdue ou le professionnalisme absolu.
À dix-neuf heures trente, Générosa la femme de ménage commençait son service dans le cabinet des comptables. Nettoyage succinct des sols, vidage des poubelles peu encombrées, et surtout le vendredi soir elle passait un temps supplémentaire dans le bureau de mademoiselle Truchet. Scellés l'un en face de l'autre, deux miroirs monumentaux occupaient les murs diamétralement opposés. Ils donnaient à la pièce cette profondeur digne des grands salons de coiffure. Générosa fut impressionnée au début, car elle se sentait surveillée par une multitude de femmes de ménage lui ressemblant. Cette étrangeté renforçait son envie d'accomplir son travail de nettoyage au mieux, au plus vite nécessitant pourtant une bonne vingtaine de minutes. Parfois, elle s'amusait avec son propre reflet, disparaissait de la surveillance des ses clones, réapparaissait brusquement en lançant un coucou ! gonflé de rire et de bonne humeur. Un sourire, une grimace, un geste, toute action étaient multipliés à l'infini.
Même un soir, il lui prit l'envie d'imiter avec l'aide de son balai serpillère, la scène de retrouvailles d'avec sa chienne Pépette, qui trop heureuse de revoir sa maitresse lui manifestait une joie sans limites et c'est seulement sur le ton autoritaire que Générosa arrivait à calmer ses ardeurs démonstratives. Un réalisateur de caméra cachée aurait eu grand succès en diffusant ce jeu de rôle improvisé.
Pour finir, d'un bref coup de chiffon elle dépoussiérait le cadre protégeant le diplôme d'honneur de mademoiselle Truchet, en ayant cette réflexion. Ça doit être triste de travailler toute seule ici, devant ces miroirs qui vous surveillent sans cesse.
Porte fermée, lumières éteintes, les miroirs au repos s'abimaient de vide.
Ça se passe toujours comme ça pour mademoiselle Truchet.
bertrand-môgendre- Nombre de messages : 7526
Age : 104
Date d'inscription : 15/08/2007
Re: Itinéraires ordinaires : Mademoiselle Truchet
Jolie idée, joli jeu (de miroirs), j'aime beaucoup la fragance désuète de ce divertissement. *Du coup, itinéraire ordinaire peut devenir itinéraires ordinaires !
Invité- Invité
Re: Itinéraires ordinaires : Mademoiselle Truchet
Bon texte que j'ai lu avec grand plaisir.
J'ai aimé : " pose du séant séance tenante ", pour ne citer que cela.
J'ai aimé : " pose du séant séance tenante ", pour ne citer que cela.
Lucy- Nombre de messages : 3411
Age : 47
Date d'inscription : 31/03/2008
Re: Itinéraires ordinaires : Mademoiselle Truchet
Mademoiselle Truchet me déprime, et tu me ravis, Bertrand !
Mais noté un " saisi du dossier" où il manque un e.
Mais noté un " saisi du dossier" où il manque un e.
Invité- Invité
Re: Itinéraires ordinaires : Mademoiselle Truchet
je suis content de ne pas avoir lu ce récit au réveil... J'aurais eu du mal à passer la journée.
J'admire la cohérence du rythme de tes phrases - ces longues phrases, parsemées de gestes et d'objets inutiles - avec la langueur du thème.
Je ne dis pas que je n'ai pas peiné, parfois, mais ça n'a fait qu'accentuer le malaise. Et cet ordinaire me fout la trouille.
J'admire la cohérence du rythme de tes phrases - ces longues phrases, parsemées de gestes et d'objets inutiles - avec la langueur du thème.
Je ne dis pas que je n'ai pas peiné, parfois, mais ça n'a fait qu'accentuer le malaise. Et cet ordinaire me fout la trouille.
grieg- Nombre de messages : 6156
Localisation : plus très loin
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Itinéraires ordinaires : Mademoiselle Truchet
pardon :
bravo!
bravo!
grieg- Nombre de messages : 6156
Localisation : plus très loin
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Itinéraires ordinaires : Mademoiselle Truchet
Bien vu!
l'ambiance lourde de la solitude ou de l'esseulement est bien rendue ici, de manière oppressante et surprenante aussi. Je n'ai découvert le subterfuge qu'à l'arrivée de la femme de ménage.
l'ambiance lourde de la solitude ou de l'esseulement est bien rendue ici, de manière oppressante et surprenante aussi. Je n'ai découvert le subterfuge qu'à l'arrivée de la femme de ménage.
Roz-gingembre- Nombre de messages : 1044
Age : 62
Date d'inscription : 14/11/2008
Re: Itinéraires ordinaires : Mademoiselle Truchet
Bon texte aussi pour moi. En le lisant, j'ai revu des images des bureaux de Brazil de Gilliam ;-)
Bien aimé le ton un peu "formel", classique, net et bien rangé comme l'aime Mme Truchet :-)
Et comme Eddy, je n'avais pas vu venir les miroirs. Je me demandais bien où était passé ces demoiselles à 17h.
A mon avis, à 17h, Mme Truchet ne voulait elle pas dire Bonsoir plutôt que bonjour ? coquille ?
Je ne sais pas si c'est déjà fait mais tu devrais l'envoyer pour la revue des muses. On n'est de toute façon jamais satisfait à 100% de ce que l'on a écrit.
Bien aimé le ton un peu "formel", classique, net et bien rangé comme l'aime Mme Truchet :-)
Et comme Eddy, je n'avais pas vu venir les miroirs. Je me demandais bien où était passé ces demoiselles à 17h.
A mon avis, à 17h, Mme Truchet ne voulait elle pas dire Bonsoir plutôt que bonjour ? coquille ?
Je ne sais pas si c'est déjà fait mais tu devrais l'envoyer pour la revue des muses. On n'est de toute façon jamais satisfait à 100% de ce que l'on a écrit.
Charles- Nombre de messages : 6288
Age : 49
Localisation : Hte Savoie - tophiv@hotmail.com
Date d'inscription : 13/12/2005
Re: Itinéraires ordinaires : Mademoiselle Truchet
Ah oui j'ai aimé vraiment : un texte à la Marcel Aymé !
Petit regret cependant sur le nom de l'amie collègue "Mme Ronchon" : je le trouve trop connoté...son caractère est perceptible par le texte...
Petit regret cependant sur le nom de l'amie collègue "Mme Ronchon" : je le trouve trop connoté...son caractère est perceptible par le texte...
lilicub- Nombre de messages : 147
Age : 53
Date d'inscription : 18/11/2008
Re: Itinéraires ordinaires : Mademoiselle Truchet
Sympa ! J'ai aimé le ton assez distant, et l'écriture foisonnante. bien vu le coup des miroirs !
Re: Itinéraires ordinaires : Mademoiselle Truchet
Joli palais des glaces où les mises en abime successives, le multiple donc, sert l'isolement. Un jeu littéraire ambitieux et difficile à mettre en œuvre, et qui ici fonctionne. Joli coup assurément.
Yali- Nombre de messages : 8624
Age : 60
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Itinéraires ordinaires : Mademoiselle Truchet
L'idée est bonne et bien exploitée, mais je déplore la présentation caricaturale de Melle. Truchet ; j'ai ressenti comme du mépris de l'auteur pour son personnage, et cela m'a gênée...
Mais, sinon, très bien vu.
Mais, sinon, très bien vu.
Invité- Invité
Re: Itinéraires ordinaires : Mademoiselle Truchet
Bravo pour cette impression d'étouffement accentuée par la longueur des phrases qui rendent palpable l'ennui de ce décor, de cette pauvre vie.
Un style intemporel qui pourrait être de toujours, enfin depuis que les demoiselles Truchet enfilent des protège-coudes sur leur blouse de nylon. J'ai presque été choquée et trouvé incongru de voir passer un ordinateur dans cet univers ;-)
Je n'ai saisi l'effet miroir qu'à la toute fin et du coup, j'ai relu tout le texte éclairé par ces reflets multiples qui m'ont enfin fait sourire... Ouf, tout devenait un peu plus léger!
Un détail:
la multitude de comptables se levait à l'identique quittait la pièce ne laissant au décor libéré (que) cette étrange profondeur répétée indéfiniment
Un style intemporel qui pourrait être de toujours, enfin depuis que les demoiselles Truchet enfilent des protège-coudes sur leur blouse de nylon. J'ai presque été choquée et trouvé incongru de voir passer un ordinateur dans cet univers ;-)
Je n'ai saisi l'effet miroir qu'à la toute fin et du coup, j'ai relu tout le texte éclairé par ces reflets multiples qui m'ont enfin fait sourire... Ouf, tout devenait un peu plus léger!
Un détail:
la multitude de comptables se levait à l'identique quittait la pièce ne laissant au décor libéré (que) cette étrange profondeur répétée indéfiniment
Re: Itinéraires ordinaires : Mademoiselle Truchet
J'aime bien la manière dont tu as construit ce texte, Bertrand. Sinon, un peu la même impression que socque concernant le portrait de Melle Truchet.
Kilis- Nombre de messages : 6085
Age : 78
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Itinéraires ordinaires : Mademoiselle Truchet
Si vous saviez comme je les aime mes personnages. Si le mépris ressort j'ai tout faux. Je dois corriger.
Merci pour les commentateurs !
Merci pour les commentateurs !
bertrand-môgendre- Nombre de messages : 7526
Age : 104
Date d'inscription : 15/08/2007
Re: Itinéraires ordinaires : Mademoiselle Truchet
Ce texte m’a laissé une impression d’ennui profond, mais je ne veux pas dire par là que sa lecture fut ennuyeuse, non, ce que je veux dire c’est que, je crois, il a atteint son but : décrire une vie qui me semble ennuyeuse et la rendre telle par l’écriture. De jolis portraits de personnages, prisonniers volontaires d’un quotidien assommant.
(je me rends compte que tout cela a déjà été dit plus haut, j'arrive après la bataille...)
(je me rends compte que tout cela a déjà été dit plus haut, j'arrive après la bataille...)
Re: Itinéraires ordinaires : Mademoiselle Truchet
J'ai aimé ce texte, Bertrand, avec sa tonalité et ton personnage un peu surannés, l'idée de ces miroirs que je n'ai pas vus venir, le souci du détail qui fait mouche.
Bref, un bon texte de mon point de vue.
Deux tous petits bémols : Pépette et la réflexion un peu trop explicite de la femme de ménage :"Ça doit être triste de travailler toute seule ici, devant ces miroirs qui vous surveillent sans cesse."
Ces deux passages ne me semblent pas indispensables, pour le reste, c'est bien vu !
Bref, un bon texte de mon point de vue.
Deux tous petits bémols : Pépette et la réflexion un peu trop explicite de la femme de ménage :"Ça doit être triste de travailler toute seule ici, devant ces miroirs qui vous surveillent sans cesse."
Ces deux passages ne me semblent pas indispensables, pour le reste, c'est bien vu !
Re: Itinéraires ordinaires : Mademoiselle Truchet
Ah, voilà, j'ai trouvé, Bertrand ! Le souvenir remonte très loin, mais figure-toi que j'ai déjà croisé Mademoiselle Truchet jadis, dans les bureaux d'Air France. Incroyable, j'étais fascinée par ce personnage pas comme les autres, en tout cas pas comme moi qui suis un peu beaucoup bohème (souviens-toi les photos de la maison dans le doux bordel de l'été, regorgeant de jeunesse et de ses pompes en vrac, avec lesquelles tu avais bellement rivalisé, je l'avoue). Bref, ahurissant tableau que celui de cette ancienne collègue, retrouvée plus tard dans le rôle de Thierry Lermite (Pierre dans "Le père Noël est une ordure"), à quelques détails près.
On croise comme ça des caricatures vivantes, dans la vie, qu'on aurait tort de ne pas croquer tellement ces personnages valent tous ceux qu'on invente pour la scène.
J'ai longtemps cherché avant de retrouver à qui pouvait bien me faire penser cette miss pas comme les autres, enfin, j'ai fini par trouver. C'est loin, tout ça...
J'adore ton texte, sauf que je n'ai pas compris pourquoi tu reprends deux fois le même paragraphe, mais vu l'heure, tu m'accorderas le bénéfice de l'épuisement d'un dimanche bien rempli.
Bonnuit Amigo !
On croise comme ça des caricatures vivantes, dans la vie, qu'on aurait tort de ne pas croquer tellement ces personnages valent tous ceux qu'on invente pour la scène.
J'ai longtemps cherché avant de retrouver à qui pouvait bien me faire penser cette miss pas comme les autres, enfin, j'ai fini par trouver. C'est loin, tout ça...
J'adore ton texte, sauf que je n'ai pas compris pourquoi tu reprends deux fois le même paragraphe, mais vu l'heure, tu m'accorderas le bénéfice de l'épuisement d'un dimanche bien rempli.
Bonnuit Amigo !
Re: Itinéraires ordinaires : Mademoiselle Truchet
Ha ha! J'aime beaucoup cette idée d'encourager "chaque individu à parfaire la compétition donnant droit de détrôner mademoiselle Truchet, de sa place d'honneur d'employée modèle"
De bleu, le but de toute une vie! :-)
Les irruptions de Mademoiselle Ronchon et de Generosa constituent l'entracte dans cette vie si rôdée de Mademoiselle Truchet, que tu restitues avec une froideur et un mécanisme que j'apprécie, car ils collent parfaitement à la situation. Caricaturale à souhait, avec un brin d'ironie. Beaucoup aimé!
De bleu, le but de toute une vie! :-)
Les irruptions de Mademoiselle Ronchon et de Generosa constituent l'entracte dans cette vie si rôdée de Mademoiselle Truchet, que tu restitues avec une froideur et un mécanisme que j'apprécie, car ils collent parfaitement à la situation. Caricaturale à souhait, avec un brin d'ironie. Beaucoup aimé!
Sahkti- Nombre de messages : 31659
Age : 50
Localisation : Suisse et Belgique
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Itinéraires ordinaires : Mademoiselle Truchet
Avec mes excuses pour avoir oublié ton texte dans ma salve de commentaires !
J'aime beaucoup, jolie construction et une façon de faire, un style qui collent parfaitement au sujet. Ca fonctionne très bien, j'oscille entre la fascination des jeu de miroir (à cet égard l'apparition de mademoiselle ronchon est très bien vue) et l'inquiétude palpable.
Bravo.
J'aime beaucoup, jolie construction et une façon de faire, un style qui collent parfaitement au sujet. Ca fonctionne très bien, j'oscille entre la fascination des jeu de miroir (à cet égard l'apparition de mademoiselle ronchon est très bien vue) et l'inquiétude palpable.
Bravo.
Loupbleu- Nombre de messages : 5838
Age : 52
Localisation : loupbleu@vosecrits.com
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Itinéraires ordinaires : Mademoiselle Truchet
c’est le registre qui te va le mieux à mon avis. Ton écriture ample et riche me fait souvent penser au style Marcel Aymé que j’affectionne. Et tu es toi aussi tout à fait dans le thème imposé. Beau texte.
Re: Itinéraires ordinaires : Mademoiselle Truchet
La fin redonne un coup de polish à l'affaire.
C'est une histoire de miroirs, de reflets, de monde retourné (...), de lecture inversée, de retour en arrière.
Je lisais et il ne se passait pas grand-chose : style un peu trop sage pour moi - classique serait plus proche.
Puis la fin.
Le "ah !"
La "belle trouvaille".
C'est une histoire de miroirs, de reflets, de monde retourné (...), de lecture inversée, de retour en arrière.
Je lisais et il ne se passait pas grand-chose : style un peu trop sage pour moi - classique serait plus proche.
Puis la fin.
Le "ah !"
La "belle trouvaille".
Re: Itinéraires ordinaires : Mademoiselle Truchet
Bien trouvé, à la fin d'une histoire lisse, à la limite de l'inintéressant. Du coup tout se met en perspective. Plaisant.
silene82- Nombre de messages : 3553
Age : 67
Localisation : par là
Date d'inscription : 30/05/2009
Re: Itinéraires ordinaires : Mademoiselle Truchet
Vrai qu'il était beau, cet itinéraire là. Enfin, pas l'itinéraire en lui-même, mais le quotidien dérisoire de la brave Truchet que les mots de B-Mô transformaient en quelque chose de bien agréable à lire.
Chako Noir- Nombre de messages : 5442
Age : 34
Localisation : Neverland
Date d'inscription : 08/04/2008
Re: Itinéraires ordinaires : Mademoiselle Truchet
J'aime beaucoup cette histoire sans pouvoir expliquer pourquoi (ou peut-être ayant la flemme d'expliquer...) En tout cas, j'avais envie de la faire remonter...
Peter Pan- Nombre de messages : 3709
Age : 49
Localisation : Pays des rêves et de l'imaginaire
Date d'inscription : 16/04/2009
Re: Itinéraires ordinaires : Mademoiselle Truchet
Je connaissais déjà, et relu avec beaucoup de plaisir.
Merci Peter Pan pour cette "remontée".
Merci Peter Pan pour cette "remontée".
Reginelle- Nombre de messages : 1753
Age : 74
Localisation : au fil de l'eau
Date d'inscription : 07/03/2008
Re: Itinéraires ordinaires : Mademoiselle Truchet
Portrait touchant, merci.
Remarque:
"Un réalisateur de caméra cachée aurait eu grand succès en diffusant ce jeu de rôle improvisé."
>me semble de trop, la contraction gâche la chute qui vaut le détour.
Remarque:
"Un réalisateur de caméra cachée aurait eu grand succès en diffusant ce jeu de rôle improvisé."
>me semble de trop, la contraction gâche la chute qui vaut le détour.
Jérémie- Nombre de messages : 412
Age : 47
Localisation : Sixfeetunder
Date d'inscription : 27/03/2010
Re: Itinéraires ordinaires : Mademoiselle Truchet
Un portrait à la Simenon même si " Mademoiselle Truchet " a quitté notre époque depuis les années 60, au moins...
L'étriqué, le poussiéreux des souffles qui passent et que l'on peut largement appliquer à tous.
L'étriqué, le poussiéreux des souffles qui passent et que l'on peut largement appliquer à tous.
Ba- Nombre de messages : 4855
Age : 71
Localisation : Promenade bleue, blanc, rouge
Date d'inscription : 08/02/2009
Re: Itinéraires ordinaires : Mademoiselle Truchet
" Bonjour monsieur le directeur ! Dans la position de l'équilibriste, une jambe en appui l'autre en extension, elle attendait la répartie, le buste tourné face à l'endroit d'où s'échappait l'invariable réponse de l'interpellé :
— Bonjour mademoiselle Truchet ! Bonne journée mademoiselle Truchet !
— Bonne journée monsieur le directeur !
Ainsi parée de cet échange de politesses quotidiennes, elle accrochait sur l'unique patère, son manteau à la place de sa blouse."
C'est marrant cet extrait m'a fait penser à Jacques Tati alias Monsieur Hulot dans ses poses hilarantes, sa façon de se tenir parfois en suspens, son côté années 60 légèrement suranné et anachronique, et ce regard humble caustique et farfelu qu'il pouvait poser sur ses contemporains, certains englués dans leur vie, pétris d'ennui, blousés par le temps et la modernité.
— Bonjour mademoiselle Truchet ! Bonne journée mademoiselle Truchet !
— Bonne journée monsieur le directeur !
Ainsi parée de cet échange de politesses quotidiennes, elle accrochait sur l'unique patère, son manteau à la place de sa blouse."
C'est marrant cet extrait m'a fait penser à Jacques Tati alias Monsieur Hulot dans ses poses hilarantes, sa façon de se tenir parfois en suspens, son côté années 60 légèrement suranné et anachronique, et ce regard humble caustique et farfelu qu'il pouvait poser sur ses contemporains, certains englués dans leur vie, pétris d'ennui, blousés par le temps et la modernité.
Rebecca- Nombre de messages : 12502
Age : 65
Date d'inscription : 30/08/2009
Re: Itinéraires ordinaires : Mademoiselle Truchet
La relecture m'a permis d'apprécier la construction en miroir que je n'avais pas remarquée en première lecture. Il y a toujours plein de subtilités dans tes textes, qui ne s'appréhendent pas forcément tout de suite. C'est pour ça que j'aime te relire : ce n'est jamais le même texte que je relis.
Invité- Invité
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