Week end en amoureux

Elle m’avait convaincu de louer ce petit chalet dans la forêt, un truc très romantique avec nuit au coin du feu. Nous n’avions plus fait l’amour depuis des mois et parfois le soir lorsque ses yeux imploraient un peu de tendresse ma gorge se nouait à peine pour lui murmurer que j’étais fatigué. Un week-end sympa comme un film hongrois s’annonçait pour moi...

J’enclenche le frein à main, nous y sommes! Elle descend toute excitée et pousse la porte de notre nid douillet. Je la rejoins mollement. La pièce principale est magnifique et sent bon le bois traité. Une cheminée veille au milieu d’un mur et mes yeux s’arrêtent sur ce lit, un immense lit qui trône pleine pièce rappelant de tous ces draps géants que ce lieu est fait pour célébrer l’amour.
Elle part inaugurer la douche me laissant seul pour réfléchir à comment j’allais m’en sortir. Si on repart maintenant j’arriverai sûrement à temps pour me plonger dans un chouette documentaire animalier avant le journal d’Arte. Mais l’eau s’arrête et je la vois s’avancer vers moi, elle se glisse dans mes bras. Si j’avais un cœur je trouverais comment repousser ce corps qui ne représente plus aucun mystère pour moi. Je suis fatigué mais dehors il pleut, le feu crépite, putain de moment romantique. C’est la scène du film où les gens mariés oublient leur alliance et s’aiment comme des amants.

Au réveil je me vois mal comment supporter toute une journée, toute une soirée dans ce maudit piège à couple. Si j’avais un cœur je la quitterais là. Au lieu de ça je sors ma boite de scrabble, la supplie de jouer avec moi et prie pour que le temps passe triple. Merde, elle a mis du mascara.
Les mots s’enchaînent, j’abreuve le plateau de EH, OH tandis qu’elle ose des WAGON, YEN et autres ZOO. A chaque tour j’attends qu’elle m’assène le fameux SEXE. Quelques points passent puis je devine le moment critique, ses cils peinturlurés la trahissent. S, une grande lassitude m’envahit, E, j’annonce mon envie de pisser. Son X triomphant se posera sans moi.

Soupir dans la salle de bain. Je cherche quelque médicament qu’un prédécesseur aurait oublié. Brusque envie de lui lexomiler la tronche mais mes espoirs restent vains. Je tire la chasse d’eau et pars la retrouver. Elle me sourit bêtement. J’allume la chaîne qui par miracle se trouve près de moi. Horreur, Brian Adams ne jouera pas de ballade. Je retourne fébrilement le tuner et bénis le silence.
Je la vois s’approcher dangereusement. Je ne supporte plus ce regard bovin qu’elle m’adresse lorsqu’elle fait mine de ne pas comprendre. Bientôt elle me sortira la voix mièvre de son « qu’est-ce que t’as chéri ? » Je m’ennuie. Et je n’ai même pas envie que ça change. Je veux une Joan Jett hétéro, des bières, du foot à la télé et que ça ne me fasse pas l’allumer. Je n’ai plus envie que ça change. Et puis, je suis fatigué.
Je m’étends muet sur les draps. Elle semble attendre quelque chose, commence à s’énerver, m’accuse de tout gâcher. J’en rirais presque. Elle finira par pleurer devant mes yeux désespérément secs puis se couchera à côté de moi. Pour l’instant, je la vois frotter son anneau comme si un génie allait en sortir. Je repense au spectacle d’Aladin sur glace auquel j’ai cédé. En fait je ne dois pas être si infect.

Visiblement elle ne s’en souvient pas. Elle se révèlerait muse de Zola que ça ne m’étonnerait pas. J’accuse par-ci, je chouine par-là. Agacé par l’ampleur de son exaltation, je capitule et lui propose de me rejoindre. Il se produit alors une chose étrange. Dans le visage de ma femme apparait une expression que je ne connais que trop bien. Je frissonne de me voir là, en face, sans glace ni miroir. L’image ne dure pas, elle brise notre vis-à-vis et s’active à rassembler ses affaires. Un peu hagard, heureux de l’inédit, j’observe. Elle passe la porte, j’entends le 4x4 démarrer puis faire rouler les graviers. Je souris pour la première fois depuis des années.

Génial !

J'ai bien aimé cette écriture sèche et railleuse, méchante je dirais, mais (outre que le sujet ne m'intéresse guère) je comprends mal l'enchaînement des événements : ils arrivent le soir, le lit est super-beau, et on passe à un "Au réveil" suivi de la partie de Scrabble comme manœuvre d'évitement. Mais comment a-t-il déjoué le piège la veille, en douceur apparemment puisque l'épouse délaissée n'a toujours pas compris ? Là, je n'ai pas compris, et ça m'a distraite pendant tout le reste de l'histoire...

En tout cas l'écriture est en très bonne adéquation avec ce qui est raconté, le texte m'a paru fort bien vu sous cet aspect.

socque a écrit:J'ai bien aimé cette écriture sèche et railleuse, méchante je dirais, mais (outre que le sujet ne m'intéresse guère) je comprends mal l'enchaînement des événements : ils arrivent le soir, le lit est super-beau, et on passe à un "Au réveil" suivi de la partie de Scrabble comme manœuvre d'évitement.

En fait voice la phrase clef: C’est la scène du film où les gens mariés oublient leur alliance et s’aiment comme des amants.
Le monsieur ne voit pas vraiment d'issue, il laisse tomber et espère qu'ensuite il sera tranquille pour le reste du W-E. (et puis ça faisait ch*** l'auteur de décrire la soirée ^_^).

Merci.

On dirait qu'il manque des étapes, ou que le narrateur les a brûlées... Tout cela est sujet à ambiguité, il me semble qu'il est nécessaire de lever toute ambiguité pour le lecteur, d'éviter l'ellipse ou de l'améliorer, afin que le texte reste crédible. C'est dommage d'avoir pris la peine d'écrire un texte si l'on passe à côté d'éléments peut-être importants à la compréhension.

Il y aussi une phrase que je ne saisis pas du tout, la référence m'échappe :

Elle se révèlerait muse de Zola que ça ne m’étonnerait pas. J’accuse par-ci, je chouine par-là.

D'accord, mais dans ce cas je ne comprends pas que l'épouse ne se doute de rien le lendemain ; je trouve vraiment que cette ellipse nuit à la cohérence du texte. Ou alors, peut-être serait-il possible d'indiquer que Madame est morose pendant la partie de Scrabble, qu'elle est déjà un peu inquiète après le fiasco de la veille.
Parce que pour moi, il est vraiment difficile de faire totalement l'impasse sur cette soirée : vu les intentions diamétralement opposées des protagonistes, j'ai du mal à imaginer que le conflit, ou au moins une tension, ne se déclare pas d'emblée...

Mais évidemment c'est vous qui voyez. Je vous signale simplement que cette partie du texte ne fonctionne pas pour la lectrice que je suis.

Ah oui, moi non plus je n'ai pas compris le coup de la muse de Zola !

J'ai beaucoup aimé aussi, j'adore le ton.

En particulier :

C’est la scène du film où les gens mariés oublient leur alliance et s’aiment comme des amants.

Brusque envie de lui lexomiler la tronche

(et comme tout le monde, je n'ai pas compris e que la muse de Zola vient faire ici)

Bravo !

bngh a écrit:Génial !

c'est un excellent début de commentaire.
la suite n'est pas passée ?
;-)

bon ben je vais pas me démarquer, je n'ai pas non plus trop compris que la première soirée-nuit soit passée comme une lettre à la poste, ni la référence à Zola
donc là nous sommes déjà plusieurs à t'attendre, tu vois ? ;-)
sinon le ton est parfait pour le thème traité
et c'est bien écrit

mentor a écrit:

bngh a écrit:Génial !

c'est un excellent début de commentaire.
la suite n'est pas passée ?

C'était trop élogieux, l'éditeur de texte l'a automatiquement censuré :o)

La phrase:

C’est la scène du film où les gens mariés oublient leur alliance et s’aiment comme des amants. suivie du Au réveil
Est censée faire comprendre que finalement ils couchent ensemble une fois arrivés. Ca m'évite de laborieusement décrire la soirée et donne encore plus de méchanceté au gars qui n'arrive pas à partir et qui en plus préserve l'espoir. Je ne m'attarde pas plus car n'y trouve pas l'intérêt.

Concernant Zola, l'explication ne vole pas au: la femme l'Accuse et lui compte tout son malheur (les peintures de Zola n'étant pas des plus gaies). C'est un peu ridicule...comme mon personnage finalement.

Je m'étais demandée en effet s'ils ne couchaient pas ensemble le premier soir... Mais alors, dans ce cas, le gars a une excuse toute trouvée pour ne pas remettre le couvert le lendemain : il peut dire qu'il est fatigué, et sa femme n'en ferait pas un drame puisqu'ils ont fait l'amour la veille ; dans ce cas aussi, pour moi, il y a un problème de vraisemblance.

socque a écrit:Je m'étais demandée en effet s'ils ne couchaient pas ensemble le premier soir... Mais alors, dans ce cas, le gars a une excuse toute trouvée pour ne pas remettre le couvert le lendemain : il peut dire qu'il est fatigué, et sa femme n'en ferait pas un drame puisqu'ils ont fait l'amour la veille ; dans ce cas aussi, pour moi, il y a un problème de vraisemblance.

bouh ! un type qui jouerait petit "bras" comme ça, ça n'existe pas dans la vrai vie ! Elle le croirait pas et elle aurait raison :-)))

bon bon, je sais, on doit pas commenter les commentaires ;-)

Lehnerd a écrit:l'explication ne vole pas au:

pardon ?

la femme l'Accuse et lui compte tout son malheur

je crois qu'il y a vraiment un souci d'ortho ! comme quoi le bon français a bien une vertu de messager fidèle ;-)

mentor a écrit:

Lehnerd a écrit:l'explication ne vole pas au:

pardon ?

Au !, il est meugnon celui-là ! :-)))))

Bon moi j'avais compris. C'est les commentaires qui m'ont mis le doute finalement.

Bien aimé, j'ai trouvé ca plutot bien ecrit, assez fluide même si il y a des défauts de rythme (la dernière phrase par exemple). Certaines phrases enchainements sont vraiment chouettes.

Evanescent a écrit:

mentor a écrit:

Lehnerd a écrit:l'explication ne vole pas au:

pardon ?

Au !, il est meugnon celui-là ! :-)))))

tu as lu comme moi, éva, j'y croyais pas, mais... ;-)

mentor a écrit:

Evanescent a écrit:

mentor a écrit:

Lehnerd a écrit:l'explication ne vole pas au:

pardon ?

Au !, il est meugnon celui-là ! :-)))))

tu as lu comme moi, éva, j'y croyais pas, mais... ;-)

haut_HAUT

Nan mais si on ne me donne pas la possibilité d'éditer il faut s'attendre à ce que je fasse des lapsus digitaux. J'ai beau prévisualiser, c'est qu'une fois le message envoyé que je vois tout ça.

il peut dire qu'il est fatigué, et sa femme n'en ferait pas un drame puisqu'ils ont fait l'amour la veille

Alors là ça dépend de la femme! Moi par exemple.... Surtout que bon, ils viennent là *exprès* pour se *retrouver* itou itou. Mais bon, tu as raison, on pouvait s'attendre à ce qu'elle soit moins gourmande. D'ailleurs c'est ce que le mec devait se dire d'où son Merde lorsqu'il a vu le mascara, outil de séduction ultime *rires*.

Lehnerd a écrit:Nan mais si on ne me donne pas la possibilité d'éditer il faut s'attendre à ce que je fasse des lapsus digitaux. J'ai beau prévisualiser, c'est qu'une fois le message envoyé que je vois tout ça.

j'adore les lapsus digitaux, j'adore
au: pour haut, c'est un hénooorme lapsus, dis donc !
oui, j'adore ce genre d'explicifications
;-)

Exemplification ><

Il est interdit de lapsusifier ce mot, digitalement ou pas. ^^

mentor a écrit:au: pour haut, c'est un hénooorme lapsus, dis donc !

J'ai du penser ne vole pas haut, jusqu'aux (cieux de l'intelligence?) pour finir "au". Mais Freud vous expliquerait ça mieux que moi

Lehnerd a écrit:

mentor a écrit:au: pour haut, c'est un hénooorme lapsus, dis donc !

J'ai du penser ne vole pas haut, jusqu'aux (cieux de l'intelligence?) pour finir "au". Mais Freud vous expliquerait ça mieux que moi

tu t'embourbes encore plus là, insiste pas :-)))

Evanescent a écrit:Exemplification ><

Il est interdit de lapsusifier ce mot, digitalement ou pas. ^^

ha non ! je m'élève !
je fais une très nette différence entre Explicification et Exemplification
naméo !

Explicitation, alors. Autre mot interdit à lapsusifier.

Faudrait penser à écrire, parce que raconter ne tient pas au corps, encore moins à l'esprit…

Evanescent a écrit:Explicitation, alors. Autre mot interdit à lapsusifier.

allez, d'accord ;-)

Mi bof.

J'ai la sensation d'un ton forcé, d'une méchanceté volontaire pour faire intéressant. Pas l'impression que tu habites vraiment ton texte. C'est pas mal écrit, mais ça fait fabriqué, pour moi. Du coup, je décroche.

J'ai adoré ce texte, que j'ai trouvé peut-être très légèrement brouillon vers la fin pour ma part. Il y a du cynisme, et de belles phrases simples mais efficaces qui me plaisent.

Moi c'est le sujet qui m'a touché.

Le contre-cliché du couple qui se retrouve en amoureux.

Les lachetés et les peurs de l'homme exposées. J'ai aimé la partie foot, bière et Joan Jet. La chair est triste dans l'histoire.

Il y en a marre de la chair ! Non à la dictature de la chair ! On cherche à nous faire croire en permanence au désir comme preuve d'amour, à l'acte sexuel comme ultime moyen d'exister.

Dans cette histoire l'hommes en a marre, il est persécuté. Il a perdu son désir et on veut le lui prendre tout de même !

Manque un peu de cohérence au niveau du récit mais le parti pris est courageux.

Puisque mon commentaire n’est pas passé en entier, je le publie à nouveau ;-))
Génial !
J’ai lu ton texte avec un grand plaisir, sans me poser de question. J’ai aimé l’écriture, l’histoire, le sujet, les personnages et la chute.
Tu as écrit ce texte suivant ta réalité, je l’ai lu suivant la mienne et la magie a fonctionné : j'ai ressenti une émotion (pas ceux qui lisent avec leur cerveau.) L’émotion est idiosyncrasique !
Et tu n’as pas écrit ce texte par hasard… n’est-ce pas ?

bngh a écrit:Puisque mon commentaire n’est pas passé en entier, je le publie à nouveau ;-))
Génial !
J’ai lu ton texte avec un grand plaisir, sans me poser de question. J’ai aimé l’écriture, l’histoire, le sujet, les personnages et la chute.
Tu as écrit ce texte suivant ta réalité, je l’ai lu suivant la mienne et la magie a fonctionné : j'ai ressenti une émotion (pas ceux qui lisent avec leur cerveau.) L’émotion est idiosyncrasique !
Et tu n’as pas écrit ce texte par hasard… n’est-ce pas ?

ça c'est du comm, bravo ! ;-)

Un week-end sympa comme un film hongrois s’annonçait pour moi...
J'ai souri (et pourtant, il y a de bons films hongrois :-)

Bien aimé le sujet, mais je déplore que tu forces le trait pour bien faire comprendre que le type n'a pas envie. Ceci dit, c'est le sujet du texte, donc ça se comprend, mais cela pourrait être plus subtil. Ici, c'est comme si il n'y avait que cela et rien d'autre mais cette cohabitation entre deux personnes dans un couple, ma foi, ça passe aussi par d'autres moments du quotidien où on fait semblant et ceux-ci sont complètement zappés.
Du coup, pas mal de trucs ne fonctionnent pas ou pas bien à mes yeux.