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Communications breakdown

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Petite-FRAP
slave1802
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Message  slave1802 Ven 6 Fév 2009 - 22:43

Pour la centième fois de la journée, le téléphone sonna.

Pour la centième fois de la journée, il décrocha.

Mais pour une fois il n'y avait personne au bout du fil. Seulement le bruit lointain et confus de milliers de communications qui s'entrecroisaient sans jamais se percuter ; en un fantastique ballet sonore, toujours mouvant et jamais interrompu. Capricieux malstrom dirigé par un maestro dément laissant son imagination se perdre dans le flux et reflux de cette mer de voie venue de tous les horizons et s'entremêlant au hasard des connexions du gigantesque réseau téléphonique mondial. Symphonie cacophonique de crécelles électroniques.



- Nous pouvons noter ici la débauche d'adjectifs, de superlatifs, de verbes donnant une impression de courant et de masse liquide, accentué par le manque flagrant de ponctuations. Comme pour noyer le lecteur. Mais reprenons le court du récit. (Le maître se rassit et l'élève désigné par la main impartiale du guide reprit la lecture.)




Et cette symphonie fantastique se déversait dans son oreille comme un fleuve en crue se jetant dans la mer, créant de multiples remous et d'innombrables tourbillons, jetant le doute dans son esprit conditionné depuis tant d'année.



- Admirez au passage la métaphore.




Lentement des fonctions oubliées de son cerveau se remirent en activité. La barrière cérébrale qu'on avait patiemment édifiée dans sa jeunesse se fissurait et se délabrait sous les coups de butoir de la rapsodie téléphonique. Un à un les auto-blocages cédaient laissant la conscience reprendre son autorité.

Alors la rage le saisit. Il n'avait été qu'un rouage obéissant et sans importance. Il serait maintenant le grain de sable qui grippe le mécanisme.

Il commença par détruire le téléphone. Il l'expédia droit vers le plafond. Le combiné décolla tel un missile, mais le cordon tendu à l'extrême brisa son élan à son apogée et le rabattit en suivant une courbe presque parfaite vers le mur ou il explosa dans une dernière sonnerie avortée, projetant ses entrailles d'ébonite aux quatre coins du bureau.

Le P.C. fut renversé et éventré à l'aide du fauteuil. Ses cinq pieds munis de roulettes firent imploser le tube cathodique de l'écran. L'Interphone rendit l'âme sous les coups de talon furieux du révolté, comme il se nommait lui-même, rejetant le patronyme dont l'avait affublé l'administration centrale.



- Remarquez le déchaînement de violence qu'entraîne pour le héros la découverte de la vérité sur l'organisation du monde. Déchaînement contre la société que l'on retrouve souvent dans le reste de l'œuvre de cet auteur torturé. L'écriture est un moyen pour lui d'exorciser sa peur et son refus du monde extérieur, mais poursuivons voulez-vous...



Bien qu'il ne fut que quinze heures, il s'habilla et quitta son bureau. Dans le couloir il fut brutalement assailli par la rumeur s'échappant des autres bureaux dans lesquels ses malheureux collèges continuaient à s'agiter vainement, guidé par la force de l'habitude et leur programmation d'employés de bureaux standard. Il se boucha les oreilles et s'élança courbé sous la tourmente sonore, plus que jamais décidé à échapper à l'esclavage du travail.



- Notez : Comment transformer des sons quotidiens en ennemis implacables ? En leur donnant une apparence de vie matérielle. Toute vie est un ennemi potentiel.



Il sortit enfin du battement. Il se retrouva seul dans la rue. A cette heure la tout le monde vaquait à ses occupations habituelles. Il reprit sa course au milieu des blocs de bétons que ce matin encore il appelait immeubles.



- Toujours cette aversion pour les H.L.M. et les grands ensembles architecturaux modernes.



Il ne s'arrêta qu'une fois. Devant la vitrine d'un armurier. Qu'il fit voler en éclats pour s'emparer d'un fusil à pompes et de munitions idoines.

Il arriva enfin dans son appartement et, sans même reprendre son souffle, il commença à le tuer.



- Mais qui va-t-il donc tuer ? Allez vous me demander. Il vous l'a dit, il va tuer son appartement. De nouveau l'auteur donne vie à de l'inanimé pour mieux le diabolliser



Il tira d'abord sur la télé pour le priver de vision. Il le réduisit au silence en truffant la chaîne hi-fi de chevrotines et de balles à ailettes. Il fit feu ensuite sur le téléphone pour qu'il ne puisse pas appeler au secours. Il tira ensuite sur la pendule, sur le four à micro-onde, sur l'aspirateur automatique, sur le radiateur autonome, sur le réfrigérateur, sur le lave-linge, sur le lave-vaisselle...

N'interrompant son tir meurtrier que pour recharger son arme, il le tuait à petit feu. Il visa enfin la tête : Le micro-ordinateur domestique explosa en mille fragments lorsque les projectiles l'atteignirent. L'appartement touché à mort gémit une dernière fois, puis le silence retomba avec l'écho des dernières détonations.



- Admirez la manière. Voyez comment l'on donne la vie pour la reprendre aussi tôt. Imaginez les sensations du créateur. La puissance que confère un simple stylo. On devient un dieu bâtisseur d'univers et tyran sanguinaire. On use du droit de vie et de mort comme d'un jouet. On se sent un géant, un dieu...

- Comprenez l'ivresse qui s'empare des auteurs. Imaginez leurs profondes désillusions quand ils reprennent contacts avec notre terne réalité. Pardonnez leur folie comme ils pardonnent notre uniformité.




Dans l'appartement dévasté flottait une odeur de poudre et de plastique fondu. Le révolté se dressait solitaire au centre du champ de bataille qui, autrefois, ce matin même, avait formé son univers familier. Il semblait déchargé d'un lourd fardeau. Il venait de trancher le cordon ombilical qui le liait à son passé. Il se dirigea alors vers le tableau électrique et d'un geste sec il actionna le disjoncteur. L'âme de l'appartement disparu dans un dernier arc électrique.



- Voyez comment on bafoue la religion : En étant plus généreux que l'église en donnant une âme à un appartement, ce qu'elle refusa si longtemps aux femmes.



C'est ce moment que choisit sa femme pour entrer. Sidéré par le spectacle qui s'offrait à ses yeux, elle restait figé sur le pailllasson-vibreur qui ne le serait jamais plus.

Elle resta muette environ dix secondes. Puis reprenant son soufffle coupé elle lui demanda d'une voix qui enfla, enfla jusqu'à devenir hystérique :

- Mon dieu à moi, que c'est-il passé ici ? La guerre, une bombe, une épidémie, une émeute, un attentat terroriste, la visite du pape, la révolution, un concert surprise des Stones, la malaria, le choléra, le sida, une avalanche, une tourmente, une prise d'otage, un suicide au gaz, les Russes, les Chinois, les Martiens, les Arméniens, les Yougoslaves, les termites, une inondation, le bug de l'an 2000, la fin du monde, la faim dans le monde, enfin le monde, la nouvelle mode, le retour du messie, la résurrection de Coluche, trois jour de solde, une émeute chez Tati, une orgie, un cyclone, un ouragan, le nouveau film de Spielberg, le retour de Godzilla, un clip de Michaêl Jackson, une manifestation pacifiste, un défilé militaire, les impôts, les sauterelles, le M.L.F., le R.P.R. un O.V.N.I., une finale de la cup, un matche au Heysel, un combat de catch, le Paris - Dakar, un hélicoptère, la fureur, les jeux de vingt heures, vingt heures de jeux, je n'étais pas la, un été à lima, le Dalaï Lama, la navette spatiale, Ariane, Dassault, un dinosaure, un dîner au zoo, la droite est repassé, Hitler est béatifié Lady Dy canonisé, le monstre du Loch Ness démasqué, Giscard est venu dinner, ta mère est venu habiter chez nous, on a gagné au loto, tu as perdu le ticket, le feu, le flic, les arabes, les juifs, les Turcs, les curés, les communistes, les cubistes, les pompistes, les pompiers, les rouges, les jaunes, les verts, les bleus et trois zéros, l'euro, les vers, vers ou, la baguette à dix francs, la flûte à vingt roubles, le super à cent euro, le dollar a baissé, le yen est monté, le tabac est prohibé, l'alcool est détaxé, l'héroïne est en vente libre, le train a déraillé, le métro a décollé, l'avion a plongé, un sous-marin s'est égaré, un fleuve a débordé...



Il tira enfin, la balle en fracassant son crâne la fit taire à jamais.



-Avez-vous apprécié à sa juste valeur ce monologue ? Y Avait Vous reconnu toutes les hantises, les superstitions, les haines, les peurs et autres lieux communs de notre civilisation décadente, mêlé adroitement aux goûts et dégoûts de l'auteur. La bêtise humaine complaisamment étalée devant vos yeux ébahis et dans votre cerveau submergé par l'affluence de vérité qui s'écoule tel un fleuve de la bouche de ce personnage, par ailleurs féminin.



- Pourquoi l'avez vous tuée ?

- Elle était son complice

- La complice de qui ?

- De mon appartement.

- ...

- Tous complice, L'administration, mon employeur, tous

- ...

- Pour me maintenir en esclavage. Ils doivent payer.

- Vous avez tué votre appartement ? ...

- Parfaitement, je l'ai tué lentement, pour qu'il s'en rende compte, pour qu'il paye, pour qu'il comprenne que je l'avais démasqué, pour qu'il souffre lui aussi.

- Les impacts partout ce n'était pas en visant votre femme ?

- Non, elle, je l'ai tué à bout portant.

- Allez ouste, au dépôt le perturbé !

- Non ! Révolté, pas perturbé.



Dans l'aube blafarde le portail de l'institut psychiatrique s'ouvrit lentement. L'ambulance pénétra dans une cour murée et grise, avare de végétations si ce n'était un vague carré de gazon envahi d'herbes folles. Du bâtiment central sortirent trois infirmiers qui se dirigèrent vers le véhicule à présent immobilisé. Ils l'ouvrirent et en extraiyerent un homme brun engoncé dans une camisole. Ils l'entraînèrent en sens inverse tandis que la camionnette s'enfuyait prestement de ce lieu désolé.

A l'intérieur du bâtiment on le guida vers un vestiaire dans lequel on lui retira sa camisole ainsi que le reste de ses vêtements. On le revit d'une blouse blanche sans boutons ni ceinture. On l'emmena ensuite à travers un labyrinthe de couloir devant une lourde porte d'acier trempé. Un des infirmiers l'entrouvrit et il fut propulsé dans une vaste pièce au trois quarts obscure dans laquelle se mouvaient des silhouettes indistinctes.

Une ombre s'approcha de lui et de par sa progression se transforma en forme humaine. On lui adressa la parole :



- Bienvenue dans notre classe cher disciple, comment te nommes-tu ?

- Je suis le révolté

- Mais nous sommes tous des révoltés...



et hop un petit lien pour finir : une autre façon de publier un livre
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Message  Invité Sam 7 Fév 2009 - 7:55

J'ai bien aimé l'histoire, et l'écriture m'a paru alerte, bien adaptée à ce qu'elle dit. Bravo pour le monologue de la femme, j'ai pensé aux délires de San-Antonio ! Les interventions en italique se révèlent très logiques et bien venues. Bref, le texte m'a plu...

Une remarque : "Ils l'ouvrirent et en extraiyerent" ; le verbe "extraire" n'a pas de passé simple.

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Message  Petite-FRAP Sam 7 Fév 2009 - 10:16

OH. Remarquable. Plaisant à suivre, je voulais absolument lire ce qu'il avait à dire, ce révolté...
Par contre, bien que le monologue san-antonien soit fort bien tourné, il me semble peut être un peu trop long dans ce récit...
Intrigue bien menée et descriptions "vivantes", moment de lecture agréable.
Mon sourire cynique de la fin approuve.
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Message  Invité Sam 7 Fév 2009 - 12:55

Et moi qui croyais que c'était le temps qu'il allait tuer ! Mais ç'aurait été sans doute bien trop banal. Je ne peux pas dire que je sois dingue du texte mais j'avoue que c'est bien mené, caustique sinon irrévérencieux.

Au fait, pourquoi le titre en anglais ?

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Message  slave1802 Lun 9 Fév 2009 - 21:58

Easter(Island) a écrit:Et moi qui croyais que c'était le temps qu'il allait tuer ! Mais ç'aurait été sans doute bien trop banal. Je ne peux pas dire que je sois dingue du texte mais j'avoue que c'est bien mené, caustique sinon irrévérencieux.

Au fait, pourquoi le titre en anglais ?
Pour le morceau éponyme de Led Zeppelin ! What else ?
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Message  mentor Lun 9 Fév 2009 - 22:44

très bon, slave, ça m'a plu
la forme est originale et le fond est fort et exprime bien ce que tu veux faire passer

j'ai particulièrement apprécié ce passage :
Imaginez les sensations du créateur. La puissance que confère un simple stylo. On devient un dieu bâtisseur d'univers et tyran sanguinaire. On use du droit de vie et de mort comme d'un jouet. On se sent un géant, un dieu...

- Comprenez l'ivresse qui s'empare des auteurs. Imaginez leurs profondes désillusions quand ils reprennent contacts avec notre terne réalité

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Message  Invité Mar 10 Fév 2009 - 19:39

slave1802 a écrit:
Easter(Island) a écrit:Et moi qui croyais que c'était le temps qu'il allait tuer ! Mais ç'aurait été sans doute bien trop banal. Je ne peux pas dire que je sois dingue du texte mais j'avoue que c'est bien mené, caustique sinon irrévérencieux.

Au fait, pourquoi le titre en anglais ?
Pour le morceau éponyme de Led Zeppelin ! What else ?
Of course !!

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Message  Anne Veillac Mer 11 Fév 2009 - 9:14

Une écriture travaillée. Une belle écriture. Mais je n’ai pas réussi à vraiment croire à cette histoire. Qu’importe, puisque d’autres y ont cru.

Je n’ai pas non plus bien apprécié la deuxième voix du texte, celle du professeur. J’ai eu l’impression qu’à moi, lecteur, on faisait une explication de texte, au cas où je n’aurais pas compris. Au début, j’ai cru que c’était le texte de l’élève, le texte du narrateur, et que le professeur lui commentait ce qu’il avait écrit. Là, je trouvais ça super intéressant.

Petit détail : Cette mer de voix et non cette mer de voie. A moins que ce ne soit exprès.
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Message  Sahkti Mer 4 Mar 2009 - 13:19

Entre le texte et l'analyse de texte, mon coeur balance.
J'aime ces appartés, ces explications parfois aussi nébuleuses que le texte qu'elles tentent de décortiquer. Il y a pas mal de rythme dans tout cela, quelques pirouettes (mais aussi des fautes, hum...) et une forme d'ironie agréable à suivre.

PS: What else, c'est devenu une formule culte ça :-))
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Message  Deoxys 2 Mer 4 Mar 2009 - 13:31

Nespresso... Euh...oui^^ j'ai beaucoup aimé ce texte, original, notamment par le monologue très intéressant de la femme du protagoniste.
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