Côté jardin

- Si vous avez besoin de quelque chose vous pouvez appeler
- Merci madame
- Votre voisin, Paul, vous expliquera quelques règles de la maison, n'est-ce pas ?
- Bien sûr
- Je vous laisse
- Merci madame.( un temps ) Je m'appelle Georges.
-( deuxième jour ) Je vois que vous êtes du côté de la fenêtre ?
- C'est exact.
- Vous avez de la chance.
- Oui
- Vous pouvez voir dehors
- En effet
- ( troisième jour ) Pourriez-vous me dire ce qui se passe ?

Paul se redresse sur son lit, s'assied et regarde par la fenêtre.

- Le jardin est en pleine floraison, c'est la saison des glycines, sur le mur , plein sud , des grappes couvrent la pierre. On pourrait respirer les roses blanches sur la treille. C'est l'heure des enfants. Ils courent dans les allées. Ah, en voilà un qui vient de tomber, il pleure. Quelqu'un se lève d'un banc et le console. Sa mère sans doute, non, c'est sa grand-mère, elle porte un chignon blanc serré. Elle me rappelle ma femme, Solange. Le même sourire.

Il se détourne, se recouche.

- Merci Paul. Les roses, elle sont entrouvertes ou encore fermées ?
- Entrouvertes.
- Ma femme aimait beaucoup les roses, rouges. Elle dit toujours qu'elles sont le symbole de l'amour passionné. Vous y croyez, vous ?
- Je ne sais pas.
- Vous me raconterez demain ?
- Demain, le jardin est fermé, mais je vous raconterai lundi.
- Merci beaucoup Paul.

Quelques semaines plus tard.
Paul régulièrement décrit à Georges les aventures du jardin, devenu leur troisième compagnon.
Un jour, on emmène Paul.
Son lit reste vide.
Georges interroge. On lui répond que Paul est mort.
Il demande alors de prendre sa place près de la fenêtre.
Pourquoi pas.

- Vous pouvez me relever afin que je voie ?
- Si vous voulez.

On relève Georges. Il regarde par la fenêtre.

- Mais c'est...c'est un couloir !
- Oui, vous croyez ?
- Paul me décrivait un jardin !
- Paul ? Mais c'est impossible.
- Impossible ?
- Oui, impossible, Paul était aveugle.

Inspiré par l'histoire de deux retraités dans une chambre, quelque part.
Merci à Linda pour me l'avoir contée un jour d'avril 2009.

Joli ! Mais je trouve l'écriture un peu "brut de décoffrage", les phrases un brin trop sèches peut-être. En même temps, je comprends que cela correspond très bien au vide de la vie de ces deux hommes... Une grande efficacité, mais quelque chose me manque, et je ne sais pas quoi.

Comme c'est une histoire " vraie " qui a marqué une de mes élèves en stage, je ne pouvais pas broder. Je la rends telle que je l'ai reçue.

Une jolie histoire triste.
La seule chose qui me chiffonne c'est que Paul n'entende pas que c'est l'heure des enfants.
Oh et puis la grand-mère au chignon blanc, peut-être un petit bout caricatural(e).

Easter(Island) a écrit:La seule chose qui me chiffonne c'est que Paul n'entende pas que c'est l'heure des enfants.

Paul, aveugle et peut-être bien un peu sourd aussi, le pauvre, pareil pour Georges ? ;-)
Oui, touchante cette histoire
Plus longue ou plus "fleurie" de mots l'aurait sans doute dénaturée

Georges est paralysé, je ne sais pas s'il est sourd. Promis je demande à la rentrée.

Il avait probablement envie d'y croire, cela suffit largement.
Belle tranche d'amitié que ce que tu nous racontes là: celui qui offre du rêve et celui qui y croit, peut-être autant pour faire plaisir à l'autre qu'à lui même.

Hé bé, quelle histoire ! Toute en sensibilité et en sobriété, magnifique dans sa teneur. Tu racontes tout cela avec pudeur, j'aime beaucoup cela, pas d'effets inutiles.

Une histoire sans grands effets de style, sans effets spéciaux non plus...
et pourtant ça fonctionne à merveille. Très touchée par le petit supplément d'âme de ces deux-là.