Etudiante en psychologie et autres textes

Etudiante en psychologie

Sibylle est étudiante en psychologie. Elle a toujours rêvé d’écouter ceux qui en avaient besoin et de leur venir en aide. Mais, petit à petit, au fur et à mesure de ses études, elle s’est mise à changer de regard sur les autres, sur ceux qu’elle aime, sur ses proches, sur ses rencontres d’un jour. Un jour, elle a réalisé qu’elle n’arrivait plus à apprécier les gens tels qu’ils étaient, il fallait qu’elle analyse, qu’elle voit la faille en eux. Comme si elle les examinait avec un microscope. En réalisant cela, elle s’est sentie mal, très seule, coupée du monde.




Lucille

Elle est belle Lucille, mon soleil, mon étoile, ma lune aussi. Je l’aime trop. Elle irradie. Elle est comme un phare dans ma nuit. Je sais, c’est très bête ce que je dis là, mais il faut être amoureux pour comprendre. Comme si ça ne m’était encore jamais arrivé. Comme si c’était la première fois. Comme si ça n’était jamais arrivé à personne. Un petit miracle qui m’est tombé dessus.
Pourtant, elle est barge Lucille, j’en suis sûr, mais ça m’est égal. Il n’y a que ses yeux, son sourire et son rire qui comptent. Et ses lèvres aussi. Et son corps entier quand elle se donne. Ma Lucille d’amour.
Peut-être que je l’aime aussi parce qu’elle est barge. C’est ce qui fait son charme. Au début, ça m’a surpris, presque choqué, et maintenant j’y suis habitué, ça fait partie d’elle, je l’aime ainsi.
La première fois qu’on est passés par la gare St Lazare, il y avait des traces sur le sol, des marques jaunes, bleues et toutes entortillées, avec des courbes, des arabesques, des retours en arrière. Il a fallu que Lucille marche dessus, sans dépasser, du début à la fin. J’ai cru que c’était pour rigoler mais, la deuxième fois qu’on est repassés par là, elle a fait pareil, comme si elle ne pouvait pas s’en empêcher. Elle avait même un petit sourire gêné.
Et ensuite, j’ai remarqué tout ce qui clochait chez elle, tous ces petits rituels qu’elle s’inventait.




Colocation

Caroline vit en colocation. Ça ne se passe pas très bien. Emilie, sa colocataire, est un peu spéciale. Personne ne peut toucher à ses affaires, jamais. Même sa nourriture… Caroline trouverait plus simple qu’elles fassent les courses à tout de rôle mais non, chacune ses courses, chacune ses repas, chacune son coin dans le frigidaire. Un jour, Caroline a eu le malheur de lui emprunter son coupe-ongle et elle ne l’a même pas remis à la même place. Qu’est-ce qu’elle a entendu !
Ce n’est pas très drôle pour elle, mais dans le fond, elle se dit que c’est une bonne leçon de vie. Il lui arrive aussi d’avoir ses petites mesquineries, comme tout le monde. Mais là, à voir vivre Emilie, elle sait qu’elle ne peut que s’améliorer.
C’est pratique d’avoir un contre-modèle.




Acteur

Marc Seboul est acteur. Son nom de cinéma est Raoul Six. Tout le monde connaît sa tête mais personne ne se souvient de son nom. Il est spécialisé dans les rôles de méchants, de salauds, de sadiques, de pervers. Il travaille quand il veut, télévision ou cinéma.
Pourtant, à la ville, c’est un homme charmant. Il a un physique qui se prête assez bien à ses rôles, mais il y a aussi la question du hasard. Il a débuté en jouant un rôle de tueur et on ne lui a proposé que des rôles similaires par la suite. Il faut dire qu’il a excellé dans ce premier film, il était vraiment un personnage inquiétant. Mais il aurait pu commencer par autre chose, il aurait été bon aussi, et sa carrière aurait changé de route.
Sa vie professionnelle ne l’a jamais empêché d’avoir une vie sociale riche, une femme, des amis fidèles. Les gens ne confondaient pas l’acteur et l’homme. Mais, après son divorce, il est tombé très amoureux d’une Isabelle. Il n’a jamais réussi à la séduire. Elle était passionnée de cinéma et avait vu presque tous ses films. Même en se raisonnant, elle ne pouvait s’empêcher d’éprouver du dégoût en le regardant.




Premier matin

Elle va chez lui. C’est la première fois. Elle est intimidée. Elle a peur de le décevoir, elle a peur d’être elle-même déçue. Elle doute. Elle voudrait presque en rester là, à cette première rencontre pleine de promesse, ne pas aller plus loin.
Elle reste dormir.
Le lendemain matin, leur premier matin, ils déjeunent ensemble, l’un à côté de l’autre, presque l’un contre l’autre. Elle se sent formidablement bien. Ses doutes de la vieille sont envolés. C’est un peu comme s’ils se connaissaient depuis longtemps.

Je suis assez partagée quant à ces textes... Pour chacun, je trouve qu'ils démarrent bien, de manière intrigante, avec une espèce de "magie du quotidien", comme un regard neuf sur ce qui nous entoure, puis ils se terminent d'une manière fort plate. J'ai l'impression d'assister à un essor rompu, la raison raisonnante et raisonneuse qui reprend l'ascendant sur le rêve.

Le texte sur Lucille me paraît caractéristique, de ce point de vue. J'ai l'impression qu'après "elle a fait pareil", tout est là pour plomber l'ambiance, alors qu'avant c'est un petit bijou de légèreté.

Et si je changeais la fin de Lucille ainsi :

La première fois qu’on est passés par la gare St Lazare, il y avait des traces sur le sol, des marques jaunes, bleues et toutes entortillées, avec des courbes, des arabesques, des retours en arrière. Il a fallu que Lucille marche dessus, sans dépasser, du début à la fin. Après, elle m’a regardé avec un petit sourire gêné. C’est ce sourire qui m’a mis sur la voie.

Je rejoins socque dans son impression et persiste à demander, comme précédemment, s'il ne serait pas temps de songer à étoffer, à développer. Parce qu'en l'état on a le sentiment d'avoir quelque chose au début qui ne tient pas toutes ses promesses et part un peu en quenouille.
Il ne s'agit que de mon opinion, je me souviens que tu as déjà expliqué ne pas être prête pour ceci.
Quoi qu'il en soit, je trouve que ton écriture s'est affirmée et j'aime bien quand tu laisses aller ta plume.

Anne Veillac a écrit:Et si je changeais la fin de Lucille ainsi :

La première fois qu’on est passés par la gare St Lazare, il y avait des traces sur le sol, des marques jaunes, bleues et toutes entortillées, avec des courbes, des arabesques, des retours en arrière. Il a fallu que Lucille marche dessus, sans dépasser, du début à la fin. Après, elle m’a regardé avec un petit sourire gêné. C’est ce sourire qui m’a mis sur la voie.

A mon avis, c'est encore trop explicatif ; pour moi, le soufflé retombe avec les deux dernières phrases...

effectivement, il y a quelque chose qui cloche, je me demande si c'est pas dans l'écriture, le style qui manque un peu de..; surprise, peut-être. C'est très difficile à définir et je pense que cela peut plaire cet air archi quotidien, néanmoins, ça n'embarque pas facilement.

Je ne vois pas très bien où va Sibylle. Pourtant, le personnage m'a l'air bien intéressant et j'aurais aimé la connaître davantage.

Idem avec Lucille. C'était pourtant rigolo et intriguant cette histoire de taches de couleurs qu'elle suivait comme un rituel. Là encore, j'aurais aimé en savoir plus.

En lisant les autres textes de la série, la même impression d'inabouti me vient à l'esprit et je le regrette parce que j'aime ton écriture, son rythme et tes personnages. De plus, il y a à chaque fois un bon potentiel que tu pourrais creuser, quelque chose que tu tiens et puis pfuittt, plus rien, c'est fini et tant pis pour nous, pauvres lecteurs :-)

Pour ma part, j'ai eu l'impression de lire une galerie de portraits, sympathique mais qui ne va nulle part.

Je me suis demandée si le but était de raconter la vie de l'étudiante en psycho à travers les portraits qu'elle fait des gens, le premier petit texte étant donc une introduction à une longue suite de personnages que cette jeune fille fréquente et décrit, dans un esprit un peu "Amélie Poulain"...

Si c'est ce que tu veux faire, c'est à retravailler dans la forme mais la démarche me semble cohérente et tout à fait intéressante : je vois cela comme une nouvelle forme de "journal intime" d'une certaine manière, mais centré sur la psychologie des gens.

En revanche, si ce n'est pas dans cette démarche que tu es, je ne vois pas du tout où tu veux aller.

Dans tous les cas, j'ai une sensation d'inabouti, comme si ceci était le début d'une longue suite à laquelle il faudrait donner de la cohérence.

Sinon, je trouve l'écriture tout à fait agréable, légère.

A bientôt sous tes lignes,
Ruin.

Galerie de portraits contemporains ? Il y a le cadre, le pinceau, la couleur, à présent il faut un grand coup de seau d'acide sur le mur.
Pour " Lucille " j'ai cru un moment qu'elle était ces " signes sur le sol ".

Galerie de portraits contemporains ? Il y a le cadre, le pinceau, la couleur, à présent il faut un grand coup de seau d'acide sur le mur.
Pour " Lucille " j'ai cru un moment qu'elle était ces " signes sur le sol ".

Moi ça me plait cette manière de faire.
ça me rappele un peu les textes de Coline et ses femmes confettis (même si ce n'est pas pareil ici!) j'aime bien les petits portraits de personnages.
Idem pourtant, parfois on reste un peu frustrés, avec un besoin d'en savoir plus.

Lucille, elle me fait penser à Nadja...

Galerie de portaits sans sels, sans saveur, sans tendresse, sans méchanceté...
Juste une sorte d'objectivité froide...

Point positif : le début d'un style, le démarrage de quelque chose...

Maintenant que vous avez observé, dessiné les grandes lignes, il faut soit détailler avec plus de finesse soit colorier tout cela...
Au plaisir de lire le résultat de votre travail...

Cela fait longtemps que je ne suis pas venue sur VE. Je n'ai vu qu'hier vos derniers commentaires. J'ai réécrit la nouvelle "étudiante en psychologie" et je voudrais savoir si cette deuxième version fonctionne mieux que la première.

Etudiante en psychologie

Après son bac, Sybille s’est inscrite en fac de psycho. Elle voulait aider les autres. Son père ne comprenait pas ses motivations.
- Aider les autres ! Aider les autres ! C’est bien gentil. Mais après ?
- Après ? Rien. Je veux aider les autres, c’est tout.
- Ce n’est pas une ambition ça ! Tu peux venir en aide aux gens dans la vie de tous les jours. Ce n’est pas un métier, « aideur » !
Sibylle trouvait son père très limité par moment. Elle ne l’a pas écouté. Elle a fait ce dont elle avait envie.
Elle s’est passionnée pour ses études.

C’est en maîtrise qu’elle a commencé à réaliser le changement chez elle. Elle n’avait plus le même regard sur ses proches, ses parents, sa famille, ses amis, ses voisins ou ses rencontres d’un jour. Il fallait qu’elle les analyse, qu’elle cherche à comprendre leur fonctionnement psychique, qu’elle imagine leur enfance, leurs failles, leurs traumatismes. Elle avait même l’impression de les examiner avec un microscope.
Elle n’arrivait plus à apprécier les gens comme avant.
Elle avait acquis un savoir mais elle avait perdu le sentiment d’être en lien avec ses semblables.

Son père lui demandait parfois, sur un ton ironique :
- Bientôt la fin de tes études. Tu veux toujours aider les gens ?
- Evidemment.
En réalité, cette question la déprimait. Elle se sentait coupée des autres, coupée du monde, coupée d’elle-même. Elle ne désirait plus qu’une chose : cesser d’analyser, ce qui aurait été gênant pour ses études.

Je préfère cette version, mais la trouve encore un peu raide. Une suggestion : pourquoi ne pas mettre le texte au présent, à partir de la phrase après "C'est en maîtrise" ? D'ailleurs, vous pratiquez souvent ainsi, me semble-t-il...

Oui, Socque, je pense que vous avez raison pour le présent. Merci.


Etudiante en psychologie

Après son bac, Sybille s’est inscrite en fac de psycho. Elle voulait aider les autres. Son père ne comprenait pas ses motivations.
- Aider les autres ! Aider les autres ! C’est bien gentil. Mais après ?
- Après ? Rien. Je veux aider les autres, c’est tout.
- Ce n’est pas une ambition ça ! Tu peux venir en aide aux gens dans la vie de tous les jours. Ce n’est pas un métier, « aideur » !
Sibylle trouvait son père très limité par moment. Elle ne l’a pas écouté. Elle a fait ce dont elle avait envie.
Elle s’est passionnée pour ses études.

C’est en maîtrise qu’elle commence à réaliser le changement chez elle. Elle n’a plus le même regard sur ses proches, ses parents, sa famille, ses amis, ses voisins ou ses rencontres d’un jour. Il faut qu’elle les analyse, qu’elle cherche à comprendre leur fonctionnement psychique, qu’elle imagine leur enfance, leurs failles, leurs traumatismes. Elle a même l’impression de les examiner avec un microscope.
Elle n’arrive plus à apprécier les gens comme avant.
Elle a acquis un savoir mais elle a perdu le sentiment d’être en lien avec ses semblables.

Son père lui demande parfois, sur un ton ironique :
- Bientôt la fin de tes études. Tu veux toujours aider les gens ?
- Evidemment.
En réalité, cette question la déprime. Elle se sent coupée des autres, coupée du monde, coupée d’elle-même. Elle ne désire plus qu’une chose : cesser d’analyser, ce qui serait gênant pour ses études.