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Le murmure des bergers (IX) - Chap. 21, 22, 23, 24

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Le murmure des bergers (IX) - Chap. 21, 22, 23, 24 Empty Le murmure des bergers (IX) - Chap. 21, 22, 23, 24

Message  Hellian Ven 8 Mai 2009 - 17:01

Chapitre 21 – Choses inanimées, avez vous donc



L'impassibilité est la qualité première d'une greffière d'instruction et cette qualité, Janine Gajour la possédait plus que tout . Ce n'était pas faute d'en avoir connu des crimes et des criminels de toute nature en vingt-cinq ans de loyaux services aux côtés de treize juges d'instruction. Elle avait été la fidèle copiste des confidences les plus atroces, des turpitudes les plus ignobles. Jamais elle n'avait sourcillé, se contentant parfois, lorsque certains détails dépassaient ce que l'humain peut entendre, de demander à son juge de bien vouloir reformuler la phrase ou l'expression qu'elle craignait avoir mal comprises. Elle avait même régulièrement assisté aux autopsies qu'elle considérait comme relevant d'une pratique artistique de la boucherie, si ce n’était qu’en place d'un quartier de bœuf, c'est un corps d'homme ou de femme l’on dépeçait. On aurait eu tort de croire qu'elle y avait perdu sa sensibilité. Personne n’était plus émotif que Janine au palais de justice. Simplement, elle s'était forgée une doctrine ; dès qu'elle était "en acte", selon l'expression consacrée, elle fermait une porte dans son esprit, modifiait son regard et se faisait instrument du juge. C'était là un exercice d'humilité, une ascèse issue de longues années de cohabitation professionnelle avec ce que l'individu peut sécréter d'horreur et de perversité.
A la différence du juge qui réagit, questionne, parfois même s'autorise l'indignation, la greffière ne participe pas à l'entretien, ne suggère jamais, ni n'interprète. Elle transcrit, silencieuse. Tout au plus peut-elle s'accorder de blêmir. Elle ne doit pas penser, sauf à l'orthographe ou à la trame du formulaire. C'est au prix de cette abstraction qu’une bonne greffière autorise l'intimité propice aux aveux du criminel. Janine était donc une bonne greffière. En toutes circonstances elle savait demeurer marmoréenne. Mais lorsque Bellemare avait choisi de faire le grand saut, elle avait craqué, comme si toute cette émotion contenue durant des années avait d'un coup explosé. Sur son ordinateur, elle avait commencé par pleurer, puis lentement, sous la pression d'une vague venue de son ventre, elle avait laissé jaillir un cri, un cri de chien qui hurle à la mort. En fait, mademoiselle Gajour n'avait jamais connu des crimes et de la mort que le relent affadi du récit qu'en donnait leurs auteurs ; même les autopsies n'était qu'un spectacle de coulisses. Mais la mort en direct, dans son brutal accomplissement, jamais elle ne l’avait vue. Et soudain, dans l’acte imprévisible de Bellemare, toute la virtualité de la mort en dossiers avait fait irruption. Aussi ressentait-t-elle une légère perte de motivation. La lassitude la gagnait ; Sur le chemin du palais, depuis trois jours l'angoisse comme une pieuvre, lui nouait le plexus. Il lui fallait mobiliser des trésors d'énergie pour entrer dans le cabinet d'instruction, s'asseoir à la place qu'elle avait naguère occupée avec vaillance.

Ce jour-là, l'été faisait grise mine. Le soleil qui s'était entêté à donner à Belmont des couleurs de Provence depuis trois semaines avait disparu et Janine montait d'un pas traînant les deux étages du tribunal pour prendre son poste.
En cette seconde quinzaine de juillet, les services étaient en roue libre et les vacances avaient éclairci les effectifs. Le juge lui-même après avoir clôturé l'affaire Bellemare avait pris le chemin de la Bretagne. En insérant la clé dans la serrure, Janine songeait à la morne journée qu'elle passerait en formalités sans importance. Ah et puis il y avait aussi à débarrasser le cabinet des vestiges de l'affaire ; quelques objets dont la sinistre épée qui avait pourfendu madame Schaefer, l’étrange cordon qui devait encore porter dans ses fibres quelques molécules de la sueur ultime émise par la main de la suppliciée. Elle irait les mettre au grenier, comme d'habitude, avec les pièces à conviction non réclamées après les orages judiciaires.
Janine referma la porte, posa son sac sur une chaise, se campa face à la triste fenêtre que le menuisier avait remplacée et contempla les barreaux fraîchement scellés, à l'initiative du président, pour prévenir toute nouvelle tentative. Avec ces barreaux le cabinet qui jusqu'alors avait échappé à l'austérité des lieux de justice, prenait tout à coup un aspect carcéral. Elle poussa un profond soupir et décida de se mettre à l’ouvrage. Elle allait vider au plus vite l’endroit de tout ce qui pouvait évoquer cette histoire. Avec répugnance elle saisit l'épée et le cordon et prit l'escalier du grenier.

Sur des étagères gisait une étrange brocante d'armes et d'objets que la main d'un meurtrier avait un jour saisis. Janine détestait cet endroit. Elle croyait, comme le poète, que les objets inanimés avaient une âme, une âme damnée pour l'occasion. Ce débarras n’était autre que l'enfer des objets. Dans l'architecture subtile de leur structure atomique devaient encore résonner des cris de souffrance, rôder des regards effarés de victimes, suinter des transpirations de haine. Il devait avoir capté ces scènes atroces ou l'homme soumet son prochain au joug de sa sauvagerie. Janine avait écouté une émission de radio où un professeur un peu fou développait une thèse selon laquelle la matière n'était dans son intimité qu'un condensé d'ondes infimes. Que se passe-t-il alors dans le cœur des atomes lorsque se déversent des flux de haine ou de terreur dont la mort est l'estuaire ? Dans quel océan s’évacue cette fureur ?
Elle ne croyait pas aux maléfices, non, mais demeurait convaincue que rien n'était jamais perdu, ni du bien ni du mal, et que lorsqu'un objet avait été l’instrument de la souffrance, il devenait, comme une éponge, imbibé du malheur. Aussi se gardait-elle de tout contact avec ces outils du crime, prenant nombre de précautions par force contorsions pour se glisser entre les étagères sans que la moindre partie de son corps n'entre en contact avec ces choses maudites. Lorsque elle eût déposé les deux accessoires, elle se hâta de regagner son bureau qui, en dépit les barreaux, lui sembla réconfortant. Ici, les objets étaient neutres et rassurants, comme le lisse ronronnement de son ordinateur. Il ne restait plus de l'affaire Bellemare que l'éprouvant souvenir de l'homme bousculant les gendarmes et brisant la fenêtre. Mais au moins plus de traces physiques, hormis ce vieux bouquin, là-bas dans le coin, qu'un obstiné policier avait cru devoir remettre au juge. Drôle d'idée ! Certes, ce livre avait sans doute été témoin de l'agression d’Hubert Galichon. Mais, de là à le faire parler ! Peut-être qu'un jour, dans mille ans, confirmant sa théorie des "objets-mémoire", des scientifiques dans un laboratoire de la police extirperaient-ils les images infra atomiques, les cris, les paroles, les odeurs enfouis dans la matière. Après tout, le fin limier qui a découvert les vertus révélatrices de l'empreinte digitale, soupçonnait-il que cent ans plus tard, d'autres trouveraient le moyen de confondre les assassins et les violeurs grâce à l'analyse ADN ? L'inimaginable d'aujourd'hui est souvent l'ordinaire de demain. Pour l’heure, le juge n'avait fait aucun cas de ce livre, sauf à lui dire avant de partir de le rendre à la médiathèque.
Curieux quand même ce bouquin ! Janine n'en n'avait jamais vu d'aussi ancien, avec cette couverture craquelée et noircie. Aucun titre, ni sur la tranche, d'ailleurs très altérée, ni sur la couverture ou ce qui en restait. En y regardant de plus près, elle s'aperçut qu'il demeurait légèrement entrebâillé, à l'instar de ces livres que l'on a souvent ouverts à la même page. Elle se baissa, saisit l'ouvrage, se cala dans le fauteuil du juge, le posa devant elle. De lui-même le livre s'ouvrit en son milieu. Elle porta son regard en haut à gauche sur le premier mot, parcourut la ligne, la page entière et les autres. L’histoire la saisit, la passionna, lui fit tourner la tête. Il lui sembla plonger dans le livre, comme si une faille s'y était ouverte. Elle redressa la tête, contempla le mur qui lui faisait face, se rassura et referma le livre. Cet après-midi, c'est sûr, elle irait le rendre à la médiathèque mais pas avant d’avoir tout lu.






Chapitre 22 – Un dernier mot




Monsieur Patoureau n'avait guère le moral et cela ne lui ressemblait pas. Mis à part son aversion pour les discours, il était d'un naturel enjoué, de ces hommes que l'on qualifie de positifs. La politique qu'il avait pratiquée au niveau régional lui avait enseigné le sens des réalités ; or les réalités ne sont jamais ni totalement bonnes ni totalement mauvaises, elles dépendent du regard que l'on porte sur elles. Et puis, elles évoluent les réalités ! Le monde est instable, toujours en recherche de son équilibre. C'est la raison de son évolution. Voilà ce qu'il croyait avoir appris de la politique. Il déclinait à l'envi toute une litanie de proverbes lorsque dans l'intimité l'on devisait avec lui : « Tel qui rit vendredi, dimanche pleurera... », « La roche Tarpéienne est proche du Capitole... », « Rien n'est jamais acquis à l'homme... politique», « Après la pluie, le beau temps ». Sans le savoir, il avait acquis un mode de sagesse orientale fondée sur l'alternance des contraires, la subtile dialectique du Yin et du Yang, qu'il résumait ainsi : « D'un mal peut sortir un bien et inversement. » Cela étant, dans l’immédiat, toute cette philosophie ne l’aidait guère à passer le cap des événements qui avaient secoué Belmont. La population avait été choquée par cette accumulation de drames dont les médias avaient rendu compte bien au-delà de la circonscription. En quelques jours, la ville avait acquis une fâcheuse réputation et l’on avait assisté en cette période estivale à un défilé de touristes plus motivés par une curiosité de mauvais aloi que par les charmes de cette "petite cité de caractère", comme s'appliquait à la dénommer le guide d'Office de tourisme. Or, monsieur le maire n'appréciait pas de voir sa petite cité de caractère devenir une zone d'attraction foraine pour touristes voyeurs. Sans compter que l'inauguration de la médiathèque avait évidemment été éclipsée par ces sinistres faits divers. Aussi lui revenaient en tête d'autres adages dont il avait également nourri sa doctrine : « Pour vivre heureux, vivons cachés », ou encore : « Un peuple heureux n'a pas d’histoire. » Et voici que Belmont était dramatiquement sorti de son anonymat en vivant des histoires qui défrayaient la chronique. Tout cela n'était pas bon. On ne sait pas quelle résonance de tels événements peuvent avoir à longue échéance. La psychologie collective recèle des mystères qui ressemblent à ceux de la sismologie : lorsque survient un tremblement il faut toujours s'attendre à des répliques imprévisibles et Monsieur Patoureau qui détestait les discours ne prisait pas plus les répliques. D'évidence, Belmont avait subi un tremblement de terre. Où et quand se produiraient les répliques ? N'en serait-il pas lui-même victime ? Les gens n'allaient-ils pas inconsciemment lui attribuer la responsabilité de l’insécurité qui les avait menacés jusqu'à l'arrestation de Bellemare ? Bellemare et son épouse, qu'il avait d'ailleurs lui-même engagés comme concierges de l'Hôtel de ville, et cela en dépit de l'avis défavorable de son secrétaire .
Décidément, tout cela n'augurait rien de bon, d'autant que Basile Bertrand en faisait déjà ses choux gras. On lui avait rapporté les propos de ce dernier, dimanche, au café du PMU : « Quand on pense que c'est le maire lui-même qui a embauché ce criminel ! C'est ce qui s'appelle avoir du nez... » Rien que cette formule, "avoir du nez", ça valait plus qu'une campagne d'affichage en période électorale. Précisément monsieur Patoureau s'était toujours senti encombré de son appendice nasal qu'il avait un peu fort. Il soupçonnait Brocquart de faire secrètement alliance avec Bertrand, car comment celui-ci aurait-il été mis au courant de leur divergence à propos du recrutement de Bellemare ? L'entretien avait eu lieu "entre quatre-z-yeux", dans son bureau, sans témoin. Il fallait donc que Basile Bertrand tînt cette confidence de bonne source.

Que de soucieuses ruminations en ce samedi vingt-trois juillet, à la veille de son départ en vacances ; car monsieur Patoureau s'apprêtait à quitter Belmont pour une petite quinzaine. Comme chaque année, il irait avec son épouse à Saint-Jean-de-Mont dans l'appartement de son beau-frère et là, il ne serait plus le maire de Belmont, mais un homme en vacances. Il n'était pas fâché de ce répit. Il y avait encore quelque chose d’enfantin chez cet homme ; par exemple, croire que s’il partait, à son retour le monde aurait changé. Mais le monde ne change pas, il devient. Qu'importent les absences et le temps ! Et l'événement à la rencontre duquel se rendait monsieur Patoureau sans le savoir en était l’illustration.
Sa journée avait été bien remplie. Il lui avait fallu régler nombre de choses à la mairie et donner quelques instructions d'usage avant de partir. Maire consciencieux, il avait tenu à se mettre à jour d'une multitude de problèmes.
Il lui restait à charger la voiture après dîner. Madame Patoureau avait préparé les valises. Avec sa méticulosité habituelle, elle avait tout bien rangé dans l'entrée. Aussi, une fois le repas avalé, vacances en tête, décida-t-il d'aller chercher la voiture. Demain, de donne heure, ils prendraient la route et se transformeraient en estivants sur le coup de midi. C'est alors qu'il se souvint qu’il avait oublié son véhicule sur la place de l'hôtel de ville.
« Chérie, j'ai laissé la voiture à la mairie. Je reviens dans un quart d'heure. »
C'est étrange comme une phrase banale peut devenir précieuse à la personne qui l'entend dans certaines circonstances. Or, cette phrase prononcée si souvent, madame Patoureau de l'entendit pas, ou à peine, affairée à débarrasser la table. Ce n'est que plus tard qu’elle s'en souvint, lorsque le quart d'heure fut largement dépassé et que le commissaire Gulliver vint sonner à sa porte, le visage défait dans le crépuscule.
« Madame, j'ai une très triste nouvelle…»
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Message  Hellian Ven 8 Mai 2009 - 17:07

Chapitre23 – Rien que la mission



Finalement, tout avait été facile. Il avait suffi de repérer la voiture stationnée juste à l'angle du parking, une Safrane bleue particulièrement reconnaissable à son macaron officiel. Il viendrait bien la chercher. Le reste n'était qu'une question de patience. Se poster dans l'encoignure de la porte cochère et attendre puisque telle était la mission ; attendre qu'il passe, car il passerait. Il était toujours venu récupérer sa voiture, tard parfois, mais il ne l'avait jamais laissé stationner la nuit dehors. Donc il viendrait. Et il était venu, tranquille dans le soir, mains dans la poche, d'un pas serein et alerte. Il était passé devant la porte sans rien voir, tout à ses pensées. À quoi songeait-il ? Qu'importent les pensées d'un homme que l'on va tuer. Surtout ne pas se poser la question ! Un homme qu’il faut éliminer n'a pas d'intériorité. C'est un corps, un composé organique, un agglomérat de cellules où circulent des fluides, du sang, de la lymphe et quelques autres viscosités. Et tout cela bouge mécaniquement ; c'est une machine, élaborée certes, mais une machine. Au lieu de vis et d'écrous, il y a des ligaments, des muscles, des agglutinants, le tout constitué selon une forme stéréotypée. Il en existe des milliards comme cela. Tous les corps se ressemblent. La vie grouille dans un foisonnement de formes identiques. Quantité, fourmillement. La mission est claire, il faut éliminer cette machine que l'on désigne sous le nom de Patoureau.
L'arme est dans la main, bien serrée. C'est un magnum, une autre machine avec à l'intérieur des petits morceaux de métal mobiles qui vont tout à l'heure se diriger à la vitesse du son vers la cible... Le métal va rencontrer la chair, s'y enfoncer facilement. Le métal est plus dur que la chair, ses atomes plus denses, animés par l'explosion que la petite machine en métal va provoquer. Ils vont écarter, trancher les masses molles et s'y loger pour longtemps.

Le corps qui a pour nom Patoureau va sursauter, exploser, s'affaler en laissant couler un liquide visqueux et rougeâtre. La machine cessera de remuer, privée de sa substance, et la mission sera accomplie.
La machine organique approche de l’autre machine en métal bleu. Elle porte une partie d'elle-même vers la poche de son pantalon. On dirait qu'elle cherche quelque chose, un petit appendice de métal qu'elle dirige vers la portière. C’est curieux, il sort un drôle de son de la machine organique, comme un sifflement. Elle semble contente. Cela fait un bruit aigu et modulé. Il faut que cela cesse, rendre cette chair au silence. Il suffit de lever la main qui tient l’objet et d'appuyer sur l’ergot .
Voilà, comme ça. La petite machine en métal est docile. Elle exprime sa satisfaction par un son nettement plus puissant que la structure de chair, un son bref. Cela fait une secousse dans la main ; c'est désagréable, mais ça ne dure pas. À peine le bruit est-il dissipé que la machine molle s'effondre sur le capot de la voiture bleue. C'est curieux, la partie mobile qui tout à l'heure fouillait dans la poche du pantalon s'accroche à l'essuie-glace. Peut-être que le petit morceau de métal n'a pas bien fait son travail. Il faut encore appuyer sur l’ergot pour envoyer un autre morceau, éteindre complètement le pantin qui bouge. Une nouvelle contraction de la main, une autre secousse, le bruit, une odeur un peu piquante. Cette fois, le Patoureau tressaute, lâche l'essuie-glace, glisse lentement le long du capot, tombe sur le bitume, inerte. Autour de lui un liquide coule et baigne les pneus. Tout est bien. Les molécules sont dissociées, le morceau de chair ne siffle plus.







Chapitre 24 – de vrais professionnels



La place de l'Hôtel de ville était noire de monde. Les télévisions avaient envoyé des équipes entières dont les camions marqués du logo des grandes chaînes nationales étaient stationnés en travers des parkings, tandis que des techniciens s'affairaient à installer câbles, caméras et projecteurs. Le Journal du dimanche avait dans la nuit modifié sa une, remplaçant son titre sur « les arnaques des vacances » par ces mots sur cinq colonnes : «Belmont la maudite ! » Suivait un récapitulatif de la série d'événements qui avaient bouleversé la cité durant ces trois dernières semaines : l'agression du jeune Galichon demeuré depuis lors dans un état de prostration totale, le meurtre d'une femme honorablement connue, dans des conditions épouvantables, le suicide par défenestration d'un suspect dans le bureau du juge, puis, point d'orgue, l'assassinat la veille au soir en plein centre du maire lui-même .
Deux coups de feu tirés presque à bout portant. Et le journal de conclure que « la police se perdait en conjectures », ce qui traduisait l'impuissance des autorités. Dans la nuit, la nouvelle s'était répandue de quartier en quartier, de maison en maison, une traînée de panique. Les lumières étaient restées allumées jusqu'au petit matin. On avait interdit aux enfants de sortir.

À la messe de dix heures et demie, une affluence exceptionnelle de paroissiens avait entendu le curé se livrer à un long sermon sur le réveil des forces du Mal, invitant ses ouailles à la prière qui, seule, pourrait faire reculer le démon.
«... L’oubli de Dieu crée un vide spirituel, mes bien chers frères ! Et ce vide, qui le remplit ? Je vous pose la question, mes bien chers frères, qui s’y engouffre ? La réponse est simple, évidente, Satan ! Satan et ses acolytes, Satan ! Oui, vous m'avez bien compris et je n'ai pas peur de le désigner sous son nom séculaire... »
Ce disant il pointa un index véhément vers la porte de l'église.
«... Satan qui rôde dans nos rues la nuit quand nous dormons, insouciants du combat éternel du bien et du mal. Par nos prières renouons l’alliance avec le tout-puissant. Satan s'enhardit de notre cécité, il sort de l'ombre et ne craint plus de commettre ses terribles forfaits. Prions, mes bien chers frères, nos prières sont nos glaives contre l'armée du démon. »
S'en était suivie toute une série de Pater qu'une ferveur inaccoutumée avait fait résonner sous les voûtes de l'église saint-Romain . À la communion, on avait pour la première fois manqué d'hosties, à la grande satisfaction de l’abbé Tissier qui avait dû rompre les dernières en quatre pour satisfaire à la demande. Sur le parvis vers midi, des groupes s'étaient formés. Chacun s'était nourri des rumeurs les plus folles. Le mot "secte", rapidement accolé à l'épithète "satanique", avait circulé de bouche en bouche abondamment attisé par une hystérie naissante qui devait beaucoup au sermon du curé. D’autres n'avaient pas craint d'évoquer la résurrection de Bellemare que certains témoins auraient vu rôder dans les brumes de l'aube samedi matin.
Tout cette population se retrouva dès trois heures de l'après-midi sur la grand place pour la conférence de presse de monsieur le procureur. Devant l'affluence probable et la nécessité de donner à cette intervention une portée solennelle, les services municipaux avaient dressé à la hâte une petite estrade, installé un micro et quelques haut-parleurs. Il s'agissait non seulement d'une conférence de presse, mais d'une occasion pour les officiels de redonner aux habitants une confiance gravement altérée par la mort du maire. La place que l'on réputait grande ne suffisait pas à contenir la foule qui ne cessait d'arriver. Dès avant trois heures, les rues adjacentes avaient débordé de badauds. Des vendeurs de saucisses n'avaient pas hésité à planter leur stand.

Le soleil de retour donnait à cette effervescence une ambiance de kermesse. À la manière des vedettes, les autorités se faisaient attendre. L'estrade demeurait vide. L’impatience commençait à gagner et par endroits jaillissaient des sifflets. Vers trois heures et demie, sortant de l'Hôtel de ville, apparut la délégation. Le silence se fit. Le procureur n'était pas seul. Autour de lui, en uniforme, le préfet et le sous-préfet, le capitaine de la gendarmerie ; derrière, le commissaire de police et le secrétaire de mairie. Tous affichaient un air sombre qui renforça l'angoisse de l'assistance. On entendait au loin le ronflement d'un avion égaré dans le silence qui avait enseveli Belmont.
C'est le secrétaire de mairie qui le premier se dirigea vers le micro. Après un petit toussotement de circonstance, il sortit de sa poche une feuille de papier qu'il déplia. Nouveau toussotement. Lunettes chaussées, il se mit à lire d'une voix profonde :
« Mesdames et messieurs, dans les circonstances tragiques qui accablent Belmont, les autorités en charge de l'ordre public, monsieur le préfet, monsieur le sous-préfet, monsieur le procureur de la république et le capitaine de gendarmerie ont estimé devoir s'adresser à la population. Mais avant de leur céder la parole, je tiens à faire part de mon intense émotion, partagée, j'en suis convaincu, par la plupart d'entre vous, devant la perte immense que nous venons d'éprouver en la personne de notre maire lâchement assassiné devant cet Hôtel de ville, au centre de cette cité si chère à son cœur. Je passe la parole à monsieur le préfet. »

Le show était bien réglé. On devinait que la demi-heure de retard avait dû être consacrée à la mise en scène, le rôle de présentateur ayant été dévolu au secrétaire de mairie qui s'en était acquitté avec sobriété. Le préfet s'avança. Il n'avait pas préparé de discours, les impératifs de sa fonction lui commandant de conserver un verbe spontané.
« Mesdames, mesdemoiselles et messieurs, d'abord et avant tout, je tiens ici à m'associer au désarroi des habitants de Belmont. La perte qui vient de nous être infligée dans des circonstances dont le tragique n’a d’égal que le sordide me plonge dans une profonde tristesse. Monsieur Patoureau n'est plus. Belmont est orphelin. Bien que l'envie me vienne d'évoquer devant vous les innombrables qualités de cet homme de cœur et de devoir, je m'en abstiendrai devant l'urgence de la situation. Cependant, en sa mémoire, je vous propose d'observer dans le recueillement une minute de silence. »
Puis il regarda sa montre, activa le chronomètre et baissa la tête. Le public l’imita. Seul l'avion qui n'en finissait pas de s'éloigner donnait à la scène un soupçon d'indifférence aérienne. On entendait de-ci de-là quelques reniflements révélateurs d’un chagrin sincère.
Quand furent écoulées les soixante secondes, le secrétaire de mairie s'empara de nouveau du micro, continuant, fidèle au protocole ; son rôle de présentateur.
« Et maintenant, monsieur le procureur de la république a un message à vous transmettre. »
Un frisson parcourut la foule. L'intervention du préfet s'était inscrite dans les convenances : hommage au disparu, minute de silence... Le préfet avait joué la vedette américaine avec ce qu'il fallait d’émotion. C'est donc avec une attention redoublée qu’était attendue la prestation du procureur, figure de proue de l'action policière. Il regarda les personnalités en uniforme à ses côtés, avança d'un pas et tel un artiste confirmé, se saisit du micro qu'il décrocha de son pied, l'approcha au bord de ses lèvres à l'exemple de ces chanteurs qui, susurrant les paroles, transforment l'accessoire en esquimau.
Il en découla, démultiplié par les haut-parleurs, un crachotement exaspérant immédiatement suivi d'un effet larsen encore plus insupportable. Les enfants se mirent à leur tour à pousser des hurlements. Le secrétaire de mairie se précipita.
« Plus loin, le micro, monsieur le procureur ! Parlez plus loin ! »
Le procureur réajusta la position.
« L'ordre public dont je suis le représentant et le garant, vient d'être une nouvelle fois bafoué. Je veux que l'on sache que tout sera mis en œuvre pour que les responsables et les auteurs de ces abominations soient arrêtés et punis. »
Il reposa le micro.
Le propos déçut par sa brièveté. On s'attendait à des révélations ou, à tout le moins, à des informations plus consistantes. Un murmure parcourut la foule, très vite interrompu par la question d'un journaliste au premier rang.
« Monsieur le procureur, avez-vous des indices concernant l'auteur du meurtre de monsieur Patoureau ? »
La réponse fut encore plus brève.
« Je ne peux rien révéler pour l'instant, l'enquête est en cours.
— Monsieur le procureur, y a-t-il un lien entre l'agression dont monsieur le maire a été victime et les précédentes affaires ?
— C'est une hypothèse que nous n'excluons pas et sur laquelle nous travaillons.
— Alors, cela voudrait dire que monsieur Bellemare serait mis hors de cause à titre posthume ? »
Le procureur parut troublé. Il marqua un temps, glissa un regard vers Gulliver.
« Nous n'avons sur ce point aucune information à vous donner.
— Allez-vous rouvrir le dossier Bellemare ? »
Nouvelle confusion du procureur.
« La seule chose dont je puis vous assurer est que nous ferons tout pour faire jaillir la vérité et arrêter les coupables. J'ai d'ailleurs reçu le concours des services régionaux de la police judiciaire qui viendront prêter main-forte à nos policiers locaux.
— Monsieur le procureur, vous dites « les coupables », cela signifie-t-il que l'on serait en présence d'un complot ?
— Je vous l'ai déjà dit, nous n'excluons aucune hypothèse. Mais de là à parler d'un complot, il y a un pas que je m'abstiendrai de franchir. »
L'idée d’un complot renforça l’émoi déjà palpable du public.
« Monsieur le procureur, il se dit qu'un témoin aurait vu quelque temps après les coups de feu une femme s'enfuir en courant vers le jardin public qui jouxte l’Hôtel de ville. Cette information vous est-elle parvenue ? »
Le procureur se tourna vers Gulliver qui, pour toute réponse, afficha une moue désapprobatrice.
« Aucune information de cette nature n’a été portée à notre connaissance. »
On sentait dans la foule une tension grandissante manifestée par des grondements de plus en plus audibles jusqu'à ce que du milieu de l'assistance une voix s'élève :
« Ça suffit, la langue de bois ! Dites plutôt que vous ne savez rien. Ah, ça fait plaisir de voir comme on est protégé ! »
Cette intervention fut l'élément déclencheur d’une fronde générale, ponctuée de sifflets et de huées parmi lesquelles fusèrent diverses appréciations chères à la populace du style « justice pourrie, police de merde ! »

Le procureur voulut rappeler les perturbateurs à plus de civilité. Pour ce faire, il rapprocha le micro de sa bouche, ce qui eut pour effet de produire à nouveau un sifflement suraigu qui cette fois provoqua un concert de hurlements plutôt désapprobateurs.
Le secrétaire de mairie arracha le micro des mains du magistrat qui s’épuisait à son tour en vociférations.
« Mes amis, mes amis, je vous rappelle à la décence et au respect de la mémoire de notre maire. Nous devons réagir en adultes. La police fait son travail ! »
L'évocation de la mémoire de monsieur Patoureau eut l’effet escompté. Les huées se dissipèrent et le calme revint. Sur l'estrade, les uniformes paraissaient avoir perdu de leur superbe. Les officiels s’interrogeaient du regard. Le sous-préfet le premier prit congé, suivi du capitaine de gendarmerie et des autres. La conférence de presse avait produit l'effet inverse de celui escompté : désormais la peur régnait sur Belmont. Une psychose collective s'était installée qui amènerait chacun à faire de son voisin une menace pour lui-même.
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Message  Invité Ven 8 Mai 2009 - 17:22

Ouais, j'adore ! La scène de l'assassinat de Patoureau notamment me plaît beaucoup, avec sa dépersonnalisation de la victime.

Deux remarques :
"Il devait avoir capté ces scènes atroces où l'homme soumet son prochain au joug de sa sauvagerie."
"Lorsque elle eut (et non "eût", il s'agit d'un passé antérieur, non d'un subjonctif plus-que-parfait) déposé les deux accessoires"

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Message  Invité Ven 8 Mai 2009 - 18:33

Jamais elle n'avait sourcillé, se contentant parfois, lorsque certains détails dépassaient ce que l'humain peut entendre, de demander à son juge de bien vouloir reformuler la phrase ou l'expression qu'elle craignait (d')*avoir mal comprises. Elle avait même régulièrement assisté aux autopsies qu'elle considérait comme relevant d'une pratique artistique de la boucherie, si ce n’était qu’en place d'un quartier de bœuf, c'est un corps d'homme ou de femme l’on dépeçait.
*je ne sais pas si le D est français, mais il donnerai du liant à la phrase. D'autre part le S à comprises me parait d'un louche parfait.
En fait, c'est la fin de la phrase entière. ;-)
J'ai surligné un passage où manque quelque chose, probablement un que.

Je continue demain.

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Message  Roz-gingembre Ven 8 Mai 2009 - 18:49

Choses inanimées, avez vous donc…
Beaucoup de brio pour décrire les personnages; en quelques phrases et en choisissant quelques traits de caractères tu plantes une personnalité. Ainsi l’entrée en scène de Janine est vraiment bien orchestrée.

Que se passe-t-il alors dans le cœur des atomes lorsque se déversent des flux de haine ou de terreur dont la mort est l'estuaire ? Dans quel océan s’évacue cette fureur ?
Ça, c’est effectivement une question intéressante, tu pourrais presque rester un peu plus dessus.

elle se hâta de regagner son bureau qui, en dépit les barreaux
des barreaux, probablement

Un dernier mot - Rien que la mission
Pas grand chose à ajouter. C’est bien calé

De vrais professionnels

l’abbé Tissier, c’est pas mal à voix haute aussi. ;=)

J’avoue que tu fais preuve d’une belle maitrise de la technique narrative, je m’amuse même à en découvrir les ficelles. Et je me demande bien ce que nous réserve la suite ; tu n’es pas sans savoir que ce récit, tout bien ficelé qu’il est, met à jour l’évident plaisir que tu prends à placer tes personnages dans des situations parfois ridicules. Ainsi la suite et surtout la fin devront être à la hauteur des attentes du lecteur. C’est que Hellian, il va falloir continuer à nous faire, sinon rire, du moins sourire !
Pour finir et parmi tous ces commentaires favorables j'émettrais une petite réserve: souvent tu abordes des questions un peu plus philosophiques, ou métaphysique si on préfère. Seulement voilà, tu ne fais que les aborder ce qui est dommage car sans parler de donner des réponses, parfois il serait intéressant de creuser un peu tout ça, de donner du corps à des idées qui sont loin d’être inintéressantes. Mais peut-être justement que la suite nous le réserve ?
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Message  Invité Ven 8 Mai 2009 - 19:20

pandaworks a écrit:
Jamais elle n'avait sourcillé, se contentant parfois, lorsque certains détails dépassaient ce que l'humain peut entendre, de demander à son juge de bien vouloir reformuler la phrase ou l'expression qu'elle craignait (d')*avoir mal comprises. Elle avait même régulièrement assisté aux autopsies qu'elle considérait comme relevant d'une pratique artistique de la boucherie, si ce n’était qu’en place d'un quartier de bœuf, c'est un corps d'homme ou de femme l’on dépeçait.
*je ne sais pas si le D est français, mais il donnerai du liant à la phrase. D'autre part le S à comprises me parait d'un louche parfait.
En fait, c'est la fin de la phrase entière. ;-)
J'ai surligné un passage où manque quelque chose, probablement un que.
Après vérification, c'est bien "craindre de + infinitif".
Quant au "s" de "comprises", cela dépend si l'on considère que "la phrase" et "l'expression" s'ajoutent ("comprises") ou sont indépendantes l'une de l'autre ("comprise").

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Message  Invité Sam 9 Mai 2009 - 15:38

A la différence du juge qui réagit, questionne, parfois même s'autorise l'indignation, la greffière ne participe pas à l'entretien, ne suggère jamais, ni n'interprète.
J'ai trouvé la fin de la phrase mal fichue. La faute a la virgule devant ni qui brise le rythme. Un autre choix serait de remodeler légèrement.
A la différence du juge qui réagit, questionne, parfois même s'autorise à l'indignation, la greffière ne participe pas à l'entretien, ne suggère ni n'interprète quoi que ce soit. C'est à titre indicatif, je ne me permet pas de reconstruire vos phrases. Que ce soit bien clair.

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Message  Invité Sam 9 Mai 2009 - 15:41

A la différence du juge qui réagit, questionne, parfois même s'autorise l'indignation, la greffière ne participe pas à l'entretien, ne suggère jamais, ni n'interprète. Elle transcrit, silencieuse. Tout au plus peut-elle s'accorder de blêmir. Elle ne doit pas penser, sauf à l'orthographe ou à la trame du formulaire. C'est au prix de cette abstraction qu’une bonne greffière autorise l'intimité propice aux aveux du criminel.
Le redite est criante en lecture intuitive. Il faudrait la gommer.

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Message  Hellian Sam 9 Mai 2009 - 16:29

pandaworks a écrit:
A la différence du juge qui réagit, questionne, parfois même s'autorise l'indignation, la greffière ne participe pas à l'entretien, ne suggère jamais, ni n'interprète.
J'ai trouvé la fin de la phrase mal fichue. La faute a la virgule devant ni qui brise le rythme. Un autre choix serait de remodeler légèrement.
A la différence du juge qui réagit, questionne, parfois même s'autorise à l'indignation, la greffière ne participe pas à l'entretien, ne suggère ni n'interprète quoi que ce soit. C'est à titre indicatif, je ne me permet pas de reconstruire vos phrases. Que ce soit bien clair.
Aucun problème, bien au contraire. Je suis preneur.

il est vrai que "ni" (comme "et") ne doit pas être précédé d'une virgule. D'accord aussi pour "s'autoriser à". il est vrai que l'on "autorise quelqu'un à quelque chose " et que s'autoriser quelque chose est une tolérance peu rigoureuse.

Pour " interprète quoi que ce soit " j'y avais pensé, mais le "quoi que ce soit" me parait un peu lourd et enlève de la fluidité à la phrase. C'est pourquoi j'avais préféré l'élipse. Il y a des mots ou des expressions que j'appelle "crochus " que j'évite, comme "quiconque " ou quel qu'il soit ".

Mais ta remarque m'incite à retravailler la phrase.

Merci beaucoup
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Message  Hellian Sam 9 Mai 2009 - 16:35

Mille fois raison pour la redite "autorise". " permet" ou "favorise" serait mieux, "est la garante de ..."
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Message  Invité Sam 9 Mai 2009 - 17:05

De rien, Ve sert précisément à cela.

En fait, mademoiselle Gajour n'avait jamais connu des crimes et de la mort que le relent affadi du récit qu'en donnait leurs auteurs ; même les autopsies n'était qu'un spectacle de coulisses. Mais la mort en direct, dans son brutal accomplissement, jamais elle ne l’avait vue.
Vous avez repris là une cadence de phrases longues. La première est difficle à encaisser. Modifier sa forme pourrait être salutaire un peu de cette façon, qui présente l'avantager de virer un des deux "jamais" qui sont très proches :
En fait, des crimes et de la mort, mademoiselle Gajour n'avait jamais connu que le relent affadi des récits qu'en donnait leurs auteurs ; même les autopsies n'était qu'un spectacle de coulisses. Mais la mort en direct, dans son brutal accomplissement, jamais elle ne l’avait vue.

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Message  Hellian Sam 9 Mai 2009 - 17:34

Juste !
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Message  Invité Sam 9 Mai 2009 - 18:21

Hellian a écrit:Juste !
pas comme :
que le menuisier avait remplacée
:-)))))))))))

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Message  Invité Sam 9 Mai 2009 - 18:25

avait un jour saisis.
j'ai le regret de vous annoncer que le S de votre saisis lors votre saisie est fantasque. ;-)

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Message  Invité Sam 9 Mai 2009 - 18:27

Janine avait écouté une émission de radio où un professeur un peu fou développait une thèse selon laquelle la matière n'était dans son intimité qu'un condensé d'ondes infimes. Que se passe-t-il alors dans le cœur des atomes lorsque se déversent des flux de haine ou de terreur dont la mort est l'estuaire ? Dans quel océan s’évacue cette fureur ?
V'la not'Janine dans la physique quantique. On aura tout vu !
:-)

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Message  Invité Sam 9 Mai 2009 - 18:32

Il ne restait plus de l'affaire Bellemare que l'éprouvant souvenir de l'homme bousculant les gendarmes et brisant la fenêtre
Je note toujours les phrases contenant deux "de" dans une narration classique, elle me dérangent, sans m'irriter. Y remédier est parfois très simple :

L'affaire Bellemare, il n'en restait que l'éprouvant souvenir de...
.

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Message  Invité Sam 9 Mai 2009 - 18:36

Mais au moins, plus de traces physiques
N'oubliez pas la virgule après moins, ce qui évite la suite moins/plus, qui est très drôle, ce qui n'est pas le but de la phrase.

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Message  Invité Sam 9 Mai 2009 - 18:45

Fini le chapitre 21. J'aime bien votre histoire, décidément. Il vous faudrait retravailler la ponctuation, qui a une importance capitale dans votre style, notamment celles qui sont parfois absentes, et celles parfois inutiles.

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Message  Invité Mar 12 Mai 2009 - 15:28

Hellian, votre chapitre 23 a du mal à passer. Ce déluge métaphorique dénote, détonne dans le mouvement du texte. Ne voudriez-vous pas alléger ?

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Message  Sahkti Mar 12 Mai 2009 - 16:24

Choses inanimées, avez vous donc…
J'ignorais qu'une greffière pouvait assister à des autopsies. Drôle de métier !

Le début me paraît bon, tu arrives à entrer (emmenant le lecteur avec toi) dans l'esprit de cette pauvre Janine.
Ensuite, par contre, il me semble que ça se gâte un peu et que toutes ces considérations sur son boulot et son existence tirent en longueur. Ça manque un peu de vie et de spontanéité en fait. je comprends qu'il faille employer un ton linéaire, presque monotone, pour coller à la sombre existence de cette femme malheureuse, mais ça aurait été pas mal de justement trouver un contrepied à cette mornitude en employant un autre style, plus vif ou plus oral.
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Message  Sahkti Mar 12 Mai 2009 - 16:48

Un dernier mot
Bien mené, avec ce qu'il faut pour donner corps à ce personnage de Patoureau, bonhomme sympathique dans toute son invisibilité de politicien :-)
J'aime sa façon d'être partagé quant à la publicité faite autour de sa ville.


Rien que la mission
Dommage de revenir, même via une autre facette, aussi vite à Patoureau; ça aurait été pas mal de créer une rupture en retournant vers quelqu'un d'autre, Janine ou un personnage différent que tu pourrais exploiter dans cette partie, avant de revenir au maire.
Il y a également un changement narratif, un autre ton, plus philosophique, moins naturel. J'aime moins cette manière de raconter les événements, parce qu'elle me paraît trop extérieure.


De vrais professionnels
Retour de cette façon familière d'évoquer ces événements avec bonhommie, j'aime ça. Tu relances également habilement l'histoire, l'enquête va peut-être redémarrer et le suspense demeure entier !

La suite ! :-))
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Message  Hellian Mer 13 Mai 2009 - 20:09

Merci de vos commentaires et de l'intérêt porté à ce texte. Sachez bien qu'ils me sont fort précieux.

Je voulais juste indiquer à Panda et à Sahkti que si le chapitre 23 a pu leur sembler incongru, la suite, s'il me font l'honneur de poursuivre leur lecture, leur fournira l'explication de cette singularité stylistique.
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Message  Soliflore Sam 11 Juil 2009 - 17:48

J'aurais juré qu'il se serait passé quelque chose quand la greffière a pris le livre.

Effrayant la visite du grenier.

Avec vous, toutes les corporations touchant au domaine public en prennent plein leur grade.

J'ai adoré le "soupçon d'indifférence aérienne"

....Pose dîner, Mon Cher !
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Message  Hellian Sam 11 Juil 2009 - 18:00

Soliflore,

Faites attention, voyons !

Il y a des livres qui rendent fou et, là, je vous vois entrer dans une phase d'addiction véritable...

Je décline toute responsabilité quant aux aberrations comportementales ou éventuelles dérives délictuelles voire criminelles qui pourraient s'ensuivre...
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Message  Soliflore Sam 11 Juil 2009 - 21:22

Ha! ha!, Héllian, mais si je deviens folle à mon tour, tout le monde pourra témoigner que c'est par la faute de vos écrits sataniques!

Belle nuit!
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Message  Halicante Mar 8 Sep 2009 - 17:55

Chapitre 21 :
« Elle avait même régulièrement assisté aux autopsies qu'elle considérait comme relevant d'une pratique artistique de la boucherie, si ce n’était qu’en place d'un quartier de bœuf, c'est un corps d'homme ou de femme l’on dépeçait. » : il manque un « que » (p 114)

« Simplement, elle s'était forgée une doctrine ; » : forgé (p 114)

« En fait, mademoiselle Gajour n'avait jamais connu des crimes et de la mort que le relent affadi du récit qu'en donnait leurs auteurs ; même les autopsies n'était qu'un spectacle de coulisses. » : donnaient / n’étaient (p 115)

« Elle croyait, comme le poète, que les objets inanimés avaient une âme, une âme damnée pour l'occasion. » : ce « pour l’occasion » me gène, j’aurais vu plutôt « en l’occurrence. » (p 117)

Chapitre 22 :
« Demain, de donne heure, ils prendraient la route et se transformeraient en estivants sur le coup de midi. » de bonne heure (p 122)

Chapitre 23 :
« Il était toujours venu récupérer sa voiture, tard parfois, mais il ne l'avait jamais laissé stationner la nuit dehors.» : laissée ? (si je me rappelle bien mes cours de français, un participe passé suivi d’un infinitif s’accorde avec le COD si celui-ci fait l’action exprimée par le verbe à l’infinitif, par ex. : les chansons que j’ai entendu chanter (ce ne sont pas les chansons qui chantent) mais : Les cantatrices que j’ai entendues chanter – ici, c’est bien la voiture qui stationne, donc je pense qu’il faut l’accorder.) (p 123)

« Donc il viendrait. Et il était venu, tranquille dans le soir, mains dans la poche, d'un pas serein et alerte. » : si « mains » est au pluriel, je mettrais « dans les poches », sinon on a l’impression qu’il a les deux mains dans la même poche. ;-) (p 123)

Chapitre 24 :
« Tout cette population se retrouva dès trois heures de l'après-midi sur la grand place pour la conférence de presse de monsieur le procureur. » : Toute cette population (p 128)

« Le préfet s'avança. Il n'avait pas préparé de discours, les impératifs de sa fonction lui commandant de conserver un verbe spontané. » : est-ce parce que le préfet agit toujours dans l'urgence qu’il n’a pas le temps de préparer ses discours ? (mon ignorance en la matière a fait que je me suis arrêtée sur ce passage et que je me suis posé la question du pourquoi...) (p 129)
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