Un essai sur du merveilleux
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Un essai sur du merveilleux
Bonjour à tous.
Je poste ici un texte qui se veut merveilleux, dans la lignée de la littérature héritière de Tolkien. Je ne maîtrise pas vraiment ce registre, mais j'avais envie de m'y essayer. C'est donc le premier chapitre que je poste en premier, précédé d'une sorte d'incipit.
N'hésitez pas à critiquer, parce que je n'ai vraiment aucune idée de la qualité de ce que j'ai écrit.
« Ecoute-moi, mon petit. Ecoute-moi calmement, et tâche de trouver le sommeil durant mon discours. »
Le vieil homme frotta son crâne luisant avant de reprendre :
« Par delà les montagnes blanches de neige demeure un mal qui t’est encore inconnu. »
Le jeune garçon se cachait la moitié du visage sous sa couverture.
« Au fin fond des cavernes de glace, dans le froid et la tempête, sommeille une engeance que tes valeureux ancêtres ont chassé de notre belle terre il y a maintenant plus de mille ans. Ces êtres détestables, violents et sans foi se faisaient appeler les Kalgars. Comprend bien, mon jeune ami, qu’il était bien prétentieux de leur part de s’appeler autrement que par des noms de bêtes… Pendant des années une guerre fît rage entre les valeureux hommes et les Kalgars. Ces derniers furent chassés par delà les montagnes du Nord, d’où ils ne revinrent jamais. Personne ne sait vraiment s’ils existent encore aujourd’hui… Mais fait-moi confiance, des monstres pareils n’ont pas pu disparaître. Imagine-toi des êtres grands comme des arbres, à la peau bleue glacée et à la fourrure blanche tâchée du sang de leurs victimes. Leurs dents pointues et acérées mâchaient de la chair humaine comme nous mangeons les fruits de nos terres. Ils vivent de violence et de peur, s’entretuant, guidés par leur instinct destructeur.
-Mais ils n’existent plus, n’est-ce-pas ? interrogea le jeune garçon.
-Petit. Ne sous-estime pas ces créatures des glaces. Je les entends. Leurs pas brisent les plaques gelées du Nord, ils sortent des ténèbres et se dirigent vers notre terre. Bientôt ils seront de retour pour assouvir leur soif de sang. »
L’enfant étouffa quelques sanglots pendant que le vieil homme souriait discrètement.
« Ne pleurs pas, reprit ce dernier. Tu n’as pas à les craindre. Sais-tu pourquoi ? »
L’enfant ne répondit pas.
« Car tu es plus fort qu’eux ! Car toi, tu crois en la toute puissance de notre père Artus. Il veille sur nous et sa chaleur a chassé les Kalgars il y a mille ans, et les chassera de nouveau lorsqu’ils reviendront. Car leurs dents acérés ne peuvent rien contre la lumière du sauveur des hommes. »
L’enfant sourit, il était apaisé. Dehors, la nuit devint de plus en plus noir, jusqu’à engloutir la petite maison, le village de Brimbagole, le pays d’Ostria tout entier.
Il me paraît important, chers lecteurs, de vous parler plus en profondeur de la géographie des terres des hommes, afin que vous compreniez exactement de quoi parle notre vieil homme.
Le pays d’Ostria se situait au centre de toutes les autres terres, d’après les dires des habitants du moins. Il était également le plus vaste de l’empire des hommes. A l’ouest s’étendait le pays côtier de Man. A l’est d’Ostria, jouxtant les montagnes noires, le pays de Trace.
Ostria était une terre fertile, composé de grandes plaines verdoyantes et de forêts profondes. Il n’y avait guère de grande ville en Ostria, mais surtout de petits villages parsemant le territoire. Le village-forteresse de Navag dominait le pays. Certaines régions étaient plus ou moins peuplées, et certaines, trop boisées, n’étaient pas du tout habitées. Le roi Ostria III régnait sur cette contrée. Il est de coutume dans la culture des hommes de choisir comme nom de pays le nom du Roi.
Le pays de Man, moins grand qu’Ostria, faisait face à l’océan occidental. C’était une région moins boisée et plus rocailleuse que son voisin de l’est. Elle était également plus chaude. Dirigée par Man II, cette contrée accueillait de nombreux étrangers, de fait de sa proximité avec la mer.
Enfin, acculé aux montagnes noires s’étendait le pays de Trace, le pays des rocs et des lacs, dirigé d’une main de fer par le roi Trace Ier, considéré par ses semblables comme l’usurpateur du trône de la contrée. Le climat y était très froid, et plus on s’approchait des montagnes, plus il était sec.
Ces trois pays s’alliaient sous la même bannière religieuse, vénérant Artus le Dieu protecteur des hommes, formant un empire puissant.
Et au nord de cet immense empire, comme notre vieil ami l’a précisé à son petit-fils, une immense chaîne montagneuse infranchissable s’élève, connue comme les Montagnes Blanches, du fait de la neige perpétuelle qui recouvrent les massifs et les profondes forêts ténébreuses de cette contrée inhospitalière. Aucun explorateur ne s’est aventuré assez profondément dans ces montagnes pour en distinguer la présence d’une vie civilisée. Seule demeure dans l’esprit des hommes la légende des Kalgars, repoussés il y a plus d’un millénaire dans cette immense chaîne par les armées des hommes.
A l’est de l’empire des hommes, les montagnes noires s’élèvent. Cet amas de rocs vieux comme Artus font office de frontière naturelle avec d’autres régions dont nous aurons le loisir de parler plus tard. Les immenses territoires humains s’étendent ainsi vers le Sud jusqu’à la mer méridionale, palissade de tourbillons infranchissables et de tempêtes déchaînées. Les navires n’ont jamais tenté de la traverser. C’est pourquoi la seule raison pour laquelle les hommes la considère comme une mer et non pas comme un océan est le respect accordé à l’écrit d’un vieil auteur affirmant avoir vu des rivages de l’autre côté de la mer lors d’une expédition.
Autant dire que l’empire des hommes vit replié sur lui-même depuis bien longtemps maintenant. Les fiers soldats de la guerre contre les Kalgars n’ont désormais pour descendance que des paysans empâtés et des seigneurs mondains. Les explorateurs et aventuriers sont rares. Les hommes se disputent leurs richesses, leurs trônes, leurs femmes et leurs filles, et ne se préoccupent plus guère du monde extérieur. C’est dans cette période de décadence que prend place notre récit.
Chapitre I : du passé et des mythes
Au cœur du royaume d’Ostria s’élevait, au milieu d’une immense plaine parsemée de fermes et de champs, s’élevait le village-forteresse de Navag, considéré comme la plus grande ville du pays. De ce fait le roi y vivait, les décisions y étaient prises, l’essentiel du pouvoir y résidait. C’était donc le foyer du prince Rodia, héritier du trône d’Ostria.
En cette soirée extrêmement fraîche, le prince s’entretenait avec son professeur, dans sa chambre du bastion royale. Elle était située en haut d’une tour de bois à proximité des appartements royaux. Car Navag était en effet une ville bâtie en hauteur, et on pouvait l’apercevoir au loin dès lors que l’on entrait dans la plaine qui l’environnait.
Le professeur du prince Rodia, un dénommé Céron, discutait avec lui d’histoire. En observant par sa fenêtre les immenses plaines, le prince écoutait avec attention, car l’histoire était bel et bien ce qui l’intéressait le plus. Il laissait les sciences et les médecines aux charlatans et aux explorateurs.
« Savez-vous donc comment notre ville fût construite ? l’interrogea Céron.
-Sur une butte perdue au milieu des plaines dorées, la cité de Navag fût érigée. On me l’a si souvent répété, Céron. D’ailleurs, le terme doré me paraît de trop dans ces vers. Voyez ce ciel gris et ces routes boueuses. Ces champs inondés par la misère de notre peuple. Vraiment, Céron, je trouve ces vers idiots.
-Ces vers m’inspirent les mêmes sentiments que vous, prince. Mais je me dois de vous avertir que vous avez faux. La butte sur laquelle nous sommes, sur laquelle la grandiose cité fût bâtie, n’est autre que l’œuvre des hommes. Les anciens écrits racontent que les hommes, entrant dans ces plaines, voulaient voir venir le danger. Ils firent bâtir une butte de terre et de rocs, sur laquelle ils bâtirent la ville.
-Comment bâtir une butte, Céron ? Voilà encore des idioties historiques. Vous pensez vraiment que des hommes sauraient porter des rocs ? Trêve de plaisanteries. Si vous avez décidé de batifoler dans les légendes du passé, je préfère encore mettre un terme à ce cours et aller directement voir mon père. Depuis ce matin il me convoque, et je n’ai pas pris le temps d’aller le voir.
-Vous devriez peut-être y songer, en effet. Votre père n’est pas un homme patient. »
Le prince Rodia commença à se couvrir. Le bastion était froid et humide, ces temps-ci. Arpenter les couloirs et les escaliers était une véritable épreuve.
Le prince salua son professeur et se dirigea vers les escaliers.
Dans la grande salle du conseil, le roi Ostria III s’entretenait avec ses suppléants sur les différentes réclamations paysannes. Lorsque le prince entra, il ne cacha pas son mécontentement.
« Vous voilà enfin, mon fils ! J’ai tendance à croire que vous négligez les affaires politiques aux profits de vos petits récits ! Je ne puis souffrir un fils paresseux, Rodia. Lorsque je vous convoque, vous devez venir me voir, sans attendre, tonna le Roi.
-Excusez mon retard, père. Je m’entretenais avec Céron, répondit timidement le prince.
-Céron ! Et où est-il, encore, celui-là ? J’ai besoin de lui, moi aussi. Lui aussi semble négliger ses devoirs. Mais qu’il néglige, qu’il néglige ! Et bientôt, c’est moi qui négligerai sa place au conseil ! »
En réalité, la colère faisait parler le Roi. Car celui-ci entretenait pour Céron un véritable respect, voir même de l’admiration. Ce que, soit dit en passant, le prince Rodia ne comprenait pas du tout, vis-à-vis d’un simple érudit parmi tant d’autres.
Le Roi fît envoyer un serviteur appeler Céron l’érudit, et invita son fils à s’asseoir à la table du conseil.
Il donna sèchement la parole à son fils, l’invitant à s’exprimer sur les réclamations paysannes, lesquelles étaient totalement inconnues au prince pris au dépourvu. Il tenta de vaines réponses :
« Ma foi, les réclamations. Je ne saurai dire si, étant Roi, j’y répondrais vraiment. Mais encore, je ne saurais m’exprimer surement sur cette retenue. Je ne sais, ma foi, qu’avouer que la question semble plus compliquée que prévue, et…
-Et vous n’en savez rien, prince, coupa sèchement son père. En vérité, vous n’en avez que faire. Alors vous les trouver laides, nos plaines d’or. Vous fustigez nos anciens vers, mais vous n’avez aucune idée des causes qui font de notre royaume ce qu’il est aujourd’hui ! Cela ne vous intéresse pas, non.
Voyez, membres du conseil, le fils que m’a apporté la providence d’Artus. Un lyrique désintéressé ! Je ne veux pas de toi comme un érudit, Rodia. Il y en a bien assez qui parcourent déjà le château. Je veux un fils politique, d’action, qui s’engage envers son royaume. »
Le visage du Roi passa de la colère à ce qui semblait une sorte de tristesse. Il reprit, plus calmement :
« Tu ne t’intéressera donc pas au sort de ton peuple, Rodia ? »
Le prince ne savait que répondre. Il était conscient qu’il fuyait ses devoirs princiers. Il n’assistait qu’à quelques séances du conseil que par obligation, et parce que Céron l’y obligeait. Il ne se tenait pas informé des lois, des rumeurs, des changements. Il ne s’intéressait qu’au passé. Et il savait bien que cela blessait et irritait son père.
Les conseillers baissaient la tête, ou faisaient mine de regarder dans le vague. Rodia, lui, fixait son père d’un regard empreint d’humilité.
Enfin le Roi se calma vraiment. Il regarda ses mains en les frottant doucement. Puis Céron entra dans la pièce. Le roi sembla s’illuminer :
« Vous voilà enfin, Céron ! Nous vous attendions. »
Alors Céron, lentement, pris place autour de la table. Un des conseillers, après avoir éclairci sa gorge, pris la parole :
« Voilà. Toutes les personnes désignées sont présentes. Nous pouvons entamer la discussion concernant l’expédition royale. »
Le prince souleva les sourcils. Qu’est ce que ce vieil homme entendait par expédition royale ?
On donna la parole au Roi :
« Conseillers, comme vous le savez, depuis longtemps maintenant Trace l’usurpateur est maître du territoire de l’est. Il a chassé l’ancien roi Ovide. Je rappelle, pour ceux qui n’en ont peut-être pas pris connaissance, lança le roi en direction de son fils, que Trace premier n’est autre que le fils de l’ancien conseiller royal déchu du pays d’Ovide. Celui-là même, qui, trop enclin à enclencher une guerre avec notre peuple, a été destitué de son rang par le roi Ovide.
Vous tous, autour de cette table, avez eu le même pressentiment que moi. Comme moi, vous pensez que notre époque est troublée. Le roi Trace aura probablement comme souhait de respecter les anciens idéaux de son père. Nous devons envisager sérieusement une guerre avec notre voisin de l’est. C’est pourquoi, les membres du conseil et moi-même avons tous décidé qu’une expédition sera constituée pour prévenir la menace. L’expédition sera chargée de se rendre en territoire Trace, et d’espionner les agissements du souverain non-légitime afin d’en prévenir les hostilités. De ce fait, nous pourrons organiser la défense efficacement. Conseiller Sagnu, je vous laisse la parole concernant l’organisation de l’expédition. »
Le prince n’en revenait pas. La perspective d’une guerre lui avait fait l’effet d’un coup de masse dans le ventre. Il lançait quelques regards interrogateur à Céron, qui jamais ne lui répondait, fixant le vide en silence. Le conseiller Sagnu prit la parole :
« L’expédition aura sept jours pour se préparer. Au terme de ce délai, elle fera route vers Atoukorv, où elle pourra se reposer quelque temps, avant de repartir pour entrer en territoire étranger, et atteindre le plus vite possible la ville Trace de Ramos. De Ramos, elle pourra se diriger vers la cité royale de Lieb, où sa mission de reconnaissance commencera vraiment. Conseiller Natus, à vous la parole. »
Le prince s’agitait sur son fauteuil. Il avait un mauvais pressentiment. Les conseillers évitaient étrangement son regard, comme s’ils le fuyaient, comme s’ils avaient quelque chose à se reprocher. Natus reprit la parole :
«Inutile de préciser que l’expédition ne sera pas sans danger. La nature est dangereuse, inhospitalière. De ce fait, le conseil a porté une attention toute particulière sur la composition de l’expédition. Les membres ne devront pas être trop nombreux, et suffisamment compétents pour mener à bien cette mission cruciale. Ainsi les membres participant à l’expédition seront les suivants : l’érudit ci-présent Céron… » Le conseiller sembla trouver de la peine à lire les noms.
Le prince s’indignait intérieurement. Qui s’occuperait de ses cours ? La vie au bastion lui était d’un ennui total sans son professeur. Le conseiller reprit, après avoir méticuleusement examiné ses fiches :
« Accompagneront l’érudit Céron : l’explorateur Talion, le soldat Damren, et, enfin… »
Le conseiller avala bruyamment sa salive, et, relevant lentement un regard emplit de compassion, il ajouta :
« Le prince ci-présent Rodia. »
Ce dernier devint pâle comme la lune. Ce n’était pas la colère qui l’habitait, mais une peur inexorable. Ses mains tremblaient face à ce tournant soudain de sa vie. Le Roi prit précipitamment la parole :
« La séance est levée ! »
Les conseillers se levèrent bruyamment, des groupes entrèrent en vives discussions, seul le prince resta assis, bouche-bée, jusqu’à ce que Céron l’attrapa par le col pour le conduire jusqu’à sa chambre.
Je poste ici un texte qui se veut merveilleux, dans la lignée de la littérature héritière de Tolkien. Je ne maîtrise pas vraiment ce registre, mais j'avais envie de m'y essayer. C'est donc le premier chapitre que je poste en premier, précédé d'une sorte d'incipit.
N'hésitez pas à critiquer, parce que je n'ai vraiment aucune idée de la qualité de ce que j'ai écrit.
Avant-propos
« Ecoute-moi, mon petit. Ecoute-moi calmement, et tâche de trouver le sommeil durant mon discours. »
Le vieil homme frotta son crâne luisant avant de reprendre :
« Par delà les montagnes blanches de neige demeure un mal qui t’est encore inconnu. »
Le jeune garçon se cachait la moitié du visage sous sa couverture.
« Au fin fond des cavernes de glace, dans le froid et la tempête, sommeille une engeance que tes valeureux ancêtres ont chassé de notre belle terre il y a maintenant plus de mille ans. Ces êtres détestables, violents et sans foi se faisaient appeler les Kalgars. Comprend bien, mon jeune ami, qu’il était bien prétentieux de leur part de s’appeler autrement que par des noms de bêtes… Pendant des années une guerre fît rage entre les valeureux hommes et les Kalgars. Ces derniers furent chassés par delà les montagnes du Nord, d’où ils ne revinrent jamais. Personne ne sait vraiment s’ils existent encore aujourd’hui… Mais fait-moi confiance, des monstres pareils n’ont pas pu disparaître. Imagine-toi des êtres grands comme des arbres, à la peau bleue glacée et à la fourrure blanche tâchée du sang de leurs victimes. Leurs dents pointues et acérées mâchaient de la chair humaine comme nous mangeons les fruits de nos terres. Ils vivent de violence et de peur, s’entretuant, guidés par leur instinct destructeur.
-Mais ils n’existent plus, n’est-ce-pas ? interrogea le jeune garçon.
-Petit. Ne sous-estime pas ces créatures des glaces. Je les entends. Leurs pas brisent les plaques gelées du Nord, ils sortent des ténèbres et se dirigent vers notre terre. Bientôt ils seront de retour pour assouvir leur soif de sang. »
L’enfant étouffa quelques sanglots pendant que le vieil homme souriait discrètement.
« Ne pleurs pas, reprit ce dernier. Tu n’as pas à les craindre. Sais-tu pourquoi ? »
L’enfant ne répondit pas.
« Car tu es plus fort qu’eux ! Car toi, tu crois en la toute puissance de notre père Artus. Il veille sur nous et sa chaleur a chassé les Kalgars il y a mille ans, et les chassera de nouveau lorsqu’ils reviendront. Car leurs dents acérés ne peuvent rien contre la lumière du sauveur des hommes. »
L’enfant sourit, il était apaisé. Dehors, la nuit devint de plus en plus noir, jusqu’à engloutir la petite maison, le village de Brimbagole, le pays d’Ostria tout entier.
Il me paraît important, chers lecteurs, de vous parler plus en profondeur de la géographie des terres des hommes, afin que vous compreniez exactement de quoi parle notre vieil homme.
Le pays d’Ostria se situait au centre de toutes les autres terres, d’après les dires des habitants du moins. Il était également le plus vaste de l’empire des hommes. A l’ouest s’étendait le pays côtier de Man. A l’est d’Ostria, jouxtant les montagnes noires, le pays de Trace.
Ostria était une terre fertile, composé de grandes plaines verdoyantes et de forêts profondes. Il n’y avait guère de grande ville en Ostria, mais surtout de petits villages parsemant le territoire. Le village-forteresse de Navag dominait le pays. Certaines régions étaient plus ou moins peuplées, et certaines, trop boisées, n’étaient pas du tout habitées. Le roi Ostria III régnait sur cette contrée. Il est de coutume dans la culture des hommes de choisir comme nom de pays le nom du Roi.
Le pays de Man, moins grand qu’Ostria, faisait face à l’océan occidental. C’était une région moins boisée et plus rocailleuse que son voisin de l’est. Elle était également plus chaude. Dirigée par Man II, cette contrée accueillait de nombreux étrangers, de fait de sa proximité avec la mer.
Enfin, acculé aux montagnes noires s’étendait le pays de Trace, le pays des rocs et des lacs, dirigé d’une main de fer par le roi Trace Ier, considéré par ses semblables comme l’usurpateur du trône de la contrée. Le climat y était très froid, et plus on s’approchait des montagnes, plus il était sec.
Ces trois pays s’alliaient sous la même bannière religieuse, vénérant Artus le Dieu protecteur des hommes, formant un empire puissant.
Et au nord de cet immense empire, comme notre vieil ami l’a précisé à son petit-fils, une immense chaîne montagneuse infranchissable s’élève, connue comme les Montagnes Blanches, du fait de la neige perpétuelle qui recouvrent les massifs et les profondes forêts ténébreuses de cette contrée inhospitalière. Aucun explorateur ne s’est aventuré assez profondément dans ces montagnes pour en distinguer la présence d’une vie civilisée. Seule demeure dans l’esprit des hommes la légende des Kalgars, repoussés il y a plus d’un millénaire dans cette immense chaîne par les armées des hommes.
A l’est de l’empire des hommes, les montagnes noires s’élèvent. Cet amas de rocs vieux comme Artus font office de frontière naturelle avec d’autres régions dont nous aurons le loisir de parler plus tard. Les immenses territoires humains s’étendent ainsi vers le Sud jusqu’à la mer méridionale, palissade de tourbillons infranchissables et de tempêtes déchaînées. Les navires n’ont jamais tenté de la traverser. C’est pourquoi la seule raison pour laquelle les hommes la considère comme une mer et non pas comme un océan est le respect accordé à l’écrit d’un vieil auteur affirmant avoir vu des rivages de l’autre côté de la mer lors d’une expédition.
Autant dire que l’empire des hommes vit replié sur lui-même depuis bien longtemps maintenant. Les fiers soldats de la guerre contre les Kalgars n’ont désormais pour descendance que des paysans empâtés et des seigneurs mondains. Les explorateurs et aventuriers sont rares. Les hommes se disputent leurs richesses, leurs trônes, leurs femmes et leurs filles, et ne se préoccupent plus guère du monde extérieur. C’est dans cette période de décadence que prend place notre récit.
Chapitre I : du passé et des mythes
Au cœur du royaume d’Ostria s’élevait, au milieu d’une immense plaine parsemée de fermes et de champs, s’élevait le village-forteresse de Navag, considéré comme la plus grande ville du pays. De ce fait le roi y vivait, les décisions y étaient prises, l’essentiel du pouvoir y résidait. C’était donc le foyer du prince Rodia, héritier du trône d’Ostria.
En cette soirée extrêmement fraîche, le prince s’entretenait avec son professeur, dans sa chambre du bastion royale. Elle était située en haut d’une tour de bois à proximité des appartements royaux. Car Navag était en effet une ville bâtie en hauteur, et on pouvait l’apercevoir au loin dès lors que l’on entrait dans la plaine qui l’environnait.
Le professeur du prince Rodia, un dénommé Céron, discutait avec lui d’histoire. En observant par sa fenêtre les immenses plaines, le prince écoutait avec attention, car l’histoire était bel et bien ce qui l’intéressait le plus. Il laissait les sciences et les médecines aux charlatans et aux explorateurs.
« Savez-vous donc comment notre ville fût construite ? l’interrogea Céron.
-Sur une butte perdue au milieu des plaines dorées, la cité de Navag fût érigée. On me l’a si souvent répété, Céron. D’ailleurs, le terme doré me paraît de trop dans ces vers. Voyez ce ciel gris et ces routes boueuses. Ces champs inondés par la misère de notre peuple. Vraiment, Céron, je trouve ces vers idiots.
-Ces vers m’inspirent les mêmes sentiments que vous, prince. Mais je me dois de vous avertir que vous avez faux. La butte sur laquelle nous sommes, sur laquelle la grandiose cité fût bâtie, n’est autre que l’œuvre des hommes. Les anciens écrits racontent que les hommes, entrant dans ces plaines, voulaient voir venir le danger. Ils firent bâtir une butte de terre et de rocs, sur laquelle ils bâtirent la ville.
-Comment bâtir une butte, Céron ? Voilà encore des idioties historiques. Vous pensez vraiment que des hommes sauraient porter des rocs ? Trêve de plaisanteries. Si vous avez décidé de batifoler dans les légendes du passé, je préfère encore mettre un terme à ce cours et aller directement voir mon père. Depuis ce matin il me convoque, et je n’ai pas pris le temps d’aller le voir.
-Vous devriez peut-être y songer, en effet. Votre père n’est pas un homme patient. »
Le prince Rodia commença à se couvrir. Le bastion était froid et humide, ces temps-ci. Arpenter les couloirs et les escaliers était une véritable épreuve.
Le prince salua son professeur et se dirigea vers les escaliers.
Dans la grande salle du conseil, le roi Ostria III s’entretenait avec ses suppléants sur les différentes réclamations paysannes. Lorsque le prince entra, il ne cacha pas son mécontentement.
« Vous voilà enfin, mon fils ! J’ai tendance à croire que vous négligez les affaires politiques aux profits de vos petits récits ! Je ne puis souffrir un fils paresseux, Rodia. Lorsque je vous convoque, vous devez venir me voir, sans attendre, tonna le Roi.
-Excusez mon retard, père. Je m’entretenais avec Céron, répondit timidement le prince.
-Céron ! Et où est-il, encore, celui-là ? J’ai besoin de lui, moi aussi. Lui aussi semble négliger ses devoirs. Mais qu’il néglige, qu’il néglige ! Et bientôt, c’est moi qui négligerai sa place au conseil ! »
En réalité, la colère faisait parler le Roi. Car celui-ci entretenait pour Céron un véritable respect, voir même de l’admiration. Ce que, soit dit en passant, le prince Rodia ne comprenait pas du tout, vis-à-vis d’un simple érudit parmi tant d’autres.
Le Roi fît envoyer un serviteur appeler Céron l’érudit, et invita son fils à s’asseoir à la table du conseil.
Il donna sèchement la parole à son fils, l’invitant à s’exprimer sur les réclamations paysannes, lesquelles étaient totalement inconnues au prince pris au dépourvu. Il tenta de vaines réponses :
« Ma foi, les réclamations. Je ne saurai dire si, étant Roi, j’y répondrais vraiment. Mais encore, je ne saurais m’exprimer surement sur cette retenue. Je ne sais, ma foi, qu’avouer que la question semble plus compliquée que prévue, et…
-Et vous n’en savez rien, prince, coupa sèchement son père. En vérité, vous n’en avez que faire. Alors vous les trouver laides, nos plaines d’or. Vous fustigez nos anciens vers, mais vous n’avez aucune idée des causes qui font de notre royaume ce qu’il est aujourd’hui ! Cela ne vous intéresse pas, non.
Voyez, membres du conseil, le fils que m’a apporté la providence d’Artus. Un lyrique désintéressé ! Je ne veux pas de toi comme un érudit, Rodia. Il y en a bien assez qui parcourent déjà le château. Je veux un fils politique, d’action, qui s’engage envers son royaume. »
Le visage du Roi passa de la colère à ce qui semblait une sorte de tristesse. Il reprit, plus calmement :
« Tu ne t’intéressera donc pas au sort de ton peuple, Rodia ? »
Le prince ne savait que répondre. Il était conscient qu’il fuyait ses devoirs princiers. Il n’assistait qu’à quelques séances du conseil que par obligation, et parce que Céron l’y obligeait. Il ne se tenait pas informé des lois, des rumeurs, des changements. Il ne s’intéressait qu’au passé. Et il savait bien que cela blessait et irritait son père.
Les conseillers baissaient la tête, ou faisaient mine de regarder dans le vague. Rodia, lui, fixait son père d’un regard empreint d’humilité.
Enfin le Roi se calma vraiment. Il regarda ses mains en les frottant doucement. Puis Céron entra dans la pièce. Le roi sembla s’illuminer :
« Vous voilà enfin, Céron ! Nous vous attendions. »
Alors Céron, lentement, pris place autour de la table. Un des conseillers, après avoir éclairci sa gorge, pris la parole :
« Voilà. Toutes les personnes désignées sont présentes. Nous pouvons entamer la discussion concernant l’expédition royale. »
Le prince souleva les sourcils. Qu’est ce que ce vieil homme entendait par expédition royale ?
On donna la parole au Roi :
« Conseillers, comme vous le savez, depuis longtemps maintenant Trace l’usurpateur est maître du territoire de l’est. Il a chassé l’ancien roi Ovide. Je rappelle, pour ceux qui n’en ont peut-être pas pris connaissance, lança le roi en direction de son fils, que Trace premier n’est autre que le fils de l’ancien conseiller royal déchu du pays d’Ovide. Celui-là même, qui, trop enclin à enclencher une guerre avec notre peuple, a été destitué de son rang par le roi Ovide.
Vous tous, autour de cette table, avez eu le même pressentiment que moi. Comme moi, vous pensez que notre époque est troublée. Le roi Trace aura probablement comme souhait de respecter les anciens idéaux de son père. Nous devons envisager sérieusement une guerre avec notre voisin de l’est. C’est pourquoi, les membres du conseil et moi-même avons tous décidé qu’une expédition sera constituée pour prévenir la menace. L’expédition sera chargée de se rendre en territoire Trace, et d’espionner les agissements du souverain non-légitime afin d’en prévenir les hostilités. De ce fait, nous pourrons organiser la défense efficacement. Conseiller Sagnu, je vous laisse la parole concernant l’organisation de l’expédition. »
Le prince n’en revenait pas. La perspective d’une guerre lui avait fait l’effet d’un coup de masse dans le ventre. Il lançait quelques regards interrogateur à Céron, qui jamais ne lui répondait, fixant le vide en silence. Le conseiller Sagnu prit la parole :
« L’expédition aura sept jours pour se préparer. Au terme de ce délai, elle fera route vers Atoukorv, où elle pourra se reposer quelque temps, avant de repartir pour entrer en territoire étranger, et atteindre le plus vite possible la ville Trace de Ramos. De Ramos, elle pourra se diriger vers la cité royale de Lieb, où sa mission de reconnaissance commencera vraiment. Conseiller Natus, à vous la parole. »
Le prince s’agitait sur son fauteuil. Il avait un mauvais pressentiment. Les conseillers évitaient étrangement son regard, comme s’ils le fuyaient, comme s’ils avaient quelque chose à se reprocher. Natus reprit la parole :
«Inutile de préciser que l’expédition ne sera pas sans danger. La nature est dangereuse, inhospitalière. De ce fait, le conseil a porté une attention toute particulière sur la composition de l’expédition. Les membres ne devront pas être trop nombreux, et suffisamment compétents pour mener à bien cette mission cruciale. Ainsi les membres participant à l’expédition seront les suivants : l’érudit ci-présent Céron… » Le conseiller sembla trouver de la peine à lire les noms.
Le prince s’indignait intérieurement. Qui s’occuperait de ses cours ? La vie au bastion lui était d’un ennui total sans son professeur. Le conseiller reprit, après avoir méticuleusement examiné ses fiches :
« Accompagneront l’érudit Céron : l’explorateur Talion, le soldat Damren, et, enfin… »
Le conseiller avala bruyamment sa salive, et, relevant lentement un regard emplit de compassion, il ajouta :
« Le prince ci-présent Rodia. »
Ce dernier devint pâle comme la lune. Ce n’était pas la colère qui l’habitait, mais une peur inexorable. Ses mains tremblaient face à ce tournant soudain de sa vie. Le Roi prit précipitamment la parole :
« La séance est levée ! »
Les conseillers se levèrent bruyamment, des groupes entrèrent en vives discussions, seul le prince resta assis, bouche-bée, jusqu’à ce que Céron l’attrapa par le col pour le conduire jusqu’à sa chambre.
Sergei- Nombre de messages : 315
Age : 109
Date d'inscription : 22/09/2008
Re: Un essai sur du merveilleux
Eh bien soit rassuré, ce n'est pas mauvais !
J'aime notamment beaucoup tes dialogues (et tes petits intermèdes descriptifs), quoique la ponctuation y fasse parfois défaut... Tout cela est vivant, sans être nouveau, ça "passe bien". Dommage cependant qu'il n'y ait pas plus de description, mais les sentiments et les attitudes des personnages me semblent bien retranscrites.
Une remarque cependant sur ton "incipit" : le fait de mettre une scène de la vie quotidienne plongeant dans le monde imaginaire, suivie immédiatement d'explications faites au lecteur par l'auteur... cela rappelle un peu, voire trop, l'incipit d'un Jeu de Rôle.
Dans un roman, je verrais toutes ces explications dissoutes dans le récit, plutôt que accumulées ainsi au début... En cela, l'incipit est un peu maladroit, même si bien raconté.
Je dois avouer que je ne suis pas du tout pour l'adresse au lecteur dans le roman de fantasy, qui donne immédiatement, je trouve, une coloration "décalée" au texte. Si tu veux donner des précisions, fais-le plutôt dans une préface, où l'auteur est clairement différent du narrateur... il me semble que c'est justement ce qu'à fait Tolkien dans le Seigneur de Anneaux, concernant les Hobbits...
Pour la forme, il faut je crois, que tu choisissent entre le tiret et le guillemet, tiret qui se suffit d'ailleurs à lui-même, et doit être un cadratin : — et non un tiret normal : -
Pour savoir comment l'utiliser, ouvre un bouquin de fantasy actuelle, en général c'est simplement présenté ainsi :
— Gnagnagna, dit X
— Screunieunieu, répond Y
— Gnagnagna, rétorque X, et gnagnagna...
» Et gnagnagna. (le » permet d'aérer un monologue, de montrer que X change d'idée)
Bon courage pour la rédaction de la suite !
J'aime notamment beaucoup tes dialogues (et tes petits intermèdes descriptifs), quoique la ponctuation y fasse parfois défaut... Tout cela est vivant, sans être nouveau, ça "passe bien". Dommage cependant qu'il n'y ait pas plus de description, mais les sentiments et les attitudes des personnages me semblent bien retranscrites.
Une remarque cependant sur ton "incipit" : le fait de mettre une scène de la vie quotidienne plongeant dans le monde imaginaire, suivie immédiatement d'explications faites au lecteur par l'auteur... cela rappelle un peu, voire trop, l'incipit d'un Jeu de Rôle.
Dans un roman, je verrais toutes ces explications dissoutes dans le récit, plutôt que accumulées ainsi au début... En cela, l'incipit est un peu maladroit, même si bien raconté.
Je dois avouer que je ne suis pas du tout pour l'adresse au lecteur dans le roman de fantasy, qui donne immédiatement, je trouve, une coloration "décalée" au texte. Si tu veux donner des précisions, fais-le plutôt dans une préface, où l'auteur est clairement différent du narrateur... il me semble que c'est justement ce qu'à fait Tolkien dans le Seigneur de Anneaux, concernant les Hobbits...
Pour la forme, il faut je crois, que tu choisissent entre le tiret et le guillemet, tiret qui se suffit d'ailleurs à lui-même, et doit être un cadratin : — et non un tiret normal : -
Pour savoir comment l'utiliser, ouvre un bouquin de fantasy actuelle, en général c'est simplement présenté ainsi :
— Gnagnagna, dit X
— Screunieunieu, répond Y
— Gnagnagna, rétorque X, et gnagnagna...
» Et gnagnagna. (le » permet d'aérer un monologue, de montrer que X change d'idée)
Bon courage pour la rédaction de la suite !
Loreena Ruin- Nombre de messages : 1071
Age : 35
Localisation : Nancy
Date d'inscription : 05/10/2008
Re: Un essai sur du merveilleux
Alors, je suis assez mauvais public pour la fantasy, et décroche plus rapidement qu'un lecteur lambda du genre. Cela m'est arrivé sur votre texte au moment où vous vous êtes mis à décrire la géographie du coin (surtout en la précédant d'une adresse au lecteur, procédé qui a tendance à m'agacer). D'une manière générale, ce genre d'exposé, je trouve, rend vite le texte ennuyeux, il est préférable de distiller à mesure de l'action les données que vous voulez faire connaître.
Sinon, ce que j'ai lu de l'avant-propos était effectivement intéressant, avec une solennité qui me plaisait. J'y ai relevé quelques fautes de langue, et notamment (c'est mon dada) :
"la fourrure blanche tachée du sang de leurs victimes." (et non "tâchée" : une tache est une souillure, une tâche un travail à faire).
Sinon, ce que j'ai lu de l'avant-propos était effectivement intéressant, avec une solennité qui me plaisait. J'y ai relevé quelques fautes de langue, et notamment (c'est mon dada) :
"la fourrure blanche tachée du sang de leurs victimes." (et non "tâchée" : une tache est une souillure, une tâche un travail à faire).
Invité- Invité
Re: Un essai sur du merveilleux
Je suis offensée Socque ! :-)un lecteur lambda du genre
Loreena Ruin- Nombre de messages : 1071
Age : 35
Localisation : Nancy
Date d'inscription : 05/10/2008
Re: Un essai sur du merveilleux
Pardon, je voulais dire : un lecteur habituel de ce genre littéraire. Il n'y avait aucune intention péjorative dans ce que je disais, je suis moi-même une "lectrice lambda" de science-fiction... Toutes mes excuses.
Invité- Invité
Re: Un essai sur du merveilleux
Pas de soucis ! ;-) Je prend vite la mouche...
Loreena Ruin- Nombre de messages : 1071
Age : 35
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Date d'inscription : 05/10/2008
Re: Un essai sur du merveilleux
Merci beaucoup pour vos remarques. C'est vrai que ça me paraît plus intéressant de distiller les informations comme vous le dîtes si bien. Parce qu'en me relisant, ça paraît un peu "balancé". Je vais m'y essayer.
Il y a juste quelque chose que j'ai mal compris Loreena, désolé ^^
Quand tu parles des tirets et des guillemets, en fait c'est soit l'un soit l'autre? Si je met des guillemets je ne dois pas mettre de tirets c'est ça?
Et juste une dernière question, comment tape-t-on un quadratin sur un clavier d'ordinateur? :-D
Il y a juste quelque chose que j'ai mal compris Loreena, désolé ^^
Quand tu parles des tirets et des guillemets, en fait c'est soit l'un soit l'autre? Si je met des guillemets je ne dois pas mettre de tirets c'est ça?
Et juste une dernière question, comment tape-t-on un quadratin sur un clavier d'ordinateur? :-D
Sergei- Nombre de messages : 315
Age : 109
Date d'inscription : 22/09/2008
Re: Un essai sur du merveilleux
Alors là tu me poses une colle, à moins que tu ne sois sur mac comme moi... mais normalement sur un PC, tu vas dans "insertion", "caractère spéciaux" et tu tombes sur le cadratin.
Aujourd'hui, l'usage du tiret seul sans guillemet d'introduction est tout à fait banalisé. Mais je parlais de choix parce que, dans ton incipit, tu uses des guillemets et dans la suite, des tirets, ce qui fait un mélange un peu folklorique... en même temps, vu que c'est un incipit, ce n'est pas trop gênant, et j'avoue que les guillemets rendent bien.
Aujourd'hui, l'usage du tiret seul sans guillemet d'introduction est tout à fait banalisé. Mais je parlais de choix parce que, dans ton incipit, tu uses des guillemets et dans la suite, des tirets, ce qui fait un mélange un peu folklorique... en même temps, vu que c'est un incipit, ce n'est pas trop gênant, et j'avoue que les guillemets rendent bien.
Loreena Ruin- Nombre de messages : 1071
Age : 35
Localisation : Nancy
Date d'inscription : 05/10/2008
Re: Un essai sur du merveilleux
Ca me perturbe ce que tu me dit là, Loreena :-D Tu remets en cause mon apprentissage de CE2 !
J'avais toujours cru qu'on commençait le dialogue par la guillemet et qu'on indiquait le changement de locuteur par le tiret.
Mais je retiens, ça ne fait que faciliter les choses ce que tu me dis là :-)
J'avais toujours cru qu'on commençait le dialogue par la guillemet et qu'on indiquait le changement de locuteur par le tiret.
Mais je retiens, ça ne fait que faciliter les choses ce que tu me dis là :-)
Sergei- Nombre de messages : 315
Age : 109
Date d'inscription : 22/09/2008
Re: Un essai sur du merveilleux
Bonsoir à tous.
Voici les trois chapitres suivants, au cas où ça vous intéresserait.
Chapitre 2 : des flammes et de la résignation
Le vieux Céron projeta le jeune homme sur une chaise, sur laquelle ce dernier ne s’assit qu’un instant, avant de se relever en proie à une hystérie totale. Il agitait les bras, voulait articuler quelques mots, les yeux humides et la voix chevrotantes. Il allait de meuble en meuble, ne sachant comment réagir. Il prenait peu à peu conscience de ce qui l’attendait, des dangers qui le guettaient, de la vie de labeur et de souffrance qui le scrutait depuis la terrible révélation. Mais surtout, il comprenait qu’il n’y avait rien à faire. Aller à l’encontre d’une décision du conseil, quelle folie ! Ce serait, malgré son statut de prince, l’exil patriotique ! Finalement il alla s’agripper au manteau de Céron, colonne de pierre froide attendant calmement la tempête passer, avant de s’étaler sur le sol en pleurant.
Céron, lui, se rapprocha de la fenêtre et observa l’horizon embrumée. Enfin le prince mit fin à sa folie, se releva, pria sèchement qu’on l’excuse de cette attitude pitoyable. Mais dès lors qu’il repensait à son voyage futur, ses yeux s’embrumaient encore.
Enfin, Céron se retourna brusquement en tonnant d’une voix forte :
« Suffit, prince ! »
La voix perça les entrailles du garçon qui reprit d’un coup ses esprits, sécha ses larmes, et s’assit sur une chaise. Il murmura pour lui-même :
« Le chien. Voilà ce qui me punira de mon incompétence politique. Il veut m’endurcir, voilà tout. Il veut me mettre à l’épreuve. »
Puis, se relevant, il agrippa Céron pour lui faire face pleinement, et tonna :
« C’est cela, vieil homme ? On envoie les érudits en exil dans les pires contrées de l’empire ? Me voyez-vous, moi, arpentant les rocs des montagnes noires pour une mission de premier ordre ? Me croyez-vous vraiment capable, moi qui n’ait jamais quitté cette chambrette ? Répondez-moi, vieil homme !
-C’est pourquoi l’explorateur Talion nous accompagne, répondit calmement Céron en s’esquivant d’un pas aux étreintes du garçon.
-Et les brigands ? Et les créatures qui rôdent dans la nature, qu’en faîtes-vous ?
-C’est pourquoi le soldat Damren nous accompagne.
-Suffit, vieil homme ! Vous êtes fous ! Tout le monde dans ce bastion est fou à lier ! Nous périrons tous dans les rocs ! Et le pays sera rasé par la guerre ! »
Là-dessus le prince alla s’asseoir sur le bord de son lit. Céron le considéra quelques temps, avant d’aller s’asseoir dans un fauteuil. Il parla, calmement mais fermement :
« C’est la meilleure des écoles, prince. Vous lamenter ne sert à rien. Le passé est derrière vous, le futur vous attend. La nature, les créatures, croiseront votre route. Préparez-vous-y, et ne gémissez pas. Vous ne vous soustrairez pas à cette fatalité. Alors au lieu de vous morfondre, préparez-vous comme il se doit, nous avons sept jours. Talion et Damren font route depuis Rydana, la ville tout au nord du pays. Croyez bien qu’ils connaissant le froid et la rigueur de la nature. Nous serons bien entourés. »
Le prince releva dédaigneusement la tête, et répondit le plus sèchement possible :
« Et vous croyez me rassurer ? »
Là-dessus Céron se leva brusquement et, agrippant le prince par le col, le collant contre le mur avec une force que personne n’aurait pu soupçonner d’un tel vieillard, adressa quelques mots cinglants au prince surpris :
« Un prince n’a pas besoin d’être rassuré, majesté. Un prince fait face aux adversités, et c’est son devoir de rassurer ses troupes, et non pas le contraire. Vous êtes considéré comme le dirigeant de cette expédition. Les deux aventuriers qui arriveront demain de Rydana s’attendent à voir un homme, pas un enfant effrayé. »
Reposant le prince ébahi, il sortit de la chambre, en ajoutant simplement :
« Dans sept jours, vous devez être prêt. Rassemblez le minimum, l’utile. »
Rodia s’affala sur son lit, sans avoir une seule larme de plus à pleurer. Céron avait raison. Mais avant de partir, le prince voulait voir son père, comme si tirer les choses au clair était une obligation au bon déroulement de l’expédition.
Il descendit les escaliers, se dirigeant vers les appartements royaux. Il trouva son père devant son bureau, griffonnant sur de vieux bouts de papiers.
« Père, j’ai à vous parler. »
Sans se détacher de son occupation, ce dernier répondit simplement :
« Parle.
-Je voulais simplement savoir si, oui ou non, vous étiez à l’origine de mon implication dans cette mission.
-Oui, je le suis. »
Là-dessus, un silence s’installa. Rodia ne s’attendait pas à une réponse si honnête de son père. Finalement le Roi se tourna vers son fils, et ajouta :
« Il est temps, Rodia, que tu entres vraiment dans l’histoire humaine que tu chérie tant. Ce n’est pas en restant cloitré dans ta tour que tu deviendras Roi. Il te faut affronter les épreuves de la vie, les plus difficiles s’il le faut. Si tu meurs, Rodia, j’en serai attristé. Je ne t’envoie pas à la mort, mon garçon. Comprend bien que ce n’est pas là mon but. Mais c’est une nécessité, car la mort et la souffrance sont les aléas les plus craints, et un Roi doit s’y attendre sans flancher. Lorsque tu reviendras de ce voyage, car je suis persuadé que tu en reviendras, tu seras vraiment prêt à devenir un chef. »
Il se leva de son fauteuil, et parcourut lentement la chambre en regardant le sol :
« Vois-tu, mon fils, tu penses connaître bien des choses grâce à tes livres. Mais tu en ignores bien d’autres. Tu apprendras à te connaître durant ton périple, mais aussi à connaître des personnes que tu penses déjà connaître.
-Que voulez-vous dire, père ?
-Tu le comprendras bien assez tôt. Sache, mon fils, que cette expédition n’a pas été montée uniquement par moi pour te mettre à l’épreuve. Il s’agit réellement d’une mission cruciale pour notre royaume. Il t’incombe de t’en charger avec toute l’énergie nécessaire. Tes tripes ! ajouta-t-il en pointant son index sur le ventre du prince. Tu ne seras pas seul. J’ai fait venir de Rydana des personnes de confiance. Des habitués de la vie périlleuse.
-Mais, père, reprit Rodia. N’y avait-il pas un autre moyen de me former ? Ne pensez-vous pas qu’il est inconscient de m’envoyer ainsi au devant du danger, sans expérience aucune ?
-Non, en aucun cas. Cette mission, Artus me l’a dit, t’était destinée. Aucune autre ne te portera vers les destinées royales qui t’attendent. Fais-moi confiance, fils. Maintenant, laisse-moi, et va dormir. A partir de demain, il te faudra préparer tes affaires. Et n’ébruite pas toute cette histoire. Qui sait si nos voisins orientaux n’ont pas déjà des espions dans notre sainte cité. »
Le prince, après avoir salué son père, quitta la chambre, pour aller se coucher. En remontant vers sa chambre, il croisa le conseiller Natus, qui lui adressa quelques mots d’encouragement.
L’heure du prince était venue.
Voici les trois chapitres suivants, au cas où ça vous intéresserait.
Chapitre 2 : des flammes et de la résignation
Le vieux Céron projeta le jeune homme sur une chaise, sur laquelle ce dernier ne s’assit qu’un instant, avant de se relever en proie à une hystérie totale. Il agitait les bras, voulait articuler quelques mots, les yeux humides et la voix chevrotantes. Il allait de meuble en meuble, ne sachant comment réagir. Il prenait peu à peu conscience de ce qui l’attendait, des dangers qui le guettaient, de la vie de labeur et de souffrance qui le scrutait depuis la terrible révélation. Mais surtout, il comprenait qu’il n’y avait rien à faire. Aller à l’encontre d’une décision du conseil, quelle folie ! Ce serait, malgré son statut de prince, l’exil patriotique ! Finalement il alla s’agripper au manteau de Céron, colonne de pierre froide attendant calmement la tempête passer, avant de s’étaler sur le sol en pleurant.
Céron, lui, se rapprocha de la fenêtre et observa l’horizon embrumée. Enfin le prince mit fin à sa folie, se releva, pria sèchement qu’on l’excuse de cette attitude pitoyable. Mais dès lors qu’il repensait à son voyage futur, ses yeux s’embrumaient encore.
Enfin, Céron se retourna brusquement en tonnant d’une voix forte :
« Suffit, prince ! »
La voix perça les entrailles du garçon qui reprit d’un coup ses esprits, sécha ses larmes, et s’assit sur une chaise. Il murmura pour lui-même :
« Le chien. Voilà ce qui me punira de mon incompétence politique. Il veut m’endurcir, voilà tout. Il veut me mettre à l’épreuve. »
Puis, se relevant, il agrippa Céron pour lui faire face pleinement, et tonna :
« C’est cela, vieil homme ? On envoie les érudits en exil dans les pires contrées de l’empire ? Me voyez-vous, moi, arpentant les rocs des montagnes noires pour une mission de premier ordre ? Me croyez-vous vraiment capable, moi qui n’ait jamais quitté cette chambrette ? Répondez-moi, vieil homme !
-C’est pourquoi l’explorateur Talion nous accompagne, répondit calmement Céron en s’esquivant d’un pas aux étreintes du garçon.
-Et les brigands ? Et les créatures qui rôdent dans la nature, qu’en faîtes-vous ?
-C’est pourquoi le soldat Damren nous accompagne.
-Suffit, vieil homme ! Vous êtes fous ! Tout le monde dans ce bastion est fou à lier ! Nous périrons tous dans les rocs ! Et le pays sera rasé par la guerre ! »
Là-dessus le prince alla s’asseoir sur le bord de son lit. Céron le considéra quelques temps, avant d’aller s’asseoir dans un fauteuil. Il parla, calmement mais fermement :
« C’est la meilleure des écoles, prince. Vous lamenter ne sert à rien. Le passé est derrière vous, le futur vous attend. La nature, les créatures, croiseront votre route. Préparez-vous-y, et ne gémissez pas. Vous ne vous soustrairez pas à cette fatalité. Alors au lieu de vous morfondre, préparez-vous comme il se doit, nous avons sept jours. Talion et Damren font route depuis Rydana, la ville tout au nord du pays. Croyez bien qu’ils connaissant le froid et la rigueur de la nature. Nous serons bien entourés. »
Le prince releva dédaigneusement la tête, et répondit le plus sèchement possible :
« Et vous croyez me rassurer ? »
Là-dessus Céron se leva brusquement et, agrippant le prince par le col, le collant contre le mur avec une force que personne n’aurait pu soupçonner d’un tel vieillard, adressa quelques mots cinglants au prince surpris :
« Un prince n’a pas besoin d’être rassuré, majesté. Un prince fait face aux adversités, et c’est son devoir de rassurer ses troupes, et non pas le contraire. Vous êtes considéré comme le dirigeant de cette expédition. Les deux aventuriers qui arriveront demain de Rydana s’attendent à voir un homme, pas un enfant effrayé. »
Reposant le prince ébahi, il sortit de la chambre, en ajoutant simplement :
« Dans sept jours, vous devez être prêt. Rassemblez le minimum, l’utile. »
Rodia s’affala sur son lit, sans avoir une seule larme de plus à pleurer. Céron avait raison. Mais avant de partir, le prince voulait voir son père, comme si tirer les choses au clair était une obligation au bon déroulement de l’expédition.
Il descendit les escaliers, se dirigeant vers les appartements royaux. Il trouva son père devant son bureau, griffonnant sur de vieux bouts de papiers.
« Père, j’ai à vous parler. »
Sans se détacher de son occupation, ce dernier répondit simplement :
« Parle.
-Je voulais simplement savoir si, oui ou non, vous étiez à l’origine de mon implication dans cette mission.
-Oui, je le suis. »
Là-dessus, un silence s’installa. Rodia ne s’attendait pas à une réponse si honnête de son père. Finalement le Roi se tourna vers son fils, et ajouta :
« Il est temps, Rodia, que tu entres vraiment dans l’histoire humaine que tu chérie tant. Ce n’est pas en restant cloitré dans ta tour que tu deviendras Roi. Il te faut affronter les épreuves de la vie, les plus difficiles s’il le faut. Si tu meurs, Rodia, j’en serai attristé. Je ne t’envoie pas à la mort, mon garçon. Comprend bien que ce n’est pas là mon but. Mais c’est une nécessité, car la mort et la souffrance sont les aléas les plus craints, et un Roi doit s’y attendre sans flancher. Lorsque tu reviendras de ce voyage, car je suis persuadé que tu en reviendras, tu seras vraiment prêt à devenir un chef. »
Il se leva de son fauteuil, et parcourut lentement la chambre en regardant le sol :
« Vois-tu, mon fils, tu penses connaître bien des choses grâce à tes livres. Mais tu en ignores bien d’autres. Tu apprendras à te connaître durant ton périple, mais aussi à connaître des personnes que tu penses déjà connaître.
-Que voulez-vous dire, père ?
-Tu le comprendras bien assez tôt. Sache, mon fils, que cette expédition n’a pas été montée uniquement par moi pour te mettre à l’épreuve. Il s’agit réellement d’une mission cruciale pour notre royaume. Il t’incombe de t’en charger avec toute l’énergie nécessaire. Tes tripes ! ajouta-t-il en pointant son index sur le ventre du prince. Tu ne seras pas seul. J’ai fait venir de Rydana des personnes de confiance. Des habitués de la vie périlleuse.
-Mais, père, reprit Rodia. N’y avait-il pas un autre moyen de me former ? Ne pensez-vous pas qu’il est inconscient de m’envoyer ainsi au devant du danger, sans expérience aucune ?
-Non, en aucun cas. Cette mission, Artus me l’a dit, t’était destinée. Aucune autre ne te portera vers les destinées royales qui t’attendent. Fais-moi confiance, fils. Maintenant, laisse-moi, et va dormir. A partir de demain, il te faudra préparer tes affaires. Et n’ébruite pas toute cette histoire. Qui sait si nos voisins orientaux n’ont pas déjà des espions dans notre sainte cité. »
Le prince, après avoir salué son père, quitta la chambre, pour aller se coucher. En remontant vers sa chambre, il croisa le conseiller Natus, qui lui adressa quelques mots d’encouragement.
L’heure du prince était venue.
Sergei- Nombre de messages : 315
Age : 109
Date d'inscription : 22/09/2008
Re: Un essai sur du merveilleux
Chapitre 3 : des charpentes et des cailloux
En se réveillant, le prince eut la sensation commune à tous les hommes, qui consiste à ressentir une vive inquiétude vis-à-vis de choses qui ne nous préoccupaient plus la veille. Alors que le soir précédent Rodia avait su se convaincre de participer pleinement au voyage, voilà que ce matin il appréhendait encore davantage que lors de la séance du conseil. Il se prépara rapidement cependant, car s’il était effrayé du voyage, il s’était bien convaincu de la fatalité de celui-ci. Il comprit qu’il devait rassembler ses affaires le plus vite possible.
Pour cela, il devait s’entretenir avec quelque aventurier, pour avoir quelques conseils en matière d’équipement. Il se rendit donc en ville, et dirigea ses pas vers l’auberge du Pied Ferme, lieu de toutes les rumeurs. Après quelques investigations auprès du maître d’auberge, ses pas le portèrent vers une ferme à l’écart de la ville dans laquelle vivait un vieil homme qui avait eu la réputation de solide voyageur.
Lorsqu’il arriva face à la ferme, les pieds sombrant dans la boue humide, le vent frais lui fouettant le visage, les mains gelées par le froid ambiant, il fût tout de suite prit de dégoût pour l’aventure. Et dire que dans des conditions pires que celles-ci, il affronterait bientôt les torrents de pluie et les bêtes nocturnes.
La modeste habitation du voyageur était rongée par l’humidité. Son occupant n’avait probablement plus les forces d’entretenir sa demeure. La moisissure gagnait du terrain depuis le sol, remontant parfois même jusqu’au toit, certaines planches étaient trouées par le temps, pendant que d’autres s’enfonçaient trop profondément dans la boue sans fond.
Quelle ne fût pas sa surprise lorsque Rodia entra dans le taudis, qui se révéla en fait à l’intérieur être un nid très confortable. L’occupant avait tapissé les murs de vieux tissus pour isoler la maison chauffée par un petit feu de cheminée. Ces pratiques étaient inconnues de Rodia qui n’avait jamais quitté le palais. Des peaux de bêtes, étendues sur le sol, étaient douces à souhait, et les meubles étaient d’un esthétisme étonnant. Le vieux voyageur, assit près de la cheminée, salua le prince et l’invita à se réchauffer à côté de lui. Le prince n’hésita pas une seconde et, empoignant une chaise, prit place à côté du vieil homme.
«Sachez que c’est honneur de vous recevoir dans ma modeste chaumière, mon prince, commença le voyageur de sa voie chevrotante qui respirait la sympathie. Que voulez-vous donc d’un vieil homme comme moi ?
-Je suis venu prendre conseil, monsieur. Les rumeurs vous attribuent de nombreux voyages. Moi-même, je dois me rendre prochainement vers la ville de Nadagam pour y rencontrer le régent. J’ai décidé de voyager seul, ainsi j’aurai voulu savoir la façon dont vous aviez coutume de vous préparer à de tels périples. »
Le vieillard sourit. Il alluma sa pipe, puis répliqua :
« Le vieux Narb en a fait des voyages, en effet. Il est vif, et a compris quel voyage désire vraiment entreprendre le prince. Les rumeurs vont vite, majesté… Pour aller à Nadagam, il suffit de suivre les routes. Rien de très compliqué compte tenu des nombreuses auberges et patelins. En revanches, pour partir vers Atoukorv afin de s’aventurer ensuite, hors des routes, en territoire étranger, alors là, c’est une autre affaire…
-Tu es vif et perspicace, en effet, vieil homme. Maintenant que tu connais réellement mes desseins, tu vas pouvoir m’éclairer encore d’avantage.
-Ah, mon prince. Le problème, c’est que le vieux Narb n’est jamais allé aussi loin. Jamais il n’a foulé le sol Trace, ni même le pays de Man. L’endroit le plus éloigné dans lequel je me suis rendu se trouvait près de Rydana, tout au nord du pays, là où il fait froid, très froid. Mais cela m’a suffit à connaître la signification du mot aventure. Permettez-moi de vous dire, mon prince, que votre périple ne sera vraiment difficile que lorsque vous partirez d’Atoukorv. Car d’ici à Atoukorv, il suffit de suivre la route. Seuls les brigands restent une menace, mais les dires ébruitent une accalmie des attaques. Tandis que lorsque vous quitterez Atoukorv, vous n’aurez plus de routes pour vous guider. Vous voyagerez en pleine nature. Et c’est là qu’une bonne préparation sera de mise.
-Dîtes-moi, vieil homme. Dîtes-moi tout. »
Le vieux voyageur cracha des volutes de fumée, et reprit, le sourire au lèvre, le regard empreint de nostalgie :
« Un sac, un grand sac, mon prince. Vous le garderez sur le dos, et vous y mettrez l’essentiel de vos affaires. Nourriture, boisson, cartes… Ne négligez pas les cartes, majesté ! Pensez également à prendre du tissu. Oui, beaucoup de tissu. Tant qu’il reste de la place dans un sac à dos, toujours le combler avec du tissu. C’est léger, et ça sert à tout, le tissu. A dresser des tentes, à se couvrir, à se panser. C’est très utile… Une corde, toujours une corde par personne. Et de l’huile aussi, pour faire du feu. Et enfin, le plus important, majesté : une arme ! N’envisagez même pas un voyage sans arme ! Une arme, c’est une défense d’abord, mais aussi un gain psychologique énorme. Moi-même, lorsque je ne voyageais pas armé, une peur permanente me suivait à travers mes périples. Mais lorsqu’une lame accompagne vos pas d’un léger cliquetis si rassurant, vous envisagez les situations de manière plus positives et courageuses. Prenez une arme, messire. Une petite épée, une dague au moins. C’est très important. Enfin, n’hésitez pas à emporter des conteneurs, ça sauve des vies, les conteneurs. Des sacoches, enfin tout ça quoi. Pensez-y, majesté. »
Le vieillard marqua une pause. Il scruta les flammes pendant un long moment. Pus il ajouta :
« Mon prince, si vous en avez l’occasion, profitez de tout ce qui a trait aux arts anciens, au charlatanisme, toutes ces choses-là. On la critique trop souvent, mais la magie, ça aide. »
Le voyageur sembla réfléchir, puis se leva et se dirigea vers une commode en bois. Il fouilla lentement les tiroirs, en sortit un petit objet, et, de son pas claudiquant, vint se rasseoir près du feu. A la lumière de celui-ci, il montra un petit collier au bout duquel un petit caillou pendait. C’était résolument un pendentif très laid, et de plus, la pierre semblait assez lourde.
« Cette chose, mon prince, expliqua le vieil homme, m’a sauvé la vie plus d’une fois. Ca respire la magie, cette chose-là. C’est un sorcier de Rydana qui me l’a vendu. Je vous assure, mon prince, que je crois dur comme fer au pouvoir de cette amulette. A chaque fois d’un danger se présentait à moi, un miracle semblait me sortir de là. »
Face au scepticisme du prince, le vieux Narg s’empressa de lui raconter une anecdote en y mettant tout les gestes nécessaires pour renforcer sa crédibilité :
« Si, messire, croyez-moi ! Lorsque je suis rentré de Rydana, en me dirigeant vers mon foyer qui m’avait tant manqué, je suis passé par bien des embuches. Ainsi, un jour que je passais par un chemin peu fréquenté où je pensais pouvoir éviter les brigands, voilà que je tombe nez-à-nez avec l’un d’eux. Il me somme de donner mon or. En ce temps-là, j’étais fine lame, et je lui répondis par des esbroufes grandiloquentes. Le problème, c’est que lorsque mon adversaire sortit son arme, je me rendis compte que j’avais égaré la mienne. Et c’est à ce moment que le miracle se produisit. Alors qu’il se précipita sur moi en brandissant son couteau, j’assistai, désemparé, au fantastique pouvoir de cette pierre dont m’avait justement parlé le sorcier qui me l’a vendu. Le brigand se stoppa net dans sa course et s’affala face contre terre. A ses pieds, on serpent noir comme le jais, des plus venimeux, sifflait hargneusement. Il avait mordu jusqu’au sang le détrousseur. Vous savez ce qu’on dit, mon prince. Les serpents, pour ne pas se faire piquer, il ne faut pas bouger. Mais à ce moment-là, je n’y pensai pas. Je me mis à courir très vite, et, passant juste à côté de l’horrible bête, qui aurait très bien pu me mordre avec une facilité sans égal, elle me regarda sans broncher. Et, lorsque je fus loin d’elle, je la vis s’éloigner lentement du chemin, retournant parmi les bois.
-De la chance, tout simplement ! Se moqua le prince.
-Attendez, majesté ! Le sorcier qui me l’avait vendu, cette pierre, m’avait justement précisé que son étrange pouvoir était de solliciter la compassion des bêtes ! N’est-ce-pas incroyable ?
-Coïncidence, vieil homme. Ecoutez, je vous remercie de vos renseignements, mais je vais devoir y aller, désormais.
-Attendez, majesté ! S’empressa de reprendre le vieux Narg. Prenez ma pierre. Je sais tout de votre voyage. Vous savez, les rumeurs vont bon train, dans cette cité. Prenez-la, elle vous protégera. »
Le prince, pressé de rentrer au bastion, prit la pierre par gentillesse, et, après avoir salué chaleureusement le vieil aventurier, se dirigea vers le château.
Le soir, dans sa chambre, il avait rassemblé tout ce que le voyageur lui avait conseillé. Alors, n’expliquant pas son geste, il rangea tout de même la petite amulette dans sa sacoche, sans croire le moins du monde à la nature magique de l’objet. Il considérait la pierre surtout comme une sorte d’encouragement de la part du vieux Narg qui lui avait inspiré beaucoup d’affection.
Sergei- Nombre de messages : 315
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Re: Un essai sur du merveilleux
Chapitre 4 : des rencontres et des recommandations
Le lendemain de sa rencontre avec le vieux Narg, le prince avait repris espoir. Le vieil homme lui avait parlé de ses périples avec une certaine nostalgie qui ne laissa pas Rodia indifférent. Peut-être que ce voyage était en fait une bonne chose.
Maintenant qu’il avait préparé avec attention ses affaires pour le jour du départ, il ne savait que faire durant les six jours restant. Mais bien vite Céron lui expliqua que son programme risquait d’être chargé. En effet, le jour même le Roi l’avait fait convoquer, et cette fois-ci le jeune prince s’empressa de répondre à l’appel.
En entrant dans le bureau de son père, celui se lança sans attendre dans l’explication de nouvelles directives :
« Ah, mon fils, enfin tu es là. J’ai fini de préparer les écrits nécessaires à ton voyage. »
Il fouilla un tiroir dans son lourd bureau de chêne et en sortit une liasse de papiers. Il invita son fils à s’asseoir face au bureau, et lui présenta les papiers.
«Ces papiers te seront indispensables, Rodia. Celui-ci te permettra de prouver la légitimité de ta mission, par ma signature, tant que tu seras dans au sein du territoire. Inutile de te dire que, pour le secret de l’expédition, il te faudra t’en débarrasser une fois en Trace.
J’ai signé ainsi assez d’attestation pour l’ensemble de la troupe. J’ai de même fait préparer quatre cartes détaillant la région. »
Le jeune prince prit calmement les papiers en main, et, voyant que son père s’apprêtait à ajouter quelque chose sans s’y décider vraiment, il l’invita par quelques clignements d’yeux. Le grand homme, à travers sa barbe ténébreuse, se mit à adopter un ton intrigant, murmurant presque, et dans ses yeux luisaient la lumière du mystère :
« Ecoute, Rodia. Il faut que je te prévienne de quelque chose. Tu seras le seul à être mis au courant de ce que je vais te dire maintenant. »
Le roi regarda de tout côté, comme si on l’espionnait. Puis il reprit :
« Lorsque toi et ton groupe arriverez à Atoukorv, un homme, que j’ai engagé d’avance, t’attendra. Il te trouvera, et te contactera pour rejoindre votre groupe. Car je ne puis effacer quelques craintes en moi, mon fils. Les hommes qui vont t’accompagner n’ont jamais rien eu à se reprocher concernant leur fidélité. Mais je prévois tout ! Alors si jamais parmi ceux qui t’accompagneront jusqu’à Atoukorv un félon venait à révéler sa véritable nature en te trahissant, un renfort t’attendra plus loin sur ta route. Et un homme de plus n’est jamais inutile. »
Le prince était étonné des soudains soupçons de son père vis-à-vis de l’expédition.
« N’oublie pas que tu es prince, Rodia. Il serait aisé d’entreprendre certains crimes contre le royaume en étant si proche de toi pendant tout un voyage. Tu peux avoir confiance en Céron. Mais méfie-toi toujours des autres. Maintenant ne répond rien, car tu sais tout et je n’ai pas de temps à perdre. Je veux que tu retournes te préparer à ton périple. »
Rodia obéit docilement et quitta la pièce, remontant dans sa chambre.
Là, Céron l’attendait :
« Vous voilà, prince. Il est temps. On vous attend à l’entrée du bastion, dans le hall. Nos deux compagnons d’armes ont voyagé par le fleuve pour nous rejoindre le plus vite possible.
-Ah, je vais enfin avoir l’occasion de voir à quoi ils ressemblent ! s’enjoua le prince.
-Rodia, n’oubliez pas ce que je vous ai dit. Faîtes figure de chef, dès maintenant. Ces hommes sont des vétérans, des aventuriers, habitués à vivre à la dure. Faîtes fi de votre image de petit prince protégé, et n’hésitez pas à jouer de charisme.
-J’y veillerai, Céron. Ne vous inquiétez pas. »
Les deux hommes descendirent ainsi jusqu’au hall du bastion, dans lequel les attendaient effectivement deux hommes entourés de gardes.
L’un d’eux était plutôt grand, emmitouflé de capes et d’écharpes. Une lame pendait à sa ceinture chargée d’objets tous plus insolites les uns que les autres. Il était trempé, tout comme son partenaire. Ses cheveux noirs de jais coiffaient un visage sombre, voir inquiétant. Ses petits yeux vifs perçaient dans la pénombre crépusculaire, son nez et son menton étaient finement taillés. Une balafre lui barrait le haut du cou, et semblait s’enfoncer sinueusement sous ses vêtements imbibés d’eau.
Il ne parlait pas, observait simplement les charpentes du bastion en silence, trahissant parfois une petite mimique de l’œil gauche qui semblait cligner comme pour éloigner un insecte gênant.
Le deuxième homme, plus petit mais aussi plus massif, s’entretenait avec les gardes. Il avait une voix grave qui résonnait dans tout le hall. Il animait la conversation de gestes particulièrement mis en valeur par ses mains imposantes. Une arme pendait également à sa ceinture, et il arborait des vêtements semblables à ceux de son partenaire. Son crane chauve luisait, et laissait couler de fines gouttelettes d’eau, derniers vestiges de leur périple pour venir jusqu’à Navag.
Céron et Rodia saluèrent les deux personnages, qui s’intéressèrent soudain aux arrivants. Le grand homme s’empressa d’engager la conversation alors qu’il n’avait jusque-là pas ouvert la bouche :
« Majesté, commença-t-il poliment, se penchant légèrement. Ce sera pour moi un honneur de vous accompagner. Je suis Talion, noble voyageur de son état. Voici Damren. »
Pendant que Talion saluait Céron, le massif personnage à la voix de plomb écarta avec force un des gardes pour s’approcher du prince et s’incliner :
« Majesté ! Un honneur, un honneur. Damren, pour vous servir, dans la vie comme dans la mort. Je suis honoré d’avoir été choisi pour garantir votre sécurité. »
Le prince ne savait vraiment comment répondre. Il ne s’attendait pas à de telles révérences de la part des deux aventuriers, qu’il avait imaginé beaucoup plus rustres et froids.
Céron prit calmement la parole :
« Messieurs, compte tenu de votre fatigue et de votre état, je vous propose de vous montrer vos appartements et de reconduire à demain les entretiens expéditionnaires. Prince, vous pouvez remonter dans votre chambre. Nous vous attendrons demain dans mon bureau. »
Céron et les deux hommes disparurent dans l’embrasure d’une porte. Le prince regagna ses appartements.
Cette aventure lui inspirait de moins en moins d’effroi. Le fait d’avoir vraiment pris connaissance du groupe, les précautions de son père, lui donnaient confiance en lui. C’est le cœur débordant de courage qu’il s’allongea pour enfin s’endormir, s’imaginant toutes les luxuriantes natures qu’il allait traverser.
Sergei- Nombre de messages : 315
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Date d'inscription : 22/09/2008
Re: Un essai sur du merveilleux
Univers fantastique, très détaillé, parfois trop, mais intéressant. Je ne suis pas une grande fan de cette littérature, parce que j'éprouve souvent des difficultés à entrer dans cet univers. Pas la faute de l'auteur, juste celle de mon esprit.
Le souci, récurrent dans une bonne partie des textes du genre, est cette obligation de fournir toutes sortes de précisions sur les lieux, les noms et l'histoire de telle ou telle peuplade pour que le lecteur comprenne bien et puisse faire une bonne idée de tout le contexte. Je comprends que ça soit indispensable mais bon, ça me lasse assez vite en général et ce texte ne déroge pas vraiment à la règle, même si j'apprécie la qualité dou boulot effectué. Chapeau pour ça !
Le souci, récurrent dans une bonne partie des textes du genre, est cette obligation de fournir toutes sortes de précisions sur les lieux, les noms et l'histoire de telle ou telle peuplade pour que le lecteur comprenne bien et puisse faire une bonne idée de tout le contexte. Je comprends que ça soit indispensable mais bon, ça me lasse assez vite en général et ce texte ne déroge pas vraiment à la règle, même si j'apprécie la qualité dou boulot effectué. Chapeau pour ça !
Sahkti- Nombre de messages : 31659
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