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EXO EPHEMERE - Thème d'écriture 1 : La place

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EXO EPHEMERE - Thème d'écriture 1 : La  place Empty EXO EPHEMERE - Thème d'écriture 1 : La place

Message  Annick SB Ven 17 Juil 2009 - 7:31

Si j'en crois ma petite expérience, je constate que l'envie d'écrire sur un thème imposé est un désir partagé par beaucoup.
Le temps des exos live est trop court pour certains, je vous donc propose ici une petite semaine pour écrire un texte sur le thème suivant : La place .

CONTRAINTES :

La première phrase doit être :

"Il y avait foule sur la place . "

et la dernière :

" Alors, sans rien dire , d'un seul mouvement, ils se remirent en marche, comme aimantés par le village, impatients et peureux à la fois. "



Voilà j'espère que cet exercice vous plaira ...
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EXO EPHEMERE - Thème d'écriture 1 : La  place Empty Re: EXO EPHEMERE - Thème d'écriture 1 : La place

Message  Invité Ven 17 Juil 2009 - 8:34

Il y avait foule sur la place.
Ce n’est pas tous les jours que les aliens débarquent, surtout dans une ville de moyenne importance. D’habitude ils choisissent soit la big mégapole où se tient le gouvernement de la planète, soit le trou du cul du monde où ils se font dégommer par les deux ou trois bouseux du coin qui, finalement, avaient vocation de héros. Mais la province, en général, ce n’est pas leur style. Ils doivent avoir une prévention contre les bals de sous-préfecture.
Celui prévu serait le nec plus ultra, on l’avait promis au, donc, sous-préfet qui n’en revenait pas de cette occasion de booster sa carrière ! Les occupants du vaisseau avaient bien précisé qu’ils voulaient le rencontrer, lui. Enfin, pas lui nommément, mais ils avaient demandé où se trouvait la « coquette cité de Vichy ». Le militaire de service à la radio de l’État-Major français avait d’abord râlé : « Nous ne sommes pas un service d’informations touristiques ! Libérez immédiatement la fréquence !
— Mais nous venons visiter votre belle planète ! Vous ne voudriez certainement pas rejeter un contact avec des membres de la Fédération Intergalactique !
— Oh, mais non, Monsieur Spock, toutes mes excuses : veuillez, je vous prie, libérer immédiatement la fréquence sinon vous vous recevrez une distorsion 8 dans vos oreilles en pointe ! Bon, soyons sérieux, les rigolos : il nous faudra quelques secondes, si j’enclenche la procédure, pour repérer la boîte de sardines qui vous sert d’émetteur, et vous vous retrouverez au gnouf pour si longtemps qu’à la sortie vous devrez aller visiter vos petits-enfants dans une dimension parallèle puisque dans celle-ci vous aurez passé votre vie à vous faire défoncer le fion par les baraqués de la taule ! Une dernière fois : LIBÉREZ LA PUTAIN DE FRÉQUENCE ! »
Cela s’annonçait donc assez mal. Heureusement, quand on eut fait le rapport entre les pirates gonflés à la radio et l’apparition au radar d’un Objet Volant Vachement Chié Dans le Genre, et qu’on eut muté aux îles Kerguélen l’opérateur de la radio, on put s’enquérir avec déférence des désidératas des prestigieux visiteurs, lesquels n’avaient pas changé : ils voulaient se rendre à Vichy pour une emplette, et ne souhaitaient surtout pas de réception officielle. Ils y seraient dans dix minutes.
On avertit en catastrophe le sous-préfet de Vichy, parce que, quand même.

Comment les gens avaient-ils pu savoir en si peu de temps et se rassembler sur la place ? On aurait pu invoquer un mystérieux phénomène de télépathie spontanée, l’intervention d’une gestalt omnisciente, si le vaisseau n’avait survolé en rase-mottes la campagne alentour en beuglant, sans doute pour prévenir toute initiative de ces autochtones qui semblaient tout de même assez nerveux : « NOUS VENONS EN PAIX. NOUS VOUS PARLONS PAR L’INTERMÉDIAIRE D’UN TRADUCTEUR UNIVERSEL AUTOMATIQUE. NOUS NOUS RENDONS À VICHY POUR ACHETER UN SOUVENIR ET NE VOULONS SURTOUT PAS DÉRANGER. »
On leur avait indiqué que le mieux pour eux serait d’atterrir sur les Parcs, et établi rapidement un cordon.

Un être de cauchemar sortit de la soucoupe volante. C’était bien une soucoupe, on voyait même écrit « Made In Taiwan » en relief au cul de la porcelaine. Les observateurs supposèrent que les extra-terrestres camouflaient la véritable apparence de leur vaisseau. Mais alors pourquoi ne pas se camoufler eux-mêmes ? C’était une véritable offense, de se présenter à des humains sous la forme d’un pou géant si on pouvait faire autrement !
Le sous-préfet avala sa salive et entama son discours : « Noble plénipotentiaire, nous sommes honorés…
— Voyons, voyons, coupa le pou d’une voix débonnaire, nous ne voulons pas de cérémonie ! Nous n’avons pas qualité pour négocier quoi que ce soit avec vous, nous sommes de simples touristes. Pouvez-vous me guider à la meilleure confiserie de la ville ? »
Le sous-préfet et les membres de son cabinet s’ébranlèrent, entourant avec déférence le nuisible de deux mètres cinquante de haut. Les gendarmes n’avaient pas de mal à repousser la foule, personne ne souhaitait se trouver trop près de l’acarien qui puait la violette ; tout le monde éternuait autour de lui.
L’extra-terrestre eut un peu de mal à négocier son entrée dans la boutique. « Madame, annonça-t-il poliment à la patronne figée d’effroi, pourriez-vous me fournir une livre de vos fameux cannelés ? »
La commerçante se reprit très vite ; on parlait métier, elle était à son affaire ! « Non, répondit-elle. Les cannelés, c’est à Bordeaux qu’on fait ça. Mais nous avons de délicieuses Pastilles Vichy…
— Tu vois, résonna une autre voix dans l’oreillette située sur l’abdomen du pou, et à laquelle personne n’avait pris garde, je t’avais bien dit que ce guide touristique était nul !
— Ce coin de la galaxie n’est pas assez documenté, soupira le visiteur. Enfin, tant pis, nous n’avons pas le temps de faire une autre escale. Je vais prendre de vos Pastilles Vichy, madame…
— Une livre ?
— Oui, très bien. Vous prenez la Carte Violette ?
— Non, euh… monsieur, désolée.
— De l’or, ça ira ?
— Une livre, très bien. »

Après le départ des importuns, la patronne considéra en souriant le petit lingot d’or posé devant elle, le rangea dans sa caisse. Il faudrait le porter à la banque, elle s’en occuperait quand elle aurait fini son chapitre, laisserait la gamine garder la boutique. Elle reprit sa lecture : « Alors, sans rien dire, d’un seul mouvement, ils se remirent en marche, comme aimantés par le village, impatients et peureux à la fois. »

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Message  Annick SB Ven 17 Juil 2009 - 8:48

Cela m'a fait plaisir de vous lire ; c'est marrant car je trouve beaucoup de rapidité dans vos écrits ( enfin le peu que je lis depuis mon arrivée sur ce site ) ; par rapidité j'entends non pas le fait que vous dégainiez en premier bien sur mais dans le rythme de ce que vous narrez .

Etant speed de nature, j'essaie au contraire lorsque j'écris de rendre une ambiance lente , presque monotone ; ça me calme !

Bon, en tous les cas merci pour votre participation !
Je ne sais pas comment s'appelle en littérature votre fin ( le fait que la nana lisait ce que vs avez écrit ) si vous pouvez me l'indiquer ... merci !
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Message  Invité Ven 17 Juil 2009 - 8:56

Merci beaucoup, et je ne sais pas si le terme "mise en abyme", qui me vient à l'esprit pour ce type de fin, convient en l'occurrence...

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Message  Invité Ven 17 Juil 2009 - 10:57

Il y avait foule sur la place. Ils avaient oublié que c'était jour de marché. Ils s'étaient arrêtés, et de loin considéraient cette masse agitée et bruyante. Il y avait foule sur la place. Beaucoup trop pour eux, les deux solitaires de la combe. A leur vue elle deviendrait hostile la foule.
Nul besoin de parler, de se regarder, chacun savait ce que l'autre pensait. Ignorer les invectives, faire fi des quolibets, marcher la tête haute. Le colis ne pouvait pas attendre.
Alors, sans rien dire , d'un seul mouvement, ils se remirent en marche, comme aimantés par le village, impatients et peureux à la fois.

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Message  Invité Ven 17 Juil 2009 - 10:59

Une écriture toute en creux, qui laisse à chacun le loisir d'imaginer... J'aurais préféré du plus explicite, mais, dans le genre, c'est impeccable !

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Message  Invité Ven 17 Juil 2009 - 11:05

Merci socque. Honnêtement, je ne sais pas moi-même de quoi il retourne, c'est venu comme ça.
Bon choix de phrases pasdepannick, bonne idée d'exo (à ma portée ;-)).

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Message  Annick SB Ven 17 Juil 2009 - 11:07

Moi qui aime la concision, je suis servie ! Merci .

un petit qq chose me gène dans ces deux phrases :

[quote="Easter(Island)"] Il y avait foule sur la place. Beaucoup trop pour eux, les deux solitaires de la combe. A leur vue elle deviendrait hostile la foule.

Le "beaucoup trop" se rapporte à "foule" et je crois que j'aurai bien vu un rajout de " de monde "par exemple car bcp trop de foule ça ne sonne pas bien ...

Et pour la seconde phrase , je crois qu'à l'oreille ça sonnerait mieux ainsi :

Elle deviendrait hostile la foule , à leur simple vue.

Oui, je sais , je chipotte ... En tous le cas j'ai imaginé en vous lisant deux terroristes puis ...deux amoureux !!! Etrange non ?
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EXO EPHEMERE - Thème d'écriture 1 : La  place Empty Re: EXO EPHEMERE - Thème d'écriture 1 : La place

Message  Invité Ven 17 Juil 2009 - 13:16

Tout à fait d'accord avec la première remarque très pertinente. J'avais conscience de la syntaxe bancale mais plutôt compté sur le fait que personne ne mettrait le doigt dessus ; je devrais pourtant savoir qu'il ne faut pas mésestimer la perspicacité des Véliens !!
J'ai en effet essayé de rajouter "de monde", ou de dire "une trop grande foule", mais ni l'un ni l'autre ne me plaisaient, trop lourds à mon goût, alors j'ai joué sur la licence...

Quant à la seconde phras, elle me plaît mieux dans sa version originale, sans la pause de la virgule.
Merci de ton intérêt pasdepannick.

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EXO EPHEMERE - Thème d'écriture 1 : La  place Empty souvenirs d'enfance ...

Message  Annick SB Ven 17 Juil 2009 - 14:40

"Il y avait foule sur la place . "

Ils ne savaient pas exactement ce qu'ils étaient venu voir mais le bouche à oreilles avait bien fonctionné.
La bouche surtout, car les oreilles, ça faisait bien longtemps qu' elles n'entendaient plus.
Elle se contentaient de deviner les sentiments muets : la peur, la colère, la rage, le désarroi ? Un peu tout à la fois . La lâcheté aussi peut-être ; on n'osait plus entendre...
Ni le chant des grillons, ni le craquement des pas sur la garrigue, ni même le bruit des ricochets dans le Verdon. On n'osait plus entendre, on avait tant parlé...en vain.

C'était un jour sans surprise. Il y avait foule sur la place. A l'heure du marché, rien de bien anormal.
Un jour d'empressement, de course, de sueur, puis d'attente car le sous-préfet en personne venait annoncer la date de début du chantier, l'arrivée des bulldozers, des grues, et de l'inévitable explosion du clocher qui suivrait tôt ou tard.
Le brave homme devait arriver à la mairie vers onze heures.
Pour rien au monde on aurait raté ses paroles empoisonnées qui nous feraient réaliser la béance et le deuil à venir et qui peut-être délieraient les langues.


Ils longèrent la rue du Calvaire pour atteindre la mairie et ils le virent, tel qu'ils l'avaient imaginé, insignifiant à souhait.
Ils s'entassèrent quelques instants près des barrières de protection, certains armés d'appareils photos en bandoulière pour immortaliser l'instant maudit.
Le brave homme leur fit un signe de la main qu'ils se gardèrent bien d'interpréter.


" Alors, sans rien dire , d'un seul mouvement, ils se remirent en marche, comme aimantés par le village, impatients et peureux à la fois. "

http://www.lessallessurverdon.com/LSdemol.html
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Message  Invité Ven 17 Juil 2009 - 14:55

Le ton dramatique n'est pas parvenu à m'impliquer dans le récit, désolée.

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Message  Annick SB Ven 17 Juil 2009 - 15:03

[
quote="socque"]Le ton dramatique n'est pas parvenu à m'impliquer dans le récit, désolée.

Aucun problème !
Au contraire, votre commentaire répond à une question que je me pose svt , à savoir : est ce que le fait d'être complètement étranger à une situation relatée ou à un "style littéraire", permet de "savourer" ( excusez du peu ) un éventuel texte dont on a à priori rien à faire ?

...
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Message  Invité Ven 17 Juil 2009 - 15:21

Pasdepannick, je te conseille vivement, si ce n'est déjà fait, la lecture de "Hortense ou l''eau vive" de J. Giono, sur ce thème précisément.

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Message  Annick SB Ven 17 Juil 2009 - 15:26

Easter(Island) a écrit:Pasdepannick, je te conseille vivement, si ce n'est déjà fait, la lecture de "Hortense ou l''eau vive" de J. Giono, sur ce thème précisément.

Merci beaucoup Easter ; je ne l'ai pas encore lu et je note la référence !
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EXO EPHEMERE - Thème d'écriture 1 : La  place Empty Re: EXO EPHEMERE - Thème d'écriture 1 : La place

Message  Invité Ven 17 Juil 2009 - 15:35

.
.
Juillet javanaise : Kubu Blues.


Il y avait foule sur la place. La batîsse éventrée fumait.
Les petits hommes bruns, se souvenaient, mais pas très bien, que des Massaleh venaient là dormir, vêtus de peau rose. Ils regardaient les braises, les petits hommes bruns: un esprit s'était-il fâché ? Les Massaleh ne maîtrisent pas bien leur feu: on croyait savoir ça chez les petits hommes bruns.

Eux aussi, avaient joué avec le feu, très tôt. On ne pouvait plus, par exemple, consommer le sang du babiroussa. On avait, chez les petits hommes bruns, cessé de réduire les tête pour se réduire à genoux, plusieurs fois par jour. Il n'y a pas si longtemps, la mer s'en était fâchée. Elle avait alors pesté contre la transmigrasi, rasé la terre entière jusqu'aux Iles Noires.

Chez les petits hommes bruns, on disait que les esprits étaient fâchés, vraiment fâchés de ne plus apercevoir le menton des femmes, alors ils avaient bousculé les sens du vent. Tout était devenu fou et les batîsses éventrées. Les petits hommes bruns maudirent leur éxode et laisserent le feu fou.

On chuchotait aux petits hommes bruns que le feu fou avait noirci quelques peaux. D'autres esprits allaient se lever.

Alors, sans rien dire , d'un seul mouvement, ils se remirent en marche, comme aimantés par le village, impatients et peureux à la fois.

.
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Message  Annick SB Ven 17 Juil 2009 - 15:44

J'aime beaucoup votre texte et ses sous entendus ethnologiques.
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Message  Invité Ven 17 Juil 2009 - 17:24

Merci. J'aime beaucoup votre initiative d'exo :-).

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EXO EPHEMERE - Thème d'écriture 1 : La  place Empty Re: EXO EPHEMERE - Thème d'écriture 1 : La place

Message  Peter Pan Ven 17 Juil 2009 - 20:04

pandaworks a écrit:Merci. J'aime beaucoup votre initiative d'exo :-).

Et moi j'aimerais beaucoup que socque commente pandaworks (ou que ce dernier dise qu'il est désolé), même si c'est pour dire qu'elle n'aime pas et même si... : https://www.youtube.com/watch?v=WgToMBdlApU
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EXO EPHEMERE - Thème d'écriture 1 : La  place Empty Re: EXO EPHEMERE - Thème d'écriture 1 : La place

Message  Mure Mer 22 Juil 2009 - 14:18

L’insupportable maniaquerie austère.

Il y avait foule sur la place.
Pas un pouce d’air pour respirer, pas de falaise pour s’y jeter, s’envoler… loin d’eux.
Ils me regardaient comme une pestiférée, j’avais le front fiévreux, un filet de sueur qui me brûlait comme une plaie pourrie par l’atmosphère moite de cette jungle urbaine. J’étais nerveuse, pas à mon aise. Ça se voyait, ça se sentait, mon odeur âcre me dénonçait lâchement.

Je n’aimais pas perdre ainsi le contrôle de mon corps.
J’y passais du temps à le laver, le parfumer, l’épiler, le gommer, le masser, l’hydrater !
Chaque pore de ma peau pouvait s’enorgueillir d’être aussi doux que le sucre dont il avait la senteur ; aussi sain que le savon coutant si cher qu’il faut en taire son tarif.
Loi du paraître, plaisir d’être, je sortais une eau de lys « Senteur de Palace » pour rafraîchir mon égo.
Valeur à deux centimes d’euro, mais, valeur tout de même, respect de soi pour les autres, ce fût ma seule ruse pour me défaire de leurs yeux de merlans frits.

J’avais une liste, longue comme le bras d’un nain, il fallait que je la respecte. Que je me cale à ma tâche, que je remplisse mon cabas. Mais… Dans la salle de mon envie de bien faire, il manquait les meubles pour ranger toutes mes bonnes intentions… du coup, elles traînaient parterre, piétinées par cette masse inconfortable, envahissante et phobogène de gens pressés contre moi.

Du sel, il me faut du sel, pour la poule-au-pot de ce soir…

Je m’engluais dans la vase publique, avançant lentement vers l’étal d’épices. Il me fallait prendre patience, qu’un trou s’y fasse pour le toucher, lui, le banc du marchand. Le marchand qui ne me jetait pas un œil, les deux étaient pour la crémière d’à côté… je perdais mon bon sang.

Faut-il que je sois un paon et faire la roue pour être servie ?!!!

Silence ! J’avais crié…
Pour tous, j’étais le loup qui hurle sur le talus près du lac, le soir de lune pleine.
A nouveau, le poids de leur jugement me rendît ma transpiration.
« Elle doit être saoule. » entendais-je derrière moi.
« Pauvre fille… encore une touriste. » disait-on sur ma droite.

Je me serais bien cachée sous les tuiles de mon arrogance, mais, une cloche tinta au loin, elle annonçait la messe. Pour d’autres, elle disait la beauté du froufrou de tulle d’une vierge brune et encore pour d’autres, l’heure de descendre à la cave chercher son meilleur cru.

Alors, sans rien dire, d’un seul mouvement, ils se remirent en marche, comme aimantés par le village, impatients et peureux à la fois.
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Message  Invité Mer 22 Juil 2009 - 14:30

Un bon texte je trouve, à l'ambiance expressive... Mais alors, pour moi, la phrase imposée de fin arrive comme un cheveu sur la soupe ! Pourquoi les villageois seraient-ils "peureux" d'aller à la messe quand toute la peur semble ramassée chez la narratrice ?

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EXO EPHEMERE - Thème d'écriture 1 : La  place Empty Re: EXO EPHEMERE - Thème d'écriture 1 : La place

Message  Mure Mer 22 Juil 2009 - 15:30

Zut ! Je craignais d'être lourde et je pensais que le lecteur ferait seul le lien entre la messe et la crainte qu'elle pouvait engendrer.
J'ai coupé ce morceau qui venait juste avant la dernière phrase "imposée" :

[...] Autant d’angoisses que de joies, pour les fiancés, les pêcheurs, les épouses des festoyeurs d’apéritifs… finalement, ils me ressemblaient.

« Alors ! Il lui faut quoi à la p’tite dame ?! »
La voix de l’épicier faisait l‘écho. [...]

J'aurais dû le laisser finalement...
Merci socque. ;-)
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Message  Saint Georges Mer 22 Juil 2009 - 15:38

Il y avait foule sur la place.

Une foule grouillante de gros tas, la face cramoisie de s'être bâfrés comme des pourceaux. On sortait du repas de midi et la plupart tenaient encore des morceaux de bouffe gluante que leurs grosses mains poisseuses décortiquaient avidement. La sueur acide dégoulinait sur leurs vêtements et se mêlait aux flots de graisse tombés de leurs gosiers.

Des vapeurs montaient de cette masse d'obèses, infectant les environs qui commençaient à sentir la friture.

Assis sur l'estrade qui avait été placée devant la mairie je les observais avec dégoût. Le brouhaha général de la mastication d'une centaine de mâchoires perturbait seul le calme qui s'était installé à mon arrivée.

Braves bêtes.

En silence, je me suis levé. La masse tressaillit et commença à onduler faiblement, mon regard me renvoyait l'éclat vitreux de leurs yeux porcins.

Des grognements et des reniflements d'excitations me parvenaient et contribuaient à accentuer ma nausée, je n'arrivais pas à me débarrasser du goût poivré de charcuterie qui me collait au palais. Je finis par m'approcher du micro, empoignai ma guitare et grattai une note. Un do, pour être précis.

Le remous qui animait la masse s'accentua, quelques bras se levèrent, antennes roses boudinées qui s'agitaient dans l'air opaque.

D'autres notes suivirent, j'ai balancé la saturation. Mes doigts allaient de plus en plus vite sur les frettes et je commençais à voir flou.

Le flot se soulevait frénétiquement et toute individualité était noyée au milieu de cette grosse bête qui hurlait silencieusement. Son corps informe se tordait violemment sous l'effet d'une houle invisible.

Dans la transe qui me transportait, je vis un élément se dissocier de la masse et tomber lourdement sur le sol, puis un autre, et un autre encore.

La dernière note mourut dans un silence total, entrecoupé de sifflements et de halètements rauques.

Examinant la foule, je vis que dix d'entre eux gisaient sur le sol, les lèvres tordues par une convulsion douloureuse, la main crispée sur la poitrine. Le reste des villageois reprenait son souffle sur la place maintenant parsemée de flaques de sueur collante. Je débranchai ma guitare.


Alors, sans rien dire, d’un seul mouvement, ils se remirent en marche, comme aimantés par le village, impatients et peureux à la fois.
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Message  Invité Mer 22 Juil 2009 - 15:41

Une ambiance saisissanten très réussie ! Mais, après cette tempête incroyable dans leur vie morne de bâfreurs, pourquoi les villageois seraient-ils "peureux" à l'idée de retourner au village, leur refuge ?

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Message  Invité Mer 22 Juil 2009 - 15:41

"saisissante, très réussie"

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EXO EPHEMERE - Thème d'écriture 1 : La  place Empty Re: EXO EPHEMERE - Thème d'écriture 1 : La place

Message  Invité Mer 22 Juil 2009 - 15:43

r.

Quelle apocalypse ! Je me suis bien marré à te lire. "braves bêtes" n'était pas nécessaire : une touche de mépris dont j'aurais souhaité que tu nous laisse libre à le penser.

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Message  Saint Georges Mer 22 Juil 2009 - 15:48

Socque

Je dirais qu'ils sont impatients de retrouver le refuge que leur offre le village, mais en même temps "peureux" de l'infarctus, qui sera vraisemblablement leur lot à tous et leur a été rappelé ici.

Très bonne idée d'exercice pasdepannick, je tiens à dire que j'ai quand même trouvé la formulation de la phrase de conclusion un peu bizarre :))

Pandaworks

J'ai effectivement hésité à le mettre.
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Message  lulli Jeu 23 Juil 2009 - 17:46

Il y avait foule sur la place. Ça se serrait, s'agglomérait, se répandait, se mouvait, se dandinait… Le monde faisait masse et gueulait, riait, piaillait, hurlait, tirait, poussait, chahutait… Sur la place ça n'était plus supportable, entre les étales du marché, les poussettes à trois étages et plate forme, les gamins en culotte courte et les femmes excédée, les alcolos braillards, le curée désenchanté et la dame de Siergons, le père Foulpein, le môme à sa vieille tante et tout les touristes attirer par le festival… C'était tout simplement insupportable, on n'y respirait pas et il n'est pas nécessaire de le dire on ne faisait que passer en tentant de fuir le gros de la foule houleuse. Le festival c'était notre déveine mais les commerçant s'enrichissaient, la ville était en liesse, contente de ces aberrations à l'énergie débordante… A croire que c'était Noël en plein Août, la neige et les cierges en moins. Pour l'occasion on avait pris soin de verdir la place en lui ajoutant de grands arbres fruitiers qui eurent étaient bien en mal de survivre à l'hiver mais qui donnaient l'impression d'un climat clément… Ils fallait donc aussi contourner leurs bacs immenses ce qui ajoutait à la cacophonie existante. Toute la journée fut horrible, insensé, faisant de nos habitudes des haillons honteux qu'ils fallait cacher du regard des fraîchement débarqués. Le bar de l'Apéro Joyeux avait était fermer, rideau de fer baissé pour mettre à l'honneur le bar de Laplace qui pouvait passer pour une brasserie et où on ne se sentait pas chez soit puisqu'on ne pouvait pas s'accouder au bar à proprement parlé, le lieu ne s'y prêtant pas.

Toute la ville avait été remaniée par notre maire qui pensait pouvoir faire, enfin, reconnaître sa commune comme étant un petit paradis où il ferait bon vivre, un havre pour vacancier et retraité… On n'était pas franchement ravis mais on nous a pas demandé notre avis, on a dut passer les vaches au jet d'eau et nettoyer nos jardinets, c'est limite si on nous a pas demandé de tuer nos coqs ! Mais vous comprenez, c'est pour la fête, pour la fête vous mettrait bien un peu de votre énergie ? un peu de votre argent ? un peu de votre temps ? Bien sur, il n'y a pas d'obligation… toutefois… vous savez fort bien que nous avons besoin de terrain constructible… votre champ est fort bien placer… Et tout en sourire, et allons-y gaiement ! C'était pour la bonne cause, on ne devait pas faire la gueule mais être heureux ! Avoir au moins une fois dans sa vie l'air heureux… Vous l'aimez votre commune ? Alors prouvez-le ! Vous ne l'aimez pas ? Laissez donc la place ! Un nouvel air devait s'ouvrir et redonner sa jeunesse à notre patelin de cambrouse. Fallait juste que tout se passe bien samedi, juste ça, rien de plus. Un week-end c'est pas la mer à boire, il ferra beau et tout ira bien pour une fois ! Et ça serra la fête de l'école deux semaines plut tôt mais bon, les petits se débrouilleront bien ! Et puis si on a des fruits mûrs on les vend surtout pas, on les offres à la ville qui les distribuera aux enfants et aux jolies filles !
Vaste programme pour un petit festival de musique… Rêve en Scène… A ce demandé si la ville savait ce que ce nom cachait, Rêve en Scène… On emmènera les enfants, les bébés, les vieux de l'hospice voisin et puis… On leur apprendra la vie, la drogue, le bruit… Le maire avait soit disant trouver la musique géniale et abordable, il y avait une star qui serrait là, elle l'avait promis, en fin de nuit… le tout dans le champs de Pédro, qui tirait la tronche mais qui le lendemain se serrait évanouis devant le désastre si les choses c'était dérouler comme prévus.

Les types de Rêve en Scène avait tout bien préparé et était superbement organisé, rien à en redire, des professionnelle sachant comment gérer leur affaire, en montant le son au maximum et en emmenant avec eux toute leur troupe de rêveur qui, habitué, était capable de dormir au milieu de ce bouquant intenable. A l'heure du début, une foule ce massait donc au porte du village, rejoignant le pré en prenant le temps et en rigolant. Tout le village y allait de plus ou moins bon cœur, on était que peu à rester chez soit, c'était pas bien vu. La population était bien plus jeune que le maire l'avait imaginé, il soupira et se résignât, il s'était tromper mais ou ? ça il ne voyait pas. Pour lui une rêve partie c'était sans doute un endroit de mort violente qui ne pouvait pas venir jusqu'à sa porte… Non, il n'y avait pas pensé, pas pensé du tout… la musique électro c'était marrant, ça changeait un peu, non vraiment il ne l'avait pas vu venir, le con ! Les vieux allaient avoir la peur de leur vie, ils pensaient se trouvez dans une guinguette du bon vieux temps qui n'existe que dans leur délires sénile et les voilà emmener de force dans un lieu de débauche et de débâcle. On s'en serrait bien passé mais en même temps c'était drôle à voir, les petits tout yeux ouverts, les parents ne sachant plus sur quel pied fuir, le maire interloquer, le curée priant tout les saints du ciel et des enfers, les jeunes trouvant ça démentiels, les fillettes se faisant dragué par les DJ, les musiciens content, leurs potes aussi. Vous pensé ! Ils avaient étaient accueillis comme des rois ceux qui se faisait jeter d'absolument partout ! On a même vu une vieille totalement barré danser comme une furie sur ces rythmes indescriptibles. De la franche rigolade. Enfin, le maire n'attendait plus que la Star du show pour faire plié bagage, il l'attendait du coin de l'œil, inquiet, de plus en plus. Il finit par envoyer un émissaire, les parents et leurs jeunes enfants ayant déserté, les vieux étant retourné dans leur car, les autres ayant pris sur eux de fuir, seuls quelques jeunes indisciplinés restèrent sur place, et grand bien leur fassent ! Le maire devenait de plus en plus livide… Son émissaire il l'avait pas vraiment choisi, la Jacqueline passait par là, c'est donc elle qui s'y collerait ! D'un pas franc elle partie vers le village voir si la star n'y était pas, la musique battait son plein, les gamins hésitait entre prendre de l'extasie pour faire comme les grands ou écouter sagement en draguant la grande Hélène qui elle n'avait d'yeux que pour l'un des DJ totalement stone.

Jacqueline marchait vivement, pressés que sa mission soit finie, que tout rentre dans l'ordre, elle pensait pas tomber sur un tel os ! Elle avait eu que des crasses dans sa vie, au moins, là elle y était pour rien même si on la vis comme un oiseau de mauvaise augure… Elle revient plus vite qu'elle n'était partie, haletante, respirant mal, au bord de la crise de larme et de l'effondrement, incapable de parler de façon cohérente. En dehors des musiciens et de quelques dormeurs tout le monde se retournât vers l'arrivante, et tout le monde eu peur, même ceux qui n'étaient pas du village. La musique parus lointaine et irréel bien que vecteur d'accélération cardiaque. Le silence ce fit dans l'assistance, toute tendus vers Jacqueline, pantelante et tremblante. D'un doigt elle désignât le village, incapable de nommé ce qu'elle y avait vu qui l'avait paniqué. Alors, sans rien dire, d’un seul mouvement, ils se remirent en marche, comme aimantés par le village, impatients et peureux à la fois.
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Message  Mure Sam 25 Juil 2009 - 9:34

Bien, la semaine est passée, l'exercice est terminé, je commente.

Socque : Il m'a bien fait sourire votre texte.
Pour une fois qu'une invasion alien n'est pas source de panique totale ! :-))))
Le pou, la carte violette, les cannelés... le guide touristique, très drôle !!!
Envisagez-vous d'écrire d'autres aventures de ses nuisibles ? Si oui, je prends !

Easter(Island) : Dommage que ce soit si court, même si l'on peut se fabriquer dix mille scénarios à partir des quelques éléments que tu nous donnes là... drôle, ton texte pourrait être un thème d'exo. :-)))

Pasdepannick : Très imagé, ton texte raconte beaucoup en peu de mots, l'histoire est belle. Et ça :
on n'osait plus entendre...
Ni le chant des grillons, ni le craquement des pas sur la garrigue, ni même le bruit des ricochets dans le Verdon. On n'osait plus entendre, on avait tant parlé...en vain.
Tellement vrai ! Je le dis souvent à mes enfants qui ne supportent guère le silence que je chérie tant ! Parce que rare...

Pandaworks : J'adore !
Ton texte me fait penser à un mélange de dictons populaires mélangés aux croyances tribales, il se veut moralisateur aussi, avec cette punition qui vient.
Et là, je dis bravo :
On avait, chez les petits hommes bruns, cessé de réduire les tête pour se réduire à genoux, plusieurs fois par jour.
Saint Georges : C'est gore à souhait ! Belle scène que vous nous soumettez là, j'ai bien visualisé les porcs... ils me coupent l'appétit d'ailleurs. :-))))

Lulli : La première partie est bien, très bien même... et puis... et puis, à partir de "Toute la ville avait été remaniée par notre maire[...]" je me force à lire et puis... je fini par décrocher. Le ton est moins léger, je ne vois pas d'autres explications.
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Message  bertrand-môgendre Jeu 6 Aoû 2009 - 14:49

C'est aussi ça le Pérou*


Il y avait foule sur la place.

Trujillo, la ville du repos des randonneurs, se métamorphosait à l'occasion du festival international du printemps. Le mot printemps garnissait les bouches péruviennes, en forme de soleil brodé de fleurs. Un printemps doux à Noël donnait léger printemps à Pâques, agréable printemps au mois d'août et chaud printemps à la Toussaint période favorable pour le festival. Ce climat rendait les habitants lymphatiques.
Non loin de la place d'armes, les rues accueillaient les commerçants au tempérament nonchalant. À eux tous réunis, ils pouvaient satisfaire ou susciter les désirs alimentaires des clients. Habituellement, avec dix soles en poche, Isabel parvenait à composer un repas pour cinq personnes à base de riz, maïs, avocat, poisson ou cochon d'Inde suivant l'offre proposée.
Or aujourd'hui, l'Association des éleveurs et propriétaires de chevaux Paso péruviens organisait le concours national. Isabel envisageait pour l'occasion de préparer un seco de cabrito con frijoles (ragoût de chevreau tendre avec les haricots noirs). Elle travaillait du côté du quartier du Golfe comme nounou dans une famille de parvenus chez Benoît et Carla. Sa compatriote se trouvait bien chanceuse d'avoir décoché le jack pot répondant au doux nom de Benoît le français.
Lui, un ancien militaire à la retraite âgé de cinquante-cinq ans, avait bourlingué un peu partout dans le monde. Durant sa jeunesse d'abord au sein de la marine nationale française en tant que matelot, il obtint en fin d'engagement le grade de major, une promotion qui facilita ensuite son entrée dans la marine marchande. Les cinq années suivantes, il fut embauché comme second puis acheva sa carrière civile avec le titre mérité de chef mécanicien. Dans le port de Salaverry, sa prise de terre se nommait Carla. Pénélope et Karol, leurs étincelles d'amour transformèrent le courant alternatif de leur relation en mouvement continu. Benoît quitta la mer, se fixa avec femme et filles à Trujillo. Son apprentissage de la langue espagnole fut facilité par la persistance de son épouse, originaire du pays.
L'immobilier fut son gagne-pain. Il consacrait son temps à négocier l'achat et la vente de maisons. Ses contacts résidaient dans le quartier du Golf un endroit chic de Trujillo où étaient concentrés tous les nantis du pays, les gros bonnets de la drogue issus de Colombie et autres pays limitrophes cherchant l'espace, la discrétion, un endroit pour se dorer la pilule en profitant de la renommée climatique de la ville. Les affaires étant juteuses, Benoît gagnait de l'argent, beaucoup d'argent ce qui lui permit de se faire construire à son tour une belle villa. Le quartier était barricadé et quadrillé en permanence par des watchmen qui surveillaient les biens des habitants.
Bien sûr, vivre dans ces belles demeures vous écartait un peu des réalités de la vie locale. Isabel était restée elle, le lien direct avec la terre ferme. C'est elle qui reçut les premières menaces adressées à son patron el gringo lorsque celui-ci avait acheté un monstrueux 4 x 4 et acquis trois chiens, gardiens féroces de leur propriété grillagée. Les boulettes empoisonnées ingurgitées par les molosses attisèrent le sentiment de peur de Benoît et Carla. Un, puis deux coups de téléphone prévinrent du rapt imminent de la plus âgée de leur fille. De payer une rançon n'était rien à comparer du prix de la vie de leur enfant. Les négociations se déroulèrent dans la douleur, ils réussirent à récupérer Pénélope dans une cabane à proximité du Rio Moche. Les larmes versées influèrent sur le cours de leur vie. Benoît dormait avec son pistolet sous l'oreiller. Un policier lui avait conseillé d'établir lui-même sa propre justice en douce, à condition d'enterrer discrètement les cadavres. Sinon, il risquait de finir ses jours dans une geôle péruvienne en cas de dénonciation. Après plusieurs braquages à son domicile, ne voulant pas mettre la vie des siens en péril, Benoît s'était débarrassé de son 4 x 4 et de tout ce qui pouvait faire état de son train de vie facile. La maison fut mise en vente.
En attendant de nouveaux acquéreurs et surtout d'être mise à la rue, Isabel veillait en permanence sur la maison vide. Sous l'insistance de Benoît, elle y avait installé ses trois enfants. Son mari gardait la propriété, révolver chargé dans la ceinture.
Benoît acheta des billets d'avion pour lui et les siens, à destination de son Poitou natal où ils comptaient couler des jours heureux à la grande satisfaction de Carla qui se faisait une idée grandiose, mais tronquée de la France.

Il y avait foule sur la place d'armes.
Les chevaux envahissaient les rues.
Les cavaliers buvaient beaucoup de bière.
Par mesure de sécurité le centre-ville fut bloqué à la circulation.
Devant l'immobilisme pantois des badauds, le chauffeur de taxi débarqua Benoît, Carla, les enfants et les bagages dans une rue noire de monde. Les pétards claquaient sous leurs pas.

" Alors, sans rien dire , d'un seul mouvement, ils se remirent en marche, comme aimantés par le village, impatients et peureux à la fois. "

C'est aussi ça le Pérou.

* Merci à Nicole “envoyée spéciale” à Trujillo !
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Message  Shaw Mer 12 Aoû 2009 - 10:12

Il y avait foule sur la place.

La fête battait son plein. Les costumes bariolés juraient sur un ciel terne. D'étranges mélopées s'envolaient vers les nuages, tourbillonnant avec violence. Une profusion de joie confuse se dégageait de l'attroupement qui inondait la place publique. Le village semblait secoué d'un élan de folie, en ce jour de carnaval, jour tant attendu parmi les habitants.

Deux êtres ne se mêlaient pas à l'enthousiasme ambiant. Ils avaient marché jusqu'à l'entrée du village, se tenant par la main: Tom et Ana suivaient ce spectacle avec une attention glacée d'effroi.

Le rythme s'était emballé, la foule ivre se massait contre les barrières de sécurité. Le ciel lourd semblait vouloir contenir cette ivresse, comme un couvercle posé sur cette effusion de sentiments.
La foule était animée d'une danse entraînante, menée par un clown sinistre: Tom et Ana se sentaient mystérieusement attirés, en dépit de leur angoisse.

Alors, sans rien dire, d'un seul mouvement, ils se remirent en marche, comme aimantés par le village, impatients et peureux à la fois.
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Message  Invité Mer 12 Aoû 2009 - 18:51

Tom et Ana suivaient ce spectacle avec une attention glacée d'effroi.
Pour quelle raison ?

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Message  Shaw Mer 12 Aoû 2009 - 19:12

pandaworks a écrit:
Tom et Ana suivaient ce spectacle avec une attention glacée d'effroi.
Pour quelle raison ?
Parce que ce spectacle est à la fois joyeux et violent, dionysiaque en somme. Je vois Tom et Ana comme un couple jeune, fragile, qui se sent envahi par cette accès de joie, ce délire.
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Message  mentor Mer 12 Aoû 2009 - 19:18

Shaw a écrit:
pandaworks a écrit:
Tom et Ana suivaient ce spectacle avec une attention glacée d'effroi.
Pour quelle raison ?
Parce que ce spectacle est à la fois joyeux et violent, dionysiaque en somme. Je vois Tom et Ana comme un couple jeune, fragile, qui se sent envahi par cette accès de joie, ce délire.
tu connais pas Panda, faut lui faire une réponse délirante !
il adore
là, t'es bien trop sérieux
;-)

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Message  Shaw Mer 12 Aoû 2009 - 20:39

mentor a écrit:tu connais pas Panda, faut lui faire une réponse délirante !
il adore
là, t'es bien trop sérieux
;-)
Au temps pour moi. On ne m'y reprendra pas! ^^
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Message  Sahkti Mer 12 Aoû 2009 - 20:41

Ha mais j'avais pas vu ceci, m'en vais zyeuter tout ça !
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Message  Invité Ven 28 Aoû 2009 - 15:26

Il n'est jamais trop tard, je suppose, pour commenter.

bertrand-môgendre, je trouve que vous avez voulu trop expliquer, insérer trop d'éléments dans un cadre assez restreint, celui d'un texte bref. Du coup, pour moi, on se retrouve avec une saga, l'histoire quasiment de toute une vie en quelques lignes, et cela me donne une impression fâcheuse de digest. L'intérêt de cette histoire, cela dit, c'est d'introduire la phrase de fin de manière très logique.

Shaw, avec votre texte j'ai eu l'impression exactement inverse, celle d'un manque de consistance : je n'ai pas compris pourquoi les personnages avaient peur, le contexte m'a paru trop vague, rien n'était précisé...

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