— Je t'aime, elle dit. Exo incipitatoire… 4/6 pour Coline
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— Je t'aime, elle dit. Exo incipitatoire… 4/6 pour Coline
— Je t’aime, elle dit.
Nous sommes au restaurant, comme promis. Plus loin, derrière la baie vitrée et encore derrière une terrasse balustrée, le ciel joue avec la mer comme il en a l’habitude à cette heure.
— Et pourquoi ce serait lui qui joue avec elle et pas l’inverse ?
— Pardon ?
— C’est typiquement masculin ça !
— Masculin ?
— Parfaitement ! Sous prétexte que le ciel l’est : masculin, c’est lui qui joue avec elle et non l’inverse. Pourquoi ce ne serait pas l’inverse ?
Je ne lui rétorque pas que normalement elle n’a pas à être au courant parce que je disais pas ça à voix haute, non, même que je faisais un effort sur moi pour rester entre moi et moi, muet, dans une sorte d’intimité toute individuelle, toute personnelle, tout en regardant le ciel qui toujours joue avec la mer à cette heure. — j’y tiens.
— C’est pas parce que tu m’aimes que je te permets de lire par dessus mes pensées, je lui fais.
J’ajoute après avoir bu une gorgée, qu’il est pas mal ce vin, qu’il se laisse faire et un tas de conneries du genre pour éviter l’affrontement direct, pour tenter de noyer le poisson…
Une technique typiquement masculine et qui n’a jamais mais alors jamais fait ses preuves mais que l’homme dans son infinie naïveté continue à éprouver sous prétexte que changeant de femme il a l'impression de changer de monde.
Doux rêve…
Mais non :
— Ne change pas de sujet s’il te plaît !
— Tu préfères que j’inverse, j’inverse : La mer joue avec le ciel comme elle en a l’habitude à…
— C’est trop tard maintenant !
Eh oui, il est trop tard. Le ciel… la mer, pardon, s’est emparée de l’azur pour se le noyer dans ses entrailles et se le fondre, soleil avec, quelque part dans ses abysses, méandres noueux dont j’imagine qu’il sont pourpres, allez savoir pourquoi ?
— Ça c’est pire que masculin, c’est sexiste !
— Je t’aime aussi, je lui réponds.
— Je t’aime, elle dit.
Nous sommes au restaurant, comme promis et, je ne sais pourquoi, le serveur me fait penser à une blatte. La gueule ? La tenue ? Les deux ? J’en sais trop rien mais je l’observe naviguant d’une table à l’autre et je lui imagine six pattes, des antennes, et se faisant, l’imaginant ainsi, bien sûr, je repense à La métamorphose de Kafka. Et voilà que la blatte s’emmêle les pattes, et la voilà qui tombe, et que son plateau vole, et que les cocktails qui jusqu’à présent trônaient sur ledit plateau aussi s’envolent, atterrissent, où plutôt amerrissent vu qu’ils inondent la clientèle alentours : cris, consternation, agitation :
Une jolie fille en robe blanche genre mannequin mais dépourvu de l’essentiel soit : du charme
« Du sel vite ! »
Lui — un prétendant — si je vous dis un « prétendant » c’est parce qu’il a encore cet air protecteur d’avant l’acte — le sourire d’avant consommation ça trompe pas, me dis-je.
« Ben, c’est pas du vin ! »
La jolie fille en robe blanche genre starlette outrée et comme aspirée par l’intense effort intellectuel que demande une réponse.
— Mais…
Le serveur qui décidément ressemble à une blatte — il pourrait lui pousser des ailes là et maintenant que même pas ça m’étonnerait.
— C’est la maison qui offre !
Se passe quoi, trois secondes avant que je décroche de la scène et que mon regard se pose à nouveau sur elle.
Mon Dieu qu’elle est jolie.
— T’as entendu ? elle demande.
— J’aime Kafka aussi, je lui réponds.
— Je t’aime, elle dit.
Nous sommes au restaurant, comme promis.
Enfin, nous sommes accoudés au comptoir.
C’est peut-être même pas un comptoir.
Bon, c’est peut-être pas non plus un restaurant.
Pas vraiment.
Sans parler qu’on n'est pas accoudés du tout.
Mais c’est un truc italien parce que dans mon assiette nagent des raviolis.
Sur la boîte c’est marqué « Buitoni »
M’est avis qu’on est fin du mois.
M’est avis que de ça au moins je suis sûr.
Je m’en tape du resto des nappes à carreaux.
Des serveurs à six pattes et du reste.
— Et pour les loisirs c’est comme pour la bouffe, je lui demande, on fait dans l’économie ?
— Tu connais moins cher que la baise toi ?
Ah, les raviolis de Buitoni…
Nous sommes au restaurant, comme promis. Plus loin, derrière la baie vitrée et encore derrière une terrasse balustrée, le ciel joue avec la mer comme il en a l’habitude à cette heure.
— Et pourquoi ce serait lui qui joue avec elle et pas l’inverse ?
— Pardon ?
— C’est typiquement masculin ça !
— Masculin ?
— Parfaitement ! Sous prétexte que le ciel l’est : masculin, c’est lui qui joue avec elle et non l’inverse. Pourquoi ce ne serait pas l’inverse ?
Je ne lui rétorque pas que normalement elle n’a pas à être au courant parce que je disais pas ça à voix haute, non, même que je faisais un effort sur moi pour rester entre moi et moi, muet, dans une sorte d’intimité toute individuelle, toute personnelle, tout en regardant le ciel qui toujours joue avec la mer à cette heure. — j’y tiens.
— C’est pas parce que tu m’aimes que je te permets de lire par dessus mes pensées, je lui fais.
J’ajoute après avoir bu une gorgée, qu’il est pas mal ce vin, qu’il se laisse faire et un tas de conneries du genre pour éviter l’affrontement direct, pour tenter de noyer le poisson…
Une technique typiquement masculine et qui n’a jamais mais alors jamais fait ses preuves mais que l’homme dans son infinie naïveté continue à éprouver sous prétexte que changeant de femme il a l'impression de changer de monde.
Doux rêve…
Mais non :
— Ne change pas de sujet s’il te plaît !
— Tu préfères que j’inverse, j’inverse : La mer joue avec le ciel comme elle en a l’habitude à…
— C’est trop tard maintenant !
Eh oui, il est trop tard. Le ciel… la mer, pardon, s’est emparée de l’azur pour se le noyer dans ses entrailles et se le fondre, soleil avec, quelque part dans ses abysses, méandres noueux dont j’imagine qu’il sont pourpres, allez savoir pourquoi ?
— Ça c’est pire que masculin, c’est sexiste !
— Je t’aime aussi, je lui réponds.
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— Je t’aime, elle dit.
Nous sommes au restaurant, comme promis et, je ne sais pourquoi, le serveur me fait penser à une blatte. La gueule ? La tenue ? Les deux ? J’en sais trop rien mais je l’observe naviguant d’une table à l’autre et je lui imagine six pattes, des antennes, et se faisant, l’imaginant ainsi, bien sûr, je repense à La métamorphose de Kafka. Et voilà que la blatte s’emmêle les pattes, et la voilà qui tombe, et que son plateau vole, et que les cocktails qui jusqu’à présent trônaient sur ledit plateau aussi s’envolent, atterrissent, où plutôt amerrissent vu qu’ils inondent la clientèle alentours : cris, consternation, agitation :
Une jolie fille en robe blanche genre mannequin mais dépourvu de l’essentiel soit : du charme
« Du sel vite ! »
Lui — un prétendant — si je vous dis un « prétendant » c’est parce qu’il a encore cet air protecteur d’avant l’acte — le sourire d’avant consommation ça trompe pas, me dis-je.
« Ben, c’est pas du vin ! »
La jolie fille en robe blanche genre starlette outrée et comme aspirée par l’intense effort intellectuel que demande une réponse.
— Mais…
Le serveur qui décidément ressemble à une blatte — il pourrait lui pousser des ailes là et maintenant que même pas ça m’étonnerait.
— C’est la maison qui offre !
Se passe quoi, trois secondes avant que je décroche de la scène et que mon regard se pose à nouveau sur elle.
Mon Dieu qu’elle est jolie.
— T’as entendu ? elle demande.
— J’aime Kafka aussi, je lui réponds.
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— Je t’aime, elle dit.
Nous sommes au restaurant, comme promis.
Enfin, nous sommes accoudés au comptoir.
C’est peut-être même pas un comptoir.
Bon, c’est peut-être pas non plus un restaurant.
Pas vraiment.
Sans parler qu’on n'est pas accoudés du tout.
Mais c’est un truc italien parce que dans mon assiette nagent des raviolis.
Sur la boîte c’est marqué « Buitoni »
M’est avis qu’on est fin du mois.
M’est avis que de ça au moins je suis sûr.
Je m’en tape du resto des nappes à carreaux.
Des serveurs à six pattes et du reste.
— Et pour les loisirs c’est comme pour la bouffe, je lui demande, on fait dans l’économie ?
— Tu connais moins cher que la baise toi ?
Ah, les raviolis de Buitoni…
Yali- Nombre de messages : 8624
Age : 60
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: — Je t'aime, elle dit. Exo incipitatoire… 4/6 pour Coline
Ah, merci !
C'est vrai, ça me chiffonnait, déjà que peut-être il l'aime plus, si en plus elle bouffe pas , la vie est vraiment trop triste !^^^
Sans compter que lui non plus.
Y'a du flou dans les sentiments. C'est pas mal le flou quand le sentiment n'est pas joli.
Quand Kafka s'en mêle ( c'était un tombeur !)... ça devient labyrinthique.
Quand Yali s'en mêle... on numérote ses abatis ( avec un seul t, comme en bas breton !)
Je t'aime , elle lui dit pas.
C'est vrai, y'a pas urgence. Il attendra le facteur.
Le facteur Chance.
La distribution est aléatoire.
Y'a vraiment plus de service public !
C'est vrai, ça me chiffonnait, déjà que peut-être il l'aime plus, si en plus elle bouffe pas , la vie est vraiment trop triste !^^^
Sans compter que lui non plus.
Y'a du flou dans les sentiments. C'est pas mal le flou quand le sentiment n'est pas joli.
Quand Kafka s'en mêle ( c'était un tombeur !)... ça devient labyrinthique.
Quand Yali s'en mêle... on numérote ses abatis ( avec un seul t, comme en bas breton !)
Je t'aime , elle lui dit pas.
C'est vrai, y'a pas urgence. Il attendra le facteur.
Le facteur Chance.
La distribution est aléatoire.
Y'a vraiment plus de service public !
Invité- Invité
Re: — Je t'aime, elle dit. Exo incipitatoire… 4/6 pour Coline
La prose Meetic de Yali, on s'en lasse pas. J'espère qu'on aura cette histoire de collectionneur de godes dont tu promettais il y à peu la livraison imminente.
Invité- Invité
Re: — Je t'aime, elle dit. Exo incipitatoire… 4/6 pour Coline
Bien joué. Les sketchs sont rapides et bien croqués. Qu'est-ce qui m'arrive? Je commence à apprécier... D'ici que ce soit viral...
silene82- Nombre de messages : 3553
Age : 67
Localisation : par là
Date d'inscription : 30/05/2009
Re: — Je t'aime, elle dit. Exo incipitatoire… 4/6 pour Coline
- Je t'aime, elle dit.pandaworks a écrit:J'espère qu'on aura cette histoire de collectionneur de godes dont tu promettais il y à peu la livraison imminente.
Nous sommes dans un sex shop, comme promis..
Si, si, ça le fait. J'aime surtout le deuxième "Moi aussi, j'aime Kafka". Et puis j'aime aussi surtout le premier "C'est pas parce que tu m'aimes que je te permets de lire par dessus mes pensées". Le troisième peut-être un peu moins, mais quand même "Tu connais moins cher que la baise, toi?"
A quand les 7/9?
Chako Noir- Nombre de messages : 5442
Age : 34
Localisation : Neverland
Date d'inscription : 08/04/2008
Re: — Je t'aime, elle dit. Exo incipitatoire… 4/6 pour Coline
Je t'aime, elle dit. Tu m'en feras d'autres ?
Invité- Invité
Re: — Je t'aime, elle dit. Exo incipitatoire… 4/6 pour Coline
Amertume minimaliste... Je n'adore pas, mais c'est bien fichu.
Invité- Invité
Re: — Je t'aime, elle dit. Exo incipitatoire… 4/6 pour Coline
Je ne dis rien parce qu'il n'y a rien à (re)dire.
Invité- Invité
Re: — Je t'aime, elle dit. Exo incipitatoire… 4/6 pour Coline
Peut-être que si le narrateur avait commencé par dire que c'était la mer qui jouait avec le ciel, la femme lui aurait répondu "C'est bien masculin ça de dire que les femmes sont joueuses avec les hommes".
Insupportables parfois les bonnes femmes :-)
J'adore le fragment n° 2, sa pointe d'asurdité, son côté théâtral; c'est bien fichu dis donc.
Le trois a la mérite d'aller à l'essentiel en peu de mots, tendre et péotique dans sa familiarité du quotidien.
Insupportables parfois les bonnes femmes :-)
J'adore le fragment n° 2, sa pointe d'asurdité, son côté théâtral; c'est bien fichu dis donc.
Le trois a la mérite d'aller à l'essentiel en peu de mots, tendre et péotique dans sa familiarité du quotidien.
Sahkti- Nombre de messages : 31659
Age : 50
Localisation : Suisse et Belgique
Date d'inscription : 12/12/2005
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