L'eau verte pénétra ma coque de sapin

Tu sais, Marie, ….il y a l’océan
Cette espérance liquide qui sépare nos vies
Cette ivresse d'écume sauvage et envoûtante
Qui polit les galets en de rondes douceurs
Fracassant l’impudence de nos digues de pierre


Je sais, Marie,…..il y tes peurs
Cette meute furtive qui voyage la nuit
Pour laisser au matin la trace du chagrin
Tous ces mots que tu sèmes sur des terres arides
Ces veines tailladées rougissant l’émail blanc


Tu sais, Marie,…..il y a New York
Cette ville dressée sur ses pattes arrière
Qui tête les nuages et dévore ses fils
Cette force grouillante qui soulève nos corps
Ce vent de l’océan écartelant les rues


Je sais, Marie,….il y a tes souvenirs
Tous ces pleurs contenus sous l’orage des landes
Ce silence imposé comme un péché d’orgueil
Ce plongeon redouté des falaises abruptes
Et puis mes mains tremblantes dessinant l’avenir


Je t’attends

Beaucoup d'allure ! Cela dit, je trouve le procédé Tu sais/Je sais - il y a un peu visible... Mais de belles images, ça oui, le poème fait rêver.

Deux remarques :
"Je sais, Marie,…..il y (a) tes peurs"
"Cette ville dressée sur ses pattes arrière
Qui tète les nuages "

Superbe et particulièrement l'image de New York "qui tête les nuages et dévore ses fils". J'aime le jeu de mot tête qui fait bien sûr penser à tète.
C'est un très beau poème.

Décidément, j'aime beaucoup tes poèmes Mitsouko.
Contrairement à Socque, je ne trouve pas la répétition "trop" visible. Elle me paraît ajouter un effet chanson voire complainte, un côté lancinant qui n'est pas inintéressant. J'y vois aussi une sorte de dialogue intérieur avec l'autre, l'absente, qui témoigne d'une grande proximité affective.
Je n'ai par contre pas bien compris le pourquoi du titre : ce vers du "bateau ivre" de Rimbaud ?

J'aime tout particulièrement la 3é strophe
avec cette image à la fois évocatrice et surprenante de New-York,
ce regard de profil qui délivre une autre vérité.

Une écriture résolument moderne pour un thème toujours recommencé.
La première lecture m'a charmée - thème et expression ; la deuxième moins, il me semble que Mitsouko a les moyens de plus d'ampleur. Je le sais, je l'ai lu ailleurs :-)
Dans ce style, par exemple : Et puis mes mains tremblantes dessinant l’avenir

ton écriture est particulière, inquiétante souvent, presque bipolaire, c'est qui je pense en fait sa teneur...

Rien à redire pour moi
c'est très beau.
J'aime

voilà comme j'aime te lire ! un poèmr qui commence par vous prendre gentiment par la main et qui finit par vous arracher.

(Pile-poil, "les pattes arrière" de New york... )

Bonjour mitsouko,

j'ai pas trop mal aimé l'ensemble de ce poème, mais deux ou trois choses m'ont empêché de le savourer pleinement...

Déjà, malgré moi, la répétition « Tu sais, Marie..., Je sais, Marie..., Tu sais, Marie...» m'a fait penser à la chanson de Johnny (c'est outretemps qui va être content !) : « Ô Marie, si tu savais, tout le mal que l'on me fait... Ô Marie, si je pouvais dans tes bras nus me reposer... »

Si t'aimes pas trop Johnny, j'ai une deuxième référence peut-être plus glorieuse qui m'est venue et qui m'a également un peu gênée...

qui voyage la nuit

il y a New York

Cette ville dressée sur ses pattes arrière

Là j'ai carrément pensé à Voyage au bout de la nuit

Figurez-vous qu'elle était debout leur ville, absolument droite. New York c'est une ville debout...

J'ai également trouvé qu'il manquait de musique dans ce poème, une strophe de plus et j'aurais sûrement décroché car je me serais ennuyé je pense...

Mais rassure-toi, à part ces quelques remarques, j'ai apprécié ton poème, c'est juste qu'il manque peut-être d'un peu plus de force à mon goût ; L'ensemble des strophes n'est pas assez puissant selon moi pour en arriver à la conclusion que l'auteur de la « lettre » attend Marie, à sa place (de Marie) je serais mitigée...

Bonjour Mitsouko
Je ne trouve pas gênante la répétition que l'on pourrait te reprocher, je la crois voulue et elle a un certain sens.
Forcément, on pense à la chanson de Johnny, et je m'efforce de bannir ce rapprochement de mon esprit, car je suis sûre que cela n'est pas voulu de ta part.
Ensuite, et bien, une fois de plus, je suis sous le charme de ton langage tellement poétique, et je te remercie.
Amicalement, Embellie.

Ah, oui, le titre : à première vue, pourquoi ce vers ?
Il insinue pour moi à la fois une prémonition et une conclusion. Il y a l'océan, l'incertitude, je t'attends, l'espoir...et le naufrage pressenti, avéré, résumé dans le titre. C'est une cruauté finement exprimée.

Jolie cette description de l' incommunicabilité des deux mondes, l'Ancien monde, celui des peurs et des souvenirs et le Nouveau Monde, avec océans à franchir.
C'est intéressant les interprétations de chacun.

Sur le titre: pour moi la coque de sapin c'est un cercueil...En partance vers la mort l'eau verte qui la pénètre mène au Nouveau Monde c'est donc le contraire d'un naufrage...une espérance ...une nouvelle vie

Je sais, tu sais... c'est un peu trop présent à mon goût.

Ceci mis à part, il y a de belles images, riches de sens, dans ce poème que je trouve bien construit, tant sur le rythme, la forme que le propos.
J'aime beaucoup ce choix de titre aussi, symbolique. Comme pas mal d'éléments du texte, d'ailleurs.

Avec l'accord de l'auteur, voici une version vocale :