Baiser non volé

Baiser non volé

Où êtes vous enfuie,
Vous qu’un jour je frôlai
Sous la lune qui luit,
En ce lointain palais
Que fut notre jeunesse ?

Fallait-il qu’au désir
En cet instant je naisse,
Pour aujourd’hui gésir
En un lit de remords,
Persuadé, sans vous,

De n’être qu’heureux mort ?
Un baiser, je l’avoue,
Sous la lune ravie,
Que j’eusse dérobé,
Eût transformé ma vie.

M’en soit témoin Phœbé,
Je suis demeuré sage,
M’imposant cette fièvre,
Jusqu’au bout de mon âge,
De rêver de vos lèvres.

A quelque chose malheur est bon : cette infortune et ses brûlants regrets vous auront permis de nous offrir ce texte simplement superbe ...

Oui ! L'astucieux système de rimes (entre autres joliesses) donne toute sa légèreté à ce gracieux poème... Moi qui n'aime pas les hexasyllabes d'habitude, dont je trouve le rythme lassant, je suis conquise !

"En ce lointain palais
Que fut notre jeunesse " J'adore !

Classiquement superbe, fond et forme. Du très classique qui sait rester léger.

Bonsoir Hellian,

j'ai beaucoup aimé et le fond et la forme avec un tout petit bémol pour les trois « De » un peu trop à l'étroit selon moi dans ce passage...

Hellian a écrit: de mon âge,
De rêver de

J'aime ! Le rythme est parfait !
Réserve toute personnelle pour Phœbé... j'aime rarement les allusions mythologiques dans les poèmes (chez Nerval, ça passe).

A défaut d'être original : j'aime, passionnément.
C'est franchement bien mené.

Re bonsoir Hellian,

je viens de relire plusieurs fois ton poème, tu ne pourras pas m'accuser de l'avoir survolé hein :-)

C'est fort quand même d'arriver à installer cette ambiance de regrets en si peu de mots...
Je ne sais pas si c'est voulu, mais le titre m'a renvoyé chez Truffaut (pas le fleuriste quoi que je l'aime beaucoup aussi !) et à la magnifique chanson de Charles Trenet... (Je la mets ci-dessous, mais si t'aimes pas ou que tu trouves que ça n'a rien à faire avec ton poème, tu peux demander gentiment à la Modération de supprimer...)

Ce soir, le vent qui frappe à ma porte
Me parle des amours mortes
Devant le feu qui s'éteint
Ce soir, c'est une chanson d'automne
Dans la maison qui frissonne
Et je pense aux jours lointains

{Refrain:}
Que reste-t-il de nos amours ?
Que reste-t-il de ces beaux jours ?
Une photo, vieille photo de ma jeunesse
Que reste-t-il des billets doux,
Des mois d'avril, des rendez-vous ?
Un souvenir qui me poursuit sans cesse
Bonheur fané, cheveux au vent
Baisers volés, rêves mouvants
Que reste-t-il de tout cela ?
Dites-le-moi
Un petit village, un vieux clocher
Un paysage si bien caché
Et dans un nuage, le cher visage de mon passé

Les mots, les mots tendres qu'on murmure
Les caresses les plus pures
Les serments au fond des bois
Les fleurs qu'on retrouve dans un livre
Dont le parfum vous enivre
Se sont envolés, pourquoi ?

J'aime aussi.

Que du plaisir.
Étrange combien sont vives dans la mémoire les amours non abouties. Vrai qu'elles sont peut-être les plus belles, puisqu'aucune réalité ne leur a porté atteinte.

Merci Hellian

Un bel hommage à une " belle passante" ( une de mes chansons préférées, bien que j'aime aussi Trenet )Le rythme souligne le côté fugace de l'aventure. J'aurais aimé un alexandrin à la fin pour exprimer la pérennité du regret.

Un beau texte... Un charme un peu hors temps, mais si doux.
De rêver de vos lèvres... de rêver à !

Un peu précieux, un peu roublard, beaucoup de charme dans ce baiser qui prend la lune à témoin de son indéfectible fidélité au passé.
J'y sens un clin d'oeil malicieux mais je me trompe peut-être ...

De n’être qu’heureux mort ?
Perdrait-il de son sens sous cette forme- là :
De n'être heureux que mort ? qui me semble plus fluide

Et le jeu de mots, t'en fais quoi Arielle non mais dis donc :-)
Pour moi en tout cas, bien sûr que ça perdrait tout son sens, surtout que quand Hellian nous gratifieras de la version audio, la possible double interprétation n'en prendra que plus de force je pense... (c'est pas comme si je répondais à un commentaires en disant que je ne suis pas d'accord avec ce dernier, c'est juste pour participer chère et adorée Modéraion :-)))


< La Modérassion compatit... >
.

Je vois dans ce baiser à peine osé un clin d'œil bien plus marqué ne serait-ce que dans ce vers à double sens :

De n’être qu’heureux mort ?

Je salue donc une fois de plus la dextérité du poète.

Vi, vi, quelle nunuche je suis de n'avoir pas entendu le double sens ! Je dois être la seule à avoir l'oreille aussi dure ... Please, n'y enfoncez pas le clou !

Peter pan, crochet aurait du vous faire la peau avant que vous voliez mes commentaires... phonographe croustillant Trenet!

De la belle ouvrage, en vérité ! alliant finesse et musicalité ...
votre regret poignant est si bien suggéré que pour un peu, on l'éprouverait aussi !

Les compliments non plus , vous ne les avez pas volés !

Mychelc

on fredonnerait presque du Trenet là-dessus

mais la plus grande prouesse, fut de convertir Socque à l'hexasyllabe et là j'avoue....

dites nous Socque pourquoi l'hexasyllabe vous chagrine

Ben, parce qu'en général j'en trouve le rythme monotone, plat... C'est un rythme difficile à aviver, je trouve, il ne rebondit pas mais marche en faisaint traîner ses charentaises. Là, je m'incline, Hellian le fait sautiller avec grâce !

Vous avez une très belle plume Hélian, je vous envie.
Que de légèreté dans ce baiser volé!

version vocale :