Le mors de la petite cheval
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silene82
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Le mors de la petite cheval
- Mais pourquoi tu as tué la vieille ?
- J’en sais rien, un coup de chaud
- Un coup de chaud ? Mais tu es folle ou quoi ? Pourquoi un coup de chaud en ce moment alors que tout roulait comme sur des jonquilles ?
- Qu’est ce que j’en sais moi, tu poses de ces questions, on dirait un psychiatre sur la sellette.
- Le divan.
- La chaise percée si tu veux, pour ce que j’en ai à braire de ces salades. La vieille me fatiguait les genoux, surtout à l’heure du lait. Voilà. C’est à prendre et à laisser.
- Il faudra tout de même que tu m’expliques Gretel, on ne décapite pas une octogénaire comme ça sans raison. Surtout à la force du poignet.
- Tu sais que tu me barbes Hans ?
- Je sais.
- Et que je pourrais bien te faire subir le même sort ?
- Tu n’oserais pas mon amour.
- Ah, et quel ressort m’en empêcherait ?
- Les sentiments intenses et variés que tu me portes, douce mignonne.
- Mes sentiments sont variables très cher compagnon de jour sans pain, et imprévisibles comme il se doit dans de pareilles circonférences. J’ai tendance à bascule en ce moment, alors…
- Reçu quinte sur quinte ; néanmoins Gretel, je ne te demande pas de refaire ton cœur mais de justifier cet acte insensé.
- Mettons le sac d’os, les fémurs de verre, le cerveau délabré, les mains sucrées et les varices muettes, tu jettes tout ça dans la glace, tu secoues, tu regardes, le truc te paraît incroyable, comme tombé de la planète cimetière. Le futur glisse de tes yeux sidérés, te saisit à la glotte, te serre le kiki, et tu brises le mirage d’un coup sec. Sapin !
- Sapin…sapin…de garenne ?
- Pire, d’élevage intense. Ce coup-là, l’ultime, tu ne peux pas faire autrement que de le porter à sa destinataire.
- Facile non ?
- Mais terrible. Je maintiens dur comme faire que le « facile » s’exécute avec beaucoup de difficultés et de grâce conjugués dans l’instant.
- Bon Gretel, si j’ai bien compris, la vieille t’a effrayée ?
- Non, elle m’a juste rappelé que je détestais les toiles filantes. Et surtout, surtout, que je ne lirai jamais la fin de mon histoire à la vitesse à laquelle nous traçons l’incandescent.
Tu sais quoi ? J’ai comme l’idée que nous grillons sur place.
- Et ?
- Et rien. Cette vieille était une offense à l’allumage.
- En attendant nous avons perdu notre source de revenus.
- Y’en aura d’autres, c’est pas le client qui manque.
- A l’allure où tu le liquides il ne nous restera plus que la prime jeunesse.
- Et alors ?
- Je ne sais que te répondre Gretel, c’est la douzième en un an.
- Une par mois me semble raisonnable.
- Nous avons écumé vingt hôtels cinq étoiles, dix à quatre ; je crains que nous ne dégringolions dans la rubrique « pension de famille ».
- Aucune chance Hansou de mes tripes, les « pensions de famille » ne reçoivent plus de vieillesse dorée.
- Qu’allons-nous devenir ?
- Nous chercherons dans les villages d’aisance, les parcs clos, les villas, les demeures vrillées, nous chercherons dans les fosses hors du commun, les tombales de marbre, les crémations d’or. Nous chercherons Hans, et cette quête de l’insane nous fera oblitérer notre jeunesse affamée. Nous chercherons pour ne rien trouver, pour occuper le temps réparti sous vide. Et puis, quand le hasard aux gants de daim placera quelques rides sur notre route, nous les ferons payer de nous crevasser en silence.
- En attendant je crève la dalle
- Patience Hans, patience. Regarde, là, sur le banc posée, une grelotte à sanglots nous attend, reste où tu es, j’y vais.
On voit une ombre s’avancer vers une silhouette assise, personne n’entendra leur dialogue. Personne ne verra personne se lever, ni Hans statufié, ni le public tartuffé.
- J’en sais rien, un coup de chaud
- Un coup de chaud ? Mais tu es folle ou quoi ? Pourquoi un coup de chaud en ce moment alors que tout roulait comme sur des jonquilles ?
- Qu’est ce que j’en sais moi, tu poses de ces questions, on dirait un psychiatre sur la sellette.
- Le divan.
- La chaise percée si tu veux, pour ce que j’en ai à braire de ces salades. La vieille me fatiguait les genoux, surtout à l’heure du lait. Voilà. C’est à prendre et à laisser.
- Il faudra tout de même que tu m’expliques Gretel, on ne décapite pas une octogénaire comme ça sans raison. Surtout à la force du poignet.
- Tu sais que tu me barbes Hans ?
- Je sais.
- Et que je pourrais bien te faire subir le même sort ?
- Tu n’oserais pas mon amour.
- Ah, et quel ressort m’en empêcherait ?
- Les sentiments intenses et variés que tu me portes, douce mignonne.
- Mes sentiments sont variables très cher compagnon de jour sans pain, et imprévisibles comme il se doit dans de pareilles circonférences. J’ai tendance à bascule en ce moment, alors…
- Reçu quinte sur quinte ; néanmoins Gretel, je ne te demande pas de refaire ton cœur mais de justifier cet acte insensé.
- Mettons le sac d’os, les fémurs de verre, le cerveau délabré, les mains sucrées et les varices muettes, tu jettes tout ça dans la glace, tu secoues, tu regardes, le truc te paraît incroyable, comme tombé de la planète cimetière. Le futur glisse de tes yeux sidérés, te saisit à la glotte, te serre le kiki, et tu brises le mirage d’un coup sec. Sapin !
- Sapin…sapin…de garenne ?
- Pire, d’élevage intense. Ce coup-là, l’ultime, tu ne peux pas faire autrement que de le porter à sa destinataire.
- Facile non ?
- Mais terrible. Je maintiens dur comme faire que le « facile » s’exécute avec beaucoup de difficultés et de grâce conjugués dans l’instant.
- Bon Gretel, si j’ai bien compris, la vieille t’a effrayée ?
- Non, elle m’a juste rappelé que je détestais les toiles filantes. Et surtout, surtout, que je ne lirai jamais la fin de mon histoire à la vitesse à laquelle nous traçons l’incandescent.
Tu sais quoi ? J’ai comme l’idée que nous grillons sur place.
- Et ?
- Et rien. Cette vieille était une offense à l’allumage.
- En attendant nous avons perdu notre source de revenus.
- Y’en aura d’autres, c’est pas le client qui manque.
- A l’allure où tu le liquides il ne nous restera plus que la prime jeunesse.
- Et alors ?
- Je ne sais que te répondre Gretel, c’est la douzième en un an.
- Une par mois me semble raisonnable.
- Nous avons écumé vingt hôtels cinq étoiles, dix à quatre ; je crains que nous ne dégringolions dans la rubrique « pension de famille ».
- Aucune chance Hansou de mes tripes, les « pensions de famille » ne reçoivent plus de vieillesse dorée.
- Qu’allons-nous devenir ?
- Nous chercherons dans les villages d’aisance, les parcs clos, les villas, les demeures vrillées, nous chercherons dans les fosses hors du commun, les tombales de marbre, les crémations d’or. Nous chercherons Hans, et cette quête de l’insane nous fera oblitérer notre jeunesse affamée. Nous chercherons pour ne rien trouver, pour occuper le temps réparti sous vide. Et puis, quand le hasard aux gants de daim placera quelques rides sur notre route, nous les ferons payer de nous crevasser en silence.
- En attendant je crève la dalle
- Patience Hans, patience. Regarde, là, sur le banc posée, une grelotte à sanglots nous attend, reste où tu es, j’y vais.
On voit une ombre s’avancer vers une silhouette assise, personne n’entendra leur dialogue. Personne ne verra personne se lever, ni Hans statufié, ni le public tartuffé.
Ba- Nombre de messages : 4855
Age : 71
Localisation : Promenade bleue, blanc, rouge
Date d'inscription : 08/02/2009
Re: Le mors de la petite cheval
Beaucoup aimé le conte revisité de cette manière grinçante et impitoyable; la vieillesse : offense à l'allumage et quelques autres perles de cet accabi mais je n'ai pas compris le titre.- Mettons le sac d’os, les fémurs de verre, le cerveau délabré, les mains sucrées et les varices muettes, tu jettes tout ça dans la glace, tu secoues, tu regardes, le truc te paraît incroyable, comme tombé de la planète cimetière. Le futur glisse de tes yeux sidérés, te saisit à la glotte, te serre le kiki, et tu brises le mirage d’un coup sec. Sapin !
Et puis j'ai envie de te le dire depuis hier : J'adore ton nouvel avatar. La classe !
Re: Le mors de la petite cheval
Ah, je viens de comprendre ... Bon c'est vrai, ça , ce n'était qu'une vieille carne après tout !
Re: Le mors de la petite cheval
Un texte qui respire la finesse et l'intelligence. L'irrévérence aussi, mais ça c'est normal. J'ai ri au dialogue du tout début, ces jeux de mots drôles et /ou cruels :
etPourquoi un coup de chaud en ce moment alors que tout roulait comme sur des jonquilles ?
- Qu’est ce que j’en sais moi, tu poses de ces questions, on dirait un psychiatre sur la sellette.
- Le divan.
- La chaise percée si tu veux
Très fort Ba, très fort, comme d'hab.- Reçu quinte sur quinte
Invité- Invité
Re: Le mors de la petite cheval
Et puis, je cite aussi, pour mon plus grand plaisir de lectrice tartuffée bien volontiers :
quand le hasard aux gants de daim placera quelques rides sur notre route, nous les ferons payer de nous crevasser en silence.
une grelotte à sanglots nous attend
Invité- Invité
Re: Le mors de la petite cheval
Vos textes, Ba, sont très singuliers, c’est le moins que l’on puisse dire.
Hé oui, je les lis. Même si je les commente plus que rarement. A vrai dire, je rechigne devant la difficulté car vos « ovnis » sont tellement denses, tellement hors référents, que je n’arrive pas à les saisir complètement. Mais à chaque fois je me délecte de bribes, de fulgurances.
Comme ici :
« Mettons le sac d’os, les fémurs de verre, le cerveau délabré, les mains sucrées et les varices muettes, tu jettes tout ça dans la glace, tu secoues, tu regardes, le truc te paraît incroyable, comme tombé de la planète cimetière. Le futur glisse de tes yeux sidérés, te saisit à la glotte, te serre le kiki, et tu brises le mirage d’un coup sec. Sapin ! »
Hé oui, je les lis. Même si je les commente plus que rarement. A vrai dire, je rechigne devant la difficulté car vos « ovnis » sont tellement denses, tellement hors référents, que je n’arrive pas à les saisir complètement. Mais à chaque fois je me délecte de bribes, de fulgurances.
Comme ici :
« Mettons le sac d’os, les fémurs de verre, le cerveau délabré, les mains sucrées et les varices muettes, tu jettes tout ça dans la glace, tu secoues, tu regardes, le truc te paraît incroyable, comme tombé de la planète cimetière. Le futur glisse de tes yeux sidérés, te saisit à la glotte, te serre le kiki, et tu brises le mirage d’un coup sec. Sapin ! »
Kilis- Nombre de messages : 6085
Age : 78
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Le mors de la petite cheval
Un vrai petit festin macabre...
Rebecca- Nombre de messages : 12502
Age : 65
Date d'inscription : 30/08/2009
Re: Le mors de la petite cheval
"tracer l'incandescent" lit le commentateur muet
qui n'en dira pas plus
Aujourd'hui
qui n'en dira pas plus
Aujourd'hui
Roz-gingembre- Nombre de messages : 1044
Age : 61
Date d'inscription : 14/11/2008
Re: Le mors de la petite cheval
Rien que pour ces lectures, je suis ravie d'être revenue et de pouvoir dire, bravo. Toujours désarçonnée chez vous, et encore, ce pourrait être pire, si je saisissais toutes les allusions.
Invité- Invité
Re: Le mors de la petite cheval
"Tartuffée" de cette façon ,je veux bien l'être tous les jours pour me délecter d'une telle prose !
Merci .
Merci .
Polixène- Nombre de messages : 3287
Age : 61
Localisation : Dans un pli du temps . (sohaz@mailo.com)
Date d'inscription : 23/02/2010
Re: Le mors de la petite cheval
J'en ai encore la glotte trémulante, Ba, merci jubilant !
Invité- Invité
Re: Le mors de la petite cheval
quel univers que le tien !
tu devrais aller de l'autre côté du site expliquer à Fauve Noir ce que tu entends par STYLE en écriture
:-))
tu devrais aller de l'autre côté du site expliquer à Fauve Noir ce que tu entends par STYLE en écriture
:-))
Re: Le mors de la petite cheval
C'est presque aussi bien que du Ba, en fait.
silene82- Nombre de messages : 3553
Age : 66
Localisation : par là
Date d'inscription : 30/05/2009
Re: Le mors de la petite cheval
Un style toujours aussi décalé, déjanté et une écriture amoureuse de la langue, en forme assez théâtrale. J'aime vraiment beaucoup ces petites perles !
demi-lune- Nombre de messages : 795
Age : 63
Localisation : Tarn
Date d'inscription : 07/11/2009
Re: Le mors de la petite cheval
Quelle maestria dans l’art du détournement et de la subversion : subversion des mots, des expressions communes, des contes, et même de la morale !
Louis- Nombre de messages : 458
Age : 68
Date d'inscription : 28/10/2009
Re: Le mors de la petite cheval
Halte là petit poney, calmez votre course, arrêtez vous et moi-sonnons ensemble.
Faut-il que les gardiens tracent d’infinis sillons, exaltant d’imprenables pollens, qu’ils fixent l’ailleurs rétif sur un chemin de haute élucidation ?
Quel serment d’allégeance, à demi mot ? Quelle flamme dans la demie ombre, plus qu’à demie prête ?
Venir morde une grève de marbre, extatique, en dessinant son slip de bain ?
Tututututututut… faire des bulles à la fin, poquelines jusqu’aux griffes… La violence n’est plus dupe(rie) d’elle-même depuis… depuis Alceste. De nos jours, elle serpente librement, ses enfants portent des cheveux en coquille. D’ailleurs, regardez au loin, un foc bleu vibre, babines péniblement troussées, une tempête tartine sa puberté.
Bref, pédagogie de scie, entêtement à la Jean-Pierre François, quelques décennies en décalage… et alors, jadis toujours sera, personne ne meurt. Mais je vous ai gêné(e)(s), je m’aplatis, me ratatine, finis la musique, ça esquinte. Je vous demande pardon, humblement. Je suis un blaireau maladroit, alors, par pitié, choisissez moi un totem autre qu’herbivore… des dents plates, pfffff !
Proposition : je vous (celles et ceux de la région parisienne, s’il en reste) invite ; vous pétillerez autour d’une mousse, houblon, coca, peu importe, et nous retirerons vos ailes, n’oublions pas le i, pour moi.
Et tenez, emportez un morceau de Grosjean pour la route :
« Magnifique le lecteur qui de sa hauteur se penche, pampre de chlore en suspens sur la fontaine pour s’y voir frémir. Les astres en rang le long de son soir retiennent leur souffle. »
A vous lire très prochainement
Faut-il que les gardiens tracent d’infinis sillons, exaltant d’imprenables pollens, qu’ils fixent l’ailleurs rétif sur un chemin de haute élucidation ?
Quel serment d’allégeance, à demi mot ? Quelle flamme dans la demie ombre, plus qu’à demie prête ?
Venir morde une grève de marbre, extatique, en dessinant son slip de bain ?
Tututututututut… faire des bulles à la fin, poquelines jusqu’aux griffes… La violence n’est plus dupe(rie) d’elle-même depuis… depuis Alceste. De nos jours, elle serpente librement, ses enfants portent des cheveux en coquille. D’ailleurs, regardez au loin, un foc bleu vibre, babines péniblement troussées, une tempête tartine sa puberté.
Bref, pédagogie de scie, entêtement à la Jean-Pierre François, quelques décennies en décalage… et alors, jadis toujours sera, personne ne meurt. Mais je vous ai gêné(e)(s), je m’aplatis, me ratatine, finis la musique, ça esquinte. Je vous demande pardon, humblement. Je suis un blaireau maladroit, alors, par pitié, choisissez moi un totem autre qu’herbivore… des dents plates, pfffff !
Proposition : je vous (celles et ceux de la région parisienne, s’il en reste) invite ; vous pétillerez autour d’une mousse, houblon, coca, peu importe, et nous retirerons vos ailes, n’oublions pas le i, pour moi.
Et tenez, emportez un morceau de Grosjean pour la route :
« Magnifique le lecteur qui de sa hauteur se penche, pampre de chlore en suspens sur la fontaine pour s’y voir frémir. Les astres en rang le long de son soir retiennent leur souffle. »
A vous lire très prochainement
Jérémie- Nombre de messages : 412
Age : 46
Localisation : Sixfeetunder
Date d'inscription : 27/03/2010
Re: Le mors de la petite cheval
Haaa Ba, ce que j'aime (et envie) ta gouaille et ton aisance à te balader au pays de l'absurde et du grinçant. Dans chaque texte, il y a des perles et des trouvailles originales, une idée que tu déclines avec verve et c'est vraiment un registre dans lequel tu excelles. J'ai toujours autant de plaisir à te lire.
Hans et Gretel revisités de bien belle manière, avec toute la cruauté qui s'impose. Les contes, ce n'est -heureusement- pas toujours joli !
Hans et Gretel revisités de bien belle manière, avec toute la cruauté qui s'impose. Les contes, ce n'est -heureusement- pas toujours joli !
Sahkti- Nombre de messages : 31659
Age : 50
Localisation : Suisse et Belgique
Date d'inscription : 12/12/2005
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