Le pacte
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Le pacte
... Karl vint nous chercher en fin d’après-midi. Il s’arrêta au 11 Lemgoerstrasse et je serrai la main de Franz en lui disant à demain. Qu’il était beau dans son uniforme ! Il s’éloigna dans l’allée qui menait à l’immeuble et je le quittai à regret.
Enfin on me déposa à Bertastrasse. Je montai les marches menant à la maison. J’étais incroyablement fier, gonflé d’importance, impatient d’en remontrer à cette petite peste d’Ida, qui sûrement aller en rester pantoise.
Je vérifiai le pli de ma chemise brune, ajustai mon col, défroissai mon brassard à croix gammée. Puis me recoiffai de la main et ouvris la porte. Dans le hall, je me regardai un instant : avec mon calot, j’étais magnifique. Je pris mon souffle et entrai.
Mutti était dans la cuisine, en train de peler des légumes. Sans un mot, je me présentai à elle, raide, martial, mais avec un large sourire.
Elle leva les yeux de son ouvrage et je la vis blêmir. Ses mains retombèrent, comme privées de vie. L’une d’elles tenait encore un économe. L’autre laissa échapper une pomme de terre, qui roula à mes pieds.
Elle restait là, à me fixer d’une expression où je lisais incrédulité, désarroi, impuissance. Des larmes lui venaient, mais elle n’émettait aucun commentaire, ne trouvant peut-être pas les mots pour traduire ce qu’elle ressentait. Elle avait l’air un peu ridicule avec ses épluchures de courgettes et son torchon sur les genoux. Comme si elle avait deviné mes pensées, elle se mit à sangloter bruyamment, enfouissant son visage dans ses paumes.
Espérait-elle que je vinsse la consoler ? Je n’en fis rien. En quelques instants, j’étais à nouveau dans la rue.
Je courais de toutes mes forces. Je m’étais enfui. Etait-ce par incapacité à affronter le chagrin de ma mère, ou mû par la culpabilité ? En effet, j’avais été envahi, en un instant, par une soudaine envie de la gifler. Mon père tirait beaucoup d’orgueil de mon engagement dans le Jungvolk, je le savais. Je m’attendais à des compliments, j’imaginais Ida verte de jalousie ; au lieu de quoi, ma mère s’était mise à pleurer. Quand à ma sœur, je ne l’avais seulement pas vue. Une bouffée de colère viscérale, de haine immense montait, qui m’obstruait la gorge. Je fus obligé de m’arrêter, à bout de souffle, à un carrefour, et m’asseoir sur un banc près d’un monument.
C’était une stèle rappelant nos morts à Verdun. Je contemplai un instant le nom des héros qui avaient donné leur vie pour l’Allemagne et je me disais : pourquoi Mutti réagit-elle ainsi ? Je ne peux ni l’admettre, ni le comprendre. Je restai là un long moment, le temps de retrouver le calme, et mes forces.
Franz s’était changé. Habillé de ses nippes habituelles, il était en bas de l’immeuble, en train de gonfler les roues du vélo. Je pris place sur les marches de l’escalier. Il me serra la main, puis se préparait à reprendre sa tâche quand il s’aperçut de mon état :
- Qu’est-ce qu’il y a, ça ne va pas ?
Je lui contai ma mésaventure. Il m’écouta posément, puis se laissa tomber à côté de moi et passa affectueusement un bras autour de mes épaules.
- Ne t’en fais pas, Wolfgang. Tu verras, ça va se tasser.
Il n’était guère convaincant mais je lui sus grès de ses efforts. Il était mon ami fidèle ; c’était, à ce moment dans ma vie, la seule personne qui pouvait me comprendre. Je ressenti un immense élan de gratitude envers lui. Une solidarité nous liait, qui me touchait jusqu’aux tréfonds.
Il abandonna la bicyclette d’Ernst, glissa pompe et raccord sous la porte de la cave, puis nous sortîmes. Je le suivais comme un somnambule, encore bouleversé par ce qui s’était produit. Je ne me rendais pas compte ni ne cherchais à savoir où nous allions.
Nous nous retrouvâmes dans la cabane abandonnée, là où il gardait ses cartes postales érotiques. Les lieux n’avaient pas changé depuis la dernière fois. Franz me fit asseoir sur le lit défoncé, m’invita à attendre un instant. Allait-il encore me montrer des images écœurantes ?
Il revint avec un couteau dont il avait déplié la lame. Il prit place à côté de moi et, sans un mot, il s’entailla l’intérieur du bras. Puis il me tendit l’arme :
- A ton tour, maintenant.
Je restai coi, à fixer le sang qui coulait le long de son poignet. Que voulait-il faire ? Se suicider ? Mais si tel avait été le cas, il se serait infligé une blessure bien plus profonde.
En tous cas moi, à cet instant, j’avais confusément envie de mourir. Sans réfléchir, je l’imitai. Mais au dernier moment, manquant de courage, je me contentai d’une légère coupure, comme lui.
Je regardai le filet d’hémoglobine me dégouliner en direction du coude. J’avais l’impression que j’allais me trouver mal. Et pourtant, je ne bronchais pas, plongé dans un mélange de stupeur et d’indifférence.
Il plaqua sa plaie contre la mienne, les maintint ensemble quelques instants. Puis nous nous séparâmes. Il farfouilla dans le capharnaüm, dénicha un chiffon à la propreté douteuse qu’il déchira. Il l’appliqua sur la balafre et me fit signe d’en faire autant. Je me confectionnai un pansement provisoire avec cette loque.
Il sortit alors de sa poche une flasque qu’il me tendit. Je bus une gorgée, c’était fort, je ne pus m’empêcher de tousser. Il descendit la sienne comme si c’était de l’eau, me gratifia d’un clin d’œil :
- J’ai piqué ça à Ernst. Il le planquait sous l’évier dans la cuisine, et s’imaginait que je ne le savais pas, ce gros malin. Tu aimes ? C’est du kirsch.
Il vida le reste d’alcool. Puis se tourna à nouveau vers moi. Son visage changea d’expression. Il me regardait avec beaucoup de sérieux maintenant.
- Tu sais ce que ça signifie, ce qu’on vient de faire ?
- Oui, c’est comme Winnetoo et Old Shatterhand. A présent nous sommes liés, pour toujours.
- Exactement. Alors écoute bien : je jure que jamais je ne te laisserai tomber. Quoi qu’il arrive et même au péril de ma vie, je serai toujours là pour t’aider, te porter secours.
- Moi aussi Franz. Je promets, tu peux compter sur moi.
Il me prit fraternellement dans ses bras. Les larmes me revinrent aux yeux.
Enfin on me déposa à Bertastrasse. Je montai les marches menant à la maison. J’étais incroyablement fier, gonflé d’importance, impatient d’en remontrer à cette petite peste d’Ida, qui sûrement aller en rester pantoise.
Je vérifiai le pli de ma chemise brune, ajustai mon col, défroissai mon brassard à croix gammée. Puis me recoiffai de la main et ouvris la porte. Dans le hall, je me regardai un instant : avec mon calot, j’étais magnifique. Je pris mon souffle et entrai.
Mutti était dans la cuisine, en train de peler des légumes. Sans un mot, je me présentai à elle, raide, martial, mais avec un large sourire.
Elle leva les yeux de son ouvrage et je la vis blêmir. Ses mains retombèrent, comme privées de vie. L’une d’elles tenait encore un économe. L’autre laissa échapper une pomme de terre, qui roula à mes pieds.
Elle restait là, à me fixer d’une expression où je lisais incrédulité, désarroi, impuissance. Des larmes lui venaient, mais elle n’émettait aucun commentaire, ne trouvant peut-être pas les mots pour traduire ce qu’elle ressentait. Elle avait l’air un peu ridicule avec ses épluchures de courgettes et son torchon sur les genoux. Comme si elle avait deviné mes pensées, elle se mit à sangloter bruyamment, enfouissant son visage dans ses paumes.
Espérait-elle que je vinsse la consoler ? Je n’en fis rien. En quelques instants, j’étais à nouveau dans la rue.
Je courais de toutes mes forces. Je m’étais enfui. Etait-ce par incapacité à affronter le chagrin de ma mère, ou mû par la culpabilité ? En effet, j’avais été envahi, en un instant, par une soudaine envie de la gifler. Mon père tirait beaucoup d’orgueil de mon engagement dans le Jungvolk, je le savais. Je m’attendais à des compliments, j’imaginais Ida verte de jalousie ; au lieu de quoi, ma mère s’était mise à pleurer. Quand à ma sœur, je ne l’avais seulement pas vue. Une bouffée de colère viscérale, de haine immense montait, qui m’obstruait la gorge. Je fus obligé de m’arrêter, à bout de souffle, à un carrefour, et m’asseoir sur un banc près d’un monument.
C’était une stèle rappelant nos morts à Verdun. Je contemplai un instant le nom des héros qui avaient donné leur vie pour l’Allemagne et je me disais : pourquoi Mutti réagit-elle ainsi ? Je ne peux ni l’admettre, ni le comprendre. Je restai là un long moment, le temps de retrouver le calme, et mes forces.
Franz s’était changé. Habillé de ses nippes habituelles, il était en bas de l’immeuble, en train de gonfler les roues du vélo. Je pris place sur les marches de l’escalier. Il me serra la main, puis se préparait à reprendre sa tâche quand il s’aperçut de mon état :
- Qu’est-ce qu’il y a, ça ne va pas ?
Je lui contai ma mésaventure. Il m’écouta posément, puis se laissa tomber à côté de moi et passa affectueusement un bras autour de mes épaules.
- Ne t’en fais pas, Wolfgang. Tu verras, ça va se tasser.
Il n’était guère convaincant mais je lui sus grès de ses efforts. Il était mon ami fidèle ; c’était, à ce moment dans ma vie, la seule personne qui pouvait me comprendre. Je ressenti un immense élan de gratitude envers lui. Une solidarité nous liait, qui me touchait jusqu’aux tréfonds.
Il abandonna la bicyclette d’Ernst, glissa pompe et raccord sous la porte de la cave, puis nous sortîmes. Je le suivais comme un somnambule, encore bouleversé par ce qui s’était produit. Je ne me rendais pas compte ni ne cherchais à savoir où nous allions.
Nous nous retrouvâmes dans la cabane abandonnée, là où il gardait ses cartes postales érotiques. Les lieux n’avaient pas changé depuis la dernière fois. Franz me fit asseoir sur le lit défoncé, m’invita à attendre un instant. Allait-il encore me montrer des images écœurantes ?
Il revint avec un couteau dont il avait déplié la lame. Il prit place à côté de moi et, sans un mot, il s’entailla l’intérieur du bras. Puis il me tendit l’arme :
- A ton tour, maintenant.
Je restai coi, à fixer le sang qui coulait le long de son poignet. Que voulait-il faire ? Se suicider ? Mais si tel avait été le cas, il se serait infligé une blessure bien plus profonde.
En tous cas moi, à cet instant, j’avais confusément envie de mourir. Sans réfléchir, je l’imitai. Mais au dernier moment, manquant de courage, je me contentai d’une légère coupure, comme lui.
Je regardai le filet d’hémoglobine me dégouliner en direction du coude. J’avais l’impression que j’allais me trouver mal. Et pourtant, je ne bronchais pas, plongé dans un mélange de stupeur et d’indifférence.
Il plaqua sa plaie contre la mienne, les maintint ensemble quelques instants. Puis nous nous séparâmes. Il farfouilla dans le capharnaüm, dénicha un chiffon à la propreté douteuse qu’il déchira. Il l’appliqua sur la balafre et me fit signe d’en faire autant. Je me confectionnai un pansement provisoire avec cette loque.
Il sortit alors de sa poche une flasque qu’il me tendit. Je bus une gorgée, c’était fort, je ne pus m’empêcher de tousser. Il descendit la sienne comme si c’était de l’eau, me gratifia d’un clin d’œil :
- J’ai piqué ça à Ernst. Il le planquait sous l’évier dans la cuisine, et s’imaginait que je ne le savais pas, ce gros malin. Tu aimes ? C’est du kirsch.
Il vida le reste d’alcool. Puis se tourna à nouveau vers moi. Son visage changea d’expression. Il me regardait avec beaucoup de sérieux maintenant.
- Tu sais ce que ça signifie, ce qu’on vient de faire ?
- Oui, c’est comme Winnetoo et Old Shatterhand. A présent nous sommes liés, pour toujours.
- Exactement. Alors écoute bien : je jure que jamais je ne te laisserai tomber. Quoi qu’il arrive et même au péril de ma vie, je serai toujours là pour t’aider, te porter secours.
- Moi aussi Franz. Je promets, tu peux compter sur moi.
Il me prit fraternellement dans ses bras. Les larmes me revinrent aux yeux.
Re: Le pacte
La scène du partage des sangs est fort archétypale ; je la considère comme un passage obligé, vu l'histoire des personnages. L'ensemble de ce fragment me paraît un peu attendu (je suppose que la réaction de la mère est dans la logique du personnage, mais nous, lecteurs du site, l'avons peu vue si je me rappelle bien)... encore une fois, je ne crois pas que, dans l'ensemble du roman, vous puissiez faire l'économie de cette étape.
Mes remarques :
« impatient d’en remontrer à cette petite peste d’Ida, qui sûrement allait en rester pantoise »
« je lui sus gré de ses efforts »
« Je ressentis un immense élan »
Mes remarques :
« impatient d’en remontrer à cette petite peste d’Ida, qui sûrement allait en rester pantoise »
« je lui sus gré de ses efforts »
« Je ressentis un immense élan »
Invité- Invité
Re: Le pacte
Peut-être un problème en début de texte : Wolfgang dit "à demain" à Franz, puis le retrouve le jour-même. Ou alors une nuit est passée, mais je ne vois pas où !
J'ai apprécié le mélange de mépris et de tristesse du personnage face à la réaction de sa mère. Lorsqu'il parle d'une envie de la gifler, c'est le lecteur qui encaisse cette gifle. Les contradictions de cette réaction poussent Wolfgang à fuir et à débattre avec lui-même dans des conditions plus posées. C'est psychologiquement cohérent.
Pour la scène du sang, je trouve en effet qu'elle est archétypale, mais c'est normal venant d'adolescents : leur identité est recherchée dans l'imitation. Je vois difficilement les deux gamins être créatifs, novateurs dans de telles conditions, ils répondent avant tout à un besoin assez urgent de se souder.
Concernant l'orthographe, Ubik, ces fautes sont quand même assez grossières... Une petite relecture supplémentaire pourrait les supprimer assez facilement.
Et une interrogation :
J'ai apprécié le mélange de mépris et de tristesse du personnage face à la réaction de sa mère. Lorsqu'il parle d'une envie de la gifler, c'est le lecteur qui encaisse cette gifle. Les contradictions de cette réaction poussent Wolfgang à fuir et à débattre avec lui-même dans des conditions plus posées. C'est psychologiquement cohérent.
Pour la scène du sang, je trouve en effet qu'elle est archétypale, mais c'est normal venant d'adolescents : leur identité est recherchée dans l'imitation. Je vois difficilement les deux gamins être créatifs, novateurs dans de telles conditions, ils répondent avant tout à un besoin assez urgent de se souder.
Concernant l'orthographe, Ubik, ces fautes sont quand même assez grossières... Une petite relecture supplémentaire pourrait les supprimer assez facilement.
Et une interrogation :
Est-ce réellement de l'indifférence ? J'ajouterais bien "forcée" ou "nécessaire".Je regardai le filet d’hémoglobine me dégouliner en direction du coude. J’avais l’impression que j’allais me trouver mal. Et pourtant, je ne bronchais pas, plongé dans un mélange de stupeur et d’indifférence.
Re: Le pacte
Bien sûr, le passage est moins plein de bruit et de fureur que d'autres extraits. Mais il continue de tricoter , imperturbablement, la construction de cette nouvelle identité qui tend à se fondre dans le corps constitué par les co-affidés, soudés dans la mystique oblative du Führer.
Témoin l'uniforme, qui, comme la toge, marque le passage de l'enfance maternée à la capacité de violenter sa mère, pour des intérêts supérieurs. La tuer peut-être, si elle s'opposait aux desseins sublimes du Maître ?
Le passage du sang, difficilement contournable dans l'économie du récit, me semble très bien mené, en ce qu'il renforce l'affiliation de Wolfgang, qui franchit plusieurs autres étapes d'un coup : le partage en soldats du bandage crasseux, comme à la guerre, de l'alcool, eau des braves, de l'étreinte, encore pudique mais qui deviendra peut-être hellénique.
Pour un passage censément anodin, ou de repos, ou de reprise de souffle, je trouve que ça n'est pas mal truffé de pépites.
Témoin l'uniforme, qui, comme la toge, marque le passage de l'enfance maternée à la capacité de violenter sa mère, pour des intérêts supérieurs. La tuer peut-être, si elle s'opposait aux desseins sublimes du Maître ?
Le passage du sang, difficilement contournable dans l'économie du récit, me semble très bien mené, en ce qu'il renforce l'affiliation de Wolfgang, qui franchit plusieurs autres étapes d'un coup : le partage en soldats du bandage crasseux, comme à la guerre, de l'alcool, eau des braves, de l'étreinte, encore pudique mais qui deviendra peut-être hellénique.
Pour un passage censément anodin, ou de repos, ou de reprise de souffle, je trouve que ça n'est pas mal truffé de pépites.
silene82- Nombre de messages : 3553
Age : 67
Localisation : par là
Date d'inscription : 30/05/2009
Re: Le pacte
On assiste, dans cet extrait, à un changement de famille.
Wolfgang est en rupture, non pas avec son père, mais avec sa mère et sa sœur. Il se sent incompris de sa « Mutti », qui désapprouve son engagement. Sa sœur ne vient pas même le voir dans son nouvel uniforme. Il ne trouve, ni dans l’une, ni dans l’autre, la reconnaissance qu’il attend de sa nouvelle identité.
Franz se substitue alors à sa famille (sa partie féminine au moins) défaillante. Il noue un nouveau lien, celui du sang, le lien fraternel. Il est, outre son führer personnel, lui, plus particulièrement, et le Volkjung plus généralement, sa nouvelle famille.
Il est remarquable que, seuls ou presque, les personnages féminins soient réticents devant la montée de l’idéologie nazie. Cette réticence ne se manifeste pas dans une pensée argumentée, mais dans une sensibilité. La mère de Wolfgang éprouve une sensation d’horreur, le pressentiment d’une monstruosité dans les pratiques et idées auxquelles adhèrent son mari, et désormais son fils. Horreur muette. Elle ne sait pas dire exactement ce qui l’épouvante, mais elle ne peut admettre ce qui advient. Sa sensibilité de mère, sa sensibilité féminine, résistent.
Cet extrait est de qualité, comme les précédents.
Courage, Ubik, pour la suite.
Wolfgang est en rupture, non pas avec son père, mais avec sa mère et sa sœur. Il se sent incompris de sa « Mutti », qui désapprouve son engagement. Sa sœur ne vient pas même le voir dans son nouvel uniforme. Il ne trouve, ni dans l’une, ni dans l’autre, la reconnaissance qu’il attend de sa nouvelle identité.
Franz se substitue alors à sa famille (sa partie féminine au moins) défaillante. Il noue un nouveau lien, celui du sang, le lien fraternel. Il est, outre son führer personnel, lui, plus particulièrement, et le Volkjung plus généralement, sa nouvelle famille.
Il est remarquable que, seuls ou presque, les personnages féminins soient réticents devant la montée de l’idéologie nazie. Cette réticence ne se manifeste pas dans une pensée argumentée, mais dans une sensibilité. La mère de Wolfgang éprouve une sensation d’horreur, le pressentiment d’une monstruosité dans les pratiques et idées auxquelles adhèrent son mari, et désormais son fils. Horreur muette. Elle ne sait pas dire exactement ce qui l’épouvante, mais elle ne peut admettre ce qui advient. Sa sensibilité de mère, sa sensibilité féminine, résistent.
Cet extrait est de qualité, comme les précédents.
Courage, Ubik, pour la suite.
Louis- Nombre de messages : 458
Age : 69
Date d'inscription : 28/10/2009
Re: Le pacte
Wolfgang m'est de plus en plus attachant. Il a grandi, mais quelque chose semble subsister de son enfance. Je ne suis pas totalement d'accord avec la vision de Louis et l'idée d'un Furher personnel. J'interprète plutôt cette scène comme le moment charnière qui sera la clef d'un déchirement ultérieur, avec sa famille et/ou avec son ami.
En tous les cas, l'incertitude, le doute de Wolfgang est très bien rendu et sied à merveille à ce prénom qui m'évoque Mozart qui a eu pour drame de n'être jamais pleinement enfant, et donc jamais pleinement adulte. C'est cet enfant que je vois parader devant sa "Mutti" attendant les encouragements qui ne viennent pas. C'est d'ailleurs, cet enfant qu'elle voit grandir trop vite, qu'elle ne perçoit pas comme ce que devrait être un enfant. C'est cette privation d'innocence qui laisse cette mère dans cet état. Je ne perçois donc pas d'antinazisme féminin ici, mais bien la réticence d'une mère et d'une soeur face à un petit qui n'est pas un homme mais qu'on éduque à la guerre. C'est tout à fait différent à mon sens, beaucoup plus fin psychologiquement, et surtout beaucoup moins moralisateur. La femme si elle s'oppose ici, ce n'est pas parce qu'elle est meilleure, mais simplement parce qu'elle est mère.
La femme est l'avenir de l'homme disait le poète chanté par un autre poète
Hadrien
En tous les cas, l'incertitude, le doute de Wolfgang est très bien rendu et sied à merveille à ce prénom qui m'évoque Mozart qui a eu pour drame de n'être jamais pleinement enfant, et donc jamais pleinement adulte. C'est cet enfant que je vois parader devant sa "Mutti" attendant les encouragements qui ne viennent pas. C'est d'ailleurs, cet enfant qu'elle voit grandir trop vite, qu'elle ne perçoit pas comme ce que devrait être un enfant. C'est cette privation d'innocence qui laisse cette mère dans cet état. Je ne perçois donc pas d'antinazisme féminin ici, mais bien la réticence d'une mère et d'une soeur face à un petit qui n'est pas un homme mais qu'on éduque à la guerre. C'est tout à fait différent à mon sens, beaucoup plus fin psychologiquement, et surtout beaucoup moins moralisateur. La femme si elle s'oppose ici, ce n'est pas parce qu'elle est meilleure, mais simplement parce qu'elle est mère.
La femme est l'avenir de l'homme disait le poète chanté par un autre poète
Hadrien
Re: Le pacte
J'ai vu dans commentaire prose que tu t'inquiétais pour ta "marge de créativité".
Je te conseille, si je puis me permettre, de ne pas trop t'inquiéter.
Bien sur qu'au fur et à mesure que ton récit rentre dans la grande Histoire, tu vas être tenu de raconter des faits précis sans les déformer. Mais tes personnages t'appartiennent malgré tout et ce qui est intéressant c'est de voir comment tu leur donnes vie, comment tu décris les sentiments qui les animent, et comment leur parcours personnel les inscrit dans cette marche inexorable de l'Histoire.
Si je ne te commente pas systématiquement , je lis tous les chapitres que tu nous proposes et mon intérêt ne faiblit pas. Rien n'est anecdotique et chaque détail que tu ajoutes donne de l'épaisseur à ton intrigue et de la réalité à ta fiction historique ou à cette Histoire romancée ainsi que de la crédibilité à tes personnages.
Je te conseille, si je puis me permettre, de ne pas trop t'inquiéter.
Bien sur qu'au fur et à mesure que ton récit rentre dans la grande Histoire, tu vas être tenu de raconter des faits précis sans les déformer. Mais tes personnages t'appartiennent malgré tout et ce qui est intéressant c'est de voir comment tu leur donnes vie, comment tu décris les sentiments qui les animent, et comment leur parcours personnel les inscrit dans cette marche inexorable de l'Histoire.
Si je ne te commente pas systématiquement , je lis tous les chapitres que tu nous proposes et mon intérêt ne faiblit pas. Rien n'est anecdotique et chaque détail que tu ajoutes donne de l'épaisseur à ton intrigue et de la réalité à ta fiction historique ou à cette Histoire romancée ainsi que de la crédibilité à tes personnages.
Rebecca- Nombre de messages : 12502
Age : 65
Date d'inscription : 30/08/2009
Re: Le pacte
Je lis ces extraits, comme tu l'as conseillée et je constate que la qualité est encore au rendez-vous avec peut-être cette fois moins de force que dans d'autres morceaux lus, mais ça reste toujours plaisant et intéressant. Et je le répète, il y a un travail appréciable qui est fourni ici, comme ailleurs.
J'aurais cependant une réflexion plus globale sur l'ensemble. J'ai parfois le sentiment que le texte, qui raconte un pan de l'Histoire vu de l'autre côté comme on dit, a tendance à virer au documentaire. Je comprends bien qu'il faille permettre au lecteur d'avoir une version différente de certains événements, de mieux comprendre et appréhender la psychologie des personnages. Aucun souci avec cela mais cela passe parfois (à mes yeux s'entend) par un besoin de bien se faire comprendre qui, sur un long format, pourrait nuire à la fluidité de l'ensemble et ça serait dommage.
J'aurais cependant une réflexion plus globale sur l'ensemble. J'ai parfois le sentiment que le texte, qui raconte un pan de l'Histoire vu de l'autre côté comme on dit, a tendance à virer au documentaire. Je comprends bien qu'il faille permettre au lecteur d'avoir une version différente de certains événements, de mieux comprendre et appréhender la psychologie des personnages. Aucun souci avec cela mais cela passe parfois (à mes yeux s'entend) par un besoin de bien se faire comprendre qui, sur un long format, pourrait nuire à la fluidité de l'ensemble et ça serait dommage.
Sahkti- Nombre de messages : 31659
Age : 50
Localisation : Suisse et Belgique
Date d'inscription : 12/12/2005
Des vagues.
Sahkti a écrit:
J'aurais cependant une réflexion plus globale sur l'ensemble. J'ai parfois le sentiment que le texte, qui raconte un pan de l'Histoire vu de l'autre côté comme on dit, a tendance à virer au documentaire. Je comprends bien qu'il faille permettre au lecteur d'avoir une version différente de certains événements, de mieux comprendre et appréhender la psychologie des personnages. Aucun souci avec cela mais cela passe parfois (à mes yeux s'entend) par un besoin de bien se faire comprendre qui, sur un long format, pourrait nuire à la fluidité de l'ensemble et ça serait dommage.
Salut,
Une vision d'ensemble ? Perso, je n'y arrive qu'en lisant plusieurs chapitres à la file. Alors à partir d'extraits... ma foi...
Ce que je sais, c'est que lorsque Wolfgang est tout content de mettre son bel uniforme, ou quand il a rendez-vous avec une fille, ou quoi que ce soit d'autre, ça se passe avec le contexte autour, et je suis obligé de tricoter l'un dans l'autre. Donc, je raconte les petites anecdotes qui sont pour lui importantes, et vu son engagement, pendant ce temps il est obligé de réagir, quand par exemple sont établies les lois de Nuremberg, ou quand Röhm se fait assassiner, ou autres événements marquants, que je ne peux passer sous silence. Je m'efforce de faire en sorte que ça ne soit ni lourd, ni pédagogique, ni ceci ni cela, les écueils sont nombreux. Possible que je ne réussisse pas à les éviter tous.
En tous cas, tout est intimement imbriqué, et quand justement, on me dit que ceci arrive trop tôt, ou que cela n'est pas possible, quand je pense qu'il faudrait tout décaler, c'est pour moi comme si je devais repeindre la tour Eiffel en jaune citron avec un pinceau d'écolier.
On en est là... Je rame et les vagues sont de plus en plus hautes. Mais on en est tous là, plus ou moins, non ?
Bon, qu'ajouter... j'essaierai de faire de mon mieux possible. Voilà tout.
Ubik.
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