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Message  Toofast Sam 1 Mai 2010 - 19:13

Arrivée au sommet de l'immeuble, Ariane sentit l'air frais lui gifler le visage. Elle jeta un coup d'oeil autour d'elle. L'endroit semblait avoir avalé la Ville. On n'entendait plus que quelques coups de klaxons et des crissements de pneus étouffés.

Elle s'avança jusqu'au rebord ; se pencha, là, debout juste au dessus du vide. Elle observa pendant un moment les badauts qui vaquaient à leurs occupations, trente-quatre étages plus bas. Ils ne lui paraissaient pas plus gros que des fourmis. Elle sourit intérieurement, réchauffée par les derniers rayons de soleil de l'après-midi.

Comme elle se sentait supérieure à eux, en cet instant ! Elle les dominait de tout son être. Mais après quelques secondes, l'ivresse que lui procurait cette vision s'évanouit, et elle commença à trembler.

"Ah non ! se dit-elle. Ce n'est pas le moment de flancher. J'ai fait le plus gros". Elle s'autorisa cependant à faire le point.

Du plus loin qu'elle se souvienne, elle avait toujours voulu mourir jeune. Ben voilà, on y était. Hier, quand elle avait soufflé ses trente bougies, elle avait réalisé que c'était l'heure.

Bon, mais maintenant, elle n'étais plus si catégorique. L'ironie de la situation -une pauvre fille, du haut de son perchoir, qui songeait sérieusement à s'enfuir en courant- lui arracha un sourire. Il disparut vite : il ne fallait pas qu'elle flanche. Avoir la trouille n'était pas une raison pour mettre fin a des années de réflexion. Elle considérait la vie comme une montagne : quand on est jeune, on gravit la pente, on grimpe, on se renforce, on grandit. Un jour, on arrive au sommet. À l'apogée. Si puissant. Inatteignable.

Et puis, on glisse sur l'autre versant. On s'affaiblit, on se ride, on se meurt.

Elle, elle voulait rester au plus haut. C'était tout ou rien. Et elle était prête à mourir pour ça. Enfin, elle avait été prête, se reprit-elle.

Elle était consciente, que, si elle voulait, elle pouvait renoncer et oublier cette utopie. Elle pouvait redescendre, se fondre parmi la masse, et accepter son inévitable déclin. Quelle était la valeur d'une promesse faite à soi-même ? Cette mort était un rêve de gosse, comme de devenir acteur, ou de déménager sur une île déserte.

L'expérience lui avait apprit qu'il existait deux catégories de personnes : ceux qui révaient leur vie, et ceux qui vivaient leurs rêves. L'existence des premiers était semblable à un long fleuve, le courant calme les entrainants, sans conscience ni frissons. Quant aux seconds, moins nombreux, ils vivaient sur une montagne russe : à toute allure, des émotions plein la tête, et d'une dangereuse intensité. Et elle, elle était arrivée au bout de son circuit. Elle pensa : "À vivre trop vite, on meurt trop jeune. Mais je ne peux décidement pas aller barboter avec les autres".

Elle se demanda alorsanxieusement où elle allait, si ce n'était ni dans le grand huit, ni dans le cours d'eau. Qu'y avait-il après la mort ? "C'est une formidable occasion de le découvrir", conclus-t-elle en hochant la tête.

Une clameur la tira de sa rêverie. La foule d'anonyme se massait au dessous de son immeuble. Un fourgon de police était même là. On la pointait du doigt, on lui criait : "Ne sautez pas ! On arrive !".

Elle murmura, plus pour elle-même que pour eux : "Je ne saute pas. Je m'envole".

La porte s'ouvrit avec fracas, mais les policiers n'eurent que le temps de voir une jeune femme se laissant tomber dans le vide, les yeux mi-clos et un incroyable sourire aux lèvres, semblant flotter dans la lueur du soleil couchant. Inatteigable.
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Message  Invité Sam 1 Mai 2010 - 19:33

La chute (si j'ose dire), le fait que ce soit l'arrivée des flics qui décide la jeune femme à sauter, sauve pour moi ce texte de la banalité.

Bienvenue sur Vos Écrits, à vous lire bientôt !

Quelques remarques :
« Elle jeta un coup d'œil autour d'elle »
« les badauds qui vaquaient à leurs occupations »
« elle n'était plus si catégorique »
« – (le trait d’union ne suffit pas pour une incise, il faut prévoir un quart ou demi-cadratin, je ne sais pas trop comment on dit) une pauvre fille, du haut de son perchoir, qui songeait sérieusement à s'enfuir en courant – (le trait d’union ne suffit pas pour une incise, il faut prévoir un quart ou demi-cadratin, je ne sais pas trop comment on dit) lui arracha »
« une raison pour mettre fin à des années de réflexion »
« L'expérience lui avait appris »
« deux catégories de personnes : celles (les personnes) qui rêvaient leur vie, et celles (les personnes) qui vivaient leurs rêves. L'existence des premières (les personnes) était semblable à un long fleuve, le courant calme les entrainant (et non « entrainants », il s’agit d’un participe présent), sans conscience ni frissons. Quant aux secondes (les personnes), moins nombreuses, elles vivaient »
« Elle se demanda alors anxieusement (et non « alorsanxieusement ») »
« conclut-elle (et non « conclus-t-elle ») en hochant la tête »
« La foule d'anonymes (si c’est une foule, il y en a plusieurs) se massait »

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Message  Toofast Sam 1 Mai 2010 - 20:12

Arrivée au sommet de l'immeuble, Ariane sentit l'air frais lui gifler le visage. Elle jeta un coup d'œil autour d'elle. L'endroit semblait avoir avalé la Ville. On n'entendait plus que quelques coups de klaxons et des crissements de pneus étouffés.

Elle s'avança jusqu'au rebord ; se pencha, là, debout juste au dessus du vide. Elle observa pendant un moment les badauds qui vaquaient à leurs occupations, trente-quatre étages plus bas. Ils ne lui paraissaient pas plus gros que des fourmis. Elle sourit intérieurement, réchauffée par les derniers rayons de soleil de l'après-midi.

Comme elle se sentait supérieure à eux, en cet instant ! Elle les dominait de tout son être. Mais après quelques secondes, l'ivresse que lui procurait cette vision s'évanouit, et elle commença à trembler.

"Ah non ! se dit-elle. Ce n'est pas le moment de flancher. J'ai fait le plus gros". Elle s'autorisa cependant à faire le point.

Du plus loin qu'elle se souvienne, elle avait toujours voulu mourir jeune. Ben voilà, on y était. Hier, quand elle avait soufflé ses trente bougies, elle avait réalisé que c'était l'heure.

Bon, mais maintenant, elle n'était plus si catégorique. L'ironie de la situation - une pauvre fille, du haut de son perchoir, qui songeait sérieusement à s'enfuir en courant - lui arracha un sourire. Il disparut vite : il ne fallait pas qu'elle flanche. Avoir la trouille n'était pas une raison pour mettre fin à des années de réflexion. Elle considérait la vie comme une montagne : quand on est jeune, on gravit la pente, on grimpe, on se renforce, on grandit. Un jour, on arrive au sommet. À l'apogée. Si puissant. Inatteignable.

Et puis, on glisse sur l'autre versant. On s'affaiblit, on se ride, on se meurt.

Elle, elle voulait rester au plus haut. C'était tout ou rien. Et elle était prête à mourir pour ça. Enfin, elle avait été prête, se reprit-elle.

Elle était consciente, que, si elle voulait, elle pouvait renoncer et oublier cette utopie. Elle pouvait redescendre, se fondre parmi la masse, et accepter son inévitable déclin. Quelle était la valeur d'une promesse faite à soi-même ? Cette mort était un rêve de gosse, comme de devenir acteur, ou de déménager sur une île déserte.

L'expérience lui avait appris qu'il existait deux catégories de personnes : celles qui révaient leur vie, et celles qui vivaient leurs rêves. L'existence des premières était semblable à un long fleuve, le courant calme les entrainant, sans conscience ni frissons. Quant aux secondes, moins nombreuses, elles vivaient sur une montagne russe : à toute allure, des émotions plein la tête, et d'une dangereuse intensité. Et elle, elle était arrivée au bout de son circuit. Elle pensa : "À vivre trop vite, on meurt trop jeune. Mais je ne peux décidement pas aller barboter avec les autres".

Elle se demanda alors anxieusement où elle allait, si ce n'était ni dans le grand huit, ni dans le cours d'eau. Qu'y avait-il après la mort ? "C'est une formidable occasion de le découvrir", conclus t-elle en hochant la tête.

Une clameur la tira de sa rêverie. La foule anonyme se massait au dessous de son immeuble. Un fourgon de police était même là. On la pointait du doigt, on lui criait : "Ne sautez pas ! On arrive !".

Elle murmura, plus pour elle-même que pour eux : "Je ne saute pas. Je m'envole".

La porte s'ouvrit avec fracas, mais les policiers n'eurent que le temps de voir une jeune femme se laissant tomber dans le vide, les yeux mi-clos et un incroyable sourire aux lèvres, semblant flotter dans la lueur du soleil couchant. Inatteigable.

Merci. J'essayerais de faire plus original (et mieux, si j'ose dire) dorénavent.
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Message  midnightrambler Sam 1 Mai 2010 - 21:21

Bonsoir,

Le sujet est effectivement banal ...
I believe I can fly ... Quel ado - même du siècle dernier - n'a pas eu cette impression de supériorité ? Mais la femme moderne de trente ans, amante, mère, engagée dans la vie professionnelle est dans un tout autre état d'esprit.
Pas de happy end, la chute (!) est faite pour choquer, c'est normal !
L'écriture n'est pas désagréable, assez riche et soignée, fluide et souple.

Bienvenue sur VE !

Caresses et Bise à l'Oeil,
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Message  Rebecca Dim 2 Mai 2010 - 6:21

Rêver sa mort et puis mourir ...pour ne pas se réveiller ?
Ou pour que le rêve ne s'achève en cauchemar ?
Une écriture intéressante...à suivre
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Message  silene82 Dim 2 Mai 2010 - 9:11

Et puis, on glisse sur l'autre versant. On s'affaiblit, on se ride, on se meurt

Assertion contredite par tous les artistes créateurs, qui avancent au contraire vers l'ineffable, et se retrouvent bien emmerdés quand l'élégante personne en costume Saint Laurent dont nous parle Mitsouko vient les chercher car la récré est finie. Michelangelo Buonarotti, quand ça lui a pris, pestait comme un pou avec son burin à la main, et invectivait Jules qui lui avait fait perdre 7 ans pour de la barbouille, qui lui dégoulinait sur la chetron en plus.
Même les artisans...Strad', a 90 ans, améliorait encore son boulot, avec la main qui partait un peu en sucette, à en juger par les ouïes de ses derniers violons...
Le thème m'a semblé convenu et facile, mais l'écriture est propre, ce qui est un plus indéniable. Et qui donne un goût de revenez-y. Bienvenue donc, et à vous lire davantage.
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Message  Invité Dim 2 Mai 2010 - 10:17

Je me fonds là encore à l'avis général : le thème est on-ne-peut plus éculé et resssasé, mais ton écriture, d'une belle tenue, efficace, le sauve.
Là où j'aurais sans doute abandonné ma lecture dès les premières lignes habituellement, j'ai été retenu cette fois par ton style, qui me semble plutôt prometteur.
A te relire prochainement.

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Message  Invité Dim 2 Mai 2010 - 11:29

Ce que ce texte évoque en moi ne diffère pas beaucoup de ce qui a été dit précédemment, sauf peut-être que j'ai ressenti une pointe d'irritation à certaines assertions, desquelles je veille toutefois à me distancer, ma grande maturité aidant :-). Par exemple : Elle considérait la vie comme une montagne : quand on est jeune, on gravit la pente, on grimpe, on se renforce, on grandit. Un jour, on arrive au sommet. À l'apogée. Si puissant. Inatteignable.

Et puis, on glisse sur l'autre versant. On s'affaiblit, on se ride, on se meurt.


J'ai retenu une réplique vers la fin, qui m'a bien plu, pour l'espèce de dérision qu'elle introduit, un peu comme de l'humour -ou de la poésie- malgré soi : On la pointait du doigt, on lui criait : "Ne sautez pas ! On arrive !".

Elle murmura, plus pour elle-même que pour eux : "Je ne saute pas. Je m'envole".

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Message  Plotine Dim 2 Mai 2010 - 11:47

Texte agréable à lire, certes mais qui me gêne quand même par le sujet. Le suicide ce n'est pas romantique, enfin à mon sens. Mais bon, j'avoue avoir du mal à m'envoler au-dessus des pâquerettes justement...
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