Copains d'enfance

Vincent, je le connaissais depuis la maternelle. On s’étaient toisés dès le premier jour à l’école, la larme à l’œil, agrippés aux jambes des mamans, avec un doudou crasseux et informe greffé sur le nez et on ne s’était plus quittés depuis. Je savais tout de lui, entre autres, qu’en dépit de son classique prénom français, Vincent était le fruit d’un métissage complexe, entamé depuis plusieurs générations, qui faisait se mêler en lui les gènes d’une bisaïeule japonaise et de son époux marseillais, ceux d’un trisaïeul portugais, d’un autre ancêtre antillais dans les veines duquel avaient coulé ensemble des sangs africains, indiens et bretons, sans compter un récemment découvert Savoyard égaré au milieu de cette généalogie. S’adjoignaient à ce cocktail des grand-parents expatriés, lui italien, elle, périgourdine dont il nous rebattait les oreilles et à laquelle il continuait de vouer une admiration sans bornes quoique posthume.
Identifier ses origines au seul vu de son apparence extérieure relevait donc du défi mais les peaux brunes et les yeux noirs de sa lignée avaient eu raison des quelques incursions de cheveux blonds et d’yeux bleus récessifs dans la parentèle qu’il parvenait encore à recenser avec une précision qui n’avait d’égale que la fierté qu’il en tirait.
S’appuyant sur le passé forcément aventureux de tous ces anciens, il s’attendait, bien évidemment, à un destin de grand voyageur en vue duquel, néanmoins, il ne prenait aucune disposition, bien certain que l’avenir le conduirait naturellement à suivre ce chemin. En foi de quoi, il habitait depuis bientôt vingt-quatre ans la même petite commune de banlieue parisienne dont il ne s’éloignait guère plus de quinze jours par an, guettant l’avènement du grand jour qui le propulserait à son tour vers la gloire qui nimbait la ramée familiale.

Et ? Pourquoi le mot "toisés" ?

J'ai omis de préciser qu'il s'agit d'un extrait d'un texte plus long.
Au passage : "toisés" parce que les petits commencent souvent par s'observer avec méfiance et en gardant leurs distances en de telles circonstances, enfin, de mon point de vue.

Une description qui me plaît !
Eh oui, les enfants se toisent, peu donnent spontanément leur confiance lorsqu'ils quittent la sécurité de la maison - leur micro horizon social - pour affronter le monde en commençant par la jungle de la "maternelle".
J'aimerais découvrir la vie de cet ami, a-t-il pu devenir citoyen du monde par le voyage autant qu'il l'était par les gênes ?

L'emploi du verbe "toiser" ne me gêne pas du tout, en revanche pour "On s’étaient toisés dès le premier jour à l’école", j'ai des réserves. Je sais qu'on accorde les participes passés et adjectifs avec "on" selon le nombre de personnes réellement désignées par le pronom indéfini, mais pour les verbes, vraiment, je trouve que ça fait bizarre... à vérifier, peut-être.

Comme extrait, cela me plaît beaucoup ! J'espère que nous aurons droit à la suite...

D'accord avec socque, je trouve la graphie on s'étaient toisés quelque peu surprenante...
Voilà un préambule qui met en appétit, concis et intéressant, et de surcroît frustrant, car c'est vraiment trop court. Encore ! La suite ! Merci d'avance.
Je suppose qu'il n'est pas besoin de vous dire que vous pouvez poster sur le même fil autant d'extraits que vous voulez sans vous préoccuper des temps de latence.

Envie de connaître la suite !

"On s’étaient toisés dès le premier jour à l’école" C'est une erreur !

Pour la conjugaison des verbes ON = IL ! même si on met les adjectifs au pluriel... Une anomalie de plus ...

C'est autre chose qui me gêne.
Je tournerais ça autrement (c'est une suggestion mais ce fil sert à ça, non ?) :

Vincent, je le connaissais depuis la maternelle. On s’étaient toisés dès le premier jour à l’école, la larme à l’œil, agrippés aux jambes des mamans, avec un doudou crasseux et informe greffé sur le nez et on ne s’était plus quittés depuis

Vincent, je le connaissais depuis la maternelle. Le premier jour de l'école, la larme à l'oeil, agrippés aux jambes des mamans avec un doudou crasseux et informe greffé sur le nez, nous nous étions d'abord toisés, avant de ne plus nous quitter.

Et même encore "toisés" me gêne. Je préfèrerais "regardés avec méfiance" ou "examinés" ou "dévisagés". Dans "toisé" il y a une notion de mépris. Mais à toi de voir...

Euh...
Une description par les gênes qui me...euh...gène un peu mais surtout...
La suite please...difficile de se faire une opinion sur une simple description ;o)

Bonjour, Demi-Lune,

On sent que ce texte va ouvrir sur autre chose. En tout cas, on l’espère car l’exposition généalogique est un peu longue et un peu compliquée pour un texte aussi court, même si elle justifie avec humour les aspirations aventurières non assumées du personnage.
Le fait qu’ils se toisent me semble évident, et ils décident d’être amis vraiment bien vite. Mais sans doute est-ce voulu.
On a envie de vite connaître la suite, alors, ne nous fais pas languir !

C'est un début de début... On a à peine le temps d'y goûter que déjà c'est fini. C'est un peu comme le fruit défendu.
Ah, frustration...

Mais si ça fonctionne, c'est que c'est alléchant. Déjà ça. A continuer ?

Ubik.

Le texte est très agréable à lire, on a de suite envie d’avoir la suite. Mais là, on reste vraiment sur notre faim, pourquoi ne nous avoir donné que cette présentation de personnage ?
Je n’ai aucune idée du ton ou du registre dans lequel s’inscrira ce texte, pour le moment ça me plait beaucoup et j’attends la suite avec impatience

Merci à tous pour vos commentaires qui vont, je pense, dès lors qu'il vous paraît intéressant, me motiver et m'encourager à continuer ce texte en chantier, ça va beaucoup m'aider dans ce sens.
Pour l'instant, j'ai travaillé à une petite galerie de portraits croisés d'une bande de copains, histoire qui part...je ne sais pas trop où. Donc ... encore trop en travaux pour m'avancer davantage.
Plotine, la version que tu proposes me paraît assez éloignée du ton de narration directe, "parlé" adopté par le personnage-narrateur...et puis "toisés" j'aime bien, c'est exactement ce mot-là que je voulais dire.
socque et dusha, vous avez entièrement raison pour "étaient" : c'est une erreur de ma part, même pas vu à la relecture tellement c'était gros !
Je vais essayer d'avancer si j'arrive à attraper le fil !

J'ai bien aimé le texte mais c'est vrai que je bute sur 'toiser' Il paraît peu probable que ce verbe puisse être réciproque. On pourrait avoir: 'dévisager', 'évaluer'. Mais c'est l'auteur qui décide.

Outre la liste (litanie ?) des origines un peu longuette, j'ai bien aimé ce portrait ; parce que paradoxalement (je veux dire paradoxalement par rapport au passage détaillé et un peu assommant) ce personnage me plaît de par ses origines mixtes. Et j'ai beaucoup aimé le ton moqueur mais pas méchant de la fin ; ça sonne très juste.
Côté expression, ce n'est pas le "toiser" qui m'a gênée, mais le "greffé" dans "avec un doudou crasseux et informe greffé sur le nez". Je t'assure que je n'ai pas compris d'emblée... La faute à mon manque d'imagination.

J'apprécie particulièrement la dynamique insufflée. Débuter le récit par un retour sur enfance et pédigrée et ainsi rendre vivant le désir d'ascension sociale, dans ce qu'il a de volcanique et provocateur. S'il s'agit d'une amorce, elle n'a pas le gout de poudre.