Les barreaux de chair

Vous me demandiez parfois dans un drôle d'air :
- "Que fais-tu de ta vie ?" Et moi, les yeux au loin :
- La vie sait parfois se travestir à tel point
Qu'elle en devient contraire : des barreaux de chair !

J'ai fait de ma vie une rude expérience, et
Accroché aux sourires des lambeaux putrides.
J'ai mangé des poumons entre les chairs fétides
De mes enfants tués avant que d'être nés.

Et l'Amour éclaté aux humides recoins
Des saisons effrayantes, et les doux Enfers
Où dansaient mollement les maudits de la Terre,
Avaient pour mon âme de trop sordides soins.

Je n'avais pour horizon que la nuit sans aube
Des passions embrasées tâchées de répugnances,
D'où perçaient, pustuleux, des beaux-arts un peu rances,
Que le monde froissait comme une affreuse robe.

Vous demandez encore de ce même air :
- "Que fais-tu de ta vie ?" Je réponds maintenant :
- A mon front éclabousse la fleur du vivant,
Dont la tige menue scie les barreaux de chair !

Le propos est à mon goût un peu pompeux et nébuleux, mais c'est mon problème. Je vais me limiter aux remarques de fome, car, selon moi, le texte souffre de quelques maladresses rythmiques, même si les vers ont presque tous leurs douze syllabes.

Vous me demandiez parfois dans un drôle d'air : rythme 7/5 ; en outre, on demande d'un air, pas dans un air. J'ai l'impression d'une cheville
- La vie sait parfois se travestir à tel point ; rythme 5/7, plus difficile encore à scander à mon avis que le 7/5, et répétition du mot "parfois"
Qu'elle en devient contraire : des barreaux de chair ! : rythme 7/5
Accroché aux sourires des lambeaux putrides. : rythme 7/5
Des saisons effrayantes, et les doux Enfers : rytgme 7/5
Avaient pour mon âme de trop sordides soins. : la césure est bien située après la sixième syllabe, mais celle-ci est faible (muette oralement) , du coup, comme on s'appuie dessus pour "prendre son élan" avant de dire la deuxième moitié du vers, on (je) prononce "Avaient pour mon âmEU de trop sordides soins", ce qui fait bizarre
Je n'avais pour horizon que la nuit sans aube : rythme 7/5
Des passions embrasées tâchées de répugnances : "tachées", pas "tâchées" ; "Chapeau sur la tête, je tâche d'effacer les taches"
Vous-de-man-dez-en-co-re-de-ce-mê-me air : onze syllabes
- A mon front éclabousse la fleur du vivant, : rythme 7/5

Je ne déteste pas le rythme 7/5, je l'emploie parfois, mais je pense qu'il est à consommer avec modération pour garder l'équilibre d'un texte en dodécasyllabes. Là, je trouve que vous en abusez.

Je trouve navrant ce verbiage autour des mots (con)sacrés: la vie, la chair, putride, sordide, l'Amour, l'Enfer...

A côté de ça, quelle vigueur dans l'Internationale "les damnés de la terre"!

Désolé. Je n'ai pas trop aimé.
Grandiloquent, volontairement provocateur, mais.... Je n'ai pas vraiment saisi la finalité du texte. Je suis passé à côté, il faut croire. Donc, ne prenez pas trop à coeur mon commentaire, svp

Merci Procuste de vous être penchée sur ce texte médiocre avec autant de précision. Vos remarques sont très précieuses et font avancer. Merci aussi à Vincent M de son avis. Désolée de poster ces textes très anciens et maladroits, mais vos avis me permettent de progresser sur mes écrits actuels.