Loin, très loin là-bas
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Loin, très loin là-bas
Pour Charlotte
Ils sont beaux tous les deux.
Voilà ce qui me vient à l’esprit tandis que plus loin, pile sur la ligne d'horizon, la mer se heurte, se ravage, et recommence infiniment à affronter la barrière de corail.
Ils sont beaux tous les deux et c’est le plus grand lagon du monde qui s’étale à leur pieds, sous pilotis, sur tek caillebotis.
Sa main repose sur son avant-bras, la sienne de main, le sien d’avant-bras. S’ils restent comme ça, me dis-je, en plein soleil, étendus sur Transats, il aura une marque en absence de coup de soleil. Une marque de main.
Ils sont blancs tous les deux, pour l’instant.
Elle est brune, ses cheveux se bouclent au gré des mouvements de sa tête, au gré de sa respiration que soulève une poitrine discrète.
Il est poivre et sel, arbore une gueule toute cisaillée, un peu comme si l’angulaire se faisait esthétisme à rebrousse-poil, y compris la cicatrice au coin des lèvres.
Ils sont loin du monde tous les deux, et le seraient de toute façon, ici ou ailleurs.
Sauf que nous sommes ailleurs, si loin de tout.
Sacré coin de paradis, Ouvéa : Nouvelle-Calédonie.
J’y ai mes quartiers, j’y trimballe ma viande hâlée par un soleil permanent, je vais sous les voiles, je vais sous le vent, entre deux je pêche, j’alimente les restaurants : qui veut de ma porcelaine ; qui veut de ma popinée ?
Ils sont beaux tous les deux. Outre la marque blanche sur son avant-bras, bientôt, ils auront tous les deux, au doigt, celle de l’alliance qu’ils portent depuis peu.
— Ils sont beaux tous les deux, tu trouves pas ?
Le serveur hausse les épaules, parce qu’il sait lui, qu’à force de voir le quotidien, on ne voit plus rien. Qu’à forcer l’habitude l’exception nous échappe.
— Je te sers un blanc, un autre ? il demande.
— Vas-y. Les jours de mer ça creuse l’appétit ! je réponds, sans quitter le couple des yeux.
— Pour ça que t’as pas touché à ton assiette ?
— Pas celui-là d'appétit, mais celui de l'esthétisme.
Ils sont beaux tous les deux, et un peu moins blancs que tout à l’heure, constaté-je.
Et puisqu’il est question de blanc, je bois le mien d’un trait, frais, presque glacé.
Et je délaisse mon assiette.
Et l’envie de reprendre la mer me saisit.
Voilà ce qui me vient à l’esprit tandis que plus loin, pile sur la ligne d'horizon, la mer se heurte, se ravage, et recommence infiniment à affronter la barrière de corail.
Ils sont beaux tous les deux et c’est le plus grand lagon du monde qui s’étale à leur pieds, sous pilotis, sur tek caillebotis.
Sa main repose sur son avant-bras, la sienne de main, le sien d’avant-bras. S’ils restent comme ça, me dis-je, en plein soleil, étendus sur Transats, il aura une marque en absence de coup de soleil. Une marque de main.
Ils sont blancs tous les deux, pour l’instant.
Elle est brune, ses cheveux se bouclent au gré des mouvements de sa tête, au gré de sa respiration que soulève une poitrine discrète.
Il est poivre et sel, arbore une gueule toute cisaillée, un peu comme si l’angulaire se faisait esthétisme à rebrousse-poil, y compris la cicatrice au coin des lèvres.
Ils sont loin du monde tous les deux, et le seraient de toute façon, ici ou ailleurs.
Sauf que nous sommes ailleurs, si loin de tout.
Sacré coin de paradis, Ouvéa : Nouvelle-Calédonie.
J’y ai mes quartiers, j’y trimballe ma viande hâlée par un soleil permanent, je vais sous les voiles, je vais sous le vent, entre deux je pêche, j’alimente les restaurants : qui veut de ma porcelaine ; qui veut de ma popinée ?
Ils sont beaux tous les deux. Outre la marque blanche sur son avant-bras, bientôt, ils auront tous les deux, au doigt, celle de l’alliance qu’ils portent depuis peu.
— Ils sont beaux tous les deux, tu trouves pas ?
Le serveur hausse les épaules, parce qu’il sait lui, qu’à force de voir le quotidien, on ne voit plus rien. Qu’à forcer l’habitude l’exception nous échappe.
— Je te sers un blanc, un autre ? il demande.
— Vas-y. Les jours de mer ça creuse l’appétit ! je réponds, sans quitter le couple des yeux.
— Pour ça que t’as pas touché à ton assiette ?
— Pas celui-là d'appétit, mais celui de l'esthétisme.
Ils sont beaux tous les deux, et un peu moins blancs que tout à l’heure, constaté-je.
Et puisqu’il est question de blanc, je bois le mien d’un trait, frais, presque glacé.
Et je délaisse mon assiette.
Et l’envie de reprendre la mer me saisit.
Yali- Nombre de messages : 8624
Age : 59
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Loin, très loin là-bas
Hum hum... J'avoue ne pas très bien avoir saisi l'intérêt du texte. Très bien écrit au demeurant. L'image des marques du soleil sur les mains et l'effet répétitif souligne bien la nonchalance, le farniente, mais j'avoue que j'attendais une chute et je suis resté un peu perplexe sur la finalité du texte. Désolé, une autre fois sans doute...
Au gré de, sinon, le grès c'est une pierre. A moins que ce soit fait exprès
Au gré de, sinon, le grès c'est une pierre. A moins que ce soit fait exprès
Invité- Invité
Re: Loin, très loin là-bas
Ça me fait un peu penser à une planche de Régis Frank (j'aime bien Régis Franc).
Ce qui me manque, c'est ce qu'il ressent, lui, le narrateur : est-il envieux ? moqueur ? dédaigneux ? jaloux ? … il s'en fout ?
Mais alors pourquoi ne mange-t-il pas ?
Je ne parviens pas à déterminer ça et du coup le texte me reste étranger, comme une image hors contexte.
Pour le style, il me semble bien adapté à décrire la psychologie d'un type complexé qui se rassure en gardant ses jugements pour lui. Ces buveurs en boîte qui draguent en gardant une réserve silencieuse, en attendant que le poisson morde à leur mystériosité (rire).
Toi, Yali, le prends-tu pour un con ou le trouves-tu admirable ?
Un style mordant, mais qui mord dans le vide.
Ce qui me manque, c'est ce qu'il ressent, lui, le narrateur : est-il envieux ? moqueur ? dédaigneux ? jaloux ? … il s'en fout ?
Mais alors pourquoi ne mange-t-il pas ?
Je ne parviens pas à déterminer ça et du coup le texte me reste étranger, comme une image hors contexte.
Pour le style, il me semble bien adapté à décrire la psychologie d'un type complexé qui se rassure en gardant ses jugements pour lui. Ces buveurs en boîte qui draguent en gardant une réserve silencieuse, en attendant que le poisson morde à leur mystériosité (rire).
Toi, Yali, le prends-tu pour un con ou le trouves-tu admirable ?
Un style mordant, mais qui mord dans le vide.
Invité- Invité
AQ.
Bonsoir,
Ce texte ne présente pas beaucoup d'intérêt, c'est simplement pour moi une description assez fidèle du fond que j'ai installé sur mon écran à l'approche de l'hiver : une estacade de bois qui s'étire sur l'eau bleue d'un lagon ...
Le texte étant insipide, on s'attache à la forme et tous les défauts sautent aux yeux ... manque de relecture ? ou manque d'application, de soin ?
Il y a plusieurs mots impropres (ravage pour ?, infiniment pour indéfiniment, ... ), et pas mal de fautes d'orthographe ... jusqu'au tout dernier verbe !
Amicalement,
Midnightrambler
Ce texte ne présente pas beaucoup d'intérêt, c'est simplement pour moi une description assez fidèle du fond que j'ai installé sur mon écran à l'approche de l'hiver : une estacade de bois qui s'étire sur l'eau bleue d'un lagon ...
Le texte étant insipide, on s'attache à la forme et tous les défauts sautent aux yeux ... manque de relecture ? ou manque d'application, de soin ?
Il y a plusieurs mots impropres (ravage pour ?, infiniment pour indéfiniment, ... ), et pas mal de fautes d'orthographe ... jusqu'au tout dernier verbe !
Amicalement,
Midnightrambler
midnightrambler- Nombre de messages : 2606
Age : 70
Localisation : Alpes de Haute-Provence laclefdeschamps66@hotmail.fr
Date d'inscription : 10/01/2010
Re: Loin, très loin là-bas
Allez, une fois n'est pas coutume :
Vincent M, Narbah : j'espère n'avoir jamais à écrire avec en tête, une préoccupation de l'ordre de l'intérêt ou l'idée d'un effet du genre chute. Tout comme ce peintre qui se rendrait dans son jardin parce qu'il manque au dessus de sa cheminée nouvellement maçonnée, une toile pour l'illustrer et qui se magnerait de la peindre pour étonner sa femme qui rentre du turbin à 19h45 tapante :-)
Vincent M, Narbah : j'espère n'avoir jamais à écrire avec en tête, une préoccupation de l'ordre de l'intérêt ou l'idée d'un effet du genre chute. Tout comme ce peintre qui se rendrait dans son jardin parce qu'il manque au dessus de sa cheminée nouvellement maçonnée, une toile pour l'illustrer et qui se magnerait de la peindre pour étonner sa femme qui rentre du turbin à 19h45 tapante :-)
Yali- Nombre de messages : 8624
Age : 59
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Loin, très loin là-bas
Yali a écrit:Allez, une fois n'est pas coutume :
Vincent M, Narbah : j'espère n'avoir jamais à écrire avec en tête (…)
Ça ne me dit pas pourquoi il n'a pas d'appétit ton narrateur : je reste sur ma faim !
Invité- Invité
Re: Loin, très loin là-bas
J'aime bien le ton, l'atmosphère qui se dégage de ce cliché en bord de mer. Il y a une sorte de désabusement dans ces lignes, mais paradoxalement un appel aussi, l'appel à l'esthétisme si particulier de la mer qui ne laisse jamais indifférent. D'où la dernière phrase qui pour moi conclut comme il se doit.
Jean- Nombre de messages : 162
Age : 35
Localisation : dans un pays qu'On ne gouverne pas.
Date d'inscription : 08/05/2010
Re: Loin, très loin là-bas
J’ai aimé, malgré quelques maladresses, et quelques fautes d’orthographe sans grande importance, la scène qui nous est présentée.
Il a très faim, le narrateur, une faim de loup. Mais ce n’est pas le contenu de son assiette qui le met en appétit. Il livre de la nourriture aux restaurants, porcelaine et popinée, il nourrit l’estomac des autres, mais lui se nourrit de ce qui est autre. Autre que le quotidien qui rend invisible l’exceptionnel et le beau : « parce qu’il sait lui, qu’à force de voir le quotidien, on ne voit plus rien. ». Il crève la dalle, le narrateur, mais pas de « nourriture terrestre », pas même de nourriture marine, mais de la beauté, de l’esthétique, « Pas celui-là d'appétit, mais celui de l'esthétisme. » dit-il.
S’il pêche, pourtant pour gagner sa croûte c’est la beauté qu’il cherche « sous la voile », sur la mer, dans ce « coin de paradis ».
Ce qui le rassasie, c’est la contemplation de ce couple aperçu au bord du lagon. C’est leur beauté en ce lieu. C’est la présence d’un amour avec en arrière plan un immense lagon et, au loin, la mer déchaînée. Ce qui nourrit le narrateur en contemplation, c’est la lumière, c’est la couleur. Ce qui suscite en lui l’émotion, c’est la coloration de leur peau blanche par les rayons du soleil, c’est le dessin d’une main blanche sur la toile du corps de l’homme aux cheveux poivre et sel. Beauté de leurs traits, beauté de leur union.
Le narrateur, à la faim de loup, est aussi une sorte de loup de mer, et de loup solitaire. C’est ce que suggère la dernière phrase. Très évocatrice, cette dernière phrase. Le narrateur pourrait désirer rejoindre la mer, pour se baigner entièrement dans la beauté et la lumière ; il pourrait retrouver sa vie solitaire, plus supportable après s’être rassasié de la beauté à deux qui lui manque. Il contemple la beauté, il ne la consomme pas. Il semble s’en méfier aussi, avec une tendance à lui préférer le terme « esthétique ». Mais il s’agit bien du beau, et non du joli.
Le texte ne se ferme pas sur une chute, il s’ouvre sur des horizons évocateurs.
Ce texte suscite une émotion ; les quelques erreurs de langue une fois corrigées, il constitue, à mon avis, un beau texte.
Il a très faim, le narrateur, une faim de loup. Mais ce n’est pas le contenu de son assiette qui le met en appétit. Il livre de la nourriture aux restaurants, porcelaine et popinée, il nourrit l’estomac des autres, mais lui se nourrit de ce qui est autre. Autre que le quotidien qui rend invisible l’exceptionnel et le beau : « parce qu’il sait lui, qu’à force de voir le quotidien, on ne voit plus rien. ». Il crève la dalle, le narrateur, mais pas de « nourriture terrestre », pas même de nourriture marine, mais de la beauté, de l’esthétique, « Pas celui-là d'appétit, mais celui de l'esthétisme. » dit-il.
S’il pêche, pourtant pour gagner sa croûte c’est la beauté qu’il cherche « sous la voile », sur la mer, dans ce « coin de paradis ».
Ce qui le rassasie, c’est la contemplation de ce couple aperçu au bord du lagon. C’est leur beauté en ce lieu. C’est la présence d’un amour avec en arrière plan un immense lagon et, au loin, la mer déchaînée. Ce qui nourrit le narrateur en contemplation, c’est la lumière, c’est la couleur. Ce qui suscite en lui l’émotion, c’est la coloration de leur peau blanche par les rayons du soleil, c’est le dessin d’une main blanche sur la toile du corps de l’homme aux cheveux poivre et sel. Beauté de leurs traits, beauté de leur union.
Le narrateur, à la faim de loup, est aussi une sorte de loup de mer, et de loup solitaire. C’est ce que suggère la dernière phrase. Très évocatrice, cette dernière phrase. Le narrateur pourrait désirer rejoindre la mer, pour se baigner entièrement dans la beauté et la lumière ; il pourrait retrouver sa vie solitaire, plus supportable après s’être rassasié de la beauté à deux qui lui manque. Il contemple la beauté, il ne la consomme pas. Il semble s’en méfier aussi, avec une tendance à lui préférer le terme « esthétique ». Mais il s’agit bien du beau, et non du joli.
Le texte ne se ferme pas sur une chute, il s’ouvre sur des horizons évocateurs.
Ce texte suscite une émotion ; les quelques erreurs de langue une fois corrigées, il constitue, à mon avis, un beau texte.
Louis- Nombre de messages : 458
Age : 68
Date d'inscription : 28/10/2009
Re: Loin, très loin là-bas
J’aime beaucoup comment tu t’y prends pour nous donner à voir la beauté de ce couple inscrit dans le paysage à travers le regard du narrateur-observateur. C’est très habile, comme si tu nous rendais, nous lecteurs, voyeurs par ricochet. Et nous en sommes éclaboussés de cette beauté.
Kilis- Nombre de messages : 6085
Age : 78
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Loin, très loin là-bas
Il me manque un petit quelque chose, je ne saurais dire quoi exactement. Déjà, à qui est ce sien d'avant-bras et cette sienne de main, bon, peu importe. Peut-être le "ils sont beaux tous les deux" un peu trop répété, et un tableau trop contemplatif pour que j'y plonge. Après, oui, c'est beau sinon.
Chako Noir- Nombre de messages : 5442
Age : 33
Localisation : Neverland
Date d'inscription : 08/04/2008
Re: Loin, très loin là-bas
Réponds-je ou pas ? Pas à l'avis, rien à redire, mais à la démonstration du "Qui ne convient pas" des "mots impropres"midnightrambler a écrit:Bonsoir,
Ce texte ne présente pas beaucoup d'intérêt, c'est simplement pour moi une description assez fidèle du fond que j'ai installé sur mon écran à l'approche de l'hiver : une estacade de bois qui s'étire sur l'eau bleue d'un lagon ...
Le texte étant insipide, on s'attache à la forme et tous les défauts sautent aux yeux ... manque de relecture ? ou manque d'application, de soin ?
Il y a plusieurs mots impropres (ravage pour ?, infiniment pour indéfiniment, ... ), et pas mal de fautes d'orthographe ... jusqu'au tout dernier verbe !
Amicalement,
Midnightrambler
Une "estacade" ferme un passage, généralement elle protège des travaux, elle protège un port, un cours d'eau, elle s'assimile à une jetée, elle fait barrière, elle ne peut donc s'étirer sur l'eau bleu d'un lagon — qui du reste est rarement bleue lorsqu'il s'agit d'un lagon. Ne pas confondre avec un ponton, ou comme l'on dit chez les nous-autres un "warf"
Et donc, je vais garder les miens de mots :-)
Yali- Nombre de messages : 8624
Age : 59
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Loin, très loin là-bas
Garde tes mots, Yali, ou plutôt, continue à les coucher sur papier !
Ceci dit, une estacade peut aussi être un appontement.
J'aime ce que ce texte ne dit pas. J'aime moins les répétitions : on dirait que tu te plagies.
Ceci dit, une estacade peut aussi être un appontement.
J'aime ce que ce texte ne dit pas. J'aime moins les répétitions : on dirait que tu te plagies.
Invité- Invité
Re: Loin, très loin là-bas
Oui pour celui-ci parce qu'il y a du temps qui passe entre les lignes, le temps c'est comme l'eau ça vous imprègne toujours. Le temps ne s'achète pas, il se mérite.
bertrand-môgendre- Nombre de messages : 7526
Age : 104
Date d'inscription : 15/08/2007
Re: Loin, très loin là-bas
Un beau texte un peu frustrant parce que j’aurai eu envie de plus.
Il me plait par sa finesse, par cet art de dire entre les lignes, de forcer à lire au-delà des mots, une invitation. L’auteur ne fait pas tout le boulot, au lecteur de bosser un peu, mais il fait quand même le boulot le plus difficile et c’est plutôt réussi.
Il me plait par sa finesse, par cet art de dire entre les lignes, de forcer à lire au-delà des mots, une invitation. L’auteur ne fait pas tout le boulot, au lecteur de bosser un peu, mais il fait quand même le boulot le plus difficile et c’est plutôt réussi.
elea- Nombre de messages : 4894
Age : 51
Localisation : Au bout de mes doigts
Date d'inscription : 09/04/2010
Loin, très loin là-bas (Variation 2)
Il y a quelque part plus loin, quelque chose qui ne ressemble à rien d’autre. C’est ce qu’elle regarde.
Du bout des doigts, elle pousse sa tasse, du bout des doigts elle ramasse une mèche de ses cheveux et la rembobine comme l’on remonterait un film, comme l’on remonterait le cours du temps qui déjà, nous perd de n’être plus l’instant d’avant.
Plus loin, s’étale une mer émeraude. Plus loin encore, s’interstice une ligne dite d’horizon, qui s’évase de flou avec au-dessus quelques nuages épars, filamenteux et blancs aux propriétés quasi transparentes. Tant et tant qu’ils seraient bleus que cela m’étonnerait pas davantage.
Mais de quoi pourrais-je m’étonner encore, moi qui n’ai d’autre perspective que d’avoir.
J’ai !
J’ai sous le soleil de mai plus de questions dans les chausses que jamais je ne porte, j’ai la latitude aux antipodes, désinvolte ça va de soi, et nus-pieds.
Je repose mon stylo compagnon, vise la température, 37° et des poussières, j’ai aussi chaud dehors que dedans, j’aime cette complicité intra-extra-muros.
Une veine apparaît sous la tension d’un muscle, une veine couleur maritime, la mienne, dans cette infime portion de chair intérieure de poignet. C’est un delta, j’ai l’alluviale à fleur de peau.
Je repose mon stylo, quitte à jeter l’encre autant que ce soit là.
Du bout des doigts, elle saisit le sachet de thé qui désormais encombre sa tasse, l’observe un moment pendu au bout de son fil, dit :
— Voyons si les poissons aiment ça ?
Et le jette à l’eau.
Il y a quelque part dans l’eau, quelque chose qui ne ressemble à rien d’autre. C’est ce que nous regardons : une palanquée de poissons-clowns prêts à se mettre une peignée pour un sachet de thé vert.
— Peut-être qu’ils rêvent de la Chine ? elle dit.
— Pourquoi rêveraient-ils de la Chine ?
— Parce qu’ils n’y ont jamais mis les pieds.
Elle se laisse retomber sur son Transat, descend son chapeau de paille sur les yeux. Clôt les paupières et embarque pour une sieste.
Inutile que je lui fasse la remarque, inutile que je lui précise que « nageoires » aurait été plus approprié que « pieds », moins impropre, inutile puisque nous savons tous les deux que marcher dans une vie est si simple. Alors que s’immerger, alors que naviguer…
Du bout des doigts, elle pousse sa tasse, du bout des doigts elle ramasse une mèche de ses cheveux et la rembobine comme l’on remonterait un film, comme l’on remonterait le cours du temps qui déjà, nous perd de n’être plus l’instant d’avant.
Plus loin, s’étale une mer émeraude. Plus loin encore, s’interstice une ligne dite d’horizon, qui s’évase de flou avec au-dessus quelques nuages épars, filamenteux et blancs aux propriétés quasi transparentes. Tant et tant qu’ils seraient bleus que cela m’étonnerait pas davantage.
Mais de quoi pourrais-je m’étonner encore, moi qui n’ai d’autre perspective que d’avoir.
J’ai !
J’ai sous le soleil de mai plus de questions dans les chausses que jamais je ne porte, j’ai la latitude aux antipodes, désinvolte ça va de soi, et nus-pieds.
Je repose mon stylo compagnon, vise la température, 37° et des poussières, j’ai aussi chaud dehors que dedans, j’aime cette complicité intra-extra-muros.
Une veine apparaît sous la tension d’un muscle, une veine couleur maritime, la mienne, dans cette infime portion de chair intérieure de poignet. C’est un delta, j’ai l’alluviale à fleur de peau.
Je repose mon stylo, quitte à jeter l’encre autant que ce soit là.
Du bout des doigts, elle saisit le sachet de thé qui désormais encombre sa tasse, l’observe un moment pendu au bout de son fil, dit :
— Voyons si les poissons aiment ça ?
Et le jette à l’eau.
Il y a quelque part dans l’eau, quelque chose qui ne ressemble à rien d’autre. C’est ce que nous regardons : une palanquée de poissons-clowns prêts à se mettre une peignée pour un sachet de thé vert.
— Peut-être qu’ils rêvent de la Chine ? elle dit.
— Pourquoi rêveraient-ils de la Chine ?
— Parce qu’ils n’y ont jamais mis les pieds.
Elle se laisse retomber sur son Transat, descend son chapeau de paille sur les yeux. Clôt les paupières et embarque pour une sieste.
Inutile que je lui fasse la remarque, inutile que je lui précise que « nageoires » aurait été plus approprié que « pieds », moins impropre, inutile puisque nous savons tous les deux que marcher dans une vie est si simple. Alors que s’immerger, alors que naviguer…
Yali- Nombre de messages : 8624
Age : 59
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Loin, très loin là-bas
Je vois mieux la scène, différente et semblable.
Même évocation de Régis Franc
Je n'aime pas toujours le style dont :
s’interstice une ligne dite d’horizon
est un exemple exemplaire.
Même évocation de Régis Franc
Je n'aime pas toujours le style dont :
s’interstice une ligne dite d’horizon
est un exemple exemplaire.
Invité- Invité
Re: Loin, très loin là-bas
Narbah,
Si j'avais eu à illustrer le texte, je l'aurais fait, et, au préalable, j'aurais demandé à l'illustrateur s'il était d'accord, et à l'auteur. Question d'éthique.
Si j'avais eu à illustrer le texte, je l'aurais fait, et, au préalable, j'aurais demandé à l'illustrateur s'il était d'accord, et à l'auteur. Question d'éthique.
Yali- Nombre de messages : 8624
Age : 59
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Loin, très loin là-bas
C'est drôle, tu as toujours des personnages qui ont un stylo dans la main et qui côtoient une créature exquise, comme si dans tout ce que tu écrivais il y avait chaque fois un Yali protagoniste.. Assez curieusement, je n'arrive décidément toujours pas à plonger pleinement dans ce texte. Ce qui est peut-être normal, après tout, tant qu'on reste à bord d'estran.. Peut-être prendre le large, pour la suite ?
Chako Noir- Nombre de messages : 5442
Age : 33
Localisation : Neverland
Date d'inscription : 08/04/2008
Re: Loin, très loin là-bas
Yali a écrit:Narbah,
Si j'avais eu à illustrer le texte, je l'aurais fait, et, au préalable, j'aurais demandé à l'illustrateur s'il était d'accord, et à l'auteur. Question d'éthique.
Mais Yali, je n'ai aucune prétention à illustrer, je commente. Ces images sont des citations.
Invité- Invité
Re: Loin, très loin là-bas
Merde... Ouvéa, comment on pourrait ne pas comprendre ça !?
Et la popinée, pffff.... évidemment, là, tu fais mouche parce que tout ce que tu racontes, je le vois, je l'ai maintenant sous les yeux et ça me parle vachement bien.
Il ne me manque rien, tout est là.
Enfin si, je mens, il me manque un truc... y être pour de vrai, grrr !
T'as l'art de faire naître le manque, c'est malin !
Et la popinée, pffff.... évidemment, là, tu fais mouche parce que tout ce que tu racontes, je le vois, je l'ai maintenant sous les yeux et ça me parle vachement bien.
Il ne me manque rien, tout est là.
Enfin si, je mens, il me manque un truc... y être pour de vrai, grrr !
T'as l'art de faire naître le manque, c'est malin !
Sahkti- Nombre de messages : 31659
Age : 50
Localisation : Suisse et Belgique
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Loin, très loin là-bas
Je le fais remonter celui-ci tiens.... parce que hier, j'en parlais avec mon homme, qui n'y a jamais mis les pieds, et la question s'est posée de se dire "et si devant cet instant, cet endroit, ce point juste là qui m'a fait vibrer, il disait juste que c'est joli et voilà"... Sacrément frustrant ! Le partage est parfois plus que délicat !
Sahkti- Nombre de messages : 31659
Age : 50
Localisation : Suisse et Belgique
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Loin, très loin là-bas
J'aime beaucoup les images et la poésie que reflète ton texte! Cependant c'est vrai que l'on reste un peu perplexe sur la fin... je pense qu'il faudrait soit une chute plus forte soit une suite (pas forcemment très longue). Autre chose aussi: l'idée d'esthétisme m'a dérangé car pour moi cette version du couple idéalisée entre la mer et le corail dans l'horizon, qui paraît inatteignable ne peut pas être comparée avec l'esthétisme idée purement inventée par l'homme. C'est rabaisser et casser l'image du la nature de tu laisse paraître plus haut dans ta prose! Sinon, merci pour cette agréable lecture!
sally9394- Nombre de messages : 89
Age : 30
Date d'inscription : 10/03/2011
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