Langue et lance
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Langue et lance
Si ma langue est de glace
il me reste mes doigts
mes doigts de toutes sortes
mes doigts longs fins et gourds
mes doigts d'araignée morte
de serpent de méduse et de poulpe
de portes entr'ouvertes et veines qu'on entrouvre
mes doigts lents vains et courts
mes doigts épais mes doigts agiles
mes doigts d'argile et mes doigts sourds
si ma langue est de glace
il me reste mes doigts
mes doigts aux mille détours
pour esquisser aussi l'amour
---
Une lance s’envole
Il en va du silence
comme de la parole
Une lance s’élance
Il s’envole elle s’endort
Elle se tait il se dit
Infime jeu des cils
de l’infirme au peureux
du poreux au gracile
Une lance s’envole
Une lance s’élance
Il en va du silence
comme de la parole
il me reste mes doigts
mes doigts de toutes sortes
mes doigts longs fins et gourds
mes doigts d'araignée morte
de serpent de méduse et de poulpe
de portes entr'ouvertes et veines qu'on entrouvre
mes doigts lents vains et courts
mes doigts épais mes doigts agiles
mes doigts d'argile et mes doigts sourds
si ma langue est de glace
il me reste mes doigts
mes doigts aux mille détours
pour esquisser aussi l'amour
---
Une lance s’envole
Il en va du silence
comme de la parole
Une lance s’élance
Il s’envole elle s’endort
Elle se tait il se dit
Infime jeu des cils
de l’infirme au peureux
du poreux au gracile
Une lance s’envole
Une lance s’élance
Il en va du silence
comme de la parole
zenobi- Nombre de messages : 892
Age : 54
Date d'inscription : 03/09/2010
Re: Langue et lance
... Etrange texte, assez fort et fascinant par bien des aspects. La forme d'abord, celle d'une lame brisée avec son pommeau dans le haut. Forme donnée par le centrage et par la succession d'héxasyllabes du début qui multiplient, ça c'est pour la forme sonore, les rimes internes et finales. Ce pommeau ce pourrait -être aussi une ampoule d'huile sainte brandie à l'extrémité de sa hampe (comme celle de San Gennaro à Naples). Le sens ensuite (en même temps) : souffrance et résurrection miraculeuse (le sang de l'ampoule, sec, redevient liquide certaines années -les bonnes...). "Si ma langue est de glace" souffrance et incommunication d'une forme de langage, "il me reste les doigts" : solution de rabattement (très moderne: le clavier) et toute aussi agile, efficace, multiforme. Ce langage de substitution est longuement défendu, argumenté. Il semble difficile, une extrémité, un effort, un "travail". Pour aboutir à exprimer l'amour. L'effort est re-dit par le mot "esquisser" : pas même certain d'y parvenir. Il y a de la crucifixion dans ce début: une langue empêchée (glacée) et des doigts (arachnéens) qui peinent à parler à sa place et adoptent toutes les formes, tous les états pour seulement "esquisser" .
... Au total, en forme de tête de dague, une tête de poème qui dilate l'espace compris entre le "Si ma langue est de glace" et le "mille détours pour esquisser l'amour".
... Logiquement le texte se prolonge par la lame, étroite et droite, élancée,où cependant le rythme est plus posé, plus doux, un brin planant : "Une lance s’élance / Il s’envole elle s’endort / Elle se tait il se dit ". La lance rappelle les mythologies celtiques et la matière de Bretagne, le flanc du Christ peut-être aussi, la blessure qui en faisant expirer le Christ lui donne aussi son véritable sens (la salvation du monde).D'ailleurs commencer par la langue et finir par la parole me sonne assez évangélique (mais les Ecritures chrétienne n'ont pas le monopole de la parole). Peut-être est-ce là surinterpréter.
... Lance s'élance Lance s'envole Silence : il y a sans doute une fascination pour les sonorités et les symétries dans cette rédaction mais il doit y avoir un sens. Qui m'échappe (et ce côté ésotérique n'est pas pour déplaire qui force à chercher et donc à explorer et découvrir des aspects du texte, des possibles, des horizons de sens). J'ai eu beau chercher, inverser, contrepétrer, calembourder, écrire Silence Six-Lances et autres fadaises, j'ai eu beau penser à Scripta manent verba volant, mais rien à faire je sèche. Je perçois un échange entre Elle et Lui, qui peuvent être aussi bien un home et une femme que le Silence et la Lance. La clé est certainement dans le mot qui semble manquer, être effacé, comme gratté sur un parchemin, sur un manuscrit abîmé, à la toute fin: " il en va du silence comme de la parole" : vains ? ils demeurent ? ils s'efffacent?
... Je m'efface moi-même et serai curieux de lire ce qu'en penseront les autres (et l'auteur). En tout cas un "jus" pour moi nettement meilleur que Spahi (http://www.vosecrits.com/t8452-spahi) et que Offrir l'Oreille (http://www.vosecrits.com/t8583-offrir-l-oreille).
... Au total, en forme de tête de dague, une tête de poème qui dilate l'espace compris entre le "Si ma langue est de glace" et le "mille détours pour esquisser l'amour".
... Logiquement le texte se prolonge par la lame, étroite et droite, élancée,où cependant le rythme est plus posé, plus doux, un brin planant : "Une lance s’élance / Il s’envole elle s’endort / Elle se tait il se dit ". La lance rappelle les mythologies celtiques et la matière de Bretagne, le flanc du Christ peut-être aussi, la blessure qui en faisant expirer le Christ lui donne aussi son véritable sens (la salvation du monde).D'ailleurs commencer par la langue et finir par la parole me sonne assez évangélique (mais les Ecritures chrétienne n'ont pas le monopole de la parole). Peut-être est-ce là surinterpréter.
... Lance s'élance Lance s'envole Silence : il y a sans doute une fascination pour les sonorités et les symétries dans cette rédaction mais il doit y avoir un sens. Qui m'échappe (et ce côté ésotérique n'est pas pour déplaire qui force à chercher et donc à explorer et découvrir des aspects du texte, des possibles, des horizons de sens). J'ai eu beau chercher, inverser, contrepétrer, calembourder, écrire Silence Six-Lances et autres fadaises, j'ai eu beau penser à Scripta manent verba volant, mais rien à faire je sèche. Je perçois un échange entre Elle et Lui, qui peuvent être aussi bien un home et une femme que le Silence et la Lance. La clé est certainement dans le mot qui semble manquer, être effacé, comme gratté sur un parchemin, sur un manuscrit abîmé, à la toute fin: " il en va du silence comme de la parole" : vains ? ils demeurent ? ils s'efffacent?
... Je m'efface moi-même et serai curieux de lire ce qu'en penseront les autres (et l'auteur). En tout cas un "jus" pour moi nettement meilleur que Spahi (http://www.vosecrits.com/t8452-spahi) et que Offrir l'Oreille (http://www.vosecrits.com/t8583-offrir-l-oreille).
Re: Langue et lance
Poésie doigts d'aile...
Plaisir de faire fondre la glace sur sa langue en y suçant ces mots, un régal d'harmonie entre le son, le sens.
si ma langue est de glace
il me reste mes doigts
mes doigts aux mille détours
pour esquisser aussi l'amour
Je n'aime pas trop cet "aussi" trop restrictif qui vient rompre le charme.
Il en va du silence
comme de la parole
Fragilité des traces vouées à l'effacement, un constat sans illusion, la cible toujours se dérobe. Pudique et émouvant.
Plaisir de faire fondre la glace sur sa langue en y suçant ces mots, un régal d'harmonie entre le son, le sens.
si ma langue est de glace
il me reste mes doigts
mes doigts aux mille détours
pour esquisser aussi l'amour
Je n'aime pas trop cet "aussi" trop restrictif qui vient rompre le charme.
Il en va du silence
comme de la parole
Fragilité des traces vouées à l'effacement, un constat sans illusion, la cible toujours se dérobe. Pudique et émouvant.
Re: Langue et lance
J'ai eu le sentiment de lire 2 poèmes totalement distincts bien que postés ensemble.
Je les ai lu avec mes "oreilles", avec lecture de l'émotion, du ressenti qu'ils peuvent dégager et sans en faire d'analyse sémantique ou autre (ou tentative de). Chacun sa manière...
Ils m'ont tous deux paru intéressants et très évocateurs.
Néanmoins, exactement même remarque qu'Arielle sur le vers :
"Pour esquisser aussi l'amour", le "aussi" est de trop car le vers est trop long de 2 pieds et sonorités "é" "o" accolées malencontreusement.
Je les ai lu avec mes "oreilles", avec lecture de l'émotion, du ressenti qu'ils peuvent dégager et sans en faire d'analyse sémantique ou autre (ou tentative de). Chacun sa manière...
Ils m'ont tous deux paru intéressants et très évocateurs.
Néanmoins, exactement même remarque qu'Arielle sur le vers :
"Pour esquisser aussi l'amour", le "aussi" est de trop car le vers est trop long de 2 pieds et sonorités "é" "o" accolées malencontreusement.
demi-lune- Nombre de messages : 795
Age : 64
Localisation : Tarn
Date d'inscription : 07/11/2009
Re: Langue et lance
Lectrices,
pour esquisser aussi l'amour...
Vous trouvez ce vers malheureux à l'oreille ? Vraiment ? Moi, non. (Échec si cet avis est partagé.)
Le "aussi"... apparaît après une accumulation, et se voulait (Re-échec, apparemment) porteur d'un sens plus proche de "surtout". Le vers est de ce fait plus long, pour accentuer la présence de cet "aussi" (même si le mètre est ici ou là approximatif, ou oral, dans le pénultième vers notamment).
Bref, je m'embrouille, mais "esquisser l'amour" ne relève précisément pas du "aussi"...
Lecteur,
Pourquoi renvoyer à ces deux textes-là, plus qu'à d'autres ?
http://www.vosecrits.com/t7768-dis-toi
http://www.vosecrits.com/t7907-mon-chour
http://www.vosecrits.com/t7679-le-vieux-poete-amer-le-trompettiste-de-breme
Spahi n'est qu'un jeu- et un texte inabouti. Et que vous n'aimiez pas mes cueillettes (à l'encontre de tous les autres commentateurs)ne m'empêchera pas de penser que c'est le meilleur texte que j'aie posté ici ou, pour le moins, celui qui colle le plus à ce que je cherche.
Merci de vos commentaires.
pour esquisser aussi l'amour...
Vous trouvez ce vers malheureux à l'oreille ? Vraiment ? Moi, non. (Échec si cet avis est partagé.)
Le "aussi"... apparaît après une accumulation, et se voulait (Re-échec, apparemment) porteur d'un sens plus proche de "surtout". Le vers est de ce fait plus long, pour accentuer la présence de cet "aussi" (même si le mètre est ici ou là approximatif, ou oral, dans le pénultième vers notamment).
Bref, je m'embrouille, mais "esquisser l'amour" ne relève précisément pas du "aussi"...
Lecteur,
Pourquoi renvoyer à ces deux textes-là, plus qu'à d'autres ?
http://www.vosecrits.com/t7768-dis-toi
http://www.vosecrits.com/t7907-mon-chour
http://www.vosecrits.com/t7679-le-vieux-poete-amer-le-trompettiste-de-breme
Spahi n'est qu'un jeu- et un texte inabouti. Et que vous n'aimiez pas mes cueillettes (à l'encontre de tous les autres commentateurs)ne m'empêchera pas de penser que c'est le meilleur texte que j'aie posté ici ou, pour le moins, celui qui colle le plus à ce que je cherche.
Merci de vos commentaires.
zenobi- Nombre de messages : 892
Age : 54
Date d'inscription : 03/09/2010
Re: Langue et lance
Quand on poste un texte, il faut s'attendre à des remarques, des désaccords, des critiques (bonnes ou mauvaises). Et ne pas oublier que le texte doit toujours se suffire à lui-même, se défendre tout seul sans que son auteur doive l'expliciter ou le défendre lui-même. Sinon, en effet, c'est qu'il a échoué quelque part.
Après, je peux m'abstenir de vous commenter si vous préférez...
Après, je peux m'abstenir de vous commenter si vous préférez...
demi-lune- Nombre de messages : 795
Age : 64
Localisation : Tarn
Date d'inscription : 07/11/2009
Re: Langue et lance
Quand on poste un texte, il faut s'attendre à des remarques, des désaccords, des critiques (bonnes ou mauvaises). Et ne pas oublier que le texte doit toujours se suffire à lui-même, se défendre tout seul sans que son auteur doive l'expliciter ou le défendre lui-même. Sinon, en effet, c'est qu'il a échoué quelque part.
Après, je peux m'abstenir de vous commenter si vous préférez...
Je ne comprends pas du tout votre réaction, vos critiques ne m'ont en aucune manière blessé et je n'avais pas le sentiment, en vous répondant, lectrice, d'être, de quelque façon que ce soit, désobligeant, tout au contraire. Je m'étonnais juste de ce que ce vers vous parût malsonnant. Il ne l'est pas pour moi et j'ai beau me le répéter, je ne vois toujours pas en quoi il le serait- pour vous.
Je n'exprimais donc que mon étonnement.
Par ailleurs, j'ai tenté, davantage vers Arielle, d'expliciter le sens de cet "aussi", non qu'elle ne soit capable de me lire, mais parce qu'il arrive, parfois, que la relecture nous fasse changer d'axe ou d'avis.
Voilà, ma réponse se voulait amicale. Maintenant, je ne saurais rien vous imposer, ni le silence ni la parole...
Quant aux textes, Platon ne se plaignait-il pas qu'ils ne puissent avoir leur père auprès d'eux pour les défendre... Pour ce qui est de celui-ci, j'en assume, (désormais en silence) la totale paternité, et ses échecs, selon vous évidents.
bise zénobienne
Après, je peux m'abstenir de vous commenter si vous préférez...
Je ne comprends pas du tout votre réaction, vos critiques ne m'ont en aucune manière blessé et je n'avais pas le sentiment, en vous répondant, lectrice, d'être, de quelque façon que ce soit, désobligeant, tout au contraire. Je m'étonnais juste de ce que ce vers vous parût malsonnant. Il ne l'est pas pour moi et j'ai beau me le répéter, je ne vois toujours pas en quoi il le serait- pour vous.
Je n'exprimais donc que mon étonnement.
Par ailleurs, j'ai tenté, davantage vers Arielle, d'expliciter le sens de cet "aussi", non qu'elle ne soit capable de me lire, mais parce qu'il arrive, parfois, que la relecture nous fasse changer d'axe ou d'avis.
Voilà, ma réponse se voulait amicale. Maintenant, je ne saurais rien vous imposer, ni le silence ni la parole...
Quant aux textes, Platon ne se plaignait-il pas qu'ils ne puissent avoir leur père auprès d'eux pour les défendre... Pour ce qui est de celui-ci, j'en assume, (désormais en silence) la totale paternité, et ses échecs, selon vous évidents.
bise zénobienne
zenobi- Nombre de messages : 892
Age : 54
Date d'inscription : 03/09/2010
Re: Langue et lance
Plutôt qu'une question d'oreille, ce qui me gêne avec cet "aussi" c'est qu'il me semblait, lors de ma première lecture, que tout le poème parlait d'amour (au sens large du terme, bien sûr) avec tous ses avatars, tranchant en une sorte d'oxymore avec cette langue paralysée par la glace.
Relisant, je m'aperçois qu'on peut y lire plus de souffrance, de désespoir et de maladresse assumée que d'amour, auquel cas cet "aussi" se justifie...
Laissez-moi cependant le droit de préférer ma première lecture, imaginant l'araignée morte tissant sa toile par amour, la méduse et le poulpe tortillant leurs laideurs pour apprivoiser la beauté.
Amie calmant
Relisant, je m'aperçois qu'on peut y lire plus de souffrance, de désespoir et de maladresse assumée que d'amour, auquel cas cet "aussi" se justifie...
Laissez-moi cependant le droit de préférer ma première lecture, imaginant l'araignée morte tissant sa toile par amour, la méduse et le poulpe tortillant leurs laideurs pour apprivoiser la beauté.
Amie calmant
Re: Langue et lance
Quand on a l'âme (mot que vous n'aimez pas et que je n'emploie que par pauvreté lexicale) belle, on prête à ce qu'on lit, je reprends,
Quand on a l'[i]âme belle, on prête à ce qu'on lit
des qualités de cœur que n'avaient pas l'écrit
Oui, votre lecture plus sombre colle davantage au sens.
Quand on a l'[i]âme belle, on prête à ce qu'on lit
des qualités de cœur que n'avaient pas l'écrit
Oui, votre lecture plus sombre colle davantage au sens.
zenobi- Nombre de messages : 892
Age : 54
Date d'inscription : 03/09/2010
Re: Langue et lance
Le "aussi" me gêne ... aussi ^^
et pourquoi pas "cent" à la place de "mille", je n'ai jamais aimé les "mille" ...
Sinon il y a un bon rythme entrainant, j'aime retrouver les sonorités au détour d'un vers juste au moment où on allait oublier le son précédent
et pourquoi pas "cent" à la place de "mille", je n'ai jamais aimé les "mille" ...
Sinon il y a un bon rythme entrainant, j'aime retrouver les sonorités au détour d'un vers juste au moment où on allait oublier le son précédent
Re: Langue et lance
Il n'y a pas d'amour, il n'y a que des preuves d'amour... à esquisser aussi.
Invité- Invité
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