Au lit, tes rations !

Au lit, tes rations !

À Gérard de Nerval pour El desdichado :

Je suis le ténébreux, le veuf, l’inconsolé,
Le Prince d’Aquitaine à la tour abolie :
Ma seule étoile est morte, et mon luth constellé
Porte le soleil noir de la mélancolie.

À un poète ami bémol mineur

Il sent passivement que sa passion s’étiole
Au sommeil de l’ennui.
Il est passé minuit,
Le jour jamais, jamais, ne jaspe sa jaïole.

Il voit monter en lui un tendre entêtement
De servir sa souffrance
Au plat chaud de l’errance
Dans des déserts dorés dormant docilement.

Fragiles et frileux et faiblement frivoles,
Ses refrains de la nuit
N’émeuvent que celui
Qui caracole au corps si creux qu’il vélivole.

Il veut des violons envoûtant le velours
De son lit d’amnésique,
Que d’aucune musique
Ne luise la lumière aux larmoiements trop lourds.

Il part en poursuivant pas à pas sa pitance
Dégueulé dans l’égout
Des mots de mauvais goûts,
Se gave goulument du gris de leur fragrance.

Des mots, des mots, ses mots, miroitant dans les mers
Des vers qu’à l’évidence
Le rythme bat cadence
En flux et puis reflux des frissons doux-amers.

Nu comme un nouveau né noyé dans un mirage,
Il tète gentiment
Le plus pur monument
Des aréoles d’Art des putains de passage.


Oh ! Comme le sirop des Margaux des trottoirs
Prends la saveur d’essence
Des miels de renaissance
Et que les nymphes d’Or sont de pieux dépotoirs !

Bel exercice de style. Une musique agréable, on en oublie presque de chercher un sens à la chanson mais j'ai l'impression que ce n'est pas grave, que ce n'est pas vraiment ce qui préoccupe l'auteur...
Je ne vois pas bien l'intérêt de la citation en préambule.

j'ai bien aimé.

Arielle a écrit:Bel exercice de style. Une musique agréable, on en oublie presque de chercher un sens à la chanson mais j'ai l'impression que ce n'est pas grave, que ce n'est pas vraiment ce qui préoccupe l'auteur...
Je ne vois pas bien l'intérêt de la citation en préambule.

C'est effectivement un exercice de style sur les allitérations et les assonances, mais qui ne manque pas de sens: celui de la mélancolie pour laquelle je tiens les vers de G. Nerval comme majeurs, notamment dans l'oxymore Soleil noir.

Cela m'embêterait que la technique cache le sens, au fond que les basses couvrent la mélodie.

Merci de votre appréciation,

Bien à vous

Maryse a écrit:j'ai bien aimé.

Merci beaucoup

Bien à vous

Je suis heureux de voir qu'il existe encore beaucoup d"amateurs éclairés pratiquant la poésie et j'en découvre ici un remarquable . Il a composé un long poème sans laisser trace d'une erreur dans le rythme , sans abandonner ici ou là une faute de grammaire ou d'écriture tout en multipliant les allitérations qui exigent tant de recherches de vocabulaire ; et pour couronner le tout son poème résonne tristement de mélancolie , car la mécanique des sonorités n'zmpêche pas d'ouïr la mélodie.J'ai même compris , du moins je le crois les quelques images utilisées comme "les aréoles d'Art" ou "le sirop des Margaux" , je n'ai canné que sur "jasper la jaïole" que je n'ai trouvé dans aucun dictionnaire. Bravo!Encore!

Encore un mot qui me vient en relisant mon texte. Dommage qu'un si beau poème ait un titre si commun , même avec l'excuse de l'allitération.. J'aurais préféré "Hallali des Oraisons" et on doit pouvoir trouver mieux. Salut définitif.

François T a écrit:Je suis heureux de voir qu'il existe encore beaucoup d"amateurs éclairés pratiquant la poésie et j'en découvre ici un remarquable . Il a composé un long poème sans laisser trace d'une erreur dans le rythme , sans abandonner ici ou là une faute de grammaire ou d'écriture tout en multipliant les allitérations qui exigent tant de recherches de vocabulaire ; et pour couronner le tout son poème résonne tristement de mélancolie , car la mécanique des sonorités n'zmpêche pas d'ouïr la mélodie.J'ai même compris , du moins je le crois les quelques images utilisées comme "les aréoles d'Art" ou "le sirop des Margaux" , je n'ai canné que sur "jasper la jaïole" que je n'ai trouvé dans aucun dictionnaire. Bravo!Encore!

Bonjour François.

Merci pour ces éloges.

Jasper = bigarrer de multiples couleurs en imitant le jaspe
Jaïole = vieux français pour géole.

Je conviens que le titre n'est pas bon et votre suggestion me plaît beaucoup.

Bien à vous

Cette belle poésie m'amène vers cette réflexion sur la mélancolie: état de tristesse vague et indéfinie (spleen).
Ce mot représente selon une théorie d'hippocrate une des 4 humeurs du corps: la bile noire et son sens littéraire signifie la trstesse.
De nos jours, on réduit la mélancolie à un état dépressif. Or, dans la pensée antique (Hippocrate par exemple), la mélancolie avait une autre signification que celle proposée en particulier par la psychanalyse. En effet, elle était considérée comme une source de génie et de folie qui provoquerait une tristesse et non pas réduit dans nos sociétés actuelles à une simple pathologie, une tristesse ou encore à un dégoût de la vie.

La mélancolie dans le sens antique permettait de vivre le deuil, se dépasser ou encore de trouver un sens à la vie, en d'autre terme c'est un passage en temps de crise (qui n'aboutit pas toujours à un résultat négatif).
Le terme a en partie été supplanté depuis le XIXe siècle par celui de dépression ce qui fait qu'aujourd'hui, soit il est utilisé comme son synonyme, soit pour marquer la gravité de la dépression en sous-entendant que la mélancolie comporte des aspects psychotiques. On l'utilise encore dans le sens où il décrirait un "état-d'âme" au sens existentiel du terme.

Je crois pour conclure que l'auteur a réussi a bien décrire son état d'âme du moment et j'ai bien senti la bile noire géniale (hum!) se déverser en moi.

Merci du partage.

Amitiés

!!!

Merci à toi,

Bizou


< Alex vous l'a fait remarquer ci-dessous. Nous ne pouvons qu'approuver.
Notre texte d'accueil demande bien aux auteurs d'intervenir "avec parcimonie" afin de ne pas faire remonter systématiqement leurs propres textes en haut de page au détriment de ceux des autres auteurs.
Merci d'en tenir compte à l'avenir.
La Modération >
.

Je te conseille de ne pas remercier chaque commentateur, si tu ne veux pas te faire taper sur les doigts par Modération !

Au-delà de cette petite remarque, j'ai beaucoup aimé ce poème. Quelle surprise ! Pas une erreur métrique, des sonorités évocatrices et travaillées... Je ne connaissais pas "jasper" ni "jaïole" non plus.

Deux observations, quand même : - Il part en poursuivant pas à pas sa pitance
Dégueulé dans l’égout : dégueuler.
- En flux et puis reflux des frissons doux-amers. : je trouve la cheville un peu massive.