Aux petites choses de la maison

Bon, pas de panique, c'est un recueil, mais un petit recueil, une sorte de Poésie/Fiction. Je ne peux vous le présenter que dans son intégralité.
Les outils de ce forum n'étant pas faciles à manipuler, je vais tenté de rendre le texte tel que je l'ai conçu sans être sur du résultat.

Indication :

...
= une nouvelle page

et
...
...
= une page blanche






AUX PETITES CHOSES DE LA MAISON
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C’est une maison sans queue ni tête
au toieffondré
une enfant de la pluie que le vent protège
un squat pour les faux-fuyants
une tache de naissance sur le corps d’une neige
un sourire à la chaux une matière habitée

…

Le poids du regard lui fait boire la rivière
elle traîne des pieds dans les buissons nus
au matin elle soupire et disparaît à moitié
Elle a ce petit bout de jardin que les autres n’ont pas

…

La porte est une reine momifiée
femme qui hésite
moulin-à-vent machine à bruit
à me laisser entrer

…

Les fenêtres Lumineuses immaculées
ont les yeux du dedans
ne parlent que d’elles-mêmes
se croient nues dans l’eau grise d’une écuelle
jouent les saintes lorsque le ciel gratte la saleté

…

Aux murs d’interroger l’écho
c’est le jour serpent qui triomphe et ondule
Seuls les angles hébergent un monde endormi
et aussi ce point de silence
creusé à même la paroi
cavité pour l’engourdissement
point de chute quand la lumière en a trop dit

…

Les objets s’accumulent à l’orée du langage
elle me demande pourquoi j’emménage ici
je réponds des poutres des briques et des ardoises
Attachée à l’homme dans le cadre elle soupire
tous deux solennels à leur place dans l’oubli

…

Je tords ma colonne
pour accrocher du regard
celle qui tient la maison
sourire d’échardes aux dents d’aciers
Laide sage lourde et suspendue
elle traverse les siècles comme un vieux philosophe

…

Accrochée à la rampe
la main glisse jusqu’aux nuages
Chaos de plume au grenier décoiffé
un mot de trop et c’est le vide
aux oiseaux seuls à penser
l’aller-retour entre vous et moi

…

Accords mineurs
Entre l’ardoise et l’eau
La mélancolie cogne à la porte du toi
Aux arbres belliqueux cachés sous mes paupières
Se greffe la musique du temps contre-tête
Du temps contre-toit
Nos maisons sont ruisseaux
Nos âmes sont forêts
Accords mineurs
Entre l’ardoise et l’eau

…

L’ampoule émet un signal
hésitant
du morse en fin de règne
C’est la fin des chasses aux papillons
des ailes cramées en nuit

…

Cyclope à la peau noire
ouvre l’œil
La fatigue caresse mes paupières
paysage au repos dans l’armoire
Elle est devant moi et tente
de dégrafer mon fardeau

…

Elle :




…
…

L’aurore respire à plein poumon
revêt son bleu et travaille
meuble la maison avant que les yeux s’ouvrent
pose le matin sur le balcon des bouches
et glisse dans la cuisine préparer nos humeurs

…

Une table en miettes
au centre des regards englués de nuit
matin comme les autres
paresseux
désireux de perdre son temps
collé au miel des tartines

…

La vitre boit le chat
il est encore visible à main nue
ces proies sont dans le jardin loin de lui
Flanqué d’une pluie fine, tu embues la sonnette
L’animal sursaute mes rêves tombent sur la table
Dans mon silence j’ouvre à tous les bruits

…

Tu es l’homme des matins discount
posé au centre du canapé
Assassiné par tes promesses à taux variables
je remets le tout à l’orage et sers le chat contre ma plaie
Ces ronronnements sont sous le lit
loin de moi

…

La nature cogne et sème la foudre non loin de là
la maison pleur tant de naufrages
Au salon
les ombres humides dégustent un mal de mer
le jour et la nuit jouent aux cartes leurs symboles

…

Parfois j’ai des enfants
Après l’orage ils dessinent une balançoire
dans le jardin
Les gâteaux sont trop sucrés
la cuisine claironne des citronnades
tu joues la maîtresse de maison
mais ils ne te voient pas

…

Le soir ils prennent un train
pour je ne sais où je ne sais qui
Afin de les reconnaître
je passe mes nuits à cartographier
nos actes manqués
dans le grand salon vide

…

La poussière ne recule devant rien
celle que nous perdons s’accumule en moutons sous le lit
À l’orée des meubles attirée par la lumière
elle entame son exode
comme ces petites tortues qui tentent de rejoindre la mer
au mépris du danger
Elles rampent sans se lasser pour finir défenestrées
où balayées par leur père qui n’assume pas son rôle

…

Au jour gris au jour creux
les tulipes tentent en vain
de bander comme les chevaux
mais pour elles il n’y a d’amour sans lumière
Courbées frustrées
elles crachent sur les fourmis du jardin

…

Ici le temps passe et recule
la maison devient neuve dans son délabrement
Il n’y a pas de doutes
je suis mort pour quelqu’un
non pas pour sauver quelqu’un
je suis mort à tes yeux
à ton coeur dans ta vie pour ton salut
Je suis mort pour quelqu’un

…
…

C’est une maison sans queue ni tête
au toi effondré
une enfant de la pluie que le vent protège
un squat pour les faux-fuyants
une tache de naissance sur le corps d’une neige
un sourire à la chaux une matière habitée

Le poids du regard lui fait boire la rivière
elle traîne des pieds dans les buissons nus
au matin elle soupire et disparaît à moitié
Elle a ce petit bout de nous que les autres n’ont plus

Rectif :

deuxième vers :

Au toi effondré

C'est très, très beau. Superbe et d'une immense délicatesse, avec des mots tout simples. Grand bravo !

Une remarque :
"Elles rampent sans se lasser pour finir défenestrées
ou (et non "où") balayées par leur père"

Ayant commencé un lecture linéaire (si c'est possible), j'ai ensuite préféré grappiller au hasard du texte et recueillir des images, dont certaines sont originales. Pas de vision d'ensemble donc, juste des sensations en pointillés....

Beau travail.

Merci pour vos commentaires, et merci socque pour la coquille.
J'attends avec impatience d'autres commentaires. N'hésitez pas à m'en laisser même si vous ne lisez pas l'intégralité de ce tout petit recueil

Je n'ai pas tout lu, (jusqu'à la fin de la partie introduite par "Elle :") mais je peux déjà dire qu'il y a des choses magnifiques dans ce recueil, surtout à la deuxième lecture, j'ignore pourquoi, mais j'ai encore plus aimé.

J'ai plus de mal avec le passage introduit pas "Elle:" et je déplore un ton un peu trop personnel par moment, qui m'a empêché d'apprécier certaines "strophes". Globalement j'ai plus apprécié les passages qui parlent de la maison elle-même, que ceux où le "je" interviens.

Je pense y revenir.

A bientôt sous tes lignes,
Ruin.

Les deux passages que j'ai préféré pour l'instant :

Accrochée à la rampe
la main glisse jusqu’aux nuages
Chaos de plume au grenier décoiffé
un mot de trop et c’est le vide
aux oiseaux seuls à penser
l’aller-retour entre vous et moi

…C’est une maison sans queue ni tête
au toi effondré
une enfant de la pluie que le vent protège
un squat pour les faux-fuyants
une tache de naissance sur le corps d’une neige
un sourire à la chaux une matière habitée

Le poids du regard lui fait boire la rivière
elle traîne des pieds dans les buissons nus
au matin elle soupire et disparaît à moitié
Elle a ce petit bout de nous que les autres n’ont plus.

Bon et bien finalement j'ai lu jusqu'au bout, prise dans l'ambiance. Le meilleur se situe justement dans la partie que je n'avais pas lue, me semble t-il (après le passage centré, que je n'aime toujours pas, faute au rapport "je/vous" qui me parais un peu flou. En effet, j'aime que le "vous" puisse être pris comme un appel au lecteur, c'est du moins ainsi que je le prends dans les autres passages). Dans cette suite donc, le "je" ne me gêne plus, peut-être parce que plus universel... à l'exception de ce passage en gras :

Ici le temps passe et recule
la maison devient neuve dans son délabrement
Il n’y a pas de doutes
je suis mort pour quelqu’un
non pas pour sauver quelqu’un
je suis mort à tes yeux
à ton coeur dans ta vie pour ton salut
Je suis mort pour quelqu’un

qui ne me parle pas et me semble décalé par rapport au reste, presque conventionnel avec ce je/tu et l'évocation de la mort... S'il y a un message caché que tu voudrais faire passer, je ne l'ai pas bien saisi, j'ai l'impression qu'il manque quelque chose pour tout soit bien clair et, à part si tu veux volontairement laisser le lecteur imaginer ce qu'il veut, je te conseillerais (mais ce n'est qu'un avis) d'être plus précis, notamment dans le passage centré.

Bon courage pour l'écriture de ton recueil,
Ruin.

il y auqelque chose de saisissant dans cette écriture que j'ai commencé à picorer

la prochaine fois fais plus court, j'y reviendrais


loic

J'ai trouvé le tout magnifique, tout en gardant dans ma tête des petites touches poétiques, des fulgurances qui accrochent, des phrases que je prononce à voix haute...

Tout lu, tout aimé, que ce soit par fragments ou comme une histoire à savourer dans son entièreté. Tu te joues des mots et les colores de belles sonorités, avec des réparties qui rebondissent. Le tout donne un ensemble cohérent et en même temps, chaque partie vit elle-même, isolément. C'est très réussi, bravo !
Je ne citerai pas tous les passages que j'ai aimés, ça serait trop long :-)

Merci à vous tous pour votre lecture.
Sahkti, cela fait plaisir ce que tu dis sur la possibilité d'apprécier ce recueil dans sa totalité mais aussi chaque poèmes de façon autonome. C'était le but recherché et je ne savais pas si il était atteint.

hop.

C'est vraiment pas mal. Je n'ai pas d'objections a lire un jour ces textes sur papier. La présence des "squat' et autres "discount" crée des respirations plutôt de belle facture à l'intérieur de textes qui sont posés, lisibles et harmonieux. Je n'aime pas les mises en pages centrées, c'est tout juste si j'ai survolé "elle". Mais l'ensemble que ton post propose de bien belles choses et citer ce qui m'a plus est un peu inutile. Où peut-on lire davantage de toi ?

Et tout mes encouragements pour ce que tu appelles une "poésie fiction".
Faut célébrer quand même un peu les trucs qui demandent un certain courage, au même titre que l'écriture d'un roman.

pandaworks a écrit:Et tout mes encouragements pour ce que tu appelles une "poésie fiction".
Faut célébrer quand même un peu les trucs qui demandent un certain courage, au même titre que l'écriture d'un roman.

Tout à fait d'accord !!

Je ne me lasse pas de me promener dans ta maison, Jérome, j'y trouve chaque fois de nouveaux trésors. Tout à fait d'accord avec Panda !

Merci à vous !
C'est très motivant pour moi, car étant mon premier recueil de "poésie fiction" et mon premier recueil tout court, j'avais pas mal d'appréhensions. Çà ne fait pas longtemps que j'ai repris l'écriture après dix bonnes années de silence. Je pense envoyer ce recueil à un concours pour une édition. Sinon, Panda, on peut me lire ici pour l'instant.
Merci encore à tous pour vos retours qui m'aident bien.

pfiou ! j'ai aimé et j'ai aimé. Que dire de plus !

superbe regard sur les choses , j'adore ...