Chagrin urbain

[Arielle]

C'est un chagrin de carrefour
qui vous rattrape par la manche
et vous secoue

Un chagrin qui revient de loin
sans vous avoir jamais lâché
sans consentir à délier
vos poings noués

C'est un tourbillon de fumée
qui vous enrobe dans sa nasse
vague nausée

Vous épinglant à la paupière
l'aridité d'un pli amer
il pose son aigre baiser
à la commissure gercée
de vos rengaines

Ce chagrin de trottoir mouillé
pourrait disloquer sous vos pieds
une banquise

[Invité]

on dirait que la banquise est de saison dans les poèmes,
en attendant le printemps...ce poème là est réussi!
et m'a fait penser à une chanson d'Alain Souchon: "Ultra moderne solitude".

[Yoni Wolf]

J'aime beaucoup, vraiment, c'est original tout en restant évident, c'est simple et travaillé. Par contre je n'aime pas trop le terme "disloquer", qui sonne un peu mal à mon goût, au niveau du reste. Mais c'est pas grand-chose

[Annie]

J'ai presque honte du plaisir que je prends à le lire.
Tout est dit si finement qu'on y croit... Alors le plaisir est celui que donne le chagrin ?

Délicatesse et force de persuasion.

POur moi je n'ai pas trop aimé le terme "rengaine". "Mais c'est pas grand chose ."

[Invité]

Moi, j'ai tout aimé sauf le chagrin ( j'veux pas que mes copines aient du chagrin !!!)
Mais un chagrin de carrefour ( faut changer d'enseigne !), ça va ça vient ?

C'est un chagrin à tous vents, viens donc te mettre au chaud chez moi !

[Phylisse]

J'ai toujours trouvé difficile de mettre en mots le chagrin, de lui donner du corps, et tu le fais d'une bien jolie (et originale) manière.

Il est parfois là où on ne l'attend pas, le chagrin, quel que soit l'endroit où l'on se trouve, il surgit, se montre, nous glace, il fait froid dans tes mots, Arielle, c'est ce que je ressens en te lisant.

[Invité]

Arielle is back !
En Français cela donnerait:
Ari-elle est de retour allelou-ou-ia

[Invité]

Aigre ET amer. c'est un gros c'lui-là.
et en plus : mouillé.

c'est un beau poème, que l'on n'a pas envie de relire !

[Ariel]

J'aime la simplicité du langage.
Comment utiliser des mots simples, et les charger de sens, d'images.

Je me suis posé la question du texte, sans la prise à partie des "vous"
(comme ici je l'entends : ça pourrait tout aussi bien être vous).
ça tourne, aussi. A voir.

Après il y a les deux vers, très secs, de la nausée, et de la banquise,
très secs car je ne les sens pas liés à la ligne précédente,
et on sent comme une secousse.
Mais c'est peut-être voulu...

Mon étude du jour....

[Nicolah]

Très bien écris, bien dosé sans le trop et sans le pas assez.

[Ba]

Vous restez sur le bord du trottoir, sous les branches nues à regarder ces pattes de mots traverser devant vous +++

[Invité]

Une production à part de ton travail habituel il me semble, Arielle, ne serait-ce que dans le choix du sujet.
Toujours aussi bon, aussi finement brodé ; et je m'arrête sur ce mot "urbain", dont le double sens ne me semble pas anodin ; disons que ce chagrin eût pu être tellement moins maîtrisé.

[hi wen]

du haiku-sonnet en prose, une espèce rare.
expressif. suis passé un peu à coté de cet aigle noir et de son reviens-y.
et cette banquise qui tombe à pic, une banquise à disloquer !!

ah non pardon, pourrait disloquer
c'est encore plus étrange

[Invité]

J'aime bien ce "chagrin de carrefour" pas un "carambolage" non, mais ça fait mal tout de même.
Une suite d'images très judicieuses et parlantes. Et "urbain" dans le titre dont on entend le sens que l'on veut, mumm, j'aime beaucoup.

[Sahkti]

Mais que c'est bon de te lire... cette dentelle que tu fabriques avec plaisir et doigté, cette justesse dans les émotions évoquées, tout est là, sans effet inutile, sans morts superflus. Un délice ce texte, qui me parle de surcroît beaucoup sur le plan personnel, il fait mouche.

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