l'amour éternel

[Cerval]

c'est dans son cœur que j'aménage le jour
j'avais toute la lumière au bord de la peau
je me sentais imprévu comme une nuit de gestes idiots
je ne savais même pas mon teint de misère
mon coeur à moi c'était l'été sur terre
je me méfie de la vie enfin je me méfie

j'avais tous les oiseaux du monde dans deux gestes de tendresse
toutes les lèvres fermés comme des bordels très tard
toutes les aventures fardées que l'on s'invente le soir
les jambes aux semelles de songe pour marcher plus haut plus loin plus long

des enjambées de proverbes pour arriver au mot amour
les plaines parcourues avec dans les pieds un seul nom
toutes les pierres fleurissaient d'une unique destination
le corps rentré chez lui c'est dans tes bras qu'il devient jour
je voyais l'éclipse faite pour un frisson

,

et tous les soleils venaient sans que je les explique
je me souviens je crois je ne manquais de rien
un visage se déshabillait d'une façon si légère
on l'aurait d'eau de lune ou de clair de la terre
et si je voulais je m'y pouvais baigner

une cigarette remplaçait facilement un baiser
je tirais la couette jusqu'à ce qu'elle fasse figure de douceur
j'allongeais les jambes comme si ça repoussait l'horizon
mes poignets avaient quelque chose du tournesol

je savais des mots que l'habitude oublie
je suivais le cours de mes joues et je m'endormais par terre
la pensée échappée sans que je retienne sa robe

je savais des gestes que l'habitude oublie
là où tu te trouvais il y avait la tendresse
et tout ce que je pense et tout ce que je dis

[Cerval]

ÉTERNEL INFINI

[Polixène]

"les plaines parcourues avec dans les pieds un seul nom
toutes les pierres fleurissaient d'une unique destination"



"Je savais des gestes que l'habitude oublie"

Belles images!
Par contre, je suis moins fan de l'expression "du mot amour", tellement cliché. idem pour "les semelles de songes"

Sinon l'ensemble atteint son but, surtout s'il n'en a pas.

[Polixène]

ÉTERNEL INFINI

T'inquiètes, ça finira par te passer. On n'en meurt pas , même si on n'en guérit jamais vraiment.

[minuit]

Sur ce coup là, overdose de "je".
C'est tout ce que "je" en retient.

[hi wen]

belles images.
c'est différent, au niveau de la voix.
ca me parait plus lent et plus apaisé.

[seyne]

en lisant un poème de ce genre, on perçoit bien à quel point c'est une intelligence particulière, la poésie : synthétique, associative, syncrétique, etc...etc...

[Cerval]

on finira par oublier que je suis fou
tout ce qui se produira le sera par hasard
ainsi on ne l'imaginera pas autrement
vie meilleure qu'un emploi du temps

j'aurais les mains dans les poches
peut-être un pincement au coeur
un coeur ça se domestique
ça se met dans un ciel rationnel - n'oublions pas l'oreiller
ô dormir

j'ai essayé très fort de désapprendre dormir
je suis très loin de tout, très loin de toi
un pays sans couleurs nous sépare
comme la mauvaise mémoire de ce qu'il ne fallait pas oublier

j'oublie tous les visages, il va neiger
c'est toujours comme si rien n'avait commencé
et je n'ai jamais rien eu à vous dire

[Cerval]

j'ai un langage pour personne
j'ai finit par le désapprendre
j'ai un langage pour les pierres
et peut-être parfois battent-elles des yeux
peut-être le ciel parfois rougit-il
du joli tour de mes phrases
qui ne sont pour personne
je parle si bien vous savez
et je suis si bien élevé

je me promène dans la rue
mon teint d'huitre ne dérange pas
je suis l'insomnie
je suis l'insomnie et j'ai un long manteau sale
j'ai un long manteau sale et une mine de nuit sans lune
mes poches sont pleines de tabac
je foule mes cernes

je ne sais pas dormir
ça ne fait rien
ça n'empêche pas le jour d'être le jour
et ses obligations d'être des notes de bas de page à la nuit

il y a une sorte de contradiction dans ma poitrine
la nuit ? c'est un très lent mouvement de tire-bouchon
et je me sens débile débile débile

Un texte par rubrique et par semaine, merci. Poster dans un même fil des textes à la suite ne permet pas de contourner la règle.

[Invité]

Beaucoup de talent, beaucoup.

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