le silence entre les mots

[mya]

(Le silence entre les mots)

Ce sont ces moments-là qui sont uniques.
L'herbe est encore fraîche. C'est la course !
La brouette recueille déjà un enfant pas plus haut que trois pommes.
Je vois des courbes blondes flottées au vent. Le même sang coule dans nos veines. Seulement deux ans nous séparent.
Je me colle à ce petit corps sans défense. Balancement du navire !
"Moussaillon virage à bâbord!"
La voix de mon marin emplit soudain tout l'espace qui nous entoure. Puis après le déchirement de l'air, la brouette pivote et l'on se retrouve tous deux, sur le pavé d'un jardin.
Grands éclats de rire. Les rayons effleurent mon visage pâle, mes yeux verts s'accoutument peu à peu à cette lumière vive mais réconfortante.
Une ombre apparaît soudain dans l'angle du mur. Grand corps noir. Il se faufile avec la grâce d'un félin. Assez, pour qu'on ne le surprenne pas derrière nos ricanements.
"Bouh"
Les cheveux de mon moussaillon tressaillent. Ce n'est que mon cousin ; il prend les bras de la brouette et c'est reparti pour le grand huit.
Après le débarquement, retour au calme, le goûter nous appèlent.
Ses traits sont ternes et troubles, son visage s'approche :
"Tu viens ? On va faire tes devoirs..."
On longe le couloir. Si seulement je pouvais traverser la porte, dans ces moments-là je donnerais tout : pour faire disparaître mon corps opaque et glisser dans le noir. Ce corps... ce foutu corps....
Arrivée au dernier couloir.
C'est la porte du fond.
C'est toujours ce seuil fragile à franchir. Même rituel. Mon cahier déjà ouvert. Même rituel. Prise par la taille, posée sur le tabouret.
"Récite-moi ta leçon"
Debout. Une main parcourt ce corps qui ne m'appartient plus.
"Tu n'es pas concentrée"
Une deuxième main s'ajoute à la première mais pas au même endroit.
Le silence. Le même qui a toujours suivi les larmes.
Il m'a déjà expliqué. Ses lèvres effleurent les miennes. C'est un jeu.
"J'te le répètes : c'est un simple jeu"
Combien de temps ?
Je ne dis pas qu'il n'a pas d'importance : ça serait se mentir à soi-même.
Durant les batailles de coussins, quand il m'agrippait la jambe, la taille, le bras, y plantaient ses crocs, me fixait d'un regard avide.
C'était un jeu mon enfant.
Le simple fait d'agir de se défendre était insensé puisque je ne comprenais pas : pour moi il n'y avait pas d'explications.
C’est dans ces moments là....
Autre moment. Autre époque.
A table, le repas de famille entamé. Encore une tête blonde à ma gauche. (A croire qu'elle me suit partout). Mais les reflets s'estompent : il a mûri. Toujours la même innocence se lit sur nos visages.
Cette même pâleur qui ne s'effacera pas complètement. Du moins jusqu'à ce que la vérité éclate.
Un grand corps sombre. Ce n'est pas le même. Il me fait signe sur le palier de l'escalier. Ses traits sont flous. Je le suis. Un étage plus haut on franchit ensemble la porte de gauche : une chambre confinée qui n'est ni la sienne ni la mienne. Il y a le strict nécessaire : un lit, une armoire le long du mur, ainsi qu'une fenêtre au fond de la pièce.
Les volets sont entrouvert : sûrement une coïncidence.
"Assied toi sur le lit"
Un reflet vert foncé apparaît dans ses yeux : mon regard a changé. J'ai grandi.
C’est dans ces moments là qu'on espère se réveiller.
Et oui moussaillon le bateau est parti sans toi : il ne te reste que les mots pour le retrouver ou peut-être les larmes pour y songer.

[mentor]

Trouble, troublant, très.
Les non-dits me semblent terribles.
Ce qui est dit l'est avec simplicité mais grande force.
On devine, on hésite à comprendre, on comprend, on croit comprendre, sentiment de honte, de pitié, envie d'aider sans possible.
Texte fort, dur, que je souhaite totalement imaginaire ! ;-)
Belle écriture, très "mûre"

Quelques fautes :
"Je vois des courbes blondes flotter au vent"
"le goûter nous appelle"
"J'te le répète"
"Assieds-toi"
et quelques autres

ps : tu nous dis quelques mots sur toi dans la partie "présentez-vous" en haut du forum ? ce serait sympa mya !
;-)

[Saint Jean-Baptiste]

Très beau texte, Mya, une histoire très grave, très bien évoquée, racontée avec beaucoup de pudeur et très bien racontée.
Malgré quelques petites naïvetés quand la narratrice parle d'elle :
- les rayons effleuraient mon visage pâle (...) mes yeux verts...
- toujours la même innocence se lit sur nos visage... etc...
Ce sont des détails inutiles, ici, peut-être parce que trop "joli" !
Mais c'est un très bon texte assurément !

[Sahkti]

Suis partagée Mya...
Je trouve ton texte fort et sensible, mais n'est-ce pas le sujet plutôt que le texte en lui-même qui veut ça? je me le demande. Un tel sujet ne peut qu'interpeller et émouvoir. Reste ensuite à observer le traitement qui lui est appliqué.
J'aime beaucoup tes phrases courtes, ton écriture saccadée. Cela ressemble aux battements d'un coeur qui s'accélère sous la pression de la peur, au souffle qui se fait plus court. Pour ça, c'est bien vu.
Tu retraces aussi de manière efficace le cheminement d'une pensée, d'une frayeur.
Mais je ne sais pas, il y a un petit quelque chose qui m'empêche d'être pleinement conquise. Comme si tu en disais trop pour être sûre qu'on comprenne bien. Ou pas assez, hésitant à aller trop loin dans les profondeurs de la frayeur. Du coup, cela me donne l'impression de rester un peu trop en surface, alors que je sens poindre la violence tout au fond, là, quelque part.

[mya]

Je comprends tout à fait ce que tu veux dire !
il y a peut-être quelque part la recherche d'une réponse qui n'est pas formulée
chercher les mots : c'est ça enfet mettre des mots sur des sentiments.
Je suis loin d'avoir assez d'expérience pour faire celà ce qui explique l'aspect bancal.
Le principal pour l'instant pour moi c'est que celui ou celle qui lit puisse comprendre et interpréter à sa manière

[Giny]

Très bien écrit, avec des mots-sentiments qui expriment mieux que tout le drame. L'alternance douceur/ brutalité est bien amenée, on passe de la tendresse des cheveux blonds du cousin à un jeu flou, malsain.
Vraiment, je suis épatée par la qualité de l'écriture

[Charles]

coucou Mya, bienvenue parmi nous.

bien aimé ton écriture, ta façon de raconter, les sentiments exprimés passent bien au lecteur et l'ensemble sonne vrai. Par contre,comme Sahkti, j'ai eu une impression bizarre de trop ou de pas assez, soit un peu trop flou, soit ...

j'ai eu un peu de mal à voir qui faisait quoi dans les premières lignes, notamment après le goûter ...

[Krystelle]

L'écriture est fluide ce qui rend le texte agréable à lire. Mais j'ai souvent eu l'impression que tu cherchais à émouvoir le lecteur par de jolies tournures de phrases. A mon avis, ce n'est pas suffisant; le sujet est fort et tu restes trop à la surface des choses sans oser vraiment ni écrire en creux ni écrire en plein.

[grieg]

j'aime beaucoup
je trouve ton texte délicat
tes mots bien choisis
les univers contrastés à souhait pour provoquer non pas l'émotion, mais l'empathie

[Nath]

j'ai eu un peu de mal à suivre à certains moments; mais quand j'ai compris j'ai eu le coeur serré; beaucoup de force là dedans, de révolte contenue et c'est très bien écrit, sans détails inutiles, avec un flou bien maitrisé; beau texte

[Invité]

beau texte. Quand j'ai compri mon sang s'est glacé et j'ai trouvé encore plus beau et subtil le début de ton texte. Ces non-dits entraînent un mystère à la fois énervant et salvateur. Attention aux fautes d'orthographe cependant (cela dit je ne donne pas de leçon parce que j'en fait beaucoup moi aussi).
Continue comme ça sinon, on voit que tu as des émotions à faire partager.

[Jonjon]

J'ai pas tout saisi, mais j'ai préféré celui-ci à l'autre (Haélice).
Mentor t'as déjà parlé des fautes, je ne le referai pas.
Je te dirai encore ceci : il manque un cadre à ton histoire pour arriver à bien la situer. Tout ça reste un peu flou...

[Lyra will]

Troublant oui, peut-être un brin flou à un moment, mais beaucoup moins que dans Haélice. C'est un beau texte je trouve, j'aime comme on bascule d'une impression de bonheur à l'horreur totale, le texte est bien contruit, et bien écrit.

[Bluewitch]

C'est pas mal du tout Mya. J'aime bien cette façon faussement "photo de famille" de raconter les choses. Avec une certaine poésie, parfois un tout petit peu trop de sensibilité et encore, pas sûre que ça me dérange.
Je cris qu'avec le temps, tu vas attraper pas mal de fluidité, de force en plus pour conter les choses. Ca me plait.

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