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Un saut dans l'étrangeté

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Un saut dans l'étrangeté Empty Un saut dans l'étrangeté

Message  Plotine Jeu 10 Sep 2009 - 9:30

Un saut dans l'étrangeté Oratoire

Un saut dans l'étrangeté

[i]Nous étions à la fin du mois d'août, dans la campagne normande. Après la moisson, les paysans avaient stocké leurs bottes de paille rectangulaires dans un coin de champ. Empilées les unes sur les autres, en escalier, elles offraient un terrain de jeux rêvé pour les enfants que nous étions. Nous les escaladions, sautions d'une dénivellation à l'autre, nous nous affalions de très haut haut sans dommage, nous nous poussions, nous nous bousculions sans ménagement et sans danger, sauf qu'après un saut mal assuré, ma cheville glisse entre deux bottes de paille et se "tord".
Aussitôt, une douleur affreuse me saisit et je suis dans l'incapacité de poser le pied par terre. Je rentre clopin-clopant à la maison, avec l'aide de mes soeurs. On essaie quelque soin, consistant en un bain de pied d'eau salée, en espérant que tout rentrera dans l'ordre au cours de la nuit. Il faut dire que, dans le petit coin de campagne où nous sommes en vacances, il n'y a pas de pharmacien et le médecin passe une fois par semaine. Le lendemain, ma cheville ne s'est pas arrangée, bien au contraire. Elle est encore plus enflée et je suis dans l'incapacité de poser le pied par terre. Je souffre. "C'est une entorse, dit mon père".
Ma mère, en allant acheter le pain, se renseigne auprès des autochtones pour savoir où trouver un médecin, un kiné, un infirmier, enfin quelqu'un capable de faire un diagnostic et d'apporter les premiers soins avant notre retour en ville. C'est alors qu'une brave dame lui donne un conseil : "qu'elle aille donc à X... et là, au presbytère, elle trouvera quelqu'un qui pourra nous indiquer comment trouver une personne qui pourra nous venir en aide". Ma mère n'obtient pas plus de renseignements. Nous hésitons à suivre ces recommandations qui sentent le mystère mais nous n'avons guère d'autre choix.
Nous voilà partis, nous les citadins, sans vraiment savoir à qui nous aurons affaire... Nous sonnons au presbytère. Une vieille femme nous ouvre et nous entrons. L'ambiance est étrange. C'est la fraîcheur d'abord qui nous saisit en constraste avec la chaleur de cette journée de fin de mois d'août. Et puis le silence aussi, troublé cependant par des gémissements venant d'une autre pièce. Et la pénombre qui nous enveloppe aussitôt la lourde porte refermée. La vieille dame me regarde, comprend avant que nous n'ayons eu vraiment le temps de lui expliquer quoi que ce soit. D'ailleurs, nous sommes muets de stupeur. Elle nous fait entrer dans un salon et repart.
Nous nous asseyons, mal à l'aise et sacrément impressionnés. Mes parents ne disent rien mais je les sens mal à l'aise. Moi, je suis sereine, curieuse avant tout de savoir ce qui va se passer et surtout prête à toutes les expériences qui pourraient me soulager. Pendant ce temps, il nous semble toujours entendre des plaintes. La vieille femme revient. Elle a une petite fiole à la main. Elle s'agenouille à demi devant moi et après avoir déposé un linge propre sur sa robe noire, elle pose délicatement mon pied sur sa cuisse et puis, doucement, très doucement, après avoir enduit ses pouces du liquide contenu dans ce mystérieux flacon, elle masse ma cheville avec d'infinies précautions.
Pendant que je l'observe, je remarque qu'elle ânonne ce qui me semble être une prière, longue litanie presque inaudible. En bonne fille impie, une envie de rire me prend. Je n'ose regarder mes soeurs, persuadée que je suis, qu'un seul regard entre nous suffira à nous secouer d'un fou rire inextinguible. Tant bien que mal je me retiens. J'évite également d'imaginer les pensées de mes parents et leur stupéfaction. Les prières cessent, la brave dame - qui s'avérera plus tard être la bonne du curé - me fait comprendre que c'est fini. Mes parents proposent un paiement mais, devant son refus, mettent leur obole dans un tronc spécialement prévu à cet usage.
Et comme je repars, toujours clopin-clopant, la guérisseuse me fait comprendre que je peux poser le pied par terre. En effet, je marche presque sans douleur. Seule une légère sensibilité subsiste. Nous rentrons. Nous ne parlons pas beaucoup pendant le retour en voiture, encore sous le choc.

Le lendemain, nous apprendrons que le curé est mort. Il était à l'agonie. Quant à moi je marche !

Dans la famille, nous n' avons plus jamais parlé de cette histoire tant elle était dérangeante pour les cartésiens que nous étions
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Message  Invité Jeu 10 Sep 2009 - 10:11

Beaucoup de plaisir (et d'empathie !!) à lire cette anecdote qui sonne vraie. Les protagonistes ne s'attendaient-ils toutefois pas à trouver le curé en se rendant au presbytère ?

Une réserve ici sur la lourdeur créée par l'accumulation de verbes à l'imparfait.
Nous les escaladions, sautions d'une dénivellation à l'autre, nous nous affalions de très haut haut sans dommage, nous nous poussions, nous nous bousculions sans ménagement et sans danger,

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Message  Invité Jeu 10 Sep 2009 - 11:57

Tiens, les pécores normands savaient soigner les bobos aux chevilles avant qu'on nous vende des huiles essentielles à puissance n euros le flacounet ? Et des vieux ont gardé le savoir-faire ? Ouah. C'est la quatrième dimension !

Contrairement à Easter(Island), j'ai trouvé votre texte vide. Je ne vois pas d'autre mot. Pour moi, a rien a n'dans. Si, comme le pense silene82 (et qui paraîtrait logique quand on lit la vivacité de vos interventions et commentaires), vous avez quelque chose d'intéressant à dire, ben dites-le, quoi. Et avec quelque chose qui ressemble à du style ; ça ne nuirait pas.

Rien que cette phrase qui a l'air mise là uniquement pour faire monter le soufflé : "D'ailleurs, nous sommes muets de stupeur." Pourquoi ils sont muets de stupeur, les Parigots ? Parce qu'il fait frais et sombre dans la maison, c'est ça ? Ils vivent dans la rue, à Paris ? Ou bien ils n'ont jamais vu de vieille dame jusque-là ? Bref, pas compris l'intérêt.

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Message  silene82 Jeu 10 Sep 2009 - 13:30

Moi, j'aime bien l'histoire, le ton général, la coloration; la réserve que je mettrais est que cela ressemble plutôt à une rédaction qu'autre chose. Un peu plus de dramatisation , ou de mise en valeur d'un fait surnaturel, car, que je sache, on est bien dans ce registre, n'aurait, à mon sens, pas été superflu. L'écriture est aisée, et montre un évident potentiel: la seule chose qui manque, à mon sens, c'est un petit grain de folie, ou même, osons le paradoxe, quelques petites dissonances pour casser l'aspect trop sage de la relation.
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Message  Ba Jeu 10 Sep 2009 - 13:39

Evidemment la Normandie depuis Flaubert et surtout Maupassant sera toujours difficile à décrire, il est vrai aussi qu'une pause descriptive ne peut s'encombrer de trop d'imparfaits, bien que ce temps lui soit indispensable au passé, mais cette prose mérite qu'on la lise pour son thème et malgré ses " boitillements ".
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Message  Invité Jeu 10 Sep 2009 - 18:41

Plotine fait une entorse à l'étrangeté !
Ce n'est pas habituel.
Ca me fait penser à Jeanne Favret Saada.

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Message  Sahkti Ven 25 Sep 2009 - 15:53

Haaa, j'aime beaucoup cette histoire, Plotine ! La fin est excellente, plus fluide que le début qui peine quelque peu à démarrer. J'émettrai cependant quelques réserves sur la tonalité générale qui me paraît très scolaire. Avec de surcroît l'impression d'une écriture retenue. Par exemple, il y a quelques phrases qui laissent à penser que ces citadins n'ont jamais rien vu, mais c'est esquissé, susurré. Soit, tu modifies ces termes pour maintenir un certain équilibre, soit tu joues la carte de la moquerie jusqu'au bout et glisses davantage d'humour dans ton texte (suggestion ici, n'est-ce pas, et non ordre ou vérité).


J'ai juste un petit bémol technique avec cette phrase:
"qu'elle aille donc à X... et là, au presbytère, elle trouvera quelqu'un qui pourra nous indiquer comment trouver une personne qui pourra nous venir en aide".
Faut-il mettre des guillemets puisque c'est la jeune fille qui raconte et je suppose qu'elle ne restitue pas texto les mots prononcés, sinon, ce serait vous et non nous ? Mais détail que ceci, j'en conviens.
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