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Un début de pensée

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Procuste
Calvin
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Message  Calvin Lun 18 Oct 2010 - 12:24

Mes baisers souffrent toujours de la même carence, ils semblent un corps déficient. O petites paroles échappées. La gorge emplie de soieries, pour fixer la gravité sur le poids de mes baisers. Les colombes ont l’aile durcie d’espoir et de plomb : venez on s’envole. Si j’ai faim, je laisse mon ventre rond de glaise, et il enfle – trou noir – absorbant tout le discours, les plats entiers, de l’entrée à la péroraison. Viens viens petite Blanche mon amour, viens Margot. Tu marches dans les plaines écobuées par l’automne, viens viens petite Blanche entre des yeux de montagne, sous l’air durci - et clair – et sale. La saison te caresse de ses doigts fins, ce n’est pas moi, c’est la saison. Parce que moi j’ai des doigts long et lourds et gros, je n’ai pas des doigts d’amant mais – de paysan ; je n’ai pas des doigts d’homme romantique ; je n’ai pas les doigts de Lacenaire sur la guillotine j’ai, les doigts du désespéré, j’ai les doigts – les doigts – les doigts plein de bêtise de ne pas vouloir payer. Dans le sein du bocage, Blanche, tu tètes l’amour que l’on veut bien te donner - dans ses bras doux de paille, d’épis aux mèches dures ! Et si roides, et fades. Viens ma promise, offerte au banc des accusés : si je suis coupable, toi seule saura me conforter. Arrive dans ma cellule qui sera blanche, demain. Les plaines s’ouvrent pour toi. Soit Moise pour l’herbe fraiche et embrasse-moi comme le corps d’une étoile.

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Message  Procuste Lun 18 Oct 2010 - 13:18

Trop décousu pour moi... dommage, j'ai beaucoup aimé
"Si j’ai faim, je laisse mon ventre rond de glaise (...) les doigts plein de bêtise"

Mes remarques :
sous l’air durci - et clair
l’amour que l’on veut bien te donner - dans ses bras doux de paille : j’applaudis votre effort sur les tirets délimiteurs d’incise, sauf ces petits traits d’union qui traînent
« les doigts pleins de bêtise »
« Sois Moïse pour l’herbe fraiche »
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Message  Invité Lun 18 Oct 2010 - 14:26

Dès que j'ai vu "début de pensée" par Louis, j'ai souri. Parce que je ne t'imaginais pas avec une idée concise et finie, donc ce "début de pensée", je trouvais qu'il collait bien avec l'auteur, en tout cas ce que j'en ai lu pour l'instant.

Bon. J'ai trouvé ça très touffu, très confus. De très belles phrases, bien sûr, mais la prose n'est pas la poésie, et j'ai eu beaucoup de mal à suivre le fil de ce qui n'est pour l'instant qu'un "début" de pensée... Alors je n'ose pas imaginer la fin.

Garde les expressions, les idées, qui sont excellentes, mais le tout manque de cohérence, à mon avis

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Message  Sahkti Lun 18 Oct 2010 - 16:10

Désolée mais voilà, pour une fois, je suis passée à côté.
Le thème, premièrement, n'éveille rien en moi, je le trouve convenu (mais ce n'est pas interdit de parler d'amour) et trop doucereux à mon goût (suis mauvais public avec les baisers et tutti quanti).
Ensuite la forme et la manière qui s'apparentent pour moi à une plainte surfant avec la geignardise. Le narrateur chipote, se lamente, pense et repense, mais il tourne pas mal en rond, tout comme moi. Sorry.
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Message  Invité Lun 18 Oct 2010 - 18:12

J'ai trouvé que ça partait dans tous les sens sans se fixer sur quoi que ce soit durablement. Un début de pensées (au pluriel) plutôt. Mais pas une fixation. Bien aimé le passage sur les doigts. Sinon, eh bien sinon, il ne m'est pas resté grand-chose...

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Message  Invité Lun 18 Oct 2010 - 18:28

Tiens juste une phrase que j'ai entendue, mais je ne me souviens plus où: une oeuvre ne doit pas être pleine d'idées, mais pleine d'une idée

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Message  Calvin Mar 19 Oct 2010 - 10:38

Mes baisers souffrent toujours de la même carence, ils semblent un corps déficient. O petites paroles échappées. La gorge emplie de scories, pour fixer la gravité sur le poids de mes baisers. Colombes aux battements de moitié et aux ailes durcies. Si j’ai faim, je laisse mon ventre rond de glaise, et il enfle – trou noir – absorbant tout le discours, le « Verbe » et sa péroraison. Viens viens petite Blanche mon amour, viens Margot. Tu marches dans les plaines écobuées par l’automne, viens viens petite Blanche dans les yeux de montagne, soit l’air durci - et clair – et sale. La saison te caresse de ses doigts fins, ce n’est pas moi, c’est la saison. Parce que moi j’ai des doigts trop gros et trop longs, je n’ai pas des doigts d’amant mais de paysan ; je n’ai pas des doigts d’homme romantique ; je n’ai pas les doigts de Lacenaire sur la guillotine, j’ai les doigts du désespéré, j’ai les doigts – les doigts – les doigts plein de bêtise de ne pas vouloir payer. Dans le sein du bocage, Blanche, tu tètes l’amour que l’on veut bien te donner. Viens ma promise, offerte au banc des accusés : si je suis coupable, toi seule saura me conforter. Arrive dans ma cellule qui sera blanche, demain. Les plaines s’ouvrent pour toi. Soit Moise pour l’herbe fraiche et embrasse-moi comme la nuit le corps des étoiles.

Les fleuves brodent mes délices. Je compte mes baisers, j’en apprend de nouveau. Un peu de matière dure, un peu de cristaux, enfin. Je compte la tristesse qui est cet appétit que l’on ne veut pas rassasier, un Tantale du hasard. Venez venez petits serpents, venez. Dansez dansez petits serpents dansez vous êtes les langues du baiser dansez dansez et vous mourrez vous mourrez

Blanche n’aimait pas Firmin, du moins elle croyait, parce que Firmin n’avait pas le physique pour l’amour. Pas de brillance, que des traits. Des traits nus, vide de symboles à y coucher. Alors blanche déliait son chignon lourd, ou le soir ruisselle ; blanche elle faisait ses ongles sur la terrasse rose fontaine, songeant aux beautés parfaites – c’est ça, l’amour ? Le sensible sublimé. Alors, il y a certains physiques qui prêtent aux passions. Art brutal. Gérard l’avait. Un homme fort comme une toux de montagne. Sculpté à même les ragots des foules. Et quand Gérard embrasse Blanche il chante : dansez dansez…

Sur la place du village, Blanche, elle compte les clochers, petits cailloux, petits. Clochers rond comme le souvenirs, ronds et blancs, semés dans la campagne. Et l’eau fait pshit pshit des fourrés comme un éternuement concrétisé. Blanche, elle shoote dans le sable, petits visages, fumée. L’ocre ne souille pas ses épaules. Le temps ne ronge pas sa robe. Sur le talus ou elle s’assied seule ou avec Firmin ou avec Gérard elle charme ses serpents, elle leur apprend à se tortiller comme le supplicié, Saint-Sebastien transpercé de flèches humides, molles ; douces ; chaudes ; elle apprend a ses hommes les baisers du condamné. Langoureux sur la colline, nous avons le regard qui frôle. En un unique flux de pensée. Et mes serpents domestiqués : baisers baisers…

On a des grands yeux, c’est qu’on aime parler fort. Parce qu’on analogise aux mots le regard. Chaque mot utilisé, je l’élis ; je le verse sur ma peau intérieure. Je sens son écho le long de mon corps caverneux. Et les objets, je regarde : long : fort : pour qu’il me tatoue la peau. Je voudrais avoir tant vu, tant parlé, tant de mots, que tout ce qui m’arrive par la bouche ou l’oreille semble un palimpseste au parfum trop connu. Et les langues impriment le mouvement : petits petits petits serpents… les langues m’impriment le plaisir sur la peau, déroulant le sens sur mon squelette de pensée. Venez venez… Et quand Blanche m’embrasse je voudrais peindre la musique des mots.

Firmin s’était peint un visage d’angoisse ; trois pluies cinquante sur le regard. Les yeux lourds, gercés en dedans. Des passages de la Bible entier, qu’il s’était mit à lire Firmin comme ça là au coin du feu, des passages entier et il recitait : Sebastien, Mathieu ; Paul ; Jean : Firmin il savait tout ça au coin du feu qui fond les passions pour les rentrer en dedans, et les absorber : se vêtir de mots pour avoir le corps sacré. Une armure de bronze contre les mains du monde, un plastron increvable ; des mots de Bible pour cadenasser sa pensée. Les branches de chênes, elles, n’ont plus leur commune signification, et le rameau de gui perd sa valeur actuelle. Et comme la Nature est douce. Firmin Firmin, au coin du feu.

Gérard a les yeux de peste : froids et vifs. Mais il n’est pas encore question de Gérard. Blanche belle et douce me fait réciter les couleurs : do ré mi fa sol la si. Le temps mûrissait mûrissait l’amour pour qu’il finisse par choir comme une pomme bien pourrie. Et comme la Nature est douce. Quand les heures jouent à sculpter les montagnes. Un peu de vent, là, que je recoiffe. Blanche, donc, m’apprenait l’absence…
Blanche m’apprenait l’absence, et comment la vivre, la vivre comme une symétrie, une suspension de pensée. Comme le rayon de soleil qui soudain cesse d’offrir aux objets leurs éclat odorant. Comme un négatif qui perdrait ses couleurs, dans l’eau dégorgées. Mais ici. Blanche. Moi ? Un baiser ? Sérieusement ? non. Cette manière espiègle qu’elle avait de dissiper les espoirs comme de la fumée. Et j’ai des saisons molles…

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Message  Procuste Mar 19 Oct 2010 - 10:59

Alors là ! j'adore la manière dont vous avez développé ce début, cette construction solide et aérienne en même temps ; cela dit, je trouve vraiment dommage que vous ne vous donniez pas la peine de relire, je trouve vraiment que votre beau texte pâtit des fautes qui l'émaillent.

Mes remarques :
sous l’air durci - et clair : trait d’union pour l’incise, au lieu du tiret demi cadratin « – »
« les doigts pleins de bêtise »
« Sois Moïse pour l’herbe fraiche »
« j’en apprends de nouveau »
« Je compte la tristesse qui est cet appétit que l’on ne veut pas rassasier » : lourd, je trouve, avec ces deux relatives successives
« Des traits nus, vides de symboles à y coucher. Alors Blanche déliait son chignon lourd, où le soir ruisselle ; Blanche elle faisait ses ongles »
« Clochers ronds comme le souvenirs (le souvenir, ou les souvenirs, au choix) »
« Sur le talus où elle s’assied seule ou avec Firmin ou avec Gérard »
« Saint-Sébastien transpercé de flèches humides, molles ; douces ; chaudes ; elle apprend à ses hommes »
« qu’il s’était mis à lire Firmin comme ça là au coin du feu, des passages entier et il récitait : Sébastien »
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Message  Invité Mar 19 Oct 2010 - 15:54

Un texte qui s'enroule, se déroule, et sinue, comme Blanche la charmeuse de baisers serpents. Un texte... charnu. Là, j'aimerais en savoir plus sur ce trio...

J'en profite pour te remercier Louis! de tenir compte des commentaires qui te sont faits pour venir présenter une nouvelle version de ton texte. C'est très gratifiant pour le lecteur comme le commentateur.


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Message  elea Mar 19 Oct 2010 - 17:47

Au-delà du fond et des personnages, ce que j'aime particulièrement c'est le rythme, les mots qui dansent comme les serpents, et les images, le côté vivant du texte qui ne perd rien de sa poésie et de son mystère attirant.

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Message  Calvin Ven 22 Oct 2010 - 13:28

Firmin veillait seul, échoué sur ses plages, se forgeant des angoisses. Firmin, je l’ai vu ancrer ses plaies dans la réalité souple, pour qu’elle lui apporte ce gout de cuir et de peau tanné. Il aimait des fantômes. Et il se le rapprochait. C’est qu’à force il devenait fantôme lui-même, Firmin, à ployer le réel qui affluait à sa bouche, à ses oreilles. Il connaissait de Blanche le peut de considération qu’elle avait pour lui : tout l’amour qu’il avait pour elle. Il ne lui en tenait pas rigueur. Mais il voulait bien en tenir compte. Firmin aux yeux clairs, bientôt éteints, ses oreilles pendant comme des cordes aux suicidés. La table où il s’assied est un grand morceau de nuit, et il y a quelque chose qui vient pincer la peau intérieure. Le temps dit, il faut compter ses saisons. Il faut lire, tout ce qu’il y a lire, Golgotha de science : plus qu’avaler, attirer à soi même, avant faire gémir la poussière. Caresser ses yeux à l’envers pour qu’ils récitent les pages apprises, décrire les choses à aimer, à élire, tout ce qu’il y a à faire avant d’oublier, de glisser sur la corde raide du suicide. Ces formes à fixer, ces œillades pour se languir, ces paroles à sacraliser, ces étreintes à connaître, ces bonheurs à annexer, ces peines à fertiliser, ces prières à déconstruire, ces paysages à faire naitre, ces éclats de tessons pour se parer, ces femmes à faire jouir, ces femmes pour se justifier, pour s’oublier, ces femmes à aimer, ces femmes à aimer, Blanche à aimer, Blanche, à aimer, Blanche, Blanche, Blanche, Blanche, Blanche.

Firmin écrivait sur son carnet qu’on ne l’aimait que mal, comme une parenthèse qui ne se ferme qu’à moitié, parce qu’il est un souffle heureux que l’on avale soudain, aussitôt digéré. On l’aime comme l’oxygène qui semble si propice qu’on oublie d’en faire reluire l’existence. Il peut le voir dans les regards que lui consacre Blanche : toute la chimie qui émane d’elle. Il s’est cru brise quand il n’était qu’exhalaison.

Gérard n’est pas homme à regarder les proies blessées, il délaisse Firmin qui gémit, les bras croisés en routes sinueuses, un calvaire sur le cœur, Firmin, pitoyable Firmin, Gérard lui avance, oh Gérard. Blanches à force de fumer des cigarettes n’est que fumée, elle a le corps chaud qui lui coule dans la gorge, ça l’embrasse, c’est comme une danse intérieure. Elle aime le matin ajuster ses bijoux comme autant de détails, comme une vanité qui se justifierai dans le regard des hommes, quand ils la remarquent de loin, luire, avec la faim des pies, et que leurs yeux s’arrêtent sur sa robe, ses hanches, les formes qu’elle vient suggérer. Blanche, elle savait parler le « langage corporel » comme on dit, elle savait leur faire avouer ça aux hommes, arracher ce désir qui n’est que négation de soi-même. Si tous veulent se réaliser dans la possession du corps de l’amante, imaginant y fixer leur plaies, Blanche ne se sentait vivre que dans le fait d’être possédé, illusoirement possédée, comme le pêcheur qui remonte le hameçon au bout du quel frétille le poisson qui se croit chasseur, quand il n’est que chassé. « Mes bijoux sont mes appâts », dit Blanche. Elle a les mains pour tenir chaud comme deux bouts de soleil, et le rire est une cascade.

Mais Gérard a trop confiance en ce qu’il considère comme sa réalité, il a l’esprit d’induction, il écarte Firmin et se voit seul avec Blanche, il a fixé la cause et il attend l’effet. Il ne sait pas, Gérard, que parfois le hasard vous joue des tours, qu’il se condense en matière, en acte, en corps qui vit, en sang qui bat les veines comme un fleuve qui se dédouble. Ce hasard a le visage d'Arthur, il est commis de ferme, il est plus grand et plus beau que lui, Gérard, et c’est détail qui n’échappe pas à l’œil de Blanche. Il ne faut pas se méprendre : on penserait qu’elle est vaniteuse, vénale, qu’elle ne recherche que la luxure, mais Blanche est de ces cœurs nobles qui ne cherchent qu’a se réaliser. Et la contingence l’a fait naitre ici, Blanche, dans ce village où les traditions se transmettent comme le langage ou la nourriture, ce village où les destins ne comptent pas plus de motifs que la robe champêtre, et il faut bien se réaliser, fut-ce dans le sexe, le stupre, les corps poisseux dussent-ils tenir lieue de clef, pour briser la serrure sur les barreaux du prisonnier. Arthur a le parfum d’évasion, et à la jeune femme ça lui monte à la tête, ça l’enivre, ses doigts se tordent, bientôt ils saisiront des grappes de chair. Firmin s’évade aussi mais sa tactique n’est plus la même ; il creuse, creuse, creuse, et de son désespoir il s’en est forgé une cuiller, qui attaque le sol poreux sous ses pieds, et dans son dos il y a de grands tas de sable. Il cherche l’évasion intérieure, il veut tomber dans lui-même, dans son trou si profond, avec les mots du Christ pour se substanter. Gérard, lui, tourne toujours, au gré du vent, il dit « comme je suis libre, comme je peux aller », mais il n’est que girouette, les pieds coulés dans le béton, au mieux abeille butinant les fleurs de toujours la même espèce.

Le cadre ainsi posé, c’est alors qu’un événement arriva.


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Message  Procuste Ven 22 Oct 2010 - 13:42

J'ai trouvé le premier paragraphe superfétatoire, mais le reste m'a bien plu.

Mes remarques :
« de cuir et de peau tanné » : « tannée » si qualifie la peau, « tannés » si qualifie la peau et le cuir
« le peu (et non « peut ») de considération qu’elle avait pour lui »
« attirer à soi-même, (trait d’union) avant (de) faire gémir la poussière »
« Ces formes à fixer, ces œillades pour se languir, ces paroles à sacraliser, ces étreintes à connaître, ces bonheurs à annexer, ces peines à fertiliser, ces prières à déconstruire, ces paysages à faire naitre, ces éclats de tessons pour se parer, ces femmes à faire jouir, ces femmes pour se justifier, pour s’oublier, ces femmes à aimer, ces femmes à aimer, Blanche à aimer, Blanche, à aimer, Blanche, Blanche, Blanche, Blanche, Blanche. » : je trouve les déclinaisons de cette phrase trop nomberuses, trop systématiques, donnant (pour moi) un effet d’esbroufe
« Il s’est cru brisé quand il n’était qu’exhalaison »
« comme une vanité qui se justifierait dans le regard des hommes »
« la faim des pies » : j’adore ! C’est tout simple et très expressif
« Blanche ne se sentait vivre que dans le fait d’être possédée »
« le hameçon au bout duquel (et non « du quel ») frétille le poisson qui se croit chasseur » : j’aime beaucoup l’image
« ces cœurs nobles qui ne cherchent qu’à se réaliser »
« il faut bien se réaliser, fût-ce dans le sexe »
« les corps poisseux dussent-ils tenir lieu (et non « lieu ») de clef »
« de son désespoir il s’en est forgé une cuiller » : « de son désespoir il s’est forgé » ; le « en » fait double emploi avec le « de »
« les mots du Christ pour se substanter » : sustenter ?
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Message  Invité Ven 22 Oct 2010 - 19:14

La dernière phrase tombe à point parce que je trouve que ça commençait à ronronner un peu trop fort ; en fait, je me prends à objecter à ce que je considère comme de l'écriture automatique sans vrai travail il me semble. Parfois ça marche bien, parfois ça ne marche pas du tout, comme au début de ce nouveau passage : le premier paragraphe est particulièrement lourd, assez laid à mes yeux. Attention, je ne dis pas que ce dernier postage est du tout mauvais, je dis qu'il me laisse une impression de bâclé, de "peut beaucoup mieux faire".

A ce propos, j'ai relevé ceci qui m'a intriguée dans le contexte du récit : Et il se le rapprochait ou "reprochait" ?

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Message  Calvin Sam 23 Oct 2010 - 17:43

Tout d'abord, merci à ceux qui ont prit la peine de lire et de commenter.
Easter, c'est en effet "reprochait", et pas "rapprochait"
Ce texte, pour l'instant je le continue. Le style change un peu à chaque fois. Je sais que je ne suis pas censé faire comme ça, mais peut-être que plus tard, quand la nouvelle sera finie, je la réécrirait pour obtenir une certaine cohérence. En attendant, je peux aller un peu où je veux avec ces trois là.
Ci dessous, donc, la suite.

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Message  Calvin Sam 23 Oct 2010 - 17:48

Comme je marchais au crépuscule, sur la langue rebondie du sol, soudain tout le soir se dépose aux aubépines. Tout le soir remue dans un peu de vent. Tout le soir s’étire dans la lumière qui devient crue, qui marche à rebours sur le poil busqué des heures, tout le soir s’allonge sur mes mains, tout le soir caresse la forêt où je m’enfonce. J’y voyais Firmin, vagabondant entre les arbustes et les fênes, caressant le feuillage, comme si de ses doigts il lui pousserait une tulipe ou un coquelicot. Il se passe la main dans les cheveux. Les fougères trébuchent, la vue des ronces lui donne des maux de corps. Il gravit une colline, Firmin, il aperçoit deux ombres fraiches derrière un buisson, aux tâches d’un noir si délié qu’on pourrait en boire. C’est Blanche et Gérard. Je regarde Firmin qui regarde, j’écoute Firmin qui écoute, je suis ses yeux ses oreilles, je suis Firmin. Je regarde. Un bout de sein nu, là, de cette peau qui me saute au visage tant je l’ai désirée. Comme cette vue est douce dans cet écrin forestier, quand les insectes bourdonnent dans l’air sexuel, et le sein de Blanche, qui semble délicatement posé contre un autre sein aux quenottes d’ivoire, - Ô délicat sein de Blanche ! Gérard a sa voix de traine vulgaire, qui glisse le long des mots de sa paume poreuse, et brutale. Il pose une question. Silence. « Blanche, tu m’aimes ? » Silence. Personne ne répond, et les moustiques aux trompettes viennent murmurer plus loin des oreilles. Petit orchestre pour l’indicible. Blanche ne répond rien, seul son sein, que le ciel illumine, parle au rythme régulier du cœur. Langage de scandale. Blanche se relève soudain, repique l’Univers à son sein, elle rassemble ses charmes et part, sans un mot part, elle en a laissé quelques un sur l’herbe, aux côtés de Gérard. Des cheveux, des poils, une odeur : il ne pense pas à les ramasser. Il reste bête, Gérard. Et les pas de Blanche font un bruit de baisers. Dans sa stupidité Gérard s’enfonçait. Gérard. S’enfonçait. S’enfonçait s’enfonçait. Alors il pleut.

Je reste immobile un instant, puis je marche, j’ai beaucoup à penser. Je veux dire que la marche est mon mode de pensée : les pas apportent l’eau à mon moulin, dans des cavalcades d’étreintes joyeuses. Alors ma conscience peut tourner. Et un peu, plus loin, les pas de Blanche font un bruit de baisers. Je passe devant Gérard, il ne me remarque même pas. Bêtise de cet homme. Blanche, l’aimer, et puis quoi ? Il est couché dans ses ornières, il ne comprend pas le bruit des souliers de lin qui claquent. Ah, cela valait bien la peine de quitter les villes. Je vous ai laissé à votre propre sort. A vos bonaces. Va te faire fiche. Déjà je peux imaginer votre air hypocrite quand vous dénattez vos longues fumées bleues dans l’air douceâtre du soir. A cette heure-ci la forêt met son habit de marécage. Bras des hêtres, écartez vous un peu. On croira que c’est la nature qui me rédime. Mais non. Je ne suis pas non plus un homme des campagnes. Cet air long et calme, je le laisse aux sages. Ces espaces. Je hais tout le donné, le sensible, mes organes tapinant le monde pour qu’il lui accorde un peu de ses empiriques chimères. Mais les pas de Blanche font un bruit de baiser. Je hais ce que je suis, je hais, Gérard, je hais ces faces mornes et bêtes, et tristes et mornes, et bêtes. Je hais ces paysans qui dans les plaines dessinent les courbes d’une femme qu’ils n’ont vue qu’en rêve, et leur sein est mon sillon. Je hais cette Nature, aux tétons de bosquet où les moineaux viennent boire, ses bras les berceaux pour toute une engeance piaffante, couinante, aux naseaux d’étamines dégorgeant de pollen. Je hais ces villages qui sont un crachat sur la face vulgaire de France et les gens qui la peuplent, je hais cette langue de comptable, précise et inhumaine, et sa vulgarité, oh oui mon petit chéri embrasse moi un peu ! Parmi les cageot de pommes et les sacs d’épices. Vision charmante. Corps, un peu de riz pour baigner tes reins. Femmes françaises, incarnation de laideur : vous Maries, Françoises, Jeannes, cet air stupide dans lequel vous vous versez. A vos charmes ma vue se trouble et mon vît reste blèche. Un peu d’air, un peu d’air. Vous êtes l’épigée morne aux fleurs adventice dans lequel gît, comme un trésor, une ou deux fleur d’onagre. Alors mon corps se fend. Comme à la vue de ce sein dans la forêt. Ah, une grande colère me prend, c’est soudain. Mais les pas de Blanche font un bruit de baisers.

Il faut quitter Firmin, Firmin prend trop son aise. Gérard est toujours à sa place, il a vu le sexe du monde, et ce sexe lui échapper. Il reste tendu. C’est son corps qui bande, son sang qui se fige. Il s’enfonce dans le sol, Gérard, dans le sol qui n’était herborescent et parfumé que par la présence de Blanche qui, évanouie, laisse peu à peu son visage s’échapper. Les genoux de Gérard pénètrent le sol, qui devient terre, qui devient boue. Sous la pluie, les pas de Blanche… en longues étreintes passionnées. Ses jambes sont des langues, à Blanche, et ses hanches une lèvre aussi fière que gracile. Mais Gérard, pétrifié d’avoir vu le sexe universel, la vulve du monde retourner dans le corset de tulle, après sa question à Gérard, continue à s’enfoncer dans la boue, jusqu'à la taille, jusqu'à la poitrine, jusqu’au cou. Et ses yeux sont deux miroirs éteints. Mes baisers sont comme son être : ils semblent un corps déficient. Mais les pas de Blanche… Et Gérard de se confondre avec la terre, de voir ses jambes devenir racines, ses bras troncs, ses yeux baisers. Pour qu’une femme y marche. Et sa chevelure éclot sous la pluie en un parterre de mousse tiède et de pousses de laurier.

Firmin suivait Blanche, bandait à son ombre. Il se penche et cueille de la tête de Gérard une fleur de laurier. C’est pour Blanche. C’est pour son cou. Et qu’est ce qu’il m’arrive, pense Firmin, si je perds Blanche comme le sens de moi-même ? Songez. Il y a de quoi devenir fou. Folie tu as déjà mené Gérard dans la ténèbre. Il ne faut pas perdre Blanche, il faut se suivre. Le marécage est passé, le parterre se charge de lèvres luxuriantes. Blanche y marchant fait un bruit de baisers. Sa silhouette caresse le dos des chênes. Je la suis quand elle s’enfonce en équilibriste sur le rebord des fougères. Ecrin rose, de soie, vulve délicate, grand jardin libre aux airs spécieux. Ce parfum m’enivre. Je la suis sur la pointe escarpée d’une langue, aux manières de falaise. Il ne faut pas perdre Blanche, il ne faut pas perdre Blanche, ou je m’enfonce. Comme Gérard qui s’est enfoncé enfoncé. Dans lui-même. Il doit avoir les yeux très secs, des yeux friables, maintenant. Ô Gérard d’argile ! Permet moi de suivre les fesses de Blanche qui pénètrent la forêt. Dans ce bruit de baiser. Caractéristique, ce bruit. Et comme mes souliers semblent fouler des narines frémissantes. Blanche, Blanche, Blanche, ah, permettez-moi d’en finir. Il n’y a rien hors de l’amour, rien. C’est dans ce nombril que ma pensée se développe. J’ai suivi la transhumance du moi, j’ai été détaché : une main de passion me fixe à ces courbes puissantes. Ces baisers lourds. Soyeux. Et comme la nature est douce ! Quand Blanche que je suis comme le sens de moi-même marche dans la forêt avec ce bruit de baisers. Quand le soir taquine mes doigts, où un autre corps se ramène. Le corps désiré. Blanche. Là où je suis il n’y a que de sens pour l’amour. Je sacrifierai ma vie pour une femme. Pour un regard. Pour une étreinte. Ici tout l’univers se concentre dans un pli de la lèvre, dans le ballet amusé d’une langue. Et comme la nature est douce. J’enjambe le parfum de safran et ses lianes, mais les pas de Blanche font un bruit de baisers.

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Message  Calvin Sam 23 Oct 2010 - 17:53

Ah, Firmin vous dites toujours la même chose, mon cher.

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Message  Procuste Sam 23 Oct 2010 - 18:02

Je trouve par moments votre écriture fascinante, à d'autres instants précieuse, avec de l'afféterie. Mais ça, c'est votre choix, comment vous dites ce que vous avez à dire. Au total, je crois que vous tenez quelque chose ! Restera, peut-être, à reprendre le tout une fois finie, parce que j'ai l'impression que vous ne maîtrisez pas complètement les changements de style et de registre.

Mes remarques :
« comme si de ses doigts il lui poussait (et non « pousserait ») une tulipe ou un coquelicot »
« aux taches (une tache est une souillure, une tâche un boulot à faire ; essai de phrase mnémotechnique : « Un chapeau sur la tête, je tâche d’effacer les taches ») d’un noir si délié qu’on pourrait en boire »
- Ô délicat sein de Blanche : typographie, le trait d’union « - » ne suffit pas à introduire une incise, il faut prévoir le tiret de mi cadratin « – » ou le format au-dessus, « — »
« elle en a laissé quelques-uns sur l’herbe »
« Et un peu, plus loin, les pas de Blanche » : la disposition des virgules est vraiment bizarre, je trouve ; si c’est pour un effet, je ne vois pas lequel
« Bras des hêtres, écartez-vous (trait d’union) un peu »
« embrasse-moi (trait d’union) un peu ! Parmi les cageots de pommes »
« mon vit reste blèche »
« l’épigée morne aux fleurs adventices »
« une ou deux fleur d’onagre » : je crois qu’après « une ou deux », on met au pluriel ; à vérifier, éventuellement
« sa chevelure éclôt sous la pluie »
« qu’est-ce (trait d’union) qu’il m’arrive, pense Firmin »
« Permets-moi de suivre les fesses de Blanche »
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Message  endjel eriennon Lun 25 Oct 2010 - 5:19

j'adore, c'est super joli et original, les mots sont très beaux !!
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Message  Calvin Lun 25 Oct 2010 - 11:13

Procuste : oui, il y a beaucoup à élaguer. C'est d'ailleurs ce que je suis en train de faire, et je réécris un peu. Je reposterais le tout et sa suite quand j'aurais obtenu une certaine cohérence.

Sinon, pour endjel eriennon, merci.

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Message  Invité Lun 25 Oct 2010 - 11:36

Toujours une grande sensualité mais il faudrait canaliser tout ça. L'élaguer aussi, se concentrer sur l'essence. Cela lui donnerait encore plus de force je pense. Beau vocabulaire riche ; apprécié la rupture dans le rythme ici :
Et Gérard de se confondre avec la terre, de voir ses jambes devenir racines, ses bras troncs, ses yeux baisers.

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Message  Calvin Mer 27 Oct 2010 - 3:41



Carnet de Firmin :
J’ai tout quitté. J’ai semé ma vie au hasard. Maintenant je peux le dire, je me suis trompé. J’avais beaucoup lu. Beaucoup écrit. J’ai cru en Dieu comme un enfant et j’ai fait de la poésie comme on fait du bricolage. Par ennui. Par goût de la chose faite, mais mal faite. Je traîne derrière moi une longue déchirure. Et après ? J’ai toujours la vision de Gérard qui me hante, devenue boue dans le bruit sourd des os que l’on rompt. Et Blanche, avec le bruit de ses baisers. J’ai tout quitté. Enfin je peux commencer à parler de ma vie. Elle est nue. Il n’y a rien. Il est temps pour moi d’arrêter d’écrire.

**

Tout le souvenir de Blanche s’arrête, et se délie en tornade pour en semer des bribes aux mémoires. Ah comme il est doux d’être un pêché mortel. Elle à toujours ce petit goût se souffre, Blanche, qui nappe sa langue tantôt crue tantôt pâteuse. Elle est le passage de l’aube au crépuscule, de la lumière aux mémoires. C’est un passage que l’on empreinte, dans lequel on vient s’abîmer, soudain. Ce cumulonimbus comme un petit grain de beauté a sa bouche, et l’éclair ses expression qui font le temps d’une seconde se bouleverser son visage. Ce lac calme aux eaux insondables. On ne lit pas bien ce qu’il y a dans ces profondeurs. On ne sait pas. Aussi loin que le vent l’emporte, Firmin se rappellera toujours de cet air anxieux qu’elle à quand il avançait vers elle, vers l’œil de son cyclone. Elle est à la pointe d’un couteau ; elle s’aiguise. Elle sait bien ce que les hommes attendent d’elle, le rôle que tous ses amants ont exigé qu’elle tienne. Il est temps d’embrasser cette femme comme le souvenir d’un orage. Il est temps de recoiffer le tonnerre comme une mèche a son front.

Ah comme tout cela l’ennuie. Elle se souvient de ces temps plus ancien, Blanche, quand un simple baiser résumait le mouvement de désir qui a noué toute sa vie. Elle choisissait ses amants, elle les élisait. Comme tout était doux alors. Le travail à la ferme lui laissait de l’énergie, elle marchait maîtresse dans son royaume de commis et d’étables, avec pour salut le pas enlevé des chevaux ou des vaches. La traie du matin, quand elle s’asseyait sur le petit tabouret de rotin, la préparait au désir. C’est dans cet instinct que tous les événements d’un jour se ramènent. Elle a déjà choisi son homme, peut-être, quand elle presse de ses mains fermes le pis pour qu’en sorte le lait dont elle se gorgera. Elle soupire. Blanche a toujours refusée de laisser sa vie aux mains agiles du hasard, Blanche, elle s’est battue pour forger sa vie, elle voulait être une personne faite, fait selon son ordre. La mouvement de son destin, elle l’a apprit a l’extrême instant d’une nuit. Elle s’était réveillée un jour, se mirant dans le reflet du désir des hommes. Tout d’abord elle n’a pas compris. Puis elle avait saisi cette opportunité, elle a soufflé des naseaux, tiré sur la bride et détaché l’encolure, elle a quitté ses parents, elle s’est enfuie. Tout cela ne s’est pas fait sans crainte. Mais a connaître comme ça le plaisir, pourquoi elle laisserai la main ignorante du père l’attacher à un homme ? Un homme qu’elle n’a pas choisie. Blanche est née dans un monde d’homme, elle sait ce que ce monde lui réserve. Cette vie de servante, elle n’en veut pas. Elle la laisse aux autres femmes. Comme elles sont des regards d’aigreur pour elle ! Mais son cœur n'a le vertige que pour de plus hautes paroles.

Il n’y a que les hommes qui meurent pour moi qui peuvent me comprendre, pense Blanche, parce que ces hommes connaissent alors sa fureur de ne pas être ce qu’elle voulait, et comment elle vient arracher ça aux cœurs pendants. Parce qu’elle se refuse à souffrir, elle développe pour eux une logique de sacrifié. Elle connaît cette lumière qui est celle de l’heure du suicide. Ce grognement de la forêt, quand un homme est venu pendre sa liane de tristesses à ses troncs. Blanche y marchant fait un bruit de baisers. Pardon, pardon. Elle est jeune pourtant, mais qu'a-t-elle qui évoque ainsi le vocabulaire de la mort.

Les femmes sont plus à craindre parce qu’elles ont le cœur plus large, qui sait devenir un cœur plus meurtri. Blanche voudrait elle aussi connaître l’amour. Elle n’a de vie que pour ça. Elle a pour les préoccupations communes un regard de mépris. Mais l’amour, l’amour. Comme ils peuvent être décevant les gestes de l’amant, quand une fois donnée elle perçoit la laideur qui émane d’eux ; la déception qui émane d’elle. C’est une étrange chimie. Caprices des hommes, enfantins et méchants. Elle est lassée d’être un suicide perpétuel. Un jour elle gagner sa vie et on la respectera de l’avoir gagnée, de la laisser ainsi faite, comme un trophée contre son sein. Chaque homme a qui elle se donne la rapproche un peu plus de sa mort, a ce parfum qui l’enivre. Comme cela est doux, pense-t-elle, comme cela est doux. Je dissous mes étoiles, dans un baiser au mensonge. Blanche ! plus personne ne répond. Blanche ! On a perdu Blanche. Il est temps de vivre comme une pièce lancée au hasard.

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Message  Calvin Mer 27 Oct 2010 - 3:48

ICI UN AUTRE PERSONNAGE INTERVIENT

Elle voudrait bien, Blanche, que je lui caresse ses yeux qu’elle exhibe si fièrement, que je les prenne avec moi comme deux petits bouts d’elle, que je les égrène comme un chapelet dans ma poche, assemblés en souvenir. Et l’orbite en serait si cru, et si doux, qu’il fixerait sur mes doigts ses contours. Mais elle n’a à m’offrir que des platitudes, des velléités. Elle n’a à m’offrir que ses yeux bleus qui battent a rebours, qui me blessent le cœur, on se perd en les mirant, qui semblent dire, d’un air taquin, « j’ai des ciels a croquer », mais elle ne sait pas combien ça me perce dans une chanson d’aiguille. Elle voudrait me faire dire l’abnégation. Je ne la dirais pas. Je l’ai vu faire, avec Gérard, Firmin. Comme ils sont bêtes ces hommes ! Elle voudrait bien, Blanche, qu’on lui offre des nuits de septembre, qu’on se jette dans des alcools qui abîment, dans des nuits qui craquent. Elle a des yeux de désir pour les femmes, de possession pour les hommes, c’est différent. Elle est dure, Blanche, comme si elle voulait se faire la peau dans les bassesses, pour masquer la chair pulpeuse qui lui parait trop molle.

« Je ne laisserai aucune nuit me passer à son épine», je dis. Parce que j’ai des passions qui ne brûlent que pour la flamme des alcools exotiques. Je ne veut pas mourir, je ne veux pas mourir, parce que j’ai trop gouté la mort ici-bas, elle rend la langue pâteuse, et sale. Elle laisse un parfum de peau morte et de sable mouillé. Je ne veux pas mourir, parce que je voudrais vivre des nuits différentes, avec des mains de sel qui me font un corps inconnu. Je le connais trop, ce corps. Je voudrais briller autrement, j’ai toujours trop brillé qu’on dirait maintenant que je suis si pâle. Je voudrais briller d’un corps différent, un corps qui serait un objet soumis.

**

J’avais parlé a Margot, mais Margot me dégoute, avec ses yeux qui gémissent tout le temps, qui trainent des refus, des pitiés suspendues au bout des lèvres. Je voudrais lui faire mal, mal, mal, qu’elle cesse de geindre pour vraiment crier. Elle me dit « je t’aime, Louis, je t’aime », et j’ai envie de lui arracher sa bouche, de la jeter au sol et de la fouler de milliers de pas cruels, de lui dire arrête Margot, de t’accrocher à moi comme l’étoupe, toi qui dans la nuit rend mon front si lourd qu’il traverse l’oreiller sans atteindre le sommeil. Je ne peux plus dormir, je ne peux plus dormir. Tout ça me pèse. Blanche, elle, je voudrais prendre tout son corps liquide, en emplir ma taie et y poser ma joue contre la sienne, Blanche, y enfoncer mes doigts pour extraire des cris. Blanche ! Blanche ! Blanche ! Comme ce nom m’enivre, comme ce nom m’emmerde. Blanche ! Les hurlement de mes yeux qui n’en peuvent plus de ne pas dormir, avec deux succubes qui me grignotent les appétits, qui me rendent maigre, qui gorgent mon corps de ses propres liquides, l’une avec son amour de putain, l’autre avec ses refus de reine. Margot ! Margot ! Blanche ! Il y a Jonathan aussi qui me dit que je ne pourrais jamais écrire, et plus j'écris plus je me dit qu’il a raison : la réalité se dérobe sous mes mots. Ils échouent à l’atteindre, à la clouer de grammaire, à la réorganiser et le déplier avec mes verbes, mes mots… Imiter, je ne sais qu’imiter, je n’ai pas de voix propre. Billie Holliday chante… Et pourquoi je ne peux pas écrire comme elle chante Billie Holliday ? C’est cliché, mais on s’en fout, mais qu’importe. Je parais porte arabe. Je suis mol et affaissé. Où est-ce que je vais trouver un peu de raideur, un peu de plomb à suspendre aux distances ? Où ? Blanche ! Ce n’est pas elle qui me les donnera, elle me retire les mets que je contemple les jambes prises dans le fleuve, Blanche ! Et Margot avec son amour si sale et si laid, son amour de putain.


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Message  Calvin Mer 27 Oct 2010 - 3:50

Bien sûr, c'est bordel, mais c'est en attendant une réorganisation générale, je prends tout de même les commentaires, pour l'essai des images, la narration, le style.

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Message  Procuste Mer 27 Oct 2010 - 8:24

Putain, Louis!, pourquoi, en écrivant si bien, ne vous donnez-vous pas la peine de vous relire ? Pour moi, votre texte est gâché par toutes ses fautes de langue. J'ai déjà employé cette image à l'occasion : vous me donnez l'imperssion d'une jeune mère paniquée par la venue de son bébé et qui le balance direct au vide-ordures au lieu de le nettoyer, habiller, nourrir avant de l'exhiber au monde. Ce qu'il en voit, le monde (moi, en l'occurrence), c'est une petite chose braillarde, pleine de vigueur, destinée à devenir un adulte en pleine force, mais qu'on risque de laisser dans sa poubelle parce qu'on ne sait pas par quel bout la prendre !

Mes remarques :
« comme il est doux d’être un péché mortel. Elle a toujours ce petit goût de soufre (et non « souffre ») »
« C’est un passage que l’on emprunte »
« comme un petit grain de beauté à sa bouche, et l’éclair (de ?) ses expressions qui font le temps d’une seconde »
« Firmin se rappellera toujours cet air (et non « de cet air », on se rappelle quelque chose, on se souvient de quelque chose) anxieux qu’elle a »
« recoiffer le tonnerre comme une mèche à son front »
« Elle se souvient de ces temps plus anciens »
« La traite du matin, quand elle s’asseyait sur le petit tabouret de rotin »
« Blanche a toujours refusé (et non « refusée ») de laisser sa vie aux mains agiles du hasard »
« elle voulait être une personne faite, faite selon son ordre »
« elle l’a appris à l’extrême instant d’une nuit »
« pourquoi elle laisserait la main ignorante du père »
« Un homme qu’elle n’a pas choisi (et non « choisie » ; le participe passé du verbe conjugué avec avoir s’accorde avec le complément d’objet direct quand celui-ci est placé avant le verbe ; c’est le cas ici, Blanche n’a pas choisi qui ? « qu’ », mis pour l’homme, masculin singulier) »
« Blanche est née dans un monde d’hommes (je suppose qu’l y en a plusieurs, des mecs) »
« mais qu'a-t-elle qui évoque ainsi le vocabulaire de la mort. » : on attend plutôt un point d’interrogation en fin de phrase
« Un jour elle gagnera sa vie et on la respectera »
« Chaque homme à qui elle se donne »
« Et l’orbite en serait si crue, et si douce, qu’elle fixerait sur mes doigts »
« ses yeux bleus qui battent à rebours »
« j’ai des ciels à croquer »
« Elle voudrait me faire dire l’abnégation. Je ne la dirai (et non « dirais », le futur s’impose ici et non le conditionnel) pas »
« Je l’ai vue faire, avec Gérard, Firmin »
« Je ne veux pas mourir, je ne veux pas mourir, parce que j’ai trop goûté »
« mais Margot me dégoûte »
« toi qui dans la nuit rends mon front si lourd »
« Il y a Jonathan aussi qui me dit que je ne pourrai (et non « pourrais », le futur s’impose ici et non le conditionnel) jamais écrire, et plus j'écris plus je me dis qu’il a raison »
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Message  Procuste Mer 27 Oct 2010 - 8:30

"l'impression"
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Message  Polixène Mer 27 Oct 2010 - 20:54

Ta prose fournie, exubérante, est un vrai plaisir .
Mes bémols :l'orthographe et aussi par moments ce côté échevelé qui largue le lecteur .

Mais en gros, bravo .
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Message  Calvin Dim 31 Oct 2010 - 17:43

J'ai essayé de donner un peu de liant à tout ça : j'ai fait ce que j'ai pu :O) sinon il m'aurait fallu écrire le double encore, pour donner une véritable cohérence. Le texte, donc, peut se lire comme le récit de plusieurs personnages/narrateurs, tournant autour du personnage de Blanche. Ce n'est pas censé être complètement "définitif". Mais ce qui s'en approche le plus, bien que je n'ai pas vraiment d'idée précise pour ce texte (continuer ? élaguer ? laisser tel quel ? réécrire ? etc.)


Firmin écrivait sur son carnet qu’on ne l’aimait que mal, comme une parenthèse qui ne se ferme qu’à moitié, parce qu’il est un souffle heureux que l’on avale, soudain. On l’aime comme l’oxygène qui semble si propice qu’on oublie d’en faire reluire l’existence. Il peut le voir dans les regards que lui consacre Blanche : toute la chimie qui émane d’elle. Il s’est cru brise quand il n’était qu’exhalaison.

Blanche à force de fumer des cigarettes n’est que fumée, elle a le corps chaud qui lui coule dans la gorge, ça lui embrasse le torse dans une danse intérieure. Oh mes pieds durs, mes tamtams. Dansez, vous dansez. Elle aime le matin ajuster ses bijoux comme autant de détails, comme une vanité qui se justifierai dans le regard des hommes. Souvent ils la regardent de loin, luire, avec la faim des pies, et leurs yeux s’arrêtent sur sa robe, ses hanches. Blanche, elle savait parler le « langage corporel » comme on dit, elle savait leur faire avouer ça aux hommes, arracher ce désir qui n’est qu’abnégation. Si tous veulent se réaliser dans la possession du corps de l’amante, imaginant y fixer leur plaies, Blanche ne se sentait vivre que dans le fait d’être illusoirement possédée, comme le pêcheur qui remonte le hameçon au bout du quel frétille le poisson qui se croit chasseur, quand il n’est que chassé. « Mes bijoux sont mes appâts », dit Blanche. Elle a les mains pour tenir chaud comme deux bouts de soleil, son rire est une cascade.

Gérard a trop confiance en ce qu’il considère comme sa réalité. Il a l’esprit d’induction, il écarte Firmin et se voit seul avec Blanche ; il a fixé la cause et il attend l’effet. Il ne sait pas, Gérard, que parfois le hasard vous joue des tours, qu’il se condense en matière, en acte, en corps qui vit, en sang qui bat les veines comme un fleuve qui se dédouble. Ce hasard a le visage d'Arthur, il est commis de ferme, il est plus grand et plus beau que lui, et c’est détail qui n’échappe pas à l’œil de Blanche. Il ne faut pas se méprendre : on penserait qu’elle est vaniteuse, vénale, qu’elle ne recherche que la luxure, mais Blanche est de ces cœurs nobles qui ne cherchent qu’a se réaliser. Et la contingence l’a fait naitre ici, dans ce village où les traditions se transmettent comme le langage, et il faut bien se réaliser, fut-ce dans le sexe, le stupre, les corps poisseux dussent-ils tenir lieue de clef ; pour briser la serrure sur les barreaux du prisonnier. Arthur a le parfum d’évasion, et à la jeune femme ça lui monte à la tête, ça l’enivre. Ses doigts se tordent, bientôt ils saisiront des grappes de chair.

Ce n’est pas assez dire que de murmurer « Blanche est belle. » Il y a plus que de la beauté. Il y a plus que du physique. Blanche, c’est une femme qui donne aux désespérés l’attention qu'ils cherchent. Petits chiens fébriles ! Voilà le miroir où se déposent les regards langoureux. Elle brille ; comme ils sont nombreux, ceux qui à sa conversation ne songent plus à la mort. Elle est dans bien des cœurs ce mouvement que les tornades dissipent.

Il y a tout à chacun un langage qui lui est propre. C’est dans cet amas de parole que sa nature s’exprime. Mouvement qui délie les sens, mon petit mouvement rapide, où ma pensée s’engouffre trop vite, ah ! veux tu bien ralentir un peu ta cadence. Il y a des langages que je ne comprends pas. Langage de politique, des petites lunettes, ta raie sérieuse qui cartographie ton front, ta géographie de rides, de mimiques, de grisailles aux sourcils ; langage ouvrier, avec tes douze langues claquantes de pas dans la rue, le sein des usines où l’on s’allaite aux fumées noires, la gorge d’acier des machines ; langage d’intellectuel, toi qui respire la moisissure des sofas, etc. Langages, langages, langages. Mais un homme s’approche, regardez-le, que voici, sa démarche est hésitante. Il est amoureux. On ne rit pas. Voilà un langage que j’affectionne. Il comporte bien des plumes et de fameux contours. Mon petit paon, mon petit paon désespéré. J’ose espérer que tu meurs d’amour. Que dit-il, que dit-il, cet homme qui en oublie de vivre ?

« Il y a ces objets qui ressemblent tant a ce que j’ai désiré qu’ils me sautent au visage. Je marche dans la nuit et mes pas se perdent dans des flaques de sommeil. Ici la nuit est douce. Il est charmant, ce village. Blanche y habite. Je me souviens de choses, je me souviens de choses, de ces souvenirs que le sang veiné du temps n’efface pas. Il fait jour. Ou peut-être est-ce le soir qui vient. J’ais tiré mon chapeau au Printemps. Parfois je sens les choses, et je sens que Blanche est dans la foret, derrière ces buissons, et une angoisse émane d’elle ; une douleur émane de moi. Je l’aime tant, Blanche. Avec Gérard je crois, elle est avec Gérard. Je suis ce cœur qui cadence tout mes songes. Qu’elle parle et l’air m’enveloppe. Dans les buissons chargés d’épines une pair d’yeux clairs tressautent. Et fuient. Je m’approche de cette faille, le pouls des chênes bat plus fort. Je voudrais la voir et lui dire : « Je suis Firmin. Me voici, mon amour, je ne t’ai point quitté. »

« Soudain m’approchant ma cendre se fige à la langue de ma cigarette. Ici la nature se déplie au détour d’un bras de chêne, au coude cotonneux. Je m’approche, je m’approche. A pas doux. Et je vois derrière le buisson ce sein de Blanche. Je reconnais Gérard à sa voix de traine vulgaire, qui glisse le long des mots de sa paume poreuse, et brutale. Il pose une question. Silence. « Blanche, tu m’aimes ? » Silence. Blanche ne répond rien : seul son sein, que le ciel illumine, parle au rythme régulier du cœur. C’est un langage de scandale. Blanche se relève soudain, repique l’Univers à son sein, elle rassemble ses charmes et part, sans un mot, elle en a laissé quelques un sur l’herbe, aux côtés de Gérard. Des cheveux, des poils, une odeur : il ne pense pas à les ramasser. Il reste bête, Gérard. Et les pas de Blanche font un bruit de baisers. Dans sa stupidité Gérard s’enfonçait. Gérard. S’enfonçait. S’enfonçait s’enfonçait. Alors il pleut.

« Je reste immobile un instant, puis je marche, j’ai beaucoup a penser. Je veux dire que la marche est mon mode de pensée : mes pas sont combustibles à cette grande mécanique. Mes petits rouages précieux. Et un peu, plus loin, les pas de Blanche font un bruit de baisers. Je passe devant Gérard, il ne me remarque même pas. Bêtise de cet homme. Blanche, l’aimer, et puis quoi ? Il est couché dans ses ornières, il ne comprend pas le bruit des souliers de lin qui claquent. Ah, pour rencontrer de tels hommes cela valait bien la peine de quitter les villes. Je vous ai laissé à votre propre sort. A vos bonaces. Va te faire fiche. Déjà je peux imaginer votre air hypocrite quand vous dénattez vos longues fumées bleues dans l’air du soir. A cette heure-ci la forêt met son habit de marécage. Bras des hêtres, écartez vous un peu. On croira que c’est la nature qui me rédime. Mais non. Je ne suis pas non plus un homme des campagnes. Cet air long et calme, je le laisse aux sages. Ces espaces. Je hais ce que je suis, je hais, Gérard, je hais ces faces mornes et bêtes, et tristes et mornes, et bêtes. Je hais ces paysans qui dans les plaines dessinent les courbes d’une femme qu’ils n’ont vue qu’en rêve, et leur sein est mon sillon. Je hais, je hais, je hais, si vous saviez. Il me faut vouloir détruire le monde pour mieux en bruler d’amour. A mes pieds petits chiens, je suis de la noblesse des volcans. Fermez vos gueules. Parle, mon amour, je perds ma sève qui se dilate. Ma chevelure en est pleine. Ah, j’ai faim si tu savais. Je suis une corde qui vibre d’absence. Je ne veux plus mourir, je ne veux plus penser. Mais tes pas ô ma Blanche font un bruit de baisers. »

Il faut quitter Firmin, Firmin prend trop son aise. Gérard est toujours à sa place, il a vu le sexe du monde, et ce sexe lui échapper. Il reste tendu, c’est son corps qui bande, son sang qui se fige, il s’enfonce dans le sol, Gérard, dans le sol qui n’était herborescent et parfumé que par la présence de Blanche qui, évanouie, laisse peu à peu son visage s’échapper. Les genoux de Gérard pénètrent le sol, qui devient terre, qui devient boue. Sous la pluie, les pas de Blanche… en longues étreintes passionnées. Ses jambes sont des langues, à Blanche, et ses hanches une lèvre aussi fière que gracile. Mais Gérard, pétrifié d’avoir vu le petit sexe du monde, la vulve replète retourner dans le corset de tulle, après sa question à Gérard, continue à s’enfoncer dans la boue, jusqu'à la taille, jusqu'à la poitrine, jusqu’au cou. Et ses yeux sont deux miroirs éteints. Mes baisers sont comme son être : ils semblent un corps déficient. Mais les pas de Blanche… Et Gérard de se confondre avec la terre, de voir ses jambes devenir racines, ses bras troncs, ses yeux baisers. Pour qu’une femme y marche. Et sa chevelure éclot sous la pluie en un parterre de mousse tiède et de pousses de laurier.

Firmin suivait Blanche, bandait à son ombre. Il se penche et cueille de la tête de Gérard une fleur de laurier. C’est pour Blanche. C’est pour son cou. Et qu’est ce qu’il m’arrive, pense Firmin, si je perds Blanche comme le sens de moi-même ? Songez. Il ne faut pas perdre Blanche, il faut se suivre. Le marécage est passé, le parterre se charge de lèvres luxuriantes. Blanche y marchant fait un bruit de baisers. Sa silhouette caresse le dos des chênes. Je la suis quand elle s’enfonce dans cet écrin rose, aux atours de soie, à la vulve délicate, grand jardin libre aux airs spécieux. Ce parfum m’enivre. Je la suis sur la pointe escarpée d’une langue, aux manières de falaise. Il ne faut pas perdre Blanche, il ne faut pas perdre Blanche, ou je m’enfonce. Comme Gérard qui s’est enfoncé enfoncé. Dans lui-même. Il doit avoir les yeux très secs, des yeux friables, maintenant. Ô Gérard d’argile ! Permet moi de suivre les fesses de Blanche qui pénètrent la forêt. Dans ce bruit de baiser. Caractéristique, ce bruit. Et mes souliers semblent fouler des narines frémissantes. Blanche, Blanche, Blanche, ah, permettez-moi d’en finir. Il n’y a rien hors de l’amour, rien. C’est dans ce nombril que ma pensée se développe. Et comme la nature est douce ! Quand Blanche que je suis comme le sens de moi-même marche dans la forêt avec ce bruit de baisers. Quand le soir taquine mes doigts, où un autre corps se ramène. Le corps désiré. Blanche. Là où je suis il n’y a que de sens pour l’amour. Je sacrifierai ma vie pour une femme. Pour un regard. Pour une étreinte. Ici tout l’univers se concentre dans un pli de la lèvre, dans le ballet amusé d’une langue. Et comme la nature est douce. J’enjambe le parfum de safran et ses lianes, mais les pas de Blanche font un bruit de baisers.

Firmin, vous dites toujours la même chose, mon cher.

**

Tout le souvenir de Blanche s’arrête, et se délie en tornade pour en semer des bribes aux mémoires. Ah comme il est doux d’être un pêché mortel. Elle a toujours ce petit goût se souffre, Blanche, qui nappe sa langue tantôt crue tantôt pâteuse. Elle est le passage de l’aube au crépuscule, de la lumière aux mémoires. Elle est à la fois l’occident et son crépuscule. C’est un passage que l’on empreinte, dans lequel on vient s’abîmer, soudain. Ce cumulonimbus comme un petit grain de beauté a sa bouche, et l’éclair ses expression qui font le temps d’une seconde se bouleverser son visage. Ce lac calme aux eaux insondables. On ne lit pas bien ce qu’il y a dans ces profondeurs. On ne sait pas. Aussi loin que le vent l’emporte, Firmin se rappellera toujours de cet air anxieux qu’elle à quand il avançait vers elle, vers l’œil de son cyclone. Elle est à la pointe d’un couteau ; elle s’aiguise. Elle sait bien ce que les hommes attendent d’elle, le rôle que tous ses amants ont exigé qu’elle tienne. Il est temps d’embrasser cette femme comme le souvenir d’un orage. Il est temps de recoiffer le tonnerre comme une mèche à son front.

Ah comme tout cela l’ennuie. Elle se souvient de ces temps plus anciens, Blanche, quand un simple baiser résumait le mouvement de désir qui a noué toute sa vie. Elle choisissait ses amants, elle les élisait. Comme tout était doux alors. Le travail à la ferme lui laissait de l’énergie, elle marchait maîtresse dans son royaume de commis et d’étables, avec pour salut le pas enlevé des chevaux ou des vaches. La traite du matin, quand elle s’asseyait sur le petit tabouret de rotin, la préparait au désir. C’est dans cet instinct que tous les événements d’un jour se ramènent. Elle a déjà choisi son homme, peut-être, quand elle presse de ses mains fermes le pis pour qu’en sorte le lait dont elle se gorgera. Elle soupire. Blanche a toujours refusé de laisser sa vie aux mains agiles du hasard, Blanche, elle s’est battue pour forger sa vie, elle voulait être une personne faite, fait selon son ordre. Le mouvement de son destin, elle l’a apprit à l’extrême instant d’une nuit. Elle s’était réveillée un jour, se mirant dans le reflet du désir des hommes. Tout d’abord elle n’a pas compris. Puis elle avait saisi cette opportunité, elle a soufflé des naseaux, tiré sur la bride et détaché l’encolure, elle a quitté ses parents, elle s’est enfuie. Tout cela ne s’est pas fait sans crainte. Mais à connaître comme ça le plaisir, pourquoi laisserait-elle la main ignorante du père l’attacher à un homme ? Un homme qu’elle n’a pas choisi. Blanche est née dans un monde d’hommes, elle sait ce que ce monde lui réserve. Cette vie de servante, elle n’en veut pas. Elle la laisse aux autres femmes. Comme elles sont des regards d’aigreur pour elle ! Mais son cœur a le vertige pour de plus hautes paroles.

Il n’y a que les hommes qui meurent pour moi qui peuvent me comprendre, pense Blanche, parce que ces hommes connaissent alors sa fureur de ne pas être ce qu’elle voulait, et comment elle vient arracher ça aux cœurs pendants. Parce qu’elle se refuse à souffrir, elle développe pour eux une logique de sacrifié. Elle connaît cette lumière qui est celle de l’heure du suicide. Ce grognement de la forêt, quand un homme est venu pendre sa liane de tristesses à ses troncs. Blanche y marchant fait un bruit de baisers. Pardon, pardon. Elle est jeune pourtant, mais qu'a-t-elle qui évoque ainsi le vocabulaire de la mort.

Les femmes sont plus à craindre parce qu’elles ont le cœur plus large, qui sait devenir un cœur plus meurtri. Blanche elle aussi voulait connaître l’amour. Elle n’a de vie que pour ça. Elle a pour les préoccupations communes un regard de mépris. Mais l’amour, l’amour. Comme ils peuvent être décevant les gestes de l’amant, quand une fois donnée elle perçoit la laideur qui émane d’eux ; la déception qui émane d’elle. C’est une étrange chimie. Caprices des hommes, enfantins et méchants. Elle est lassée d’être un suicide perpétuel. Un jour elle gagner sa vie et on la respectera de l’avoir gagnée, de la laisser ainsi faite, comme un trophée contre son sein.. Chaque homme a qui elle se donne la rapproche un peu plus de sa mort, a ce parfum qui l’enivre. Comme cela est doux, pense-t-elle, comme cela est doux. Je dissous mes étoiles, dans un baiser au mensonge. Blanche ! plus personne ne répond. Blanche ! On a perdu Blanche. Il est temps de vivre comme une pièce lancée au hasard.

**

Elle voudrait bien, Blanche, qu’on lui offre des nuits de septembre, qu’on se jette dans des alcools qui abîment, dans des nuits qui craquent. Elle a des yeux de désir pour les femmes, de possession pour les hommes, c’est différent. Elle est dure, comme si elle voulait se faire la peau dans les bassesses, pour masquer la chair pulpeuse qui lui parait trop molle.

J’avais essayé de me consoler de Blanche, j’ai vu
Sophie
Par la fenêtre
Qui s’est glissée
Comme un souvenir
Et j’ai
Embrassé
Son corps
En deux boucles
D’allures
Le long de mon front…

J’ai connu Camille, qui riait a gorge ouverte a chaque fois qu’elle voyait le sexe d’un homme ; « comme ils sont drôles disait-elle, comme ils sont drôles » et elle faisait l’amour avec un sourire de dément ; j’ai revu Eve, odieusement, dans le puits de ses yeux où se perdent un instant les formes anciennes ; mais sa chair est si maigre, son corps si faible, si nu, qu’il vous rappelle au réel en un retour de bâton. Je me souviens de Constance, qui n’était que charme, et séduction, mais qui, le mouvement venu, s’éteignait en feu de paille ; avec toutes mes caresses et mes mots incapables de la rallumer. J’ai voyagé, j’ai vu à Prague, Anna, qui avait faim d’amour mais que pour elle, pour sa propre digestion, qui vous pressait tant dans des étreintes de brusqueries que l’on avait ce trouble qui empêche de rien savourer ; j’ai vu Angélique qui ne se donnait pas et Catherine qui se donnait trop vite, qui voulait tant s’offrir qu’elle ne laissait sur la langue qu’un petit goût de cendre ; et Marie, et Marie, Marie qui était si belle et qui avait des yeux si noirs, et si doux, et qui ne voulait qu’aimer que désespérément, que j’ai cru aimer un jour et dont j’ai du me faire au dégoût.

(…)

Bien du temps est passé. J’ai revu Blanche, plusieurs fois, elle n’a pas voulu de moi ; et pourquoi je m’accroche encore si imbécilement à elle ?

On dirait qu’elle fait exprès, d’entretenir la flamme sans trop l’éveiller, de la raviver en un regard et de la décevoir, constamment, ce petit jeu mesquin, cette danse constante.

Je n’en veux plus.

J’avais essayé d’écrire, pour elle.

J’avais parlé à Marie, mais Marie me dégoûte, avec ses yeux qui gémissent tout le temps, qui trainent des refus, des pitiés au bout des lèvres. Je voudrais lui faire mal, mal, mal, qu’elle cesse de geindre pour vraiment crier. Elle me dit « je t’aime, tu sais, je t’aime », et j’ai envie de lui arracher sa bouche, de la jeter au sol et de la fouler de milliers de pas cruels, de lui dire arrête Marie. Dans la nuit tu rends mon front si lourd qu’il traverse l’oreiller sans atteindre le sommeil. Je ne peux plus dormir, je ne peux plus dormir. Tout ça me pèse. Blanche, elle, je voudrais prendre tout son corps liquide, en emplir ma taie et poser ma joue contre la sienne, y enfoncer mes doigts pour en extraire des cris. Blanche ! Blanche ! Blanche ! Comme ce nom m’enivre, comme ce nom m’emmerde. Blanche ! Les soupirs de mes yeux qui n’en peuvent plus de ne pas dormir, avec deux succubes qui me grignotent les appétits, qui gorgent mon corps de ses propres liquides : l’une avec son amour de putain et l’autre avec ses refus de reine. Marie ! Marie ! Blanche ! Il y a Jean aussi qui me dit que je ne pourrais jamais écrire, et plus j'écris plus je me dit qu’il a raison : la réalité se dérobe sous mes mots. Ils échouent à l’atteindre, à la clouer de grammaire, à la réorganiser et la déplier avec mes verbes, mes mots… Imiter, je ne sais qu’imiter, je n’ai pas de voix propre. Billie Holliday chante… Et pourquoi je ne peux pas écrire comme elle chante Billie Holliday ? C’est cliché, mais on s’en fout, mais qu’importe. Je parais porte arabe. Je suis mol et affaissé. Où est-ce que je vais trouver un peu de raideur, un peu de plomb à suspendre aux distances ? Où ? Blanche ! Ce n’est pas elle qui me les donnera, elle me retire les mets que je contemple les jambes prises dans le fleuve, Blanche ! Et Marie avec son amour si sale et si laid, son amour de putain.

(On me demande : pourquoi tu veux mourir ? Mais il y a dans ma vie un genre de mouvement qui me rappelle à mon corps, et à ce corps le dégout. Si je ne peux pas trouver comme Firmin la raison d’être dans la vie scolastique ou comme Gérard dans la vie de petit laurier pour donner à rire aux ombres des arbres, alors je ne vois pas pourquoi je supporterais plus longtemps un grand poids. Mon cœur me serre comme une éponge. Il y a des routes empruntées le long de mon crâne. Une peuplade de mensonge, de ragots. Je ne veux plus l’entendre : pourquoi est-ce que je devrais encore supporter ? Je ne peux plus dormir. Il me semble, pourtant, je dis bien : il me semble, que mourir est ce que je peux faire de plus beaux, de plus fort, de plus.)

(J’ai des passions qui ne brûlent que pour la flamme des alcools exotiques. Et je ne veux pas mourir, pourtant, je ne veux pas mourir, parce que j’ai trop gouté la mort ici-bas, elle rend la langue pâteuse, et sale. Elle laisse un parfum de peau morte et de sable mouillé. Je ne veux pas mourir, parce que je voudrais vivre des nuits différentes, avec des mains de sel qui me font un corps inconnu. Je le connais trop, ce corps. Je voudrais briller autrement, j’ai toujours trop brillé qu’on dirait maintenant que je suis si pâle. Je voudrais briller d’un corps différent, un corps qui serait un objet soumis.)

Je ne désire parler que de poésie.
La poésie est la façon la plus noble de parler de soi-même ; la voir chanter les yeux des autres.
L’amour n’est pas niais. L’amour n’est pas bête. Certains hommes le sont.
Et pourquoi on ne pourrait pas parler que d’amour ? Je ne vois pas d’autre intérêt. Dans ma vie, je n’ai jamais vu d’autre intérêt que cette quête : il n’y a d’amour que du concret.
La poésie elle aussi relève du concret.
Je vous laisse aux fumées, aux distances.
On me reproche souvent de faire trop de cas de moi-même.
On ne fait jamais trop de cas de soi-même. Qui le ferais sinon ?
On n’a jamais été plus juste que le jour où l’on m’a traité d’escroc.
J’ai des grands yeux noirs qui semblent nier la vanité. Mais approchez vous un peu, mesdemoiselles, fixez, dans ces deux grands yeux noirs, mon envie, fixez, ces deux grands yeux noirs, caressez : touchez donc, vous ne ferez pas meilleur usage de vos mains.
Je contemple mes humeurs, mes pupilles. Parfois cela me fait horreur. L’iris de feu, comme cela est commun.
Ma vérité, elle se dit dans mon visage. A me voir on sait que je suis faible. Il faut masquer tout ça.
Quand on me demande pourquoi je dis des cruautés, je réponds que je m’habille.
J’aimerais bien être raide. Être dur. Avoir le corps et l’esprit noble, droit. Une épigée fière. Je n’ai de vie que pour ça. Voulez vous mesdames, etc.
Il n’y a de poésie que de l’homme. C’est la seule psychologie que je ne trouve pas vulgaire. J’invente. Blanche est douce, Blanche est belle, etc.
En littérature le narrateur est toujours le type qui s’ennuie. Ais-je déjà dis combien ma vie était ennuyeuse ?
J’aimerais tracer une ride qui condense mon amour des personnes.
La vérité, c’est que l’amour est follement amusant.

Calvin

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