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NOUVELLE VAGUE: Les genêts

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Message  Sahkti Mar 6 Mai 2008 - 15:20

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Les genêts


Tyltyl: Mais c'est que je ne l'ai pas, l'Oiseau bleu! (...)
La Lumière: Nous avons fait ce que nous avons pu...
Il faut croire qu'il n'existe pas l'Oiseau bleu; ou qu'il change de couleur lorsqu'on le met en cage...
(Maurice Maeterlinck, L'Oiseau bleu)




Il est quinze heures. Sarah referme son livre en soupirant. Les personnages de la pièce de Maeterlinck, évoluent devant elle, les enfants deviennent presque réels. Elle ne voit plus le paysage ni les gens qui se promènent; elle n'entend plus l'eau qui coule à ses pieds.
Bruges n'existe plus, Bruges la morte... `

Une ville dont elle est tombée amoureuse deux ans plus tôt quand elle a décidé de s'installer pour de bon, pour de vrai. Bruges et ses maisonnettes d'un autre temps, ses canaux, sa quiétude.
Une sérénité à l’image de cet instant, paisible, les pieds dans l’herbe et le visage sous la brise, à l’ombre d’un béguinage.
Sarah a de suite succombé au charme de ces bâtiments blancs coquets, porteurs de secrets vieux de plusieurs siècles. Que de silences contenus derrière ces murs, de destins scellés à jamais.

Les pensées de Sarah vagabondent; elle imagine des religieuses à cornettes et des oiseaux bleus qui aiment se poser sur la blancheur de leur coiffe; le tableau est drôle et la fait rire, mais ce sourire disparaît aussitôt lorsque les paroles de la Fée Bérylune, celle du livre de Maeterlinck, lui reviennent en mémoire. L'Oiseau bleu doit révéler aux enfants le grand secret des choses et du bonheur. Mais tout cela n'est que mensonge, Sarah en est convaincue. Cet oiseau tant recherché n'est qu'un leurre, un animal après lequel courent deux enfants naïfs et volontaires et qui, toujours, leur échappe.

Son esprit s'assombrit, elle se surprend à verser quelques larmes. Il y a longtemps que Sarah ne sait plus ce que c'est le goût du bonheur. Des années. Depuis ces vacances d'été passées en famille à quelques kilomètres d'ici. Elle se souvient des rires, des châteaux de sable et des repas joyeux; elle revoit le sourire de sa mère et les yeux de son frère, surtout les yeux de son frère.
C'est comme si il était encore là, comme si elle pouvait entendre sa voix.
Sa voix... une voix... tiens, à cet instant, un murmure se fait entendre. Ce n'est pas une voix, non, plutôt un chant, le chant d'un oiseau.
L'oiseau bleu revient à l'esprit de la jeune fille, celui du livre, celui des cornettes, cet oiseau qui incarne le rêve de chacun; elle a l'impression de l'entendre.
Mais oui, c'est bien un pépiement que Sarah distingue ! Elle pose son regard un peu partout à la recherche de l'animal, scrute les arbres et les toits des maisons, regarde dans l'herbe autour d'elle, mais rien, pas d'oiseau en vue, et pourtant ce gazouillement, cette mélodie... ils sont bien présents.

Un chant qui la replonge des années en arrière, lorsqu'elle écoutait le cri des mouettes enragées par les morceaux de pain qu'elle leur lançait sur la plage. Des oiseaux qui l'effrayaient et la fascinaient à la fois. Son frère se moquait d'elle et la traitait de mauviette, Sarah n'en avait cure.
Elle et lui restaient des heures à jouer dans le sable, à construire des villes de chimères et à rêver de grands horizons, de bateaux de pirates et de paquebots qui les emmèneraient à la découverte du monde.
Frédéric voulait voir l'océan Pacifique, Sarah lui disait qu'il y avait des requins; il n'en fallait pas plus pour que les enfants repartent dans leurs courses poursuites bruyantes...


En proie à une violente émotion, Sarah tente de se contenir; elle reprend la pièce de théâtre, veut relire le passage consacré à l'âme des objets; elle se souvient du poème de Lamartine " Objets inanimés, avez-vous donc une âme?", mais rien à faire, ses pensées sont ailleurs, les souvenirs refont surface. Elle referme le livre, une fois de plus.
Devant elle, à travers le feuillage des arbres s'esquisse la route de la mer, celle empruntée pour se rendre dans le bungalow loué pendant les vacances d'été.
C'était il y a longtemps. Durant tout le voyage, il régnait une folle ambiance dans la voiture, tout le monde semblait heureux.
Une fabuleuse aventure que ce chemin des vacances, une route jamais plus parcourue depuis. Non, plus depuis...

Sarah frissonne, elle songe à ce rêve qui la hante depuis des mois.
Elle est sur une plage, seule. Le soleil aveuglant la talonne pendant qu'elle prend la fuite et court à en perdre l'haleine. Il la poursuit et la contemple, avant de darder ses rayons sur elle et la paralyser, la laissant pour morte au bord d'une mer brillant de reflets étranges.
Quand tout cela s'arrêtera-t-il? Chaque fois, les mêmes scènes, une angoisse identique et la mort au bout du film. Cela ne peut plus durer.

La jeune femme se lève, ses muscles sont engourdis, son livre a pris l'humidité de l'herbe. Elle essuie la couverture avec sa manche avant de passer le tissu sur son visage, elle n'a pas envie de rentrer chez elle affronter seule tous ses démons et ses interrogations sur l'âme des choses ou le pouvoir du mensonge.
A pas brusques, Sarah quitte le jardin et prend la direction du parking où elle a laissé sa voiture. Pas de détour par la maison, c'est inutile et ça la pousserait peut-être à renoncer. Plus question de faire demi-tour, il est temps de prendre les choses en mains. De se prendre en main.

Il y a du monde en ville, quitter le centre n'est pas facile, mais peu importe, il lui faut rejoindre l'autoroute. La voiture avale les kilomètres en silence, Sarah n'entend pas ce chanteur qu'elle déteste vociférer dans la radio, elle ne se soucie pas de la vitesse et regarde à peine les panneaux indicateurs.
Elle sait où elle va, elle connaît cette route par coeur même si elle ne l'a pas empruntée depuis longtemps. Bientôt les odeurs sont là, elles ne trompent pas. L'iode, le sel, l'air marin... elle n'est plus loin du but. De son but.

Elle se surprend à avoir peur, elle réalise la folie de son geste et se maudit d'être venue jusqu'ici. Seule de surcroît, sans personne pour l'arrêter si jamais... Si jamais quoi? C'est peut-être le moment d'affronter le passé, de ranger correctement les pièces dans les tiroirs et de tirer un trait sur tout ça. Mais comment tirer un trait pourrait-il être possible après autant d'années?
La jeune femme avance vers le sable, ses mouvements sont maladroits, elle retire ses chaussures, se tord la cheville. Non, vraiment, jamais elle n'aurait dû venir. Tout ce sable, ces coquillages cassés qui lui déchirent la plante des pieds, le bruit inquiétant des vagues... et pourtant quelque chose l'attire, le pouvoir de l'eau sans aucun doute.
Epuisée, Sarah s'écroule sur la plage; elle a emporté avec elle la pièce de théâtre mais l'envie de lire n'est pas vraiment là; elle glisse le bouquin dans sa poche comme on le ferait avec un talisman avant d'effectuer le grand saut en avant.
De longues minutes s'écoulent pendant lesquelles Sarah compte les nuages; elle abandonne ses calculs, repart dans ses pensées et se souvient. Encore une fois.


Dernière édition par Sahkti le Mar 6 Mai 2008 - 15:43, édité 2 fois
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Message  Sahkti Mar 6 Mai 2008 - 15:21

De cet été, il y a déjà quinze ans, il y a seulement quinze ans, pendant lequel Frédéric et elle jouaient sur cette même plage. Elle avait sept ans, il en avait treize. Six ans d'écart, le temps nécessaire à sa mère pour refaire sa vie, retrouver un mari, avoir envie d'un autre enfant après le départ du père de Frédéric. Père dont il n'avait jamais eu de nouvelles, il l'imaginait naufragé sur une île du Pacifique ou mercenaire en Afrique; des mensonges qu'un enfant se raconte à soi-même pour ne pas accepter l'abandon d'un père qui lui avait certainement préféré un autre petit garçon.
Frédéric était son frère, son demi-frère hurlait-elle à ses oreilles quand ils se disputaient. Des disputes de gamins, une vie somme toute heureuse, un grand frère un peu pot de colle mais en même temps terriblement attachant.
Ces vacances à la mer, leur mère en parlait depuis des semaines, ça allait être formidable. La cabane de plage en bois peint et les parasols, la boîte frigo et les sandwiches au bord de l'eau, les châteaux de sable et la pêche aux crevettes... Oui, ça devait être formidable.
Les deux enfants étaient souvent livrés à eux-mêmes, les adultes préférant se reposer, mais après tout, peu importait, la mer était si proche. Les heures et les jours s'écoulaient, la peau des enfants prenait la couleur du chocolat fondu, Sarah trouvait que sa maman devenait de plus en plus jolie.

Un soir, les jeunes décidèrent de partir à la chasse aux crabes fluorescents. Comment les voir autrement qu'en menant une expédition nocturne? Tout était prêt, il suffisait d'attendre les premiers signes d'endormissement des parents, à savoir les ronflements du père de la fillette.
Sans un bruit, Sarah et Frédéric quittèrent la maison et s'engagèrent sur le petit sentier herbeux qui menait à la plage. Il fallait longer le bord de l'eau pendant quelques centaines de mètres avant d'arriver aux rochers, c'était là que se cachaient les crabes, ils avaient entendu un vieux pêcheur qui en parlait à d'autres vacanciers. Des crabes fluorescents, ça devait être quelque chose! Frédéric espérait en voir un vert et aussi un jaune et pourquoi pas un orange. Sarah s'en fichait un peu, elle avait simplement envie d'en attraper un, de le ramener dans sa chambre et de voir si il brillerait de la même façon dans le noir d'une maison.
Les rochers étaient glissants, Sarah n'arrêtait pas de déraper, de tomber, de gémir et de pleurer, disant qu'elle voulait rentrer, que ce n'était pas une bonne idée. Son frère ne l'écoutait pas, il avait repéré le trou aux crabes, il était à quelques mètres, encore un petit effort.
Les enfants s'amusèrent un long moment à faire sortir les crustacés de leur cachette, à les bousculer avec leur épuisette; c'était drôle de voir ces petits morceaux de lumière colorée déambuler sur le sable. Il se mirent à rire en imaginant les croisements que donnerait le mariage d'un crabe vert avec un crabe orange, existait-il des crabes lignés ou à pois?
La nuit elle-même sourit de leur insouciance et les regarda partir, prendre le chemin du retour, contourner un groupe de rochers pour se diriger vers les dunes.

Frédéric et Sarah avaient envie de cueillir des genêts, ils adoraient cette couleur jaune vif et ça ferait une belle surprise à leur maman au réveil, mais pas simple de faire ça dans le noir. Entre les pieds s'enfonçant dans le sable et les doigts irrités à force de vouloir arracher les tiges trop résistantes, ils y consacrèrent un bon moment avant de se mettre à rire de leur maladresse. Il ne leur restait alors qu'à se rouler dans l'herbe sauvage et se laisser glisser de haut en bas le long de l'amas sablonneux, comme le feraient n'importe quels enfants ayant la plage pour eux tout seuls.
Seuls, enfin presque. C'est trop tard que Sarah aperçut la masse humaine qui se mit à gesticuler, qu'elle entendit les cris fâchés de ce qu'elle découvrit plus tard être un homme, qu'elle venait de déranger dans ses folles cabrioles.
Un homme effrayant, sale et dépenaillé, oublié de tous et de la vie. Un homme aussi apeuré qu'eux et dont la première réaction fut de repousser la gamine qui s'approchait de lui. Crainte, timidité, réflexe... sans doute un peu de tout cela à la fois, avec pour résultat de faire pleurer Sarah et de mettre Frédéric en colère. Il n'aimait pas qu'on inquiète sa soeur, il mettait un point d'honneur à la protéger, alors la voir se faire bousculer par un inconnu n'était pas pour lui plaire. Son sang ne fit qu'un tour; il poussa cet homme qui tenait à peine sur ses jambes et le fit tomber; le sans-logis roula et dévala la dune avec des soubresauts.
Sarah ne disait rien, tout cela la dépassait et une petite voix dans sa tête lui disait qu'il fallait partir en courant.
Frédéric poursuivait l'homme qui dévalait la dune, en lui hurlant de les laisser tranquilles. Aucun d'entre eux n'avait vu les branchages et, surtout, plus bas, un rocher. Personne n'avait rien vu. Ni l'homme ni les enfants.

Ils entendirent un bruit sourd puis plus rien, plus de mouvement, pas un souffle. Sarah courut rejoindre son frère qui se tenait penché au-dessus du corps inerte; ils se regardèrent sans un mot. Les enfants étaient perdus, ils ne savaient pas quoi faire. L'homme était-il mort? Sarah recommença à pleurer, Frédéric lui jura qu'il devait être assommé et qu'il valait mieux qu'ils partent, qu'il allait se réveiller et que c'était tout. Ils rebroussèrent chemin en silence, n'arrêtant pas de se retourner, de vérifier que l'homme ne bougeait plus, qu'il ne les suivait pas.
Ils rentrèrent à la maison sans un bruit, se faufilèrent dans leur lit et firent semblant de dormir pendant les quelques heures qui les séparaient du réveil des parents.
Au petit-déjeuner, la mère leur trouva petite mine, dit que prendre l'air leur ferait le plus grand bien, que c'était bizarre ces visages grisouilles après autant de jours passés au soleil. Ils ne répondirent rien, se contentèrent de hocher la tête et de plonger le nez dans leur bol de céréales.

Arriva alors ce qu'ils redoutaient; le père de Sarah alluma la radio au moment des informations. Après quelques résultats sportifs, le journaliste annonça que le cadavre d'un homme avait été retrouvé dans les dunes.
"Pas très loin de la maison" s'exclama le père de Sarah. La police concluait à une mort accidentelle, dont les circonstances étaient encore indéterminées. L'homme était un clochard, inconnu des services sociaux du coin; il présentait un degré élevé d'alcoolémie, vraisemblablement la raison de sa chute contre un rocher, provoquant la rupture de la nuque et le décès immédiat, selon les premières constatations médicales.
Sarah et Frédéric se regardèrent, acquiescèrent en silence pendant que la maman murmura "pauvres gars", puis sortirent à pas lents de cette maison devenue bien silencieuse.
L'un et l'autre se jurèrent le silence absolu sur toute cette affaire, sinon ils iraient en prison, on les placerait dans des familles d'accueil, leurs parents mourraient de chagrin et ils ne se reverraient jamais plus. Les promesses furent échangées et chacun demeura dans son coin pendant le restant de la journée. Le coeur n'était plus à la rigolade, ni aux jeux; ils avaient basculé dans le monde adulte en un fragment de minute, le temps nécessaire pour faire tomber un homme.

Cinq jours plus tard, Frédéric avait disparu. Les parent appelèrent la police, des battues furent organisées, des affichettes collées un peu partout dans la région, même la télévision en parla. Rien n'y fit, on ne retrouva jamais Frédéric, ni trace de lui, nulle part. Sarah fouilla frénétiquement sa chambre à la recherche d'une lettre, d'un indice. Peut-être le fantôme du clochard était-il venu faire peur à Frédéric ou bien des amis de l'homme tué était venu se venger. Jamais son frère ne serait parti sans rien lui dire, jamais il ne l'aurait laissée toute seule.

Les mois passèrent, lentement, lourdement. La mère de Sarah fit une dépression qui la poussa peu à peu vers la démence, son père se mura dans un silence qui ne devait jamais prendre fin et Sarah continua à vivre avec son terrible secret. Pendant des années, elle hésita entre la vérité et le silence mais la promesse était plus forte que tout, elle ne devait jamais trahir son frère. Sans compter l'attente folle qu'elle entretint tout ce temps de recevoir une carte, un signe, un coup de téléphone. Après tout elle était sa seule vraie soeur disait-il, il ne pouvait pas l'oublier comme ça. Mais aucune nouvelle ne parvint jamais à Sarah, qui finit par ne plus penser qu'en termes de remords.

Le temps s'écoula, n'effaçant rien. Au contraire.
La famille revint plusieurs fois sur les lieux de la disparition, comme un pèlerinage, un espoir jamais assouvi de revoir Frédéric, de l'apercevoir surgissant de derrière une dune ou se promenant sur la plage en leur faisant signe de la main.
Puis les visites s'estompèrent avant de s'effacer complètement.
Sarah quitta un jour le domicile familial, trouva un emploi, un chat et un appartement. Dans un vieil immeuble du quartier historique de Bruges.


Bruges, que Sarah a quitté ce soir pour revenir sur les lieux du drame.
Bruges, dont un béguinage silencieux lui a inspiré cette expédition sur le chemin des regrets et peut-être de la délivrance.
Bruges, où chante encore, quelque part, un oiseau bleu, celui qui doit révéler aux enfants le grand secret des choses...
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Message  apoutsiak Mar 6 Mai 2008 - 16:17

.

D'un bout à l'autre, j'ai apprécié la fluidité de ce texte comme du sable qui coule entre les doigts.

Le texte installe une douloureuse monotonie.
A cause d'elle, il manque, à mon goût, un peu de relief à ce paysage.

Par ailleurs, j'ai du mal à accepter la frustration du secret dans ce type d'histoire, d'autant plus que les éléments mystérieux (dont l'exposition complexifierait l'écriture) pourraient faire le relief dont j'ai parlé plus haut.
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Message  à tchaoum Mar 6 Mai 2008 - 18:59

une belle histoire triste.
Je trouve que la partie "faits divers" est un peu rapide, un peu abrupte... Et deux d'un coup, ça fait beaucoup. La disparition de Frédéric est comme une deuxième couche quand la première n'est pas sèche... d'ailleurs, ça mériterait sans doute un autre épisode, une nouvelle jumelle, l'histoire de Frédéric.
On a du mal à laisser repartir Sarah toute seule avec sa peine.
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Message  Lucy Mar 6 Mai 2008 - 19:37

Jolie histoire, Sahkti !
Les mots coulent comme de l'eau. Les remords et les regrets, l'accident qui détruit trois vies, le tout écrit avec justesse, juste ce qu'il faut.
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Message  Kilis Mer 7 Mai 2008 - 8:35

Beaucoup de lenteur dans ce texte. La première partie, à Bruges, installe une atmosphère, oui. Mais j'ai trouvé qu'il manquait quelque chose qui ferait lien avec la suite, le récit des événements passés. On dirait un simple collage de deux textes. Et, même si l'écriture coule bien, le récit n'a pas éveillé mon émotion. Trop de distance, je ne sais. Je suis restée à côté.
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Message  Yali Mer 7 Mai 2008 - 11:32

Difficile d'imaginer Bruges autrement que comme une ville toute spécialement faite pour les touristes et uniquement pour eux. Pas que je manque d'imagination pourtant, mais j'ai vu :-)

Pour ma part, cette sorte de mélancolie, d'acceptation dans laquelle le personnage principal se tient a pour effet de virtualiser les actes, les émotions passées ou présentes, d'installer chez le lecteur que je suis une certaine distance avec le texte dans la mesure ou je ne participe en rien à la construction, pas d'invitation au suspens, à l'intrique ou autre chose. C'est là, c'est à prendre comme tel et du coup je me retrouve comme spectateur et non comme acteur et ça me manque.

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Message  Invité Mer 7 Mai 2008 - 11:54

Plus que tout, j''apprécie l'écriture soignée d'un récit dans lequel je suis facilement entrée... Le poids du secret est tangible, l'angoisse de Sarah bien rendue, ainsi que son incurable sentiment de culpabilité. Cela m'a touchée.

J'ai relevé 2 ou 3 incorrections :

pendant que la maman murmura "pauvres gars",
Les parent
des amis de l'homme tué était venu

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Message  Charles Mer 7 Mai 2008 - 12:31

Ayant lu le 1er jet, j'apprécie, en 1er lieu, le travail, les modifications, le remodelage du texte que tu as réalisé et qui l'a, je trouve, bonifié.

Un peu plus de tendresse pour la partie au passé que pour celle au présent. Parce que la partie au passé est le vrai coeur de l'intrigue, qu'elle est plus touchante, humaine et ramène à l'enfance, parce que celle au présent est un peu passive ... En relisant, je me rends compte que j'aurais peut être aimé en savoir plus à la fin, sur ce que ce pélerinage a finallement apporté à la narratrice ...
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Message  claude Mer 7 Mai 2008 - 17:39

J'aime beaucoup. ça se lit d'un trait, cul sec ! pas le temps de voir le temps passé, on avale les mots sans les mâcher. mais bordel ! la question reste entière : pourquoi il s'est tiré Fred ?

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Message  Sahkti Jeu 8 Mai 2008 - 9:18

J'ai oublié de remercier Charles et Zou pour leur attentive relecture et leurs conseils!
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Message  Arielle Jeu 8 Mai 2008 - 19:35

Beaucoup de questions pour clore cette nouvelle: Qui était ce Sdf mort dans les dunes? (J'ai cru un instant que c'était le père de Frédéric) Qu'est devenu le garçon? Sarah, après son retour sur les lieux est-elle parvenue à "ranger correctement les pièces dans les tiroirs et de tirer un trait sur tout ça" ? J'aime bien finir sur une interrogation … mais là, quand-même, je me sens un peu frustrée! J'aime la mélancolie des images, la nostalgie des verts paradis qui devient poignante dans le cas présent à cause des évènements qui ont suivi.

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Message  panasonic Jeu 8 Mai 2008 - 21:29

J'aime bien ton écriture, Sakhti : elle est claire et confiante.
Et puis tu racontes bien les choses, j'ai aimé cette histoire.
Merci
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Message  Krystelle Dim 11 Mai 2008 - 13:57

Tu réussis à peindre une atmosphère particulière dans ce texte et je trouve que les mots coulent bien.

Néanmoins, je partage l’impression de lenteur dont parlait Pili et la tonalité est un peu trop monocorde à mes yeux. Tu utilises certains mécanismes qui certes te permettent donner une dimension nostalgique à ce texte mais qui, à force, suscitent une certaine monotonie. Je pense, par exemple aux reprises en début de phrases, quelques exemples :
"C'est comme si il était encore là, comme si elle pouvait entendre sa voix. Sa voix..."
"Une route jamais plus parcourue depuis. Non, plus depuis.."
"elle n'est plus loin du but. De son but."
"sans personne pour l'arrêter si jamais... Si jamais quoi?"
"de tirer un trait sur tout ça. Mais comment tirer un trait..."
"après le départ du père de Frédéric. Père dont il n'avait jamais eu de nouvelles..."
"quels enfants ayant la plage pour eux tout seuls. Seuls, enfin presque."

Etc...
J'ai bien conscience que les répétitions sont voulues et maîtrisées, mais tu abuses un peu trop du procédé, d'autant que tu joues sur d'autres reprises (celle du prénom "Sarah", celle de "Bruges" à la fin du texte...). Bref, cela contribue à ralentir un peu trop le rythme du récit (même si j'ai bien compris que le but ici n'est pas de faire un texte trépidant !).

Je regrette aussi cette fin qui se précipite avec la disparition de Frédéric. Tu écris « La mère de Sarah fit une dépression qui la poussa peu à peu vers la démence, son père se mura dans un silence qui ne devait jamais prendre fin et Sarah continua à vivre avec son terrible secret » et paf, tu scelles trois destins en une seule phrase. Ça contraste un peu trop abruptement avec la place et le temps que tu as pris pour planter le décor des souvenirs.

Mais je le redis, en dépit de ces petites réserves, j'ai passé un moment de lecture sympathique.

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Message  Reginelle Dim 11 Mai 2008 - 22:37

qu'un enfant se raconte à soi-même = "à lui-même"... non ?? (juste pour ne pas oublier)

Pour moi, il n'y a rien de trop, et il ne manque rien... On apprend juste ce qu'il y a à apprendre pour comprendre. Et Sarah, qui a eu la plus mauvaise part dans tout cela. Le choc de la mort de cet homme, d'abord. Ensuite, la disparition de son frère. Frédérick a choisi, lui, de tout quitter. Ce qu'il est devenu, n'est pas important. Au contraire, c'est bien ce mystère qui entoure sa disparition qui ramène Sarah sur cette plage. Je ne crois pas qu'elle y serait revenue autrement. Et pour finir, les cassures de la famille. Oui... tout ça déballé en quelques mots, aussi rapidement que dégringole un chateau de cartes. L'univers heureux de Sarah s'est effondré en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire.

Oui... un passage m'a paru quand même moins dans le ton... ou qui ne cadrait pas tout à fait :
... la plante des pieds, le bruit inquiétant des vagues... et pourtant quelque chose l'attire, le pouvoir de l'eau sans aucun doute.
Epuisée, Sarah s'écroule sur la plage; elle a emporté avec elle la pièce de théâtre mais l'envie de lire n'est pas vraiment là; elle glisse le bouquin dans sa poche comme on le ferait avec un talisman avant d'effectuer le grand saut en avant.

Je conçois mal Sarah se demander encore ce qui l'attire là-bas, et se dire "c'est le pouvoir de l'eau", etc. Non... je ne peux que l'imaginer chercher les lieux, essayer de les reconnaître... pour faire le lien avec hier... y remettre ses pas. Et le bouquin, me semble, du coup, déplacé... ou alors en faire un morceau de réalité, appartenant à son présent, auquel elle se raccrocherait. Comme à une bouée...

Mais j'ai beaucoup beaucoup aimé.

ça, ça devient une rengaine, à force de le dire. Vraiment séduite par tous ces textes.
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Message  Sahkti Lun 12 Mai 2008 - 7:18

Reginelle a écrit:qu'un enfant se raconte à soi-même = "à lui-même"... non ??
Je ne le jurerais pas, mais il me semble que les deux tournures sont valables. Je vais chercher un peu pour savoir.
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Message  Reginelle Lun 12 Mai 2008 - 7:28

je crois que "soi" va avec "on"... il se raconte à lui-même et on se raconte à soi-même. Mais si tu trouves d'autres précisions, je suis preneuse aussi !
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Message  bertrand-môgendre Lun 12 Mai 2008 - 10:15

Question typographie, sous réserve d'assentiment de Yali, il me semble que les deux points, points virgule, d'interrogation et d'exclamation sont précédés d'une espace insécable.
Voilà, ma participation technique sur le texte.


S’agissant du commentaire : Sarah m'a pris par la main, écouter une histoire sans fin...(ceux qui trouvent une référence sont les bienvenus). Volontiers, j'ai plongé en apnée, me réservant de-ci de-là, quelques remontés à l'air libre. Libre, parce que j'ai eu l'impression d'avoir gobé cette histoire, dont l'improbable rejoint la fiction, le temps d'une lecture.
L'ambiance est morose, à l'image de cette ville morte.
Je n'ai pas saisi le lien avec Lamartine : " objets inanimés avez-vous donc une âme ? "
L'ambiance est morose, à l'image de cette ville morte.
Émotion clin d'oeil : j'ai cru un moment, qu'il n'y aurait pas de mort dans cet épisode.
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Message  Yali Lun 12 Mai 2008 - 10:39

bertrand-môgendre a écrit:Question typographie, sous réserve d'assentiment de Yali, il me semble que les deux points, points virgule, d'interrogation et d'exclamation sont précédés d'une espace insécable.
Voilà, ma participation technique sur le texte.

C'est juste Bertrand, tous signes typo composés de deux éléments : ; ? ! «.» est précédé et succédé d'une espace insécable.
Et pour compléter la critique technique, on ne signale pas une citation ainsi : "citation" mais bien ainsi « citation »

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Message  Sahkti Lun 12 Mai 2008 - 19:35

Pas d'espace et guillemets "" sont un choix volontaire de ma part, je l'ai toujours fait et ne changerai rien, parce que je préfère comme ça, même si c'est politiquement incorrect. Je ne perdrai pas le Goncourt pour ça :-)
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Message  Sahkti Lun 12 Mai 2008 - 19:36

bertrand-môgendre a écrit:Émotion clin d'oeil : j'ai cru un moment, qu'il n'y aurait pas de mort dans cet épisode.
heu... jamais possible ça! :-)
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Message  Gobu Mar 13 Mai 2008 - 13:01

Ce thème de la ville d'eau et de l'oiseau bleu a décidément inspiré plusieurs histoires d'adultes portant de lourds secrets enfouis au fond d'eux-mêmes. Peut-être l'image de l'eau coulant imperturbablement vers sa destinée est-elle une métaphore du destin des hommes.

La mélancolie générée par les brumes et les crachins du Nord n'est pas étrangère à ton récit, même si à Bruges, elle est tempérée par la grâce de l'architecture et la douceur de vivre. Ton personnage est prisonnier d'un sortilège dont l'oiseau bleu détient peut-être la clef. Le lecteur n'en saura pas plus. Et c'est sans doute mieux ainsi. Les vérités de l'oiseau bleu ne sont pas toujours bonnes à entendre...
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Message  Invité Jeu 15 Mai 2008 - 5:38

Une beau texte, une construction solide sans egarements litteraires.
C'est du serieux, mais en dessous d'un cran des choses qui peuvent me toucher. Je suis reste en observateur cette fois.

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Message  mentor Ven 16 Mai 2008 - 14:34

une sombre histoire bien mélancolique et mystérieuse aussi. Belle imagination. Ce sdf avait-il un rapport avec cette famille ? Le père ? On ne le saura pas. Et le sort du demi-frère ? Non plus. Et c’est mieux de laisser le lecteur finir lui-même l’histoire s’il en a envie. Toujours une belle écriture avec un ton juste. Un seul mort ce coup-ci, mais mort violente, ça s’imposait ! ;-)

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Message  Sahkti Lun 19 Mai 2008 - 16:33

bertrand-môgendre a écrit:Je n'ai pas saisi le lien avec Lamartine : " objets inanimés avez-vous donc une âme ? "
En fait, dans mon premier jet, cela faisait partie d'un ensemble bien plus long, parce que je parlais beaucoup plus du livre de Maeterlinck, de son contenu (magnifique) et de la relation entre les humaines et les objets. Il y a toute une partie consacrée à cela dans le livre, lorsque les humains réalisent que les objets ne les aiment pas, sont dotés d'une âme et ont du mal à être réduits au simple rang d'objet.
J'ai sabré au second tour, parce que trop long et la rupture entre le début et la partie "faits divers" se remarquait trop (ce que certains ont repéré d'ailleurs), mais j'ai conservé ce vers parce que j'aime ce texte de Lamartine. Voilà :-)
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