Exo « Écrire suivant un incipit » : Inévitable c'était
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Exo « Écrire suivant un incipit » : Inévitable c'était
EXO INCIPIT
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Il aurait pu tenter d’aller plus loin. Passer l’amère fragrance des amandiers, et s’immerger dans l’océan de mots de l’illustre Nobel de littérature pour rincer toute cette amertume. Mais rien n’y pouvait : pour lui, le parfum des amandes amères évoquait principalement l’odeur du cyanure et n’avait pas grand-chose à voir avec les amours contrariées. Même si le poison contrarie parfois le destin les amourettes. Contrariété fatale, si l’on peut dire.
C’était plus fort que lui. Il n’arrivait tout simplement pas à se mettre à la place d’un narrateur à qui le parfum du cyanure ne rappelait rien que le fantôme d’amours défuntes, au milieu de leur dérisoire carrousel de sanglots, reniflements de narine et mouchoirs trempés de larmes. Tel est le triste destin des amours contrariées. Surtout au Mexique, où l’on s’épanche volontiers.
Cette odeur, dont l’âcreté provoque la suffocation immédiate de qui n’aurait pas songé à se protéger les voies respiratoires, évoquait pour lui bien d’autres souvenirs que les réminiscences de pauvres émois d’adolescent passés au hachoir du temps qui passe. Le double assassinat de la Calle Padre Lachez. L’affaire de la veuve Santamaria. Le mystère de la Villa Diego Rivera. Entre autres.
Et maintenant le sulfureux dossier de la succession Moralès. Encore une enquête qui empestait l’amande amère à plein nez. En plus de la cocaïne, à plein nez aussi naturellement. Mais c’est le pays qui veut ça. Au Mexique, tout ce qui pue sent peu ou prou la coco. Et inversement.
Cela faisait plus de trente ans qu’Esteban De la Torre s’en goinfrait narines déployées, de toute cette palette olfactive. Très exactement depuis le jour où il était rentré au Ministère Public Fédéral…après de brillantes études de médecine et non sans avoir passé un doctorat en droit dans la foulée. La conjonction entre son bagage médical et ses indéniables compétences juridiques firent rapidement de lui un spécialistes des affaires d’empoisonnement, aussi remontaient-elle de tous les bras de la tentaculaire Mexico vers son bureau rococo du Palais de Justice.
En tant que représentant du Ministère Public, Don Esteban avait pour tâche de faire enfermer les empoisonneurs en prison, en présentant à la Cour un dossier suffisamment bien étayé pour mettre la défense en déroute. La charge d’enquêter sur le terrain, collecter des indices à la pince à épiler, trouver des témoins, cuisiner des suspects, analyser des pièces à conviction, tout cela revenait aux investigateurs de la Police Criminelle et à la Brigade Scientifique. Monsieur le Procureur n’a pas à salir ses mains manucurées en tripotant des cadavres ou risquer des voies de fait de la part d’un suspect mal éduqué.
El Señor Procurador Federal De la Torre n’était pas de ces magistrats-là. En dépit du soin qu’il accordait à ses mains, comme tout ancien médecin, il n’hésitait pas à les plonger dans le cambouis. Et même s’il s’habillait et se chaussait chez les meilleur faiseurs de la capitale, il prenait le risque d’abîmer ses élégants costumes, et même – horresco referens – crotter ses souliers cousus main, en se livrant à toutes sortes d’activités auxquelles leurs créateurs ne les avait pas destinées. Un homme de terrain, El Señor Procurador Federal, accompagnant les policiers lors des interpellations les plus hasardeuses, gilet pare-balle enfilé par-dessus le veston irréprochable et Colt 44 magnum au poing. Les gringos sont ce qu’ils sont, mais ils en connaissent un rayon question armes à feu. Ce gros flingue aux allures de canon antichar avait la cote auprès des caméras et des appareils photo des médias. Don Esteban ne reculait pas devant la réclame lorsqu’il y allait de la Justice et du maintien de l’ordre. Une mission pas évidente dans une agglomération de quinze millions d’habitants, où le compteur annuel d’homicides au mètre carré affiche l’un des résultats les plus performants au monde. Même si ces meurtres ne sont pour la plupart que de vulgaires règlements de compte ou de sordides tragédies domestiques sur fond d’alcool et de misère.
Avec l’affaire Moralès, en revanche, on évoluait dans les sphères les plus élevées du crime. Le vieux Pablo « Cojones » Moralès avait indiscutablement été assaisonné à l’amande amère première pression, mais du diable si l’on pouvait savoir qui avait agité la burette au-dessus de son potage. Le nombre de gens qui priaient chaque jour la Madone de Vera Cruz, patronne des causes justes, pour que crève le vieux salopard, dépassait simplement l’entendement. Même dans son entourage proche, beaucoup avaient intérêt à ce qu’il se fasse évacuer du décor, et peu lui souhaitaient de faire encore de vieux jours. A l’abri de ses oreilles, naturellement. Les cimetières de Mexico hébergeaient ceux qui avaient eu l’inconscience de tenir ce genre de propos en sa présence..
Pablo Moralès était un criminel pour qui le crime avait payé. Il avait certes pas mal fréquenté les centres de loisirs pénitentiaires, surtout du temps de sa querelleuse jeunesse – ce qui lui avait valu son surnom – mais l’âge lui avait appris à tempérer sa fougue et faire exécuter (c’est le mot) le sale boulot par d’autres. Les bidonvilles de la périphérie regorgent de petites mains toutes prêtes à se saloper moyennant quelques poignées de pesos. En vertu – si l’on peut dire – de quoi il était parvenu à un âge que la plupart de ses rivaux n’avaient jamais atteint, sinon derrière les barreaux. A soixante-dix ans, il était depuis longtemps retiré des affaires, à jouir paisiblement du tas de fric qu’il avait entassé au cours d’une longue carrière de violence et de trafics divers.
Et de corruption, aussi, El Señor Procurador Federal était bien obligé d’en convenir. En dépit des promesses la main sur le cœur de chaque nouveau président et des rituelles campagnes de moralisation de la vie publique, elle repoussait comme de la mauvaise herbe à peine l’avait-on cru éradiquée. Et comment aurait-il pu en aller autrement dans un pays où un inspecteur de police ou un employé municipal gagnaient péniblement en une année ce qu’un gros dealer ou un tenancier de maisons closes ramassait en une journée ? Un pays où les traitements des fonctionnaires étaient le plus souvent versés avec des mois de retard, quand ils étaient versés. Un pays dont le précédent Président Lopez Portillo, commentant les accusations de fraude électorale envers son parti, disait : « Les peuples ont le régime qu’ils méritent »
Cela avait au moins le mérite d’être clair. La corruption régnait en maître parce que les dirigeants de ce pays méprisaient leur peuple et que ce dernier le leur rendait bien. L’élan révolutionnaire et la ferveur patriotique des Zapata, Villa et Madero étaient bien morts, même si l’on encensait encore leur mémoire à chaque coin de rue. Le Procureur de la Torre n’avait rien d’un révolutionnaire, mais il se faisait une haute idée de sa fonction, qu’il jugeait incompatible avec les pots-de-vin, les dessous de table et plus généralement toute forme de passe-droit. Une honnête aisance matérielle héritée de son père chirurgien réputé lui permettait de pallier aux irrégularités de revenus qui affectaient jusqu’aux hauts magistrats comme lui.
Depuis qu’il avait pris en main l’enquête sur l’assassinat de Pablo Moralès, il avait été discrètement chapitré par des personnes bien intentionnées, qui lui avaient expliqué tout l’intérêt qu’il y aurait – pour lui comme pour tout le monde – à ce que cette affaire se solde par un non-lieu. Et pronto. Après tout, faisaient-elles observer, personne ne pleurerait sincèrement le disparu, ni sa veuve qui hériterait d’un gros paquet ni ses enfants, même combat, et encore moins sa jeune maîtresse de vingt ans à qui il laissait aussi un confortable matelas de pesos. Et il y avait à Mexico des centaines de foyers où l’on faisait brûler des cierges pour remercier le Ciel d’avoir exaucé leurs vœux. Assurément, on avait farci le vieux tyrannosaure à l’amande amère, mais qui a vécu par l’épée périra par l’épée, n’est-ce pas, Monsieur le Procureur Fédéral ?
Amen. Un avocat d’affaires rondouillard et obséquieux s’épongeait spasmodiquement le front avec son mouchoir à carreaux, un banquier mince et arrogant lui allumait un double coronas sous le nez, un général de la Guardia Civil avec des miroirs sur les yeux se présentait, raide comme un cactus-cierge dans son uniforme pavé de médailles et même le chef de cabinet du Ministre de la Justice, une main persuasive sur son épaule, lui murmurait : « Vous savez, mon cher Esteban, le Ministre a particulièrement confiance en vous. Et le Président aussi. On parle de vous pour la Cour Suprême. Soyez à la hauteur, mon vieux. » Personne à Mexico ne semblait manifester la moindre envie de savoir qui avait empoisonné Pablo Moralès, et quand à ceux qui savaient, ils sauraient bouche close garder. L’avocat manœuvrait pour la famille, le banquier ne tenait nullement à ce que le magot du vieux pirate soit mis sous séquestre, le général voulait à tout prix qu’on évite de tisonner les cendres de certains dossiers encore brûlants, et quant au bras droit du Patron, à ce qu’on murmurait dans les couloirs du Palais de Justice, il soupait avec la veuve et lorgnait sur la maîtresse.
De son vivant, Moralès avait arrosé tous azimuts et pas avec le cul de l’arrosoir. Ceux que la pluie de pesos avait humectés n’avaient qu’un vœu, mais alors fervent : que l’on ensevelisse toute l’affaire bien profond, dans le même trou que la charogne pourrie du vieux salopard, et qu’on n’en parle jamais plus, même à la veillée. Surtout à la veillée, faut pas saloper les bons moments. Le procureur De la Torre se souciait peu de savoir qui avait empoché des enveloppes et combien elles contenaient. Cela était du ressort de la Section anti-corruption. En fait cela était du ressort de la Nacion entière. La corruption avait commencé bien avant la naissance de Pablo Moralès et elle ne cesserait pas avec sa disparition. Ce que voulait Don Esteban, c’était découvrir le modus operandi du crime et confondre le coupable. Ce qu’on ferait de lui par la suite, il s’en ponçait le Pilate. Au train où allaient les choses, il était probable qu’on le décorerait du Mérite National.
Les empoisonneurs, selon le Procureur, font des assassins d’une espèce très particulière. La plupart des meurtriers doivent établir le contact physique ou au moins visuel avec leur victime au moment des faits, et souvent en tirent du plaisir. Etrangler un homme avec un lacet, lui fracasser le crâne au marteau, lui plonger un poignard entre les côtes ou même lui déchiqueter les entrailles au pistolet-mitrailleur sont des activités qui, à défaut de sens moral, réclament un certain courage. Ou disons de la férocité. Il en va tout autrement de l’empoisonneur. Ce dernier est un prédateur à sang-froid. Il n’a besoin de courage qu’à l’instant très bref où il verse le poison. Et il aura veillé à ce que personne ne puisse le surprendre à ce moment-là. L’empoisonneur n’est pas né de la dernière pluie.
Celui qui s’était payé Moralès était même venu au monde avant le déluge, à en juger par l’habileté avec laquelle il avait dissimulé les indices. La victime était morte durant la sieste qu’elle effectuait sur la véranda de sa propriété. C’est Alvarez, le majordome de la maison, qui l’avait découverte raide et convulsée dans son fauteuil à bascule, la bave aux lèvres et les yeux révulsés. Un spectacle sans aucun doute réconfortant pour de nombreux de ses concitoyens, mais qui figea de stupeur le domestique : il n’avait perdu de vue son patron que le temps d’aller chercher des glaçons à l’office, les autres ayant fondu sous l’implacable soleil de juillet à Mexico. Le vieux jouisseur n’hésitait pas à agrémenter sa sieste de tequila-citron bien frappée. Avec un trait de sirop de canne, il avait le bec sucré.
On pensa inévitablement que le poison avait été versé dans le long drink, et le malheureux majordome, suspect numero uno dans ce cas de figure, n’échappa que de justesse au troisième degré. El Señor Comisario Federal Criminal Guttierez, en charge du volet policier de l’affaire, n’avait pas la réputation de plaisanter. Heureusement pour le pauvre Alvarez, l’analyse ne révéla aucune trace de poison ni dans le verre de la victime, ni dans la bouteille, ni dans les glaçons, ce qui innocentait ipso facto le majordome. Au reste, il était un des rares de la maisonnée à ne pas se réjouir ouvertement de la mort de son employeur. Après trente ans de bons et pas toujours loyaux services, il s’était attaché à lui en dépit du caractère tyrannique et de la malignité du bonhomme, traits qui ne s’étaient pas améliorés avec l’âge. Dans l’esprit d’Alvarez, il s’agissait certainement de vertus.
Une fois éliminée la piste du remontant fatal, le champ des hypothèses tendait vers l’infini. On ne manquait pas de suspects, on croulait sous leur nombre. Rien que dans la vaste demeure rococo du défunt, vingt personnes résidaient en permanence. La veuve, bien entendu, mais aussi son fils et sa fille, son gendre et la sœur cadette de celui-ci, qui n’était autre que la dernière maîtresse en date de Moralès. Une affaire de famille en quelque sorte. Mais on trouvait aussi, en sus du majordome, une gouvernante – anglaise, por favor ! – pour Madame, trois femmes de chambre, un couple de cuisiniers avec leur jeune commis originaire du Chiapas, deux jardiniers philippins, plus un service de protection composé d’un chauffeur-garde du corps et de quatre agents de sécurité, autrement dit des gros bras des bas-fonds déguisés en robocops. Sans parler des nombreux visiteurs – on aimait recevoir – et du défilé des fournisseurs – on soignait ses invités.
Parmi ces derniers figuraient pas mal de personnalités en vue, sportifs célèbres, vedettes du cinéma ou de la télé, chanteurs en vogue – le Mexicain adore chanter – et bien entendu l’obséquieux défilé des obligés, avocats marrons, affairistes avides, élus et fonctionnaires accommodants, quand il ne s’agissait pas d’un chef de cabinet ministériel ou d’un juge à la Cour Fédérale. Il était impensable d’inculper tout ce beau linge en bloc. Tout au plus pouvait-on en convoquer quelques éléments individuellement à titre de témoin.
Don Esteban les convoqua tous. La veuve et sa bru adultère. Le cuisinier et son commis indio. Le chauffeur et les quatre gorilles en treillis de combat. Le trois-quarts aile de l’America de Mexico et le présentateur des jeux du midi. Isabela Suarez, la bombe d’Acapulco, le dernier soap à la page et Ramon Zarate, l’inoubliable interprète de « Palomas de mi amor » Il fit se déranger aussi les palpeurs d’enveloppes et les siffleurs de pots-de-vin, ne fût ce que pour leur donner – non pas mauvaise conscience, faut pas rêver – mais au moins quelques sueurs froides. Faut pas rêver non plus, ils avaient tous le bras long. Le Chef de Cabinet, lui, comme on sait, avait aimablement laissé entendre qu’il y avait tout intérêt à clore le dossier sans faire de vagues et quant au juge fédéral, ce fut lui qui le convoqua pour lui signifier avec beaucoup moins de courtoisie qu’il souscrivait entièrement à ce point de vue. Don Esteban en prit bonne note, Señor Juge Fédéral.
La veuve se montrait nettement plus amène. Devant son visage serpentait un éventail de dentelle noire. La chair opulente de ses bras dénudés frémissait au mouvement du poignet auquel se balançait un bracelet d’émeraudes. Le vieux forban n’avait pas trafiqué que de la drogue. Entre deux battements de l’éventail, deux rangées d’interminables cils insolemment fardés battaient en rythme. L’éventail proclamait la vieille et respectable ascendance castillane de Doña Teresa, le ballet des cils sur les prunelles de charbon luisant attestait de la pureté de cœur de l’intéressée. Hélas l’éventail – andalou – avait été ramené de Séville par son époux d’une de ses virées tauromachiques en Espagne et les cils à rallonges évoquaient plus la Casa Rosita – bordel de première classe où la future Madame Moralès, plus notoire à l’époque sous le surnom de Teresina la Ventouse, avait fait ses classes – qu’un pensionnat de jeunes filles du meilleur monde. Sa bru, la maîtresse du trépassé, faisait moins de tralala, foin d’éventails brodés et de papillonnements au rimmel, à vingt ans, un tee-shirt deux tailles trop étroit, un short du même gabarit et un chupa-chup coulissant entre les lèvres font tout aussi bien l’affaire. Surtout si l’on pose le short tendu à exploser par son contenant sur le coin du bureau.
Don Esteban, parfait hidalgo et fort porté sur le beau sexe, reçut cinq sur cinq le message subliminal, en fut in petto flatté et le jeta dans la corbeille à papier. Il ne mélangeait jamais le travail et la bagatelle. Quant au sentiment, il le réservait en exclusivité à sa vieille maman qui mûrissait gentiment à l’ombre des orangers en fleurs de l’hacienda familiale. Il songea qu’une petite semaine sabbatique auprès d’elle, à se régaler de son pollo con mole et de ses natillas, et à déguster le vin de la propriété, ne saurait lui nuire et y renonça en soupirant. Monsieur le Procureur était un bourreau de travail. Tant de dossiers s’empilaient sur son bureau que son secrétariat de trois personnes – fort efficace, ce qui était assez rare dans l’administracion – ne parvenait pas même à classer cet Himalaya de paperasse et de fiches. Personne, en tous cas, ne l’aiderait à résoudre l’affaire Moralès. La police avait fait ce qu’elle avait pu, ou en tous cas ce qu’on lui avait dit de faire, ce qui n’est pas nécessairement la même chose. Au bout du compte on n’avait rien, pas le moindre fragment d’indice, pas le plus vague témoignage intéressant, pas le plus petit début de la queue d’une piste. La sagesse autant que l’intérêt prescrivaient de demander le non-lieu, se rincer l’esprit de toute la boue charriée par les héritiers, les affairistes et les corrompus et aller se faire dorloter chez Mamita.
Pourtant, il existait deux indices incontestables. Le poison, d’abord, qui finirait peut-être, à force d’analyses, à livrer ses secrets. La patience est la botte secrète du chimiste. Mais surtout on tenait un autre indice, de poids, celui-là : le contenant du poison, à savoir la dépouille de Pablo Moralès. De poids car le patriarche du crime, sur ses vieux jours, s’était considérablement laissé aller question tamales, tacos et autres fajitas, au point de peser si lourd qu’il n’avait pas fallu moins de quatre fonctionnaires de police pour l’extraire de son rocking-chair fatal. On avait naturellement disséqué le défunt sous toutes les coutures. La famille n’y avait mis aucune objection, et quand aux autres, ils auraient volontiers donné un coup de main pour le boulot. En déplorant qu’il ne soit pas encore un tout petit peu en vie. A part une dose de cyanure suffisante pour foudroyer un bison, on ne trouva rien de suspect dans son organisme, étonnamment bien conservé en dépit de l’âge, de la goinfrerie et de la boulimie du quidam. Sans parler de son érotomanie. Les témoins concernés avaient été formels, et le devoir de réserve autant que la pudeur interdisent d’en parler d’avantage. Don Esteban pouvait comprendre le soulagement éprouvé à l’entour de la victime à l’annonce de sa mort. C’était un peu le Père Fouettard et Pervers Pépère qui crevaient de concert. Il était bien temps, vieille pourriture !
Ce vieil obèse méchant et vicieux qui tyrannisait ses proches et terrorisait son entourage commençait à fasciner Don Esteban, grand amateur de patriarches démesurément latino-américains, tout à fait dans la veine de ceux de l’auteur du malheureux incipit parfumé à l’amande amère. Il en sourit. Les autres, ils les avait lus, et plutôt deux fois qu’une. Pour arracher à la victime le secret de son trépas, il comptait moins sur le médecin légiste que sur ses petites fiches. Nourries des témoignages qu’il avait recueillis, elles brossaient le portrait d’un personnage odieux et détesté, mais en creux, elles dessinaient les motivations et les sentiments des témoins. Ce qui était évident c’est que le vieux salopard les tenait tous par les cojones. Par la ruse, la peur, la violence, mais aussi par la truculence et la séduction, le bougre semblait savoir y faire aussi bien avec les jolies femmes qu’avec les mauvais garçons. Mais surtout il les tenait par l’argent. Les millions, peut-être les milliards de pesos qu’il avait amassés durant sa longue carrière de parrain du crime, avaient été patiemment blanchis et réinvestis par une petite armée d’avocats à la coule, de banquiers complaisants et de prête-noms grassement rétribués. On disait qu’il possédait plus de la moitié du nouveau quartier d’affaires, plusieurs chaînes de restaurants prospères et une exploitation agricole de trente mille hectares avec plus de bêtes à cornes que de véhicules sur la chaussée du centre de Mexico à midi. Il savait faire pleuvoir l’or avec munificence sur ses obligés. En revanche, il aurait fait arracher avec bonhomie les testicules de qui se serait risqué à lui dérober ne fût-ce que vingt centavos.
El Señor Procurador consulta le chronographe Piaget en platine qui ornait son poignet. En tant que magistrat, il tenait pour l’exactitude et pour l’exactitude, la Suisse constitue une sorte de référence absolue. Quelques reliquats de l’héritage paternel lui permettaient de s’offrir une montre qui valait au moins cinq ans de son traitement. Elle indiquait dix-neuf heures trois minutes et trente deux secondes sept dixièmes et quatre centièmes. On est suisse ou on ne l’est pas. En tout état de cause une heure décente pour prendre un verre. Normalement, à cette heure, il le prenait à son club en fumant un panatela, mais ce soir il attendait un visiteur exceptionnel. Il tira du secrétaire en marqueterie d’acajou baroque un carafon de pur malt écossais de trente ans d’âge. En dépit de son patriotisme intransigeant – le Mexicain est volontiers cocardier – Don Esteban avait le palais international, et son système digestif délicat avait du mal à fraterniser avec la virile rudesse de la tequila et du mezcal qui faisaient pourtant la fierté de la Nacion. Son visiteur, grand amateur de vénérables eaux-de-vie, lui saurait gré de cette attention.
Pour résoudre l’énigme Moralès, Don Esteban avait choisi de prendre les choses au rebours. Au lieu de partir de la scène du crime et construire l’enquête à partir de celle-ci, comme on procède toujours, il avait décidé de remonter dans le passé et se concentrer sur Moralès, sa vie, son œuvre, sa légende. Car d’une certaine manière, il était déjà légendaire dans les ruelles mal famées, dans les bars à putes et les salles de jeux clandestines de Mexico, voire de tout le pays. Saint Pablo « Cojones » patron des mauvais garçons et des filles perdues mais pas pour tout le monde. La solution du mystère gisait quelque part dans son ascension, son apogée, sa retraite dorée. Sa fin brutale, et tout à fait dans l’esprit de sa vie aventureuse, n’était que le point final de la saga. Il fallait chercher la clé de l’énigme dans la brume de son passé. Tout un tas de respectables et moins respectables citoyens avaient eu intérêt et envie de zigouiller le vieux. Mais un seul l’avait fait. Un seul. Les autres avaient trop peur de lui. Et plus il les payait, plus ils lui étaient enchaînés. Pourtant l’un d’entre eux avait eu la froide détermination de mijoter son plan le temps qu’il fallait, endormir les soupçons du vieux, plus méfiant qu’un scorpion de Durango, et lui fourrer le cyanure dans le gosier sans qu’on puisse savoir comment. Toute considération morale et pénale mise à part, bravo l’artiste. Du grand art dans le domaine de la trahison. On était en pleine tragédie, et le Mexicain raffole de l’antique. Souvenons-nous du vieux lion Trotsky pioletisé dans le dos par son secrétaire particulier Ramon Mercader ou plus loin dans le passé du président Madero, exécuté par son cher compagnon d’armes, le judas Huerta.
Dès lors qu’on nageait en pleine tragédie, il lui fallait un spécialiste pour se maintenir à flot. Un homme dont le regard toujours neuf et jamais conventionnel lui ferait miroiter la paillette d’or qu’il n’aurait pas vue dans le tas de scories. Un homme dont la profonde connaissance de l’Homme lui révélerait la faille dans un témoignage en apparence irréprochable. Un homme enfin, dont l’œuvre était tellement nourrie de ce mélange de démesure et de dérision qui caractérisait aussi bien le cas Moralès que tout le Mexique, voire l’Amérique Latine, qu’il se sentirait aussi familier avec les protagonistes de l’affaire qu’avec les personnages de ses propres fictions. Un homme, enfin, que le père d’Esteban avait soigné et protégé de son influence alors qu’il fuyait le tyran de son pays et avait demandé l’asile politique. Le Mexique mitraillait un peu ses contestataires mais accueillait volontiers ceux des autres. Depuis ils étaient amis et il se réjouissait de l’échange intellectuel qui allait suivre. Il renifla le breuvage, n’y trouva nulle trace d’amande amère et peaufina le poli des verres de sa pochette de soie. On n’est jamais trop soigneux.
- Salut, Señor Procurador Federal
- Salut, amigo, assied-toi et prend un verre, nous allons parler boutique. Haines recuites et amours contrariées, veuves noires et héritiers griffus, roides militaires et cauteleux fonctionnaires, sans oublier le parfum de l’amande amère. Bref on est dans ton jardin.
- T’as toujours pas pu le lire ? Me mens pas je le vois par terre, tu l’as encore laissé tomber à la première page.
- Oui amigo. Mais j’ai lu tous tes autres.
- Je t’en donne acte. Sers-moi un autre scotch…Alors comme ça t’as besoin d’un petit coup de pouce gratos pour te sortir la tête du marigot, et tu t’es dit que ce vieux caïman de Gabo nageait comme il fallait dans ces eaux troubles-là, n’est-ce pas ? Tu manques pas d’air !
- C’était inévitable, Gabo. C’est la vie.
GOBU
PS : L’auteur précise, dans le souci du confort intellectuel du lecteur(trice) que Gabriel Garcia Marquez a réellement séjourné au Mexique entre 1966 et le début des années 90, et qu’il a bien pris une certaine part à la vie publique locale, en particulier dans la critique de la corruption et la défense des minorités. Quant au reste, pure fiction. Bref, c’est la vie.
Suivant incipit :
C'ETAIT INEVITABLE
« C’était inévitable : l’odeur des amandes amères lui rappellerait toujours le destin des amours contrariées. » C’était inévitable : le bouquin en chut sur le tapis. Le putain de chef-d’œuvre lui était toujours tombé des mains dès lecture de cette phrase. Dommage qu’il se soit agi de l’incipit.Il aurait pu tenter d’aller plus loin. Passer l’amère fragrance des amandiers, et s’immerger dans l’océan de mots de l’illustre Nobel de littérature pour rincer toute cette amertume. Mais rien n’y pouvait : pour lui, le parfum des amandes amères évoquait principalement l’odeur du cyanure et n’avait pas grand-chose à voir avec les amours contrariées. Même si le poison contrarie parfois le destin les amourettes. Contrariété fatale, si l’on peut dire.
C’était plus fort que lui. Il n’arrivait tout simplement pas à se mettre à la place d’un narrateur à qui le parfum du cyanure ne rappelait rien que le fantôme d’amours défuntes, au milieu de leur dérisoire carrousel de sanglots, reniflements de narine et mouchoirs trempés de larmes. Tel est le triste destin des amours contrariées. Surtout au Mexique, où l’on s’épanche volontiers.
Cette odeur, dont l’âcreté provoque la suffocation immédiate de qui n’aurait pas songé à se protéger les voies respiratoires, évoquait pour lui bien d’autres souvenirs que les réminiscences de pauvres émois d’adolescent passés au hachoir du temps qui passe. Le double assassinat de la Calle Padre Lachez. L’affaire de la veuve Santamaria. Le mystère de la Villa Diego Rivera. Entre autres.
Et maintenant le sulfureux dossier de la succession Moralès. Encore une enquête qui empestait l’amande amère à plein nez. En plus de la cocaïne, à plein nez aussi naturellement. Mais c’est le pays qui veut ça. Au Mexique, tout ce qui pue sent peu ou prou la coco. Et inversement.
Cela faisait plus de trente ans qu’Esteban De la Torre s’en goinfrait narines déployées, de toute cette palette olfactive. Très exactement depuis le jour où il était rentré au Ministère Public Fédéral…après de brillantes études de médecine et non sans avoir passé un doctorat en droit dans la foulée. La conjonction entre son bagage médical et ses indéniables compétences juridiques firent rapidement de lui un spécialistes des affaires d’empoisonnement, aussi remontaient-elle de tous les bras de la tentaculaire Mexico vers son bureau rococo du Palais de Justice.
En tant que représentant du Ministère Public, Don Esteban avait pour tâche de faire enfermer les empoisonneurs en prison, en présentant à la Cour un dossier suffisamment bien étayé pour mettre la défense en déroute. La charge d’enquêter sur le terrain, collecter des indices à la pince à épiler, trouver des témoins, cuisiner des suspects, analyser des pièces à conviction, tout cela revenait aux investigateurs de la Police Criminelle et à la Brigade Scientifique. Monsieur le Procureur n’a pas à salir ses mains manucurées en tripotant des cadavres ou risquer des voies de fait de la part d’un suspect mal éduqué.
El Señor Procurador Federal De la Torre n’était pas de ces magistrats-là. En dépit du soin qu’il accordait à ses mains, comme tout ancien médecin, il n’hésitait pas à les plonger dans le cambouis. Et même s’il s’habillait et se chaussait chez les meilleur faiseurs de la capitale, il prenait le risque d’abîmer ses élégants costumes, et même – horresco referens – crotter ses souliers cousus main, en se livrant à toutes sortes d’activités auxquelles leurs créateurs ne les avait pas destinées. Un homme de terrain, El Señor Procurador Federal, accompagnant les policiers lors des interpellations les plus hasardeuses, gilet pare-balle enfilé par-dessus le veston irréprochable et Colt 44 magnum au poing. Les gringos sont ce qu’ils sont, mais ils en connaissent un rayon question armes à feu. Ce gros flingue aux allures de canon antichar avait la cote auprès des caméras et des appareils photo des médias. Don Esteban ne reculait pas devant la réclame lorsqu’il y allait de la Justice et du maintien de l’ordre. Une mission pas évidente dans une agglomération de quinze millions d’habitants, où le compteur annuel d’homicides au mètre carré affiche l’un des résultats les plus performants au monde. Même si ces meurtres ne sont pour la plupart que de vulgaires règlements de compte ou de sordides tragédies domestiques sur fond d’alcool et de misère.
Avec l’affaire Moralès, en revanche, on évoluait dans les sphères les plus élevées du crime. Le vieux Pablo « Cojones » Moralès avait indiscutablement été assaisonné à l’amande amère première pression, mais du diable si l’on pouvait savoir qui avait agité la burette au-dessus de son potage. Le nombre de gens qui priaient chaque jour la Madone de Vera Cruz, patronne des causes justes, pour que crève le vieux salopard, dépassait simplement l’entendement. Même dans son entourage proche, beaucoup avaient intérêt à ce qu’il se fasse évacuer du décor, et peu lui souhaitaient de faire encore de vieux jours. A l’abri de ses oreilles, naturellement. Les cimetières de Mexico hébergeaient ceux qui avaient eu l’inconscience de tenir ce genre de propos en sa présence..
Pablo Moralès était un criminel pour qui le crime avait payé. Il avait certes pas mal fréquenté les centres de loisirs pénitentiaires, surtout du temps de sa querelleuse jeunesse – ce qui lui avait valu son surnom – mais l’âge lui avait appris à tempérer sa fougue et faire exécuter (c’est le mot) le sale boulot par d’autres. Les bidonvilles de la périphérie regorgent de petites mains toutes prêtes à se saloper moyennant quelques poignées de pesos. En vertu – si l’on peut dire – de quoi il était parvenu à un âge que la plupart de ses rivaux n’avaient jamais atteint, sinon derrière les barreaux. A soixante-dix ans, il était depuis longtemps retiré des affaires, à jouir paisiblement du tas de fric qu’il avait entassé au cours d’une longue carrière de violence et de trafics divers.
Et de corruption, aussi, El Señor Procurador Federal était bien obligé d’en convenir. En dépit des promesses la main sur le cœur de chaque nouveau président et des rituelles campagnes de moralisation de la vie publique, elle repoussait comme de la mauvaise herbe à peine l’avait-on cru éradiquée. Et comment aurait-il pu en aller autrement dans un pays où un inspecteur de police ou un employé municipal gagnaient péniblement en une année ce qu’un gros dealer ou un tenancier de maisons closes ramassait en une journée ? Un pays où les traitements des fonctionnaires étaient le plus souvent versés avec des mois de retard, quand ils étaient versés. Un pays dont le précédent Président Lopez Portillo, commentant les accusations de fraude électorale envers son parti, disait : « Les peuples ont le régime qu’ils méritent »
Cela avait au moins le mérite d’être clair. La corruption régnait en maître parce que les dirigeants de ce pays méprisaient leur peuple et que ce dernier le leur rendait bien. L’élan révolutionnaire et la ferveur patriotique des Zapata, Villa et Madero étaient bien morts, même si l’on encensait encore leur mémoire à chaque coin de rue. Le Procureur de la Torre n’avait rien d’un révolutionnaire, mais il se faisait une haute idée de sa fonction, qu’il jugeait incompatible avec les pots-de-vin, les dessous de table et plus généralement toute forme de passe-droit. Une honnête aisance matérielle héritée de son père chirurgien réputé lui permettait de pallier aux irrégularités de revenus qui affectaient jusqu’aux hauts magistrats comme lui.
Depuis qu’il avait pris en main l’enquête sur l’assassinat de Pablo Moralès, il avait été discrètement chapitré par des personnes bien intentionnées, qui lui avaient expliqué tout l’intérêt qu’il y aurait – pour lui comme pour tout le monde – à ce que cette affaire se solde par un non-lieu. Et pronto. Après tout, faisaient-elles observer, personne ne pleurerait sincèrement le disparu, ni sa veuve qui hériterait d’un gros paquet ni ses enfants, même combat, et encore moins sa jeune maîtresse de vingt ans à qui il laissait aussi un confortable matelas de pesos. Et il y avait à Mexico des centaines de foyers où l’on faisait brûler des cierges pour remercier le Ciel d’avoir exaucé leurs vœux. Assurément, on avait farci le vieux tyrannosaure à l’amande amère, mais qui a vécu par l’épée périra par l’épée, n’est-ce pas, Monsieur le Procureur Fédéral ?
Amen. Un avocat d’affaires rondouillard et obséquieux s’épongeait spasmodiquement le front avec son mouchoir à carreaux, un banquier mince et arrogant lui allumait un double coronas sous le nez, un général de la Guardia Civil avec des miroirs sur les yeux se présentait, raide comme un cactus-cierge dans son uniforme pavé de médailles et même le chef de cabinet du Ministre de la Justice, une main persuasive sur son épaule, lui murmurait : « Vous savez, mon cher Esteban, le Ministre a particulièrement confiance en vous. Et le Président aussi. On parle de vous pour la Cour Suprême. Soyez à la hauteur, mon vieux. » Personne à Mexico ne semblait manifester la moindre envie de savoir qui avait empoisonné Pablo Moralès, et quand à ceux qui savaient, ils sauraient bouche close garder. L’avocat manœuvrait pour la famille, le banquier ne tenait nullement à ce que le magot du vieux pirate soit mis sous séquestre, le général voulait à tout prix qu’on évite de tisonner les cendres de certains dossiers encore brûlants, et quant au bras droit du Patron, à ce qu’on murmurait dans les couloirs du Palais de Justice, il soupait avec la veuve et lorgnait sur la maîtresse.
De son vivant, Moralès avait arrosé tous azimuts et pas avec le cul de l’arrosoir. Ceux que la pluie de pesos avait humectés n’avaient qu’un vœu, mais alors fervent : que l’on ensevelisse toute l’affaire bien profond, dans le même trou que la charogne pourrie du vieux salopard, et qu’on n’en parle jamais plus, même à la veillée. Surtout à la veillée, faut pas saloper les bons moments. Le procureur De la Torre se souciait peu de savoir qui avait empoché des enveloppes et combien elles contenaient. Cela était du ressort de la Section anti-corruption. En fait cela était du ressort de la Nacion entière. La corruption avait commencé bien avant la naissance de Pablo Moralès et elle ne cesserait pas avec sa disparition. Ce que voulait Don Esteban, c’était découvrir le modus operandi du crime et confondre le coupable. Ce qu’on ferait de lui par la suite, il s’en ponçait le Pilate. Au train où allaient les choses, il était probable qu’on le décorerait du Mérite National.
Les empoisonneurs, selon le Procureur, font des assassins d’une espèce très particulière. La plupart des meurtriers doivent établir le contact physique ou au moins visuel avec leur victime au moment des faits, et souvent en tirent du plaisir. Etrangler un homme avec un lacet, lui fracasser le crâne au marteau, lui plonger un poignard entre les côtes ou même lui déchiqueter les entrailles au pistolet-mitrailleur sont des activités qui, à défaut de sens moral, réclament un certain courage. Ou disons de la férocité. Il en va tout autrement de l’empoisonneur. Ce dernier est un prédateur à sang-froid. Il n’a besoin de courage qu’à l’instant très bref où il verse le poison. Et il aura veillé à ce que personne ne puisse le surprendre à ce moment-là. L’empoisonneur n’est pas né de la dernière pluie.
Celui qui s’était payé Moralès était même venu au monde avant le déluge, à en juger par l’habileté avec laquelle il avait dissimulé les indices. La victime était morte durant la sieste qu’elle effectuait sur la véranda de sa propriété. C’est Alvarez, le majordome de la maison, qui l’avait découverte raide et convulsée dans son fauteuil à bascule, la bave aux lèvres et les yeux révulsés. Un spectacle sans aucun doute réconfortant pour de nombreux de ses concitoyens, mais qui figea de stupeur le domestique : il n’avait perdu de vue son patron que le temps d’aller chercher des glaçons à l’office, les autres ayant fondu sous l’implacable soleil de juillet à Mexico. Le vieux jouisseur n’hésitait pas à agrémenter sa sieste de tequila-citron bien frappée. Avec un trait de sirop de canne, il avait le bec sucré.
On pensa inévitablement que le poison avait été versé dans le long drink, et le malheureux majordome, suspect numero uno dans ce cas de figure, n’échappa que de justesse au troisième degré. El Señor Comisario Federal Criminal Guttierez, en charge du volet policier de l’affaire, n’avait pas la réputation de plaisanter. Heureusement pour le pauvre Alvarez, l’analyse ne révéla aucune trace de poison ni dans le verre de la victime, ni dans la bouteille, ni dans les glaçons, ce qui innocentait ipso facto le majordome. Au reste, il était un des rares de la maisonnée à ne pas se réjouir ouvertement de la mort de son employeur. Après trente ans de bons et pas toujours loyaux services, il s’était attaché à lui en dépit du caractère tyrannique et de la malignité du bonhomme, traits qui ne s’étaient pas améliorés avec l’âge. Dans l’esprit d’Alvarez, il s’agissait certainement de vertus.
Une fois éliminée la piste du remontant fatal, le champ des hypothèses tendait vers l’infini. On ne manquait pas de suspects, on croulait sous leur nombre. Rien que dans la vaste demeure rococo du défunt, vingt personnes résidaient en permanence. La veuve, bien entendu, mais aussi son fils et sa fille, son gendre et la sœur cadette de celui-ci, qui n’était autre que la dernière maîtresse en date de Moralès. Une affaire de famille en quelque sorte. Mais on trouvait aussi, en sus du majordome, une gouvernante – anglaise, por favor ! – pour Madame, trois femmes de chambre, un couple de cuisiniers avec leur jeune commis originaire du Chiapas, deux jardiniers philippins, plus un service de protection composé d’un chauffeur-garde du corps et de quatre agents de sécurité, autrement dit des gros bras des bas-fonds déguisés en robocops. Sans parler des nombreux visiteurs – on aimait recevoir – et du défilé des fournisseurs – on soignait ses invités.
Parmi ces derniers figuraient pas mal de personnalités en vue, sportifs célèbres, vedettes du cinéma ou de la télé, chanteurs en vogue – le Mexicain adore chanter – et bien entendu l’obséquieux défilé des obligés, avocats marrons, affairistes avides, élus et fonctionnaires accommodants, quand il ne s’agissait pas d’un chef de cabinet ministériel ou d’un juge à la Cour Fédérale. Il était impensable d’inculper tout ce beau linge en bloc. Tout au plus pouvait-on en convoquer quelques éléments individuellement à titre de témoin.
Don Esteban les convoqua tous. La veuve et sa bru adultère. Le cuisinier et son commis indio. Le chauffeur et les quatre gorilles en treillis de combat. Le trois-quarts aile de l’America de Mexico et le présentateur des jeux du midi. Isabela Suarez, la bombe d’Acapulco, le dernier soap à la page et Ramon Zarate, l’inoubliable interprète de « Palomas de mi amor » Il fit se déranger aussi les palpeurs d’enveloppes et les siffleurs de pots-de-vin, ne fût ce que pour leur donner – non pas mauvaise conscience, faut pas rêver – mais au moins quelques sueurs froides. Faut pas rêver non plus, ils avaient tous le bras long. Le Chef de Cabinet, lui, comme on sait, avait aimablement laissé entendre qu’il y avait tout intérêt à clore le dossier sans faire de vagues et quant au juge fédéral, ce fut lui qui le convoqua pour lui signifier avec beaucoup moins de courtoisie qu’il souscrivait entièrement à ce point de vue. Don Esteban en prit bonne note, Señor Juge Fédéral.
La veuve se montrait nettement plus amène. Devant son visage serpentait un éventail de dentelle noire. La chair opulente de ses bras dénudés frémissait au mouvement du poignet auquel se balançait un bracelet d’émeraudes. Le vieux forban n’avait pas trafiqué que de la drogue. Entre deux battements de l’éventail, deux rangées d’interminables cils insolemment fardés battaient en rythme. L’éventail proclamait la vieille et respectable ascendance castillane de Doña Teresa, le ballet des cils sur les prunelles de charbon luisant attestait de la pureté de cœur de l’intéressée. Hélas l’éventail – andalou – avait été ramené de Séville par son époux d’une de ses virées tauromachiques en Espagne et les cils à rallonges évoquaient plus la Casa Rosita – bordel de première classe où la future Madame Moralès, plus notoire à l’époque sous le surnom de Teresina la Ventouse, avait fait ses classes – qu’un pensionnat de jeunes filles du meilleur monde. Sa bru, la maîtresse du trépassé, faisait moins de tralala, foin d’éventails brodés et de papillonnements au rimmel, à vingt ans, un tee-shirt deux tailles trop étroit, un short du même gabarit et un chupa-chup coulissant entre les lèvres font tout aussi bien l’affaire. Surtout si l’on pose le short tendu à exploser par son contenant sur le coin du bureau.
Don Esteban, parfait hidalgo et fort porté sur le beau sexe, reçut cinq sur cinq le message subliminal, en fut in petto flatté et le jeta dans la corbeille à papier. Il ne mélangeait jamais le travail et la bagatelle. Quant au sentiment, il le réservait en exclusivité à sa vieille maman qui mûrissait gentiment à l’ombre des orangers en fleurs de l’hacienda familiale. Il songea qu’une petite semaine sabbatique auprès d’elle, à se régaler de son pollo con mole et de ses natillas, et à déguster le vin de la propriété, ne saurait lui nuire et y renonça en soupirant. Monsieur le Procureur était un bourreau de travail. Tant de dossiers s’empilaient sur son bureau que son secrétariat de trois personnes – fort efficace, ce qui était assez rare dans l’administracion – ne parvenait pas même à classer cet Himalaya de paperasse et de fiches. Personne, en tous cas, ne l’aiderait à résoudre l’affaire Moralès. La police avait fait ce qu’elle avait pu, ou en tous cas ce qu’on lui avait dit de faire, ce qui n’est pas nécessairement la même chose. Au bout du compte on n’avait rien, pas le moindre fragment d’indice, pas le plus vague témoignage intéressant, pas le plus petit début de la queue d’une piste. La sagesse autant que l’intérêt prescrivaient de demander le non-lieu, se rincer l’esprit de toute la boue charriée par les héritiers, les affairistes et les corrompus et aller se faire dorloter chez Mamita.
Pourtant, il existait deux indices incontestables. Le poison, d’abord, qui finirait peut-être, à force d’analyses, à livrer ses secrets. La patience est la botte secrète du chimiste. Mais surtout on tenait un autre indice, de poids, celui-là : le contenant du poison, à savoir la dépouille de Pablo Moralès. De poids car le patriarche du crime, sur ses vieux jours, s’était considérablement laissé aller question tamales, tacos et autres fajitas, au point de peser si lourd qu’il n’avait pas fallu moins de quatre fonctionnaires de police pour l’extraire de son rocking-chair fatal. On avait naturellement disséqué le défunt sous toutes les coutures. La famille n’y avait mis aucune objection, et quand aux autres, ils auraient volontiers donné un coup de main pour le boulot. En déplorant qu’il ne soit pas encore un tout petit peu en vie. A part une dose de cyanure suffisante pour foudroyer un bison, on ne trouva rien de suspect dans son organisme, étonnamment bien conservé en dépit de l’âge, de la goinfrerie et de la boulimie du quidam. Sans parler de son érotomanie. Les témoins concernés avaient été formels, et le devoir de réserve autant que la pudeur interdisent d’en parler d’avantage. Don Esteban pouvait comprendre le soulagement éprouvé à l’entour de la victime à l’annonce de sa mort. C’était un peu le Père Fouettard et Pervers Pépère qui crevaient de concert. Il était bien temps, vieille pourriture !
Ce vieil obèse méchant et vicieux qui tyrannisait ses proches et terrorisait son entourage commençait à fasciner Don Esteban, grand amateur de patriarches démesurément latino-américains, tout à fait dans la veine de ceux de l’auteur du malheureux incipit parfumé à l’amande amère. Il en sourit. Les autres, ils les avait lus, et plutôt deux fois qu’une. Pour arracher à la victime le secret de son trépas, il comptait moins sur le médecin légiste que sur ses petites fiches. Nourries des témoignages qu’il avait recueillis, elles brossaient le portrait d’un personnage odieux et détesté, mais en creux, elles dessinaient les motivations et les sentiments des témoins. Ce qui était évident c’est que le vieux salopard les tenait tous par les cojones. Par la ruse, la peur, la violence, mais aussi par la truculence et la séduction, le bougre semblait savoir y faire aussi bien avec les jolies femmes qu’avec les mauvais garçons. Mais surtout il les tenait par l’argent. Les millions, peut-être les milliards de pesos qu’il avait amassés durant sa longue carrière de parrain du crime, avaient été patiemment blanchis et réinvestis par une petite armée d’avocats à la coule, de banquiers complaisants et de prête-noms grassement rétribués. On disait qu’il possédait plus de la moitié du nouveau quartier d’affaires, plusieurs chaînes de restaurants prospères et une exploitation agricole de trente mille hectares avec plus de bêtes à cornes que de véhicules sur la chaussée du centre de Mexico à midi. Il savait faire pleuvoir l’or avec munificence sur ses obligés. En revanche, il aurait fait arracher avec bonhomie les testicules de qui se serait risqué à lui dérober ne fût-ce que vingt centavos.
El Señor Procurador consulta le chronographe Piaget en platine qui ornait son poignet. En tant que magistrat, il tenait pour l’exactitude et pour l’exactitude, la Suisse constitue une sorte de référence absolue. Quelques reliquats de l’héritage paternel lui permettaient de s’offrir une montre qui valait au moins cinq ans de son traitement. Elle indiquait dix-neuf heures trois minutes et trente deux secondes sept dixièmes et quatre centièmes. On est suisse ou on ne l’est pas. En tout état de cause une heure décente pour prendre un verre. Normalement, à cette heure, il le prenait à son club en fumant un panatela, mais ce soir il attendait un visiteur exceptionnel. Il tira du secrétaire en marqueterie d’acajou baroque un carafon de pur malt écossais de trente ans d’âge. En dépit de son patriotisme intransigeant – le Mexicain est volontiers cocardier – Don Esteban avait le palais international, et son système digestif délicat avait du mal à fraterniser avec la virile rudesse de la tequila et du mezcal qui faisaient pourtant la fierté de la Nacion. Son visiteur, grand amateur de vénérables eaux-de-vie, lui saurait gré de cette attention.
Pour résoudre l’énigme Moralès, Don Esteban avait choisi de prendre les choses au rebours. Au lieu de partir de la scène du crime et construire l’enquête à partir de celle-ci, comme on procède toujours, il avait décidé de remonter dans le passé et se concentrer sur Moralès, sa vie, son œuvre, sa légende. Car d’une certaine manière, il était déjà légendaire dans les ruelles mal famées, dans les bars à putes et les salles de jeux clandestines de Mexico, voire de tout le pays. Saint Pablo « Cojones » patron des mauvais garçons et des filles perdues mais pas pour tout le monde. La solution du mystère gisait quelque part dans son ascension, son apogée, sa retraite dorée. Sa fin brutale, et tout à fait dans l’esprit de sa vie aventureuse, n’était que le point final de la saga. Il fallait chercher la clé de l’énigme dans la brume de son passé. Tout un tas de respectables et moins respectables citoyens avaient eu intérêt et envie de zigouiller le vieux. Mais un seul l’avait fait. Un seul. Les autres avaient trop peur de lui. Et plus il les payait, plus ils lui étaient enchaînés. Pourtant l’un d’entre eux avait eu la froide détermination de mijoter son plan le temps qu’il fallait, endormir les soupçons du vieux, plus méfiant qu’un scorpion de Durango, et lui fourrer le cyanure dans le gosier sans qu’on puisse savoir comment. Toute considération morale et pénale mise à part, bravo l’artiste. Du grand art dans le domaine de la trahison. On était en pleine tragédie, et le Mexicain raffole de l’antique. Souvenons-nous du vieux lion Trotsky pioletisé dans le dos par son secrétaire particulier Ramon Mercader ou plus loin dans le passé du président Madero, exécuté par son cher compagnon d’armes, le judas Huerta.
Dès lors qu’on nageait en pleine tragédie, il lui fallait un spécialiste pour se maintenir à flot. Un homme dont le regard toujours neuf et jamais conventionnel lui ferait miroiter la paillette d’or qu’il n’aurait pas vue dans le tas de scories. Un homme dont la profonde connaissance de l’Homme lui révélerait la faille dans un témoignage en apparence irréprochable. Un homme enfin, dont l’œuvre était tellement nourrie de ce mélange de démesure et de dérision qui caractérisait aussi bien le cas Moralès que tout le Mexique, voire l’Amérique Latine, qu’il se sentirait aussi familier avec les protagonistes de l’affaire qu’avec les personnages de ses propres fictions. Un homme, enfin, que le père d’Esteban avait soigné et protégé de son influence alors qu’il fuyait le tyran de son pays et avait demandé l’asile politique. Le Mexique mitraillait un peu ses contestataires mais accueillait volontiers ceux des autres. Depuis ils étaient amis et il se réjouissait de l’échange intellectuel qui allait suivre. Il renifla le breuvage, n’y trouva nulle trace d’amande amère et peaufina le poli des verres de sa pochette de soie. On n’est jamais trop soigneux.
- Salut, Señor Procurador Federal
- Salut, amigo, assied-toi et prend un verre, nous allons parler boutique. Haines recuites et amours contrariées, veuves noires et héritiers griffus, roides militaires et cauteleux fonctionnaires, sans oublier le parfum de l’amande amère. Bref on est dans ton jardin.
- T’as toujours pas pu le lire ? Me mens pas je le vois par terre, tu l’as encore laissé tomber à la première page.
- Oui amigo. Mais j’ai lu tous tes autres.
- Je t’en donne acte. Sers-moi un autre scotch…Alors comme ça t’as besoin d’un petit coup de pouce gratos pour te sortir la tête du marigot, et tu t’es dit que ce vieux caïman de Gabo nageait comme il fallait dans ces eaux troubles-là, n’est-ce pas ? Tu manques pas d’air !
- C’était inévitable, Gabo. C’est la vie.
GOBU
PS : L’auteur précise, dans le souci du confort intellectuel du lecteur(trice) que Gabriel Garcia Marquez a réellement séjourné au Mexique entre 1966 et le début des années 90, et qu’il a bien pris une certaine part à la vie publique locale, en particulier dans la critique de la corruption et la défense des minorités. Quant au reste, pure fiction. Bref, c’est la vie.
Gobu- Nombre de messages : 2400
Age : 70
Date d'inscription : 18/06/2007
Re: Exo « Écrire suivant un incipit » : Inévitable c'était
Bravo Gobu. On croirait lire du Garcia Marquez. Très bon texte "à la manière de", je prends pour exemple la phrase suivante :
Devant son visage serpentait un éventail de dentelle noire. La chair opulente de ses bras dénudés frémissait au mouvement du poignet auquel se balançait un bracelet d’émeraudes. tout à fait dans son style, mais il faudrait tout citer. Bravo, vraiment.
Devant son visage serpentait un éventail de dentelle noire. La chair opulente de ses bras dénudés frémissait au mouvement du poignet auquel se balançait un bracelet d’émeraudes. tout à fait dans son style, mais il faudrait tout citer. Bravo, vraiment.
Invité- Invité
Re: Exo « Écrire suivant un incipit » : Inévitable c'était
Ah bravo quelle truculence dans la narracion
Quel style quel brio et quelle inspiracion !
Juste une phrase mal foutue je pense que c'est une coquille :
"En tant que magistrat, il tenait pour l’exactitude et pour l’exactitude, la Suisse constitue une sorte de référence absolue."
Quel style quel brio et quelle inspiracion !
Juste une phrase mal foutue je pense que c'est une coquille :
"En tant que magistrat, il tenait pour l’exactitude et pour l’exactitude, la Suisse constitue une sorte de référence absolue."
Rebecca- Nombre de messages : 12502
Age : 65
Date d'inscription : 30/08/2009
Re: Exo « Écrire suivant un incipit » : Inévitable c'était
Une nouvelle menée de main de maître qui fait toute mon admiration.
Invité- Invité
Re: Exo « Écrire suivant un incipit » : Inévitable c'était
Iris a écrit:...qui fait toute mon admiration.
...admiracion, por favor.
Muchas gracias.
Gobu- Nombre de messages : 2400
Age : 70
Date d'inscription : 18/06/2007
Re: Exo « Écrire suivant un incipit » : Inévitable c'était
Si, admiracion, disculpame. (?)Gobu a écrit:Iris a écrit:...qui fait toute mon admiration.
...admiracion, por favor.
Muchas gracias.
Invité- Invité
Re: Exo « Écrire suivant un incipit » : Inévitable c'était
Señor Gobu me encanta mucho su historia. Hay que macho fue este Pablo Morales, tenia los cojones como melones !
Jean Lê- Nombre de messages : 591
Age : 65
Localisation : Bretagne
Date d'inscription : 22/11/2010
Re: Exo « Écrire suivant un incipit » : Inévitable c'était
Jean Lê a écrit:Señor Gobu me encanta mucho su historia. Hay que macho fue este Pablo Morales, tenia los cojones como melones !
Como sandias, amigo, como sandias !
Gobu- Nombre de messages : 2400
Age : 70
Date d'inscription : 18/06/2007
Re: Exo « Écrire suivant un incipit » : Inévitable c'était
Ha dis donc, que dire Gobu, si ce n'est BRAVO !
La qualité du texte, le soin apporté à l'écriture, l'idée, son traitement, bref tout me paraît bien (pas super comme commentaire, je sais, désolée :-)
Dans ce qui me plaît particulièrement, c'est ce début, vif, emporté, caustique, presque léger, qui débouche progressivement sur un récit humain plus lourd, puissant, avec des tableaux dépeints qu'on voit prendre vie sous nos yeux. Et puis cette manière "d'écrire vivant" qui te caractérise, je ne sais trop comment expliquer ce sentiment, cette impression que les mots prennent littéralement vie.
Vraiment de l'excellent boulot, je me suis régalée. Merci !
La qualité du texte, le soin apporté à l'écriture, l'idée, son traitement, bref tout me paraît bien (pas super comme commentaire, je sais, désolée :-)
Dans ce qui me plaît particulièrement, c'est ce début, vif, emporté, caustique, presque léger, qui débouche progressivement sur un récit humain plus lourd, puissant, avec des tableaux dépeints qu'on voit prendre vie sous nos yeux. Et puis cette manière "d'écrire vivant" qui te caractérise, je ne sais trop comment expliquer ce sentiment, cette impression que les mots prennent littéralement vie.
Vraiment de l'excellent boulot, je me suis régalée. Merci !
Sahkti- Nombre de messages : 31659
Age : 50
Localisation : Suisse et Belgique
Date d'inscription : 12/12/2005
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