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Un style clair pour se rincer l'œil

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Message  Raoulraoul Mar 17 Déc 2013 - 11:31

Un style clair pour se rincer l’œil

    Il y a une ivresse fantastique à rentrer dans une ville déserte. Celle-ci n’est pas très grande mais je devrais y trouver ce que je cherche
    Dans les rues il n’y a personne. Cela me convient. Dans les autres villes je n’y avais rencontré que des populations agitées, énervées, avec les tracas désagréables qui en découlent. Ici, rien de cela. Les rues sont propres. Les jardinets ne sont pas clôturés, ils sont soigneusement entretenus.
    Ce qui me ravit le plus ce sont des détails charmants. Comme ces rideaux suspendus aux fenêtres des maisons. Adorables dentelles incrustées de biches, de bateaux, de moulins à vent ou de fleurs aux arborescences gracieuses. Toutes ces guipures désuètes décorent les fenêtres. Le plus merveilleux c’est qu’elles semblent frémir à mon passage. Elles ont comme un souffle d’aise vivant à me voir marcher, solitaire, dans la ville. Elles m’accompagnement et saluent mon arrivée ! Aux fenêtres, c’est une valse de dentelles dont la cadence menue, presqu’imperceptible, rythme mes pas. Leur doux balancement m’émeut. Mais une autre découverte me surprend.
    Dans le vide des dentelles, je distingue des yeux qui me suivent. Derrière les guipures immaculées, des visages s’agitent et se pressent contre les carreaux. Si je les regardent ostensiblement ils se dérobent aussitôt dans l’intérieur noir des maisons. Alors je reste courtois. Je ne les regarde pas en train de me regarder tous ces visages aux yeux fouineurs. Je m’abandonne à eux qui se repaissent de moi. Ils me dévorent et cela me comble. J’existe tout d’un coup dans cette ville vide et silencieuse.  
    Ces visages qui font valser les guipures sont grisâtres avec leurs cheveux de neige, des cheveux qui dévalent sur des épaules ratatinées, ou d’autres relevés en chignons comme une  pâtisserie branlante au sommet du crâne. Des têtes de vieilles. Des vieilles femmes au teint blafard, aux chairs fissurées, le nez tombant, les lèvres rentrées. D’autres vieilles, plus rondelettes, enfarinées de poudre, ont une bouche saliveuse et gourmande. Leurs doigts griffus s’accrochent aux rideaux. Je ne me contiens plus. Toutes cette colonie de vieilles qui m’épie. Je suis l’objet de leur avidité. Je ralentis ma marche. Je bouleverse ainsi la ville endormie. On n’a d’yeux que pour moi, mais personne ne veut le montrer. Les vieilles s’affolent derrière leurs fenêtres, elles s’écartent dès que je les surprends. Quelle folie ! Quel jeu ! Ces momies qui jubilent en cachette à l’arrivée d’un étranger dans la ville. J’ai connu tant de villes où la foule était plus redoutable qu’un désert. Dans cette ville fantôme, aujourd’hui, je me consume de joie sous les pupilles fureteuses des rombières qui me matent goulument derrière leurs rideaux.
    Je n’ai rien de remarquable. Je cherche un emploi. On m’a dit qu’ici il y en aurait. La population est vieillissante, alors les jeunes bras vigoureux sont les bienvenus. Je cherche le bureau de recrutement, mais les rues sont vides et personne pour me renseigner.
    Je me hasarde à rentrer dans un jardinet. Je frappe à une porte. Le rideau est retombé mais la porte ne s’ouvre pas. J’imagine bien qu’on fait le mort dans la maison, quand un inconnu vient secouer le heurtoir sous le porche. Alors je quitte le jardinet, referme dernière moi doucement la barrière de bois, et je reprends ma course solitaire dans les rues de la ville.
    Qui suis-je ? Celui que tous les regards voudront que je sois. Le regard de la vieillesse sur moi. Ces vieilles femmes au désir éteint. Je rêve de leur ancien temps. Que d’expérience engrangée dans leurs mains ! Que de fatigue et de place pour la douceur à présent elles doivent contenir ! Que de réconfort enviable dans la niche molle et blême de leur corps ! Quelle tendresse inépuisable dans leurs yeux, leur voix, leurs gestes pour un chômeur perdu dans la rue ! Et pour finir, quelle sagesse elles ont les vieilles pour vivre si longtemps, avoir traversées les guerres, les famines, la maladie, quelle secret elles pourraient m’apprendre, moi qui suis emporté au premier coup de vent de la crise !
    Saoulé de rêveries je m’assieds sur un banc. Et là, je sais que je vais satisfaire l’appétit d’un peloton de femmes derrière leurs dentelles de rideaux. Là, une ronde, là une anguleuse, là une sinueuse et féline, là une géante, là une dominatrice, là-bas une pleureuse. Pour ne pas gêner leur gai voyeurisme je ferme les yeux sur mon banc, acceptant les visions qu’elles auront de moi. Et aussi, les miennes que je me ferai d’elles, dans un fatras de jambes, de bouches, de bras, de fesses et de girons. Une avalanche soyeuse de chemises de nuit sur moi déboule. La ronde m’enveloppe, l’anguleuse me coince, la sinueuse m’enlace, la géante m’étouffe, la dominatrice me sermonne, la pleureuse m’attendrit. C’est rocambolesque tous les égards qu’une vieille femme manifeste pour l’enfant en vous ! Son épiderme laiteuse, ses cheveux chenus, sa chemise, ses dentelles, ses dessous, son linge, voiles, blancs rideaux de mousseline, cette blancheur  prénatale, odorante, parfumée qui ondule, célébrant ouvertement la vie, la naissance, aux portes immédiates de la mort !
    Combien de temps je suis resté ainsi sur mon banc, combien de minutes hors du temps durant lesquelles mes rombières de rêve se sont délectées de moi, derrière leur rideau à mouche à rabier ?  
    La nuit tombe et les persiennes des maisons se ferment. Les volets coulissants et rideaux métalliques remplacent la  valse des dentelles. Brutal changement pour l’étranger dans la rue. Un silence glacé s’abat sur la ville. Mais dans ce silence, sortant d’une impasse, un roulement léger s’approche de moi. Une fillette en trottinette surgit, elle stoppe net. Elle me demande, sans embarras :
    – Bonsoir monsieur. Je t’ai observé. Tu es tout seul et il fait nuit. Si tu veux je peux te trouver un coin tranquille dans la maison de ma grand-mère.
    – Je ne veux pas te déranger, petite.
    – Tu ne me déranges pas. Seulement il faudra que personne te voit chez ma mémé.
    Avant que je réagisse, la fillette me saisit la main et me voici la suivant, tirant derrière moi ma valise à roulettes. Nous arrivons dans une modeste villa du quartier. Il fait totalement nuit. Par une échelle, que je gravis à grand peine, la fillette m’introduit dans son grenier. Elle me chuchote :
    « Là, c’est ici ma cabane. Je te prête ma poupée. Je viens ici souvent me réfugier quand mémé me gronde. Mais ce soir je serai gentille. Je t’apporterai une tranche de gâteau. Surtout ne fais pas de bruit ! ».
    Puis elle se sauve. Je me vois cerné par une muraille de couvertures tendues formant les cloisons de la cabane, sous les combles. Je m’allonge sur le matelas par terre. Je n’entends plus que les craquements de la charpente et le sifflement de ma respiration asthmatique. Je suis sur le point de m’endormir quand des intonations de voix me réveillent.  Des voix aigrelettes, d’autres chevrotantes, glapissantes, mais toutes participant à une conversation tumultueuse dont je capte les bribes :
    « Je te le répète, c’est un étranger… t’as vu son teint typé… il vient repérer s’il y a des maisons à cambrioler… son regard est bizarre… je suis certaine qu’il est armé… c’est un voyageur peut-être… mais non, dans sa valise il a des outils pour fracturer les coffres forts… c’est certainement un obsédé, un malade mental, un violeur… il est contagieux avec toutes ces maladies nouvelles… j’aimerai pas le croiser toute seule dans la rue… on devrait peut-être prévenir le commissariat… de toute façon il n’est pas d’ici, ça se voit tout de suite… »  
    Par les lattes du plancher les commentaires de l’assemblée fusent en vrac et m’abasourdissent. Je ne perds rien du brillant portrait que les vieilles ont retenu de moi à l’abri de leurs guipures. Je tombe de haut, certes d’un grenier ! Me voilà pris au piège des succubes et des Gorgones les plus effrayantes de la ville. De vieilles diablesses qui m’attendent avec leurs tridents pour m’empaler. Désespéré, je m’écroule sous les couvertures de la cabane. La poupée de la fillette me fixe de ses yeux charmeurs et candides. Je l’étranglerais de rage si je ne craignais de décevoir la petite fille.
    Après ce charivari d’insultes au verdict sans appel, les vieilles cancanières se séparent, chacune regagnant son logis. La fillette et sa grand-mère partent se coucher dans leur chambre.
    Ce n’est que tôt le matin qu’un chuchotement me tire de ma léthargie. C’est la fillette, m’amenant une dégoulinante part de gâteau aux pommes. Elle m’invite à fuir de la maison sans tarder. Nous descendons dans la salle à manger pour sortir devant par le jardin. Sa grand-mère n’est pas levé. Elle ronfle toujours très fort jusque tard dans la matinée, me souffle l’enfant. Mais débarquant avec ma valise dans la salle à manger, je découvre avec stupeur, une ombre tapie au coin de la cheminée.
    – Qui est-ce ? je demande.
    – C’est mon pépé. Ne crains rien. Il ne parle jamais à grand-mère.
Le vieil homme, lentement, un tisonnier à la main, remue les braises encore chaudes dans la cheminée. Je le salue poliment. Mais le vieillard m’arrête et d’une voix tremblotante il m’explique avec douceur :
    « Elles sont terribles… Je voudrais mourir mais la Faucheuse ne veut pas de moi. Alors je suis relégué au feu. Je n’ai jamais mon mot à dire. Combien de temps ça va durer ?... Sauvez-vous vite, monsieur, avant qu’elles vous attrapent. Je ne vous souhaite pas de vivre jusqu’à mon âge, Allez, partez… »
Il se recroqueville sur la chaise, brandissant son tisonnier plein d’étincelles dans le noir.
    Je quitte la maison. Dans la rue l’air vif de l’aube me cingle le nez. Je ne parviens pas à lâcher la main de la fillette qui m’accompagne sur le trottoir. Les volets des fenêtres ne sont pas encore ouverts. Aucun regard pour me juger. Je me demande qui je suis ? Un assassin, un demandeur d’emploi ? Un obsédé, un violeur de vieilles dames ou d’enfants ? Tout cela à la fois. Tout paraît tellement possible… Qui sommes-nous sans le regard des autres ?
    La fillette m’accorde un bisou mouillé sur la joue et elle me tend sa poupée, avant de courir rejoindre la maison de sa grand-mère.
    Je suis seul dans la rue, trainant d’une main ma valise à roulettes et dans l’autre balançant une poupée échevelée, aux prunelles de candeur.
Les premiers volets s’ouvrent. Les rideaux de dentelles commencent à s’agiter.    
    Oui, cette fois, je ressemble à un fou, auquel on ne donne pas de boulot, dans des villes de plus en plus hostiles et désertes.


**
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Message  Kash Prex Mar 17 Déc 2013 - 12:37

Les descriptions du début de texte sont un peu longues au début, mais j'ai apprécié la suite. Ça m'a remis un peu dans l'atmosphère de mes propres vadrouilles, ça m'a fait sourire.
J'ai été un peu troublé par les termes de "ville fantôme" et "ville déserte", qui au début, dans la scène des regards espions, m'a fait croire à une grosse paranoïa du personnage qui aurait inventé toutes ces vieilles femmes. Mais non, elles existent bien et sont décrites de manière à ce qu'on les visualise très bien, d'une réalité palpable.
J'aime l'imagine finale du type qui repart avec sa valise et sa poupée pendante.
Sur la forme, quelques fautes d'orthographe à corriger dans le début du texte.
Une lecture sympa =)
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Message  seyne Mar 17 Déc 2013 - 18:00

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Message  Louis Ven 20 Déc 2013 - 18:02

Les rues de la ville sont désertes, mais la cité n'est pourtant pas inhabitée. Toute une population y réside, une population de femmes âgées. Elles ont un regard pour l'homme qui vient d'arriver, un regard braqué sur cet inconnu. Dissimulés derrière des rideaux de dentelle, des visages observent le nouvel arrivant, des visages qui veulent voir sans être vus, « Si je les regarde ostensiblement ils se dérobent aussitôt dans l’intérieur noir des maisons. » Toute la ville est un immense regard ; partout des yeux « fouineurs »  tentent de se dérober à une vue en retour ; sans yeux, sans visage, sans corps, juste un regard. Regard sans présence. Sans réciprocité. Regard d'un invisible.
Les femmes de la ville ne cherchent pas à exister pour l'homme, mais donnent une existence au nouveau venu, «  J’existe tout d’un coup dans cette ville vide et silencieuse ». Exister, c'est d'abord vivre dans le regard des autres, c'est trouver dans ce regard un miroir qui confirme et certifie sa propre existence, réponse au besoin de se trouver soi hors de soi. N'exister qu'à ses propres yeux, c'est ne pas exister, c'est n'être rien, pure transparence. Les yeux de la ville sans présence suffisent à attester à l'homme sa propre présence.

Les visages entrevus des femmes âgées évoquent l'hiver de la vie, teintes grises, teintes de neige, « Ces visages qui font valser les guipures sont grisâtres avec leurs cheveux de neige ». Derrière les fenêtres, des visages survivent à la vie ; des êtres anémiés, étiolés, « des vieilles femmes au teint blafard, aux chairs fissurées, le nez tombant, les lèvres rentrées. », des êtres ravagés par le temps, comme issus des tableaux de Goya, véritables morts vivants, surveillent l'homme dans la rue. Vampires, succubes, ils absorberaient avidement son sang, sa jeunesse, sa virilité, « d’autres vieilles, plus rondelettes, enfarinées de poudre, ont une bouche saliveuse et gourmande. Leurs doigts griffus s’accrochent aux rideaux. ( … ) Je suis l’objet de leur avidité. »

Les vieilles femmes de la ville cherchent à prendre la vie qui passe sous leurs fenêtres, et ne donnent rien, ne se donnent pas même à la vue, quand l'homme dans la rue, lui, voudrait recevoir d'elles, au moins un emploi, lui, jeune chômeur, mais aussi un peu de leur expérience de la vie, « Que d’expérience engrangée dans leurs mains ! » ; et aussi de leur tendresse, « Que de fatigue et de place pour la douceur à présent elles doivent contenir !  ( …) Quelle tendresse inépuisable dans leurs yeux, leur voix, leurs gestes pour un chômeur perdu dans la rue ! » ; et puis de leur sagesse, « quelle sagesse elles ont les vieilles pour vivre si longtemps, avoir traversées les guerres, les famines, la maladie » ; enfin une part des secrets de leur force de vie et puissance d'exister, « quels secrets elles pourraient m’apprendre, moi qui suis emporté au premier coup de vent de la crise ! ». Mais rien, elles ne donnent rien.

Le jeune homme se donne, lui,  à l'appétit de leur regard, généreusement, mais sans rien recevoir, sinon ce sentiment, malgré elles, d'exister : « Je m’abandonne à eux qui se repaissent de moi. » Les femmes âgées, conscientes de leur faiblesse, ont peur. Elles mordent la vie qui passe, mais à l'abri, derrière leurs murs, derrière leurs fenêtres, dont les « charmantes » dentelles masquent leurs dents cruelles.

Le jeune homme trouve une jouissance dans une rêverie où il s'enivre des visions multiples et diverses qui démultiplient son existence, et dans un échange par lequel son regard imaginatif donne aux femmes fantômes, des lingeries et des corps maternels, « cette blancheur  prénatale, odorante, parfumée qui ondule, célébrant ouvertement la vie, la naissance, aux portes immédiates de la mort ! »

Mais dans la réalité de leur regard, il n'est qu'un étranger, un violeur, un voleur, un danger potentiel.

La seule femme humaine et bienveillante, la seule à posséder la vertu d'hospitalité, est une fillette, c'est une enfant. L'ouverture aux autres, la rencontre avec autrui ne se trouvent plus que dans l'innocence des enfants. Les femmes vieillies ont succombé à la peur, à l'hostilité, et à tous les pires préjugés ; elles se sont refermées sur elles-mêmes, derrière les murs de leur maison, de leur épiderme, de leurs préjugés.
La solitude de la jeune fille dans la vieillesse ambiante n'a trouvé pour toute compagnie qu'une poupée, qu'elle offre à l'homme solitaire. Elle lui fait don d'une présence féminine, mais muette et compréhensive ; elle lui fait don d'une « poupée échevelée, aux prunelles de candeur », elle lui fait don d'un regard différent, d'un autre regard, d'un regard candide.

Les hommes sont absents de la ville. La ville est au féminin. La seule présence masculine est celle d'un vieil homme, qui n'a plus le droit à la parole, « je n’ai jamais mon mot à dire » ; dénué de pouvoir, «  relégué au feu », au seul entretien du foyer, Lare misérable, déchu.

Ce texte vaut pour sa dimension à la fois philosophique, psychologique et sociale.
Il nous donne, en particulier, d'un point de vue social, l'image d'un monde vieilli, le nôtre, dominé par la peur, de ce qui est nouveau, inconnu, étranger ; dominé par « le sentiment d'insécurité » ; monde en lequel chacun se referme sur soi, ne s'ouvre plus à autrui, se comporte comme de vieilles femmes apeurées. Un monde social qui se repaît de l'image de la jeunesse, mais se méfie d'elle, et n'offre aux nouvelles générations qu'un désert devant elles, une situation misérable, pas d'emploi, pas de transmission d'une expérience et d'une sagesse ; un monde qui renferme chacun dans sa solitude.  

P.S. : « mouche à rabier » ? Est-ce un jeu de mots ? L'orthographe exacte est « Moucharabieh »

Louis

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Message  Invité Sam 21 Déc 2013 - 12:04

Des villes mortes (j'ai le souvenir de villes comme ça), des gens qui se cachent, le chômage, le mystère des fenêtres comme des forêts (ça, ça me plait vraiment) ; ce sont des thèmes récurrents dans tes écrits. Le début est un peu long comme souvent, sans doute pour bien s'accrocher, s'arrimer au sujet. Pas vu de petit chaperon rouge, juste la jeunesse comme notre seule porte de sortie, comme un espoir à un vieux monde, une société qui s’éteint, qui est en train de disparaitre. Pourquoi cette ville exclusivement féminine et presque morte ? J'ai aimé que ce jeune homme s'offre aux regards, comme on porte un défit.

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Message  Raoulraoul Sam 28 Déc 2013 - 15:58

Kash Prex : tu as raison pour les fautes d'orthographe. merci
Seyne : les grands-mères sont comme des loups pour l'étranger, la petite fille vit avec une méchante bête qui se dissimule derrière le masque d'une mémé. Je suis d'accord avec ton illustration.
Vertigo : tu viens de me faire prendre conscience de cette récurrence. C'est formidable comment des lecteurs assidus et subtils comme toi peuvent nous éclairer, l'auteur étant souvent aveuglé par sa subjectivité. Merci vraiment.
Louis : j'ai apprécié particulièrement ton paragraphe de conclusion, liant le philo-psycho-socio. En écrivant je me suis laissé guider par des images, des sensations, des atmosphères et probablement aussi les préoccupations de l'air du temps... Ton microscope analytique a synthétisé le tout avec justesse. Je ne suis pas satisfait de mon titre, je reconnais qu'il est racoleur. J'ai voulu seulement indiquer que ce texte était de style plus classique, linéaire, contrairement à mes textes précédents. J'aurais préféré un titre évoquant davantage le rapport entre l'imaginaire heureux de l'œil et la réalité castratrice de la parole... (Concernant "moucharabieh" ta correction est juste, mon orthographe est mauvaise et sans jeu de mot). Merci pour ton beau et utile texte Louis.
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Message  seyne Sam 28 Déc 2013 - 18:28

Le conte du Petit Chaperon Rouge peut s'interpréter de multiples façons, et renvoie en particulier à l'ambiguïté de l'archétype de la vieille femme, Mémé Gâteau ou méchante sorcière cannibale. Dans le conte, le contenu du panier qu'apporte la fillette peut se comprendre comme une offrande destinée à détourner de l'enfant cette avidité redoutable, ces "grandes dents". Bien entendu de nombreux commentateurs ont fait remarquer les liens avec l'autre avidité, celle de la séduction sexuelle, incarnée par le loup tentateur. D'une certaine façon, mère-grand et loup ne font qu'un.
Dans ton récit, il y a un glissement très intéressant puisque c'est un homme jeune qui se sent objet d'une avidité scopique, qu'il perçoit d'abord comme admirative et bienveillante, puis peu à peu comme meurtrière. On sent qu'il y a beaucoup de projections sexualisées dans les fantasmes persécutifs de la fin...
C'est la petite fille pré pubère, encore éloignée de ces pulsions, sorte de figure inversée des vieilles femmes, qui le sauve (là aussi on pense à une image en miroir de la figure du chasseur ou du bûcheron, qui dans le conte sauve la fillette et la grand-mère, avec sa hache ou son grand fusil.)
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