matin
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matin
quand le serpent se dresse devant la vitre
entre par la fenêtre
l’intérieur de la chambre change - dans le début de l’aube.
le lit est vertical
le vernis à ongles se répand sur le sol
alors les murs brunissent comme une
grotte
tout est enfermé dans l’immobilité
du lieu qu’on connaît
réverbérations de l’air
contre les murs.
plus tard
on est assis sur le lit qui a repris sa place
la fenêtre est vide
les murs s’éveillent
on est bien seul.
entre par la fenêtre
l’intérieur de la chambre change - dans le début de l’aube.
le lit est vertical
le vernis à ongles se répand sur le sol
alors les murs brunissent comme une
grotte
tout est enfermé dans l’immobilité
du lieu qu’on connaît
réverbérations de l’air
contre les murs.
plus tard
on est assis sur le lit qui a repris sa place
la fenêtre est vide
les murs s’éveillent
on est bien seul.
Re: matin
Etrange...on dirait un tableau de Hopper : une femme assise sur un lit qui songe...les yeux dans le vague /vide/ résigné
obi- Nombre de messages : 575
Date d'inscription : 24/02/2013
Re: matin
le serpent vraiment? n'est-ce pas plutôt une image pour figurer la surprise, l'incompréhension qui surgit au réveil?
je me suis souvent demandé si le nouveau-né juste issu du corps de la mère ne ressent pas quelque chose de semblable?
je me suis souvent demandé si le nouveau-né juste issu du corps de la mère ne ressent pas quelque chose de semblable?
danie- Nombre de messages : 149
Age : 74
Date d'inscription : 10/02/2020
Re: matin
Le point de départ est un tableau dont je ne retrouve pas l'auteur, assez énigmatique, à la limite de l'abstraction.
Magie, folie, état de confusion, mais aussi cet état amer qui vous envahit parfois au réveil, j'ai vu tout cela apparaître derrière l'image.
Magie, folie, état de confusion, mais aussi cet état amer qui vous envahit parfois au réveil, j'ai vu tout cela apparaître derrière l'image.
Re: matin
ah le matin
seul devant son miroir
quand on se dit que
demain sera destin
seul devant son miroir
quand on se dit que
demain sera destin
So-Back- Nombre de messages : 3658
Age : 101
Date d'inscription : 04/04/2014
Re: matin
Ce "quand" m'attrape au lasso et serre le cou au poème. (J'ai tenté de l'oublier, en vain)
J'en retiens une amertume abstraite, comme celle d'une boisson inconnue. Effectivement, ce malaise de dédoublement du matin, au moment où on réintègre de justesse son corps de chair et d'os, après avoir navigué dans l'eau "de là"
J'en retiens une amertume abstraite, comme celle d'une boisson inconnue. Effectivement, ce malaise de dédoublement du matin, au moment où on réintègre de justesse son corps de chair et d'os, après avoir navigué dans l'eau "de là"
Polixène- Nombre de messages : 3298
Age : 62
Localisation : Dans un pli du temps . (sohaz@mailo.com)
Date d'inscription : 23/02/2010
Re: matin
Un très beau poème sur ce sentiment si particulier qui succède à la grande danse des choses et des souvenirs. On se confond un instant dans l'évocation et on se sent bien seul, en effet, au moment où le vide tout autour dit à tout le monde de se taire.
Jand- Nombre de messages : 306
Age : 27
Date d'inscription : 05/04/2016
Re: matin
Impression partagée.
Ba- Nombre de messages : 4855
Age : 71
Localisation : Promenade bleue, blanc, rouge
Date d'inscription : 08/02/2009
Re: matin
merci à vous tous.
Juste un mot à propos de ce "quand" abrupt qui débute le poème... j'ai essayé de l'enlever, mais je crois qu'il a une fonction importante : il marque la soudaineté, l'instant précis et presque électrique du changement d'état de conscience. Ce moment où on sent qu'il n'est plus possible de retourner dans le sommeil.
Juste un mot à propos de ce "quand" abrupt qui débute le poème... j'ai essayé de l'enlever, mais je crois qu'il a une fonction importante : il marque la soudaineté, l'instant précis et presque électrique du changement d'état de conscience. Ce moment où on sent qu'il n'est plus possible de retourner dans le sommeil.
Re: matin
L'usage exclusif du pronom personnel "on" sur l'ensemble du poème (vers 9, 13, 16) laisse entendre que l'expérience relatée ici peut être vécue par l'ensemble du lectorat. Les marqueurs temporels (vers 1 : "quand", vers 3 : "dans le début de l'aube", vers 6 : "alors", vers 12 : "plus tard") en circonscrivent les étapes. Le serpent figure l'image de la transformation, ce que confirme le vers 3. Le surgissement vertical - donc spectaculaire - du reptile fait basculer la perception du lieu intime ("l'intérieur de la chambre change"). Le monde extérieur va imposer une traversée des apparences (vers 1/2 : "se dresse devant la vitre/entre par la fenêtre"). Le moment évoqué ("dans le début de l'aube") s'inscrit dans la tranche du sommeil paradoxal, là où logent les rêves dont nous nous souvenons. Voilà le lecteur propulsé dans une histoire à dormir debout, au sens propre du terme (vers 4 : "le lit est vertical"). Les repères familiers sont faussés, brouillés, bouleversés. Plus de place pour les artifices, ces masques derrière lesquels nous cachons notre véritable nature (vers 5 : "le vernis à ongles se répand sur le sol"). Le songe de fin de nuit se présente ainsi comme le révélateur d'une vérité cachée. Difficile d'éviter la case Platon - le mythe de la caverne - aux vers 6 et 7 (comparaison : "les murs brunissent comme une/grotte"). Tournons-nous le dos à la lumière ? Ne sommes-nous pas prisonniers, reclus dans un espace resserré (vers 8/9 : "tout est enfermé dans l’immobilité/du lieu que l'on connaît", vers 10/11 : "réverbérations de l’air/contre les murs"), captifs d'une illusion, englués dans un temps qui ne nous correspond pas, bien différent de celui auquel nous aspirons au plus profond de notre être ? La dernière strophe matérialise le retour à la pleine conscience des choses qui nous entoure (personnification du vers 15 : "les murs s'éveillent"), à la banalité d'un quotidien (vers 13 : "le lit a repris sa place", vers 14 : "la fenêtre est vide") qui nous laisse un goût de cendre, l'indicible sensation d'un manque fondamental (marqueur d'intensité du vers 16 : "on est bien seul").
Merci pour ce partage !
Merci pour ce partage !
jfmoods- Nombre de messages : 692
Age : 59
Localisation : jfmoods@yahoo.fr
Date d'inscription : 16/07/2013
Re: matin
Merci pour ton commentaire.
Ce qui me touche profondément c'est la façon dont une certaine rigueur, et même une "technicité" d'analyse, dont tu es l'héritier, montre sa pertinence et sa capacité à soutenir l'intuition, l'émotion.
C'est comme ce poème : l'image pensée puis créée par un peintre inconnu vient à la rencontre de vécus personnels, familiers, et cela déclenche une autre vision imaginaire, un petit bouleversement des sens, du sens.
Je veux dire : tout est allié, alliage et métamorphose.
Ce qui me touche profondément c'est la façon dont une certaine rigueur, et même une "technicité" d'analyse, dont tu es l'héritier, montre sa pertinence et sa capacité à soutenir l'intuition, l'émotion.
C'est comme ce poème : l'image pensée puis créée par un peintre inconnu vient à la rencontre de vécus personnels, familiers, et cela déclenche une autre vision imaginaire, un petit bouleversement des sens, du sens.
Je veux dire : tout est allié, alliage et métamorphose.
matin
Bonjour Seyne,
Curieux poème construit sur "quand.../ .../alors.../...//plus tard...". En fait en deux temps :
- le temps du réveil
- le temps de l'après réveil
Le premier est onirique, effrayant pour le lecteur mais pas pour l'acteur du poème.
Le deuxième est conscient mais terriblement morne pour tout le monde.
On pourrait s'interroger sur la signification du serpent, du lit vertical, du vernis à ongles renversé, de la grotte, de l'enfermement immobile. C'est Freudien et Kafkaïen.
Tout pour échapper à la solitude désespérée du "plus tard" !
On a la gorge serrée.
Curieux poème construit sur "quand.../ .../alors.../...//plus tard...". En fait en deux temps :
- le temps du réveil
- le temps de l'après réveil
Le premier est onirique, effrayant pour le lecteur mais pas pour l'acteur du poème.
Le deuxième est conscient mais terriblement morne pour tout le monde.
On pourrait s'interroger sur la signification du serpent, du lit vertical, du vernis à ongles renversé, de la grotte, de l'enfermement immobile. C'est Freudien et Kafkaïen.
Tout pour échapper à la solitude désespérée du "plus tard" !
On a la gorge serrée.
thyl- Nombre de messages : 2
Age : 80
Date d'inscription : 11/11/2022
Re: matin
oui, le lecteur peut projeter aussi ses propres associations, comme je l'ai fait sur ce tableau rencontré par hasard, le choc de ce serpent dressé dans un rectangle.
Re: matin
Salut. J'ai lu mais jai peur d'être passé à côté... Onirique, surréaliste... Il y a des images, mais je n'ai pas réussi à entrer dedans, désolé
Re: matin
Oui, j'avoue que je le trouve moi aussi un peu tiré par les cheveux...
En fait celui que j'avais exhumé du passé pour te le faire lire c'est "films". D'une certaine façon je lui trouve des ressemblances avec ton dernier poème : des choses qui se superposent.
En fait celui que j'avais exhumé du passé pour te le faire lire c'est "films". D'une certaine façon je lui trouve des ressemblances avec ton dernier poème : des choses qui se superposent.
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