Bill Derringer...

socque a écrit:Le style est vif, alerte, mais vraiment l'ensemble est trop caricatural pour moi... Comment imaginer qu'un directeur de la CIA ne sache pas que le Président des Etats-Unis habite la Maison Blanche ?

Oui effectivement, voila pourquoi j'ai longtemps hésité à poster la suite...
L'histoire est totalement délirante !
Bon cela dit, elle a fait rire quelques amis donc...

Ah ah! 'cré Bill! tout juste lu le premier texte (me suis arrêté quand j'ai vu qu'il y en avait un deuxième: c'est que je commence à fatiguer..)

Oui bon ce n'est pas de la toute première finesse, néanmoins ça se lit bien et c'est rigolo. Le trait caricatural est un peu forcé parfois, mais y a quelques perles très réussies. (notamment "ne pas se laisser prendre à notre propre propagande", ça c'est fort..) tiens, pour la peine: https://www.youtube.com/watch?v=MCxo7bBAuss
Bref, moi aime bien. Me réserve la suite pour demain.

Suggestions:
- au début: "son bureau ovale" au lieu de "son bureau de la maison blanche"
- ben.. pas d'autre, en fait.

ps: si panda passe par là, j'adore ses commentaires ^^

Yo Boc !
Je trouve le trait quand même un tantinet forcé et le côté tarte à la crème m'embête un peu, ce qui ne m'a pas empêchée de sourire, surtout à l'évocation des traducteurs.
Au passage j'ai relevé certaines incorrections, je sais que tu y attaches de l'importance :

Lui qui pensait avoir acquis un poste de pouvoir, voilà que l’on l’humiliait comme il ne l’avait jamais été de toute son existence (si l’on excepte bien sûr les cours d’art dramatique…).
Du reste, conclut-il
Dans ton équipe, à la CIA, il y a un homme qui sera parfait pour cette tâche
loin de cette terre dangereuse infestée entre autres d’espions indiens,

ha, un peu dommage de retrouver Derringer avant ce qu'on a lu lorsqu'il est président
c'est tout aussi déjanté et un peu forcé parfois
peut-être moins... construit
oui, j'aurais aimé lire les aventures de ton héros dans l'ordre chrono

Eh ben, en voila un pave. Je n'en ai lu que la premiere partie. Je lirais le reste plus tard.
Comme le dit Panda, ca se lit bien, l'ecriture etant fluide- mais non moins quelconque. Question humour, de ce que j'ai pu lire, j'ai trouve ca un peu leger, gentillet : j'ai a peine esquisse un sourire.

A+

Dis, Boc, ton Bill Derringer existerait-il par hasard dans une version plus facile à lire que sur écran ? Je serais intéressée par un petit pdf qui me permettrait d'imprimer le tout, et ce afin d'épargner mes yeux qui fatiguent facilement...

Voilà, j'ai enfin terminé de rédiger mes commentaires sur ton "Bill Derringer." J'ai noté beaucoup de broutilles (ci-dessous.) Mes impressions sont à la suite.

P 7 « Circonstance rarissime, il n’était pas entouré de sa cohorte de subalternes et conseillers en tous genres » : sa cohorte de subalternes et de conseillers en tout genre ?

P 8 « Jusque là, il ne s’était jamais permis d’agir en dehors du cadre des intérêts des lobbys qui l’avaient placé là où il était » des lobbies

P 9 « Il croyait avoir encore affaire à un subordonné indélicat qui transgressait ses ordres afin de lui présenter quelque requête sans intérêt. » le « de » manque dans la version imprimée.

P 12 « – Non M. le Président, fit l’un d’entre eux après que tous aient échangé un bref regard » : eurent échangé un bref regard

P 13 « – Je crois vous avoir donné un ordre, rappela le président sur un ton lourd de menace » : Tu as mis « menace » au pluriel à d’autres endroits (et c'est ce que j'aurais mis partout)

« – Il y a plein de ces… étudiants de ces… scientifiques » : une virgule après « étudiants » ?

P 14 « Le chef de la Police Fédérale, Andrew Holster, était rapidement revenu pour répondre à ses ordres et à son indignation. » : je soupçonne un zeugme de s’être glissé dans cette phrase (sauras-tu le retrouver ? ;-)) ; je crois que c’est dû à « répondre à son indignation » qui sonne bizarre… (mais je ne suis pas spécialiste en zeugmes.)

P 15 « Le président se rendit dans la salle de conférence de la Maison Blanche d’un pas alerte, non pour combler son retard, mais en anticipant sur la jouissance que lui apporterait la présence de tous ces gens, suspendus aux paroles émanant de ses lèvres. » :
Salle de conférences
tournure un peu lourde (« à ses lèvres » aurait suffi.)

« L’un des conseillers qui marchait à ses cotés reçut un appel sur son téléphone cellulaire. Il s’arrêta, échangea quelques mots avec son interlocuteur, puis trottina pour revenir aux cotés du président. » côtés

P 16 « Bill Derringer se saisit du téléphone blanc qui reposait sur un bureau, au milieu de la pièce, puis s’assura du regard de la présence de son garde. » : tournure un peu lourde (du…de…de)

« Cela fait déjà quelques temps que ces Frenchies refusent de suivre notre leadership et tentent de préserver leurs intérêts au sein des états terroristes. » « quelque temps » ? « Frenchies » sans majuscule ?

P 19 « Il se préparait à passer la porte que son garde du corps venait préalablement de lui entrouvrir, lorsqu’une lueur bleutée emplit la pièce. » : pléonasme

P 21 « C’est d’un pas résolu, poussé par sa résolution et sa foi inébranlable en lui-même que le président des Etats-Unis d’Amérique traversa le couloir qui allait le mener à la salle de conférence tant désirée. » : répétition, mais elle est peut-être voulue ?

P 24 « Le président dut pencher sa tête en arrière dans un mouvement qui fut une injure pour ses cervicales alors que l’agent des services secrets prenait appui sur les épaules d’un garde du corps et chuchotait son message. » : la tête

P 29 « Cet ordre fut prononcé avec toute la colère contenue que le président avait habilement décelé chez John Wayne dans La prisonnière du désert, son western favori. » : décelée

P 36 « ses épaules s’affaissèrent, ses yeux se fixèrent sur la table de conférence et sa voix reprit l’intonation du canard enroué lorsqu’il déclara : » « se fixer » à la forme pronominale me semble mal employé ici
(1. s'établir définitivement
2. s'assigner une tâche, un devoir, une date
3. argotiquement, se faire une piqûre d'héroïne, cocaïne...)

« Une fois encore, l’agent Osprey prit l’initiative de la parole : » tournure un peu lourde (« l’initiative : » aurait suffi)

P 41 « En dépit de la surprise, tous ses collaborateurs s’évertuèrent à assumer un visage de marbre inexpressif qui contrastait avec les nombreux tics nerveux du directeur du SETI. » afficher un visage ?

P 43 « – Eh bien… mais de fonds privés… nous avons des généreux donateurs qui grâce à Internet… » de généreux donateurs

P 47 « « N’en déplaise aux anti-mondialistes ou autres apôtres des théories perverses qui parasitent la bonne marche des états capitalistes, la réalité de chaque être vivant, de l’insecte à l’être humain, est un état de guerre permanent, et je ne vois pas comment des visiteurs d’un autre monde pourraient être exempts d’une telle règle. » La formulation me paraît un peu lourde.

« Alors, lorsque des êtres, qu’ils viennent d’un autre monde ou pas, parlent de générosité, d’altruisme ou autres concepts qui sont aux antipodes même de la vérité, ils le font à n’en pas douter soit pour nous affaiblir en prélude à une invasion, soit pour observer nos réactions. » d’autres concepts

P 48 « D’autant que nous ne savons rien d’eux et qu’eux semblent nous connaître bien en détail. » l’un ou l’autre suffirait. (connaître bien ou connaître en détail)

P 49 « S’ils nous sont hostiles, ce qui est encore une fois infiniment plus probable, je vous inviterais à considérer le fait qu’ils ne nous ont pas encore attaqués et tentent donc soit de nous étudier, soit de nous affaiblir. » j’aurais mis un futur « inviterai », mais c’est purement intuitif !

P 50 « Déjà que vous n’avez pas su établir une ligne d’approvisionnement de Berlin à Stalingrad, vous espérez faire comment pour ravitailler les troupes engagées dans votre campagne délirante contre les Aliens ? » Tu as écrit « alien » avec une minuscule à certains endroits, avec une majuscule à d’autres.

« Le seul avantage tactique que nous avons –peut-être– sur nos ennemis, c’est qu’ils semblent pacifistes et altruistes. La seule chose que nous gagnerions à les attaquer, c’est précisément à le perdre ! » « le » pour « avantage » me semble bien éloigné pour que l’on comprenne à quoi il se rapporte. Tu aurais peut-être pu reprendre le mot « avantage » ou un équivalent ?

P 51 « Ne sommes-nous donc voués qu’à être cela ? Des esclaves en puissance ? » Cela sonne un peu bizarre à mes oreilles (mais j’ai peut-être les oreilles bizarres, qui sait ?!) J’aurais mis plutôt « voués qu’à cela ? Être des esclaves en puissance ? »

P 54 « Salopard de Lindebruck… » Lindenbruck

P 57 « Durant l’année qui venait de s’écouler, il estimait avoir démontré avec brio qu’il était le président le plus digne, le plus ferme, et le plus garant des valeurs républicaines que l’Amérique ait jamais connu depuis John Ford. » : le complément de temps me semble mal placé (« Durant l’année qui venait de s’écouler, il estimait… » : on a l’impression qu’il estime durant l’année… Peut-être pourrais-tu le placer ailleurs : « il estimait avoir démontré avec brio, durant l’année qui venait de s’écouler,… »
« Le plus garant » : je me demande si on peut employer le superlatif pour « garant » - soit on est garant de quelque chose, soit on ne l’est pas, non ?

P 59 « Combien de traîtres cette affaire extraterrestre nous a-t-elle permis de débusquer et neutraliser ? » et de neutraliser ?

P 67 « Il était équipé d’une lourde armure de bronze et tenait une lance à la main gauche. » de la main gauche ?

« La barbe broussailleuse qui cachait la moitié de son visage ne dissimulait pas sa colère et sa détermination. » : ni sa détermination ?

P 72 « Franchement mon vieux, cela n’a rien de personnel, mais je doute qu’il y ait beaucoup de caméra là-bas, alors je ne vois pas en quoi vous seriez d’un besoin vital pour ma présidence dans un tel contexte. » : caméras


Les extraterrestres m’ont fait penser à ceux de Mars Attacks, surtout au début. On les découvre ensuite moins facétieux que ceux du film, plus réfléchis…
J’ai apprécié l’humour ( par exemple : « Si le garde ne connaissait pas si bien son président, il aurait juré que ce dernier réfléchissait. »)
Les pensées des différents protagonistes qui réagissent chacun aux dires et aux agissements du président sont bien rendues.
A partir de la page 50, j’ai trouvé qu’il y avait un peu trop de blabla et pas assez d’action, mais la fin de l’histoire m’a bien plu.
Je n’ai pas compris tout de suite pourquoi les extraterrestres, si supérieurs aux humains, confiaient aux présidents des États le soin de choisir les personnes qui resteraient en vie, cela me semblait illogique, mais finalement ça se tient (ils sont vraiment trop forts, ces E.T. !)
Bref, en résumé j’ai bien aimé malgré quelques longueurs, et la fin est très réussie, je trouve. Et puis, j’oubliais : quel bel objet ! La couverture et les illustrations rendent le tout très agréable à lire.

sur le premier Dirringer :



"Il faut que je prenne garde à ne pas croire à notre propre propagande"
Et c’est le Président qui parle !

Voilà bien pour moi, l’une des meilleures phrases du texte, parmi tant d’autres perles.

Elle donne le ton du récit : déjanté, caricatural à souhait, parodique, mais si réaliste, au fond. Et c’est bien ça qui fait peur.

En effet, je n’ai pu m'empêcher de coller la tête de l'ex-debeliou sur les épaules de ce Président à si fort QI[/font][font='Comic Sans MS']. Lui et son aréopage d’incapables sont parfaitement mis en situation et ne nécessitent pas de longues descriptions : on les « voit », on les entend presque. Leurs délires semblent mener notre planète vers un destin bien peu enviable jusqu’à ce que… N’en disons pas plus, le dénouement est jouissif.

L’écriture est alerte et maîtrisée, le texte est vif, aéré, intelligent.

Et comme le suggérait un autre commentateur, je verrais également ce texte adapté pour le théâtre, une sorte de huis clos terrifiant, terrifiquement drôle.

Un excellent moment de lecture !

Eh bien moi, j'ai a-do-ré !
Tu as très bien rendu les différents personnages, leur rôle, les perspectives que leur donnent les différentes fonctions. Forcément, c'est un peu caricatural, mais c'est ça, justement, qui est drôle. Et je ne suis pas sûr que ce soir si caricatural que ça… Enfin, je ne sais pas, je n’ai jamais participer à une réunion de décideurs américains… J’ai bien aimé les pensées de chacun des participants à la fin des chapitres, qui précisent très bien les positions des protagonistes, comment elles évoluent, ou n’évoluent pas.
A la fin, le retournement m’a semblé être la seule issue avant même de le lire, si bien que l’effet de surprise a été un peu affaibli. Peut-être pourrais-tu le renforcer en insistant moins sur le côté humaniste des extra-terrestres, en laissant un peu de flou dans leurs motivations, un quiproquo possible… ?

Gév a écrit: Peut-être pourrais-tu le renforcer en insistant moins sur le côté humaniste des extra-terrestres, en laissant un peu de flou dans leurs motivations, un quiproquo possible… ?

trop tard, c'est publié !
;-)

Faut que je me le relise celui-ci et que j'y revienne, avec le recul

mentor a écrit:

Gév a écrit: Peut-être pourrais-tu le renforcer en insistant moins sur le côté humaniste des extra-terrestres, en laissant un peu de flou dans leurs motivations, un quiproquo possible… ?

trop tard, c'est publié !
;-)

Oui...c'est déjà publié !
Et non...ce n'est pas trop tard !
Il ne me restait plus beaucoup d'exemplaires de Bill Derringer lorsque je l'ai posté sur VE.
J'éprouvais l’envie d'avoir des "retours" sur ce texte, mais aussi des avis et corrections en vue d'une éventuelle réimpression.
Vous ne m'avez pas déçu...merci à tous !
Aujourd'hui, il ne me reste plus qu'une poignée de Derringer.
Je rééditerai ce texte je crois, ne serais-ce que parce que cela me fait tout simplement envie : c'était le texte "cobaye" de notre jeune maison et trop de bons souvenirs lui sont associés pour que je le laisse "épuisé" sans le rééditer sous une forme plus aboutie.
Je le ferai aussi et surtout en raison de l'intérêt que vous avez bien voulu lui témoigner, du temps que vous avez tous passé à le lire et à me donner vos avis et corrections. Il va de soi que ces derniers me seront plus qu'utiles...
Encore merci à tous !

boc tu peux m'en envoyer un ?
bertrand_mogendre hotmail point com

chako en retient un aussi, dès qu'il sera accouché de la presse.

Deux Août 2028, 12 heures 37

Lorsqu’il reprit connaissance, Bill Derringer était dans son « bureau » de la CIA, affalé sur deux prostituées, et baignait encore dans des relents de cocaïne et d’alcool mêlés.
Titubant sous le coup d’une bien trop familière souffrance qui lui transperçait le crâne, le directeur de la CIA se dirigea néanmoins en ligne droite vers la salle de bain avec toute l’assurance et l’aplomb d’un vétéran rompu à cet exercice quotidien : il était de nouveau en territoire connu.
Après avoir pris sa douche, il s’approcha inexplicablement de son bureau, et chose plus incroyable encore, il y vit les diverses éditions des quotidiens nationaux, en prit un…et alors…il le lut…comme sous le coup d’une force invisible et mystique…Le destin, peut-être…
Toujours est-il qu’à peine 5 minutes plus tard, il réussissait à déchiffrer le titre en première page : « Encore un meurtre atroce ».
C’est à ce moment que tout lui revint à l’esprit : l’entretien avec le président, le meurtrier, le tueur à arrêter avant le FBI…Un homme qui tue les représentants de races inférieures…Un homme qui appartient à leur confrérie fraternelle et qui souhaite établir au nom de Dieu la suprématie de la race blanche…

Lorsqu’on frappa à sa porte, Bill Derringer reconnut lui-même les coups du destin.

-« Agent Smith », se présenta un très jeune et séduisant homme brun, à la carrure sportive et qui le dépassait de deux têtes.

-Smith ? Releva le directeur en même temps que la tête. Vous allez pouvoir m’aider…Pourquoi vous appelez-vous tous Smith, ici ?

-C’est que…c’est un nom commun que nous nous donnons pour préserver notre anonymat

-Et vous me prenez pour un peau-rouge !? Moi, votre directeur ! Vous ne me faites pas confiance ! Quel est votre vrai nom ?

Je ne savais pas pourquoi on nous conseillait de cacher notre véritable identité…même et surtout à notre directeur…mais je commence à comprendre…

-Mais c’est que…en ce qui me concerne, je m’appelle réellement Smith, monsieur le directeur, mentit l’agent.

Si tu gobes ça, je saurai à quoi m’en tenir…

-Il y a des choses qui vont changer ici, affirma Bill Derringer en se relevant avec dignité…tout en se grattant les testicules qui ballottaient librement sous son peignoir.

Ok, maintenant je sais !

-Ah…bien sûr, monsieur le directeur.

-Comme vous le savez, je suis surtout un président d’entreprises, et j’entend établir ici la même hiérarchie…La CIA s’appellera dorénavant CA : un conseil d’administration…dont je serai le président !

-Oui…je suppose que le président puis le congrès approuveront cette judicieuse proposition, monsieur le directeur…J’ajouterais même que la lettre I qui signifie intelligence n’aura probablement guère sa place au sein de notre organisation sous votre judicieuse direction, osa ajouter l’agent excédé. Puis-je toutefois vous demander pourquoi vous désirez ce changement, monsieur le directeur ?

-Monsieur le président ! Je veux que vous m’appeliez monsieur le président ! hurla Bill Derringer sur un ton hystérique tout en tapant du point sur la table.

D’accord, je n’insiste pas, il veut juste qu’on l’appelle monsieur le président…ça commence fort…et encore un débile à la tête du bureau pour que d’autres huiles puissent faire leur sale cuisine !

-Vous aviez besoin de mes… services, monsieur le président ?

-Oui…oui…alors voilà : comme le président vous l’a sûrement dit…

-Excusez-moi, mais vous parlez de vous à la troisième personne en ce moment ? ironisa dangereusement l’agent qui croyait à juste titre converser avec un malade mental.

-Cessez d’être insolent ! Je parle du président des Etats-Unis du nord ! Il a déjà dû vous parler grossièrement de l’affaire que vous allez devoir résoudre, non ?

Pas aussi grossièrement que ça, pensa l’agent…mais presque…

-Il a évoqué un psychopathe qui appartiendrait à « votre » société et qui tue les représentants, je cite, « des races inférieures ». Consigne : à retrouver et faire disparaître au plus vite. Peut-être pourriez-vous me donner certains détails, monsieur le président ?

-Ah oui…oui…les détails…Tenez, dit-il à l’agent Smith en lui montrant le journal. Tout est là-dedans ! Sur cette photo…Ah non, pas celle-là, continua-t-il en faisant une moue curieuse. Pas la bonne race !
Puis il feuilleta le journal quelques minutes et écarquilla les yeux tout en collant littéralement son nez sur une photo.
-C’est bien ça ! C’est la bonne sous-race…

-Pardon, monsieur le direct…euh…président ?

-Voilà, dit-il en ouvrant le journal à la bonne page sous les yeux de l’agent Smith. Voilà la victime…

-Quoi ? C’est un des vôtres qui a fait ça ? Et il faut le retrouver ? Sincèrement, je comprends votre inquiétude vis-à-vis des médias, ou même que vous vouliez étouffer l’affaire, mais de là à ouvrir une enquête pour meurtre et à mobiliser une équipe, je crois que vous exagérez et que…

-Vous vous opposez à un ordre strict donné par vos deux présidents ?

-Mais pourquoi ? Si vous voulez que je retrouve le coupable…Dites-moi pourquoi…Quelle est la vraie raison ?

Bill Derringer soupira.

-En fait, je n’en sais rien…Même à moi, le président n’a rien dit…Il a craint d’être espionné par des peaux-rouges

-Quoi ? Le lobby des casinos et des maisons de jeux serait impliqué ?

-Qu’est-ce que ça a à voir là-dedans ? Ces sauvages ont osé attaquer un Saloon ?

-Mais, monsieur le président, les indiens ont des intérêts énormes dans les maisons de jeux, dans tous les états d’amériq…

-Les fumiers ! vociféra le directeur de la CIA en frappant à nouveau du poing sur la table. Je comprends, maintenant !

-Monsieur le président, il vous faut réaliser la position difficile dans laquelle vous me mettez…je vais avoir une dizaine d’agents sous mes ordres…dont des anciens du bureau…Je suis jeune et il va me falloir justifier une enquête dont le but est de retrouver l’assassin de…enfin, la victime est un corniaud sans vouloir vous offenser ! Ils sont nombreux à crever chaque jour dans nos caniveaux et on ouvre rarement une enquête pour autant !

-Oui, je sais, et je partage cet avis, comme je sais que vos hommes le partageront également. Dans le cas contraire, ils ne seraient pas dignes de se trouver à la CA…mais aussi dur que cela vous paraisse, il va falloir considérer cette sous-race non comme un animal, mais comme un être humain. J’en ai reçu l’ordre strict du président des Etats du nord.

-Cela ne va pas être de la tarte, Monsieur le président, finit l’agent Smith. Il appuya ses derniers mots avec des accents méprisants que Bill Derringer ne sut déceler tant il était enchanté qu’on l’appelle par ce titre si désiré.

-Agent Smith ! J’oubliais de vous dire…

-Oui, Mr le président ?

-On m’a dit qu’en dépit de vos mœurs, vous étiez un jeune homme très ambitieux, ce qui n’est déjà pas si mal : si vous accomplissez votre mission, vous serez rapidement promu, et tout cela, un jour, sera à vous !

Bill Derringer tendit la main vers les deux jeunes femmes dénudées, qui telles des Belles au bois dormant trash, reposaient encore lourdement dans un coma éthylique dû tant à l’alcool qu’à la cocaïne dont elles étaient encore saupoudrées.
Le chef de la CIA interpréta la moue de dégoût de son subalterne comme une marque de jalousie.

-Ah ! Agent Smith ! le rappela à nouveau son directeur alors qu’il franchissait la porte.

-Oui ?

-Je suis désolé, je n’ai pas d’os sur moi, mais j’en aurai un à votre retour, soyez-en sûr !

-Ce ne sera pas nécessaire, monsieur ! répondit l’agent en refermant la porte.

III-Une enquête bien singulière

Les quatre agents Smith, Smith, Smith et Smith attendaient leur nouveau supérieur (auquel, on l’aura compris, ils ne faisaient pas confiance) dans la salle de briefing depuis dix bonnes minutes lorsqu’ils le virent entrer en tenant un quotidien sous son aisselle droite.
Son visage était blême lorsqu’il déposa le journal sur une table, sous les yeux de ses collègues.

-Vous êtes le nouveau facteur, ironisa l’agent Smith ?
-Non, c’est la nouvelle secrétaire…et elle nous fait de l’œil, renchérit dangereusement l’agent Smith.
-Vous n’y êtes pas, il nous montre comment résoudre le problème des toilettes, proposa l’agent Smith.
-A moins qu’il ne soit muet et graphophobe : il essaye de communiquer avec nous en nous montrant des mots sur le journal, supposa l’agent Smith.

-Je suis le plus jeune, d’accord, le plus inexpérimenté, d’accord, je vous demande de faire un sale boulot pour votre président, d’accord…mais vous devriez en avoir l’habitude, non ?

-Bien sûr, répondit l’agent Smith ! Qui devons-nous faire disparaître cette fois ? Une pute qui en sait trop ?
-Un journaliste qui souhaite faire son travail ?
-Un cadre indélicat d’une de leurs entreprises polluantes, meurtrières et esclavagistes ?
-Un politicien démocrate qui ait une chance contre notre directeur actuel aux prochaines élections ?
-Le président de Pepsi Cola ?

-Non non, pas cette fois ! Les arrêta l’agent Smith. Nous devons retrouver le meurtrier de…de ça !…

Et il leur montra la photo du journal.

-Vous vous foutez de notre gueule ? S’offusquèrent les agents Smith en se raidissant comme un seul Smith.

-Oui…Alors écoutez : l’ordre vient du président lui-même, et je crois sincèrement qu’ils ont pété les plombs cette fois !
Ce qu’ils ont en tête, je n’en sais rien. Derringer m’affirme qu’il s’agit d’une campagne de propagande visant à démontrer au public que les conservateurs ont du respect pour les sous-races.
Ou alors le vrai but est peut-être encore plus farfelu : comme vous le savez, le président des Etats-Unis et notre cher directeur sont à la tête des entreprises de fabrication d’armes à feu, et dans le cas de ce meurtre, c’est une voiture et non un flingue qui est en cause…Pour une fois, cette affaire éloignerait la presse d’un secteur assez sensible où notre directeur et notre président ont tous deux des intérêts énormes.

-C’est débile.
-Inepte.
-Je n’y crois pas…
-Il doit y avoir une erreur…
-Quel boulot de merde !

-Je suis d’accord avec vous…parce que le plus incohérent dans l’histoire, c’est qu’ils nous demandent, à nous, d’escamoter l’affaire et de doubler le FBI…Alors par définition le public n’en saura rien !

-Il y a un cadavre dans le placard, en déduisirent les quatre agents Smith.

-Exact ! Ou plutôt…disons qu’ils soupçonnent un des leurs d’avoir fait le coup…Un des membres de leur néo-fraternité aryenne pour être plus précis. Vu le nombre de nègres et de portos qu’ils dessoudent directement ou indirectement avec leur KKK, la rifle association, les ventes d’armes et leurs pseudos programmes sociaux…Je ne comprends pas pourquoi ils paniquent à cause du meurtre de ce bâtard !

-Techniquement, il ne s’agit pas d’un meurtre, releva un des quatre agents Smith. Tout au plus d’un homicide par imprudence…et encore…regardez la victime, on la voit plutôt bien en dépit de la faible définition de la photographie :
les quatre membres sont étirés en étoile et le corps est littéralement aplati par un des pneus…On peut même en prendre une empreinte…je m’en charge !

-Je crois, en effet, qu’un traumatisme direct dû à un choc frontal nous aurait à coup sûr mis sur la piste d’un homicide direct, mais il ne faut rien déduire de définitif pour l’instant, précisa un de ses collègues : parfois, des gens sont fauchés de plein fouet sans que le conducteur ait réellement l’intention de les emboutir…De même, j’ai déjà rencontré un cas où le pilote souhaitait intentionnellement percuter sa victime : mais voila que cette dernière s’effondre dans sa fuite et l’assassin lui roule alors dessus…

-De même, il faut considérer la taille de la victime : il est évident que le sujet, en raison de sa petite taille, peut tout à fait être resté hors du champ de vision du conducteur, que ce soit avant, pendant, ou après les faits !

-A priori, je dirais que la victime est de sexe féminin, âgée de quelques années à peine, et de race…

-Pour la race c’est ok, pas la peine de revenir là dessus ! Mais pour le sexe comment tu fais, Smith ? Pour moi ces bestiaux se ressemblent tous ! Quant à l’âge…ils ont toujours été un peu courts sur patte de toute manière, non ? Un peu comme ces putains de pékinois qui…

-Stop ! Le président a été clair sur ce sujet, trancha leur jeune supérieur. La victime n’appartient PAS à une race inférieure et doit être traitée comme une personne, même en interne…

-Alors une fois sur place j’irais enquêter sur la…famille de la victime et rechercher des témoins.

-Je vais me pencher sur l’arme du crime déclara l’agent Smith qui observait déjà la photo du journal à la loupe : je pense que c’est elle qui nous mènera le plus sûrement sur la piste du meurtrier…La configuration des pneus évoque un modèle très singulier de véhicules qui m’est très familier, cela me fait penser aux…

-Je préfère vous voir comme cela, soupira l’agent Smith…Je me charge de trouver les témoins personnellement ! Plus vite on bouclera cette affaire et plus vite on en sera débarrassés !

-Bravo ! Ca c’est de la déduction, chef !
-J’en ai une autre : plus vite je mangerai et moins j’aurais faim.
-Moi aussi : pierre qui roule n’amasse pas mousse.
-Bon allez, on va arrêter nos conneries, trancha le quatrième Smith en apportant une aide inattendue à son jeune chef. On a tous le même sentiment, à savoir qu’on nous a lancé sur l’enquête la plus débile et la plus inutile de toute l’histoire du bureau…Mais par chance, elle ne me semble pas bien compliquée.

-En réalité, je suis persuadé que cette histoire ne va pas traîner, confirma leur chef. Merde, on a tout entre les mains : l’empreinte des pneus de la bagnole qui a servi au « meurtre », des témoins puisque les propr…euh…parents de la victime se trouvaient vraisemblablement près d’elle au moment des faits…
Mais surtout, et c’est là un élément de première importance : je crois que le meurtrier est persuadé de pouvoir agir en totale impunité et ne pense pas une seconde devoir brouiller les pistes. Si on agit vite, je pense qu’on va pouvoir boucler cette affaire avant demain, et alors la plaisanterie sera terminée. Allez ! conclut-il en frappant des mains ! On réquisitionne le jet privé de notre directeur et on s’envole pour York ! On y croit ! On a la foi !

-On a la foi ! confirma l’agent Smith.
-On a la foi ! enchaîna l’agent Smith.
-On a la foi ! communia l’agent Smith.
-Pas moi ! rappela l’agent Smith.

Quelques heures suffirent aux cinq agents Smith pour atteindre la ville de York, louer une poignée de véhicules, et faire installer sur place un QG improvisé où des subalternes compétents les rejoindraient bientôt.

Deux Août 2010, 17 heures 37

L’agent Smith arpentait les rues de York sans la moindre considération pour la beauté des bâtiments : à la recherche des lieux du crime, une copie du journal à la main, il espérait recueillir des témoignages lorsqu’il aperçut une femme âgée qui déposait une gerbe de fleurs sur le trottoir. Une flaque de sang séché enlaidissait encore la rue à quelques mètres de là.

Si ça c’est pas du bol, pensa l’agent.

Fermement décidé à ne pas laisser passer sa chance, l’homme de la CIA vint discrètement se placer derrière la femme agenouillée. Ainsi revêtu du complet noir traditionnel de la CIA, le visage dissimulé derrière des lunettes de soleil, il était l’essence même d’un employé des pompes funèbres.
Du haut de son autisme émotionnel, il considéra avec un intérêt tout professionnel cette femme de race noire qui ne lui avait jusque là accordé aucune attention : agenouillée, elle était toujours prisonnière de son drame et récitait des prières ponctuées de sincères sanglots.
Lorsqu’elle se releva enfin et reprit conscience du monde qui l’entourait, il lui fut difficile d’ignorer l’imposante présence de l’agent Smith.

-Madame, recevez toutes mes condoléances, et sachez que je m’associe à vous dans votre douleur, déclara-t-il aussi gravement que possible.

En réalité, il avait du mal à retenir son rire devant un spectacle qui lui paraissait parfaitement grotesque.

-Ma pauvre petite Cynthia…ma fille…ma fille chérie, suffoqua la vieille dame contre l’épaule de l’agent.

Constatant que cette personne était visiblement peu intéressée par son identité, l’agent Smith savait que la compassion ne servait à rien dès lors qu’il s’agissait de soutirer des informations. La peur par contre…

-Madame, je suis précisément venu vous parler de Cynthia. Nous ne trouvons nulle part trace de votre…fille. Nous en venons à supposer que vous l’avez adoptée –voire achetée- illégalement, peut-être même hors de notre territoire, sur un simple catalogue !

La vieille dame fit un pas en arrière dans la rue visiblement effrayée au delà des attentes de l’agent…Ce dernier la retint par le poignet.

-Vous croyez que c’est facile ? hoqueta-t-elle. Je n’avais même pas les moyens d’assurer ses vaccins, comment voulez-vous que je m’occupe de lui faire avoir des papiers officiels ?

-Cela nous aurait pourtant aidé, soupira l’agent, plus conciliant. Sachez que nous sommes à la recherche du coupable.

-Le meurtrier ? Vous enquêtez pour retrouver le meurtrier de ma petite Cynthia ? souffla la dame incrédule.

-Sachez que cette enquête a reçu l’aval des plus hautes instances de l’état, admit l’agent qui se retenait toujours de rire. Je voudrais savoir, continua-t-il, si vous avez été témoin de l’accident.

-Ce n’était pas un accident ! cria la vieille dame. Ce monstre a clairement fait dévier sa moto pour écraser ma petite…

-Une moto ? l’interrompit l’agent. Ce serait une moto qui a écrasé votre… ?

-Non… pas exactement…c’était une moto avec une remorque attachée sur le côté…

-Un side-car ? proposa l’agent.

-Oui c’est ça…un side-car couleur kaki…Au moins aussi vieux que moi !

-Vous avez vu sa couleur ? Je suppose que vous n’avez pas eu la possibilité de lire sa plaque ? rêva Smith.

-Figurez-vous que ce soir-là je portais mes lunettes, jeune homme ! s’offusqua la dame. Et lorsque ce monstre a…Je n’ai pensé qu’à une chose : lire la plaque d’immatriculation, comme dans Starsky et Hutch…

Je rêve…mais je rêve…

-Vous pouvez me la donner maintenant ? demanda précipitamment l’agent.

-Bien sûr : N…A…Z…I… 4… Y…O…U

-Quoi ?! Vous voulez bien me répéter ça ?!

-NAZI 4 YOU…je ne vois pas ce qu’il y a de si étonnant !…

D’accord…inutile de sortir le bloc note…

-Je vous remercie, dit l’agent, vous avez été d’une aide…très précieuse !

-Vous ne me demandez même pas mon nom ? l’apostropha la dame comme il s’éloignait.

-Pour quoi faire ? daigna-t-il répondre. S’il s’avère que vous m’avez menti et que toute cette affaire n’est qu’une escroquerie aux assurances…Je peux vous assurer que nous vous retrouverons.

-Mais…mais…j’ai porté plainte…le procès…

-Il n’y aura pas de procès, finit en souriant l’agent Smith avant de disparaître.

Deux Août 2010, 19 heures 22

-Arrêtez tout ! lança l’agent Smith, revenu de son interrogatoire, dans une salle où une dizaine d’individus s’activaient en diverses recherches sur leurs terminaux respectifs

-Jackpot chef ? l’interrogea un agent Smith.

-Et comment ! s’exclama son supérieur. Vous en connaissez combien d’agents de la CIA qui ont un side-car allemand datant de la dernière guère mond…

-L’analyse de l’empreinte de pneu laissée sur le corps de la victime me permet de confirmer, lança l’agent Smith

-Je vous rappelle qu’il y a justement un de nos agents qui a sa clinique ici à York, et qui possède précisément un de ces véhicules, fanfaronna l’agent Smith, décidé à faire durer le suspense.

-Nous avons recensé quatre personnes possédant un side-car dont les caractéristiques correspondent à celui que nous recherchons…Même si, à priori, la coïncidence est plus que troublante, il ne faut pas pour autant nous arrêter sur ce seul suspect…Qu’Il soit le coupable serait un putain de désastre ! se morfondit l’agent Smith.

-Et ils ont tous une plaque d’immatriculation avec NAZI 4 YOU écrit dessus, tes autres suspects ? L’acheva l’agent Smith.

-Ah, merde ! souffla l’agent Smith
-Je savais qu’il y avait un problème, je le savais, se lamenta l’agent Smith.
-Qu’est-ce qu’on fait maintenant ? supplia l’agent Smith.
-Le numéro deux de la CIA…c’est le numéro deux de la CIA…, rappela l’agent Smith.
-Lindenbruck…, soufflèrent les cinq agents Smith.

-Bon…, tenta de résumer l’agent Smith en regardant ses hommes. Ce n’est pas notre directeur qui m’a ordonné cette enquête, mais plutôt notre président : soit il savait que ce nazi était impliqué dans le…meurtre, soit c’est une machination…Dans les deux cas, notre président souhaite voir tomber cet encombrant aryen défraîchi sans que l’opinion ne soit au courant…et donc sans désavouer Derringer.
Franchement, je ne comprends pas pourquoi il n’a pas pris cette décision plus tôt. Maintenant voilà…qu’est-ce qu’on fait par rapport à Derringer ? Il est tout à fait capable de nous faire muter en Alaska après un coup comme celui-là !

-Le directeur de la CIA est notre supérieur direct, il faut lui faire état des résultats de notre l’enquête avant de procéder à l’élimination, déclara l’agent Smith en se lavant les mains.

-On va faire ça, décida rapidement son supérieur. Ah, je vous préviens, ce taré de Derringer veut que l’on s’adresse à lui en l’appelant « Mr le président ». Et ne vous étonnez pas s’il vous lance un os en guise de récompense.

-Quel connard ! Soufflèrent les agents Smith.

Et ils reprirent l’avion pour Dallas.

IV-Une conclusion inattendue

Dallas, Deux Août 2010, 22 heures 28

De son bureau de la CIA, Bill Derringer avait une liaison directe et sécurisée avec le premier personnage de l’état américain.

-Mr le président…, commença Bill Derringer, tout va bien ? Aucun peau-rouge n’est sur la…

-C’est bon, Bill, l’arrêta le président, la liaison est parfaitement sûre. Pourquoi m’appelles-tu ?

-Eh bien ça y est, j’ai identifié le tueur mais…

-Quoi ? Déjà ? Le FBI piétine depuis trois semaines et tes hommes ont réussi en juste…

-Oui…ils ont fait fort, mais il n’y a pas d’espions peaux-rouges à Dallas, concéda Bill Derringer.

-Je te rappelle, Bill, que cette liaison est parfaitement sûre…

-Bon, en tout cas, on l’a eu le tueur de Cynthia ! Mais franchement, je suis gêné à l’idée de sacrifier un homme de valeur pour un simple petit meurtre de rien du tout comme celui-là…

-Un…quoi ?! Petit meurtre de rien du tout ? Ce salaud a déjà étripé une vingtaine de négresses en moins d’un mois ! C’est bien un des hommes de notre… congrégation qui a fait le coup ? Un de tes proches ?

-Plutôt, oui…, lâcha Derringer.

-Bon, alors qui ?! Exigea le président.

-Lindenbruck, avoua Bill Derringer, embarrassé.

Court silence…

-Merde, je n’osais pas le croire…pourtant ça se tient…il a sa clinique à York. Mais comment avez-vous fait pour l’avoir ? A chaque meurtre, il n’y a jamais eu de témoins, ni la moindre piste.

-Ben, là il y avait la mère adoptive de la…victime…qui a…

-Bon, attend Bill, je ne comprend pas…Tu m’as bien dit « Cynthia » tout à l’heure ? Aucun rapport du FBI ne mentionne une victime portant ce nom…Tu es bien sûr de toi ?

-Ben, il y avait pas le nom de la victime sur le journal…Enfin, je crois pas…c’est sa mère qui a…

A l’autre bout de la ligne, on entendait un son caractéristique de feuilles froissées.

-Bill ! Sur le seul journal qui a publié une photo d’une des victimes, on donne bien son nom : Grace Auckney.

Nouveau son de feuilles froissées…

-Ah oui, mais ça, c’est pas la bonne race que vous…que euh…que vous m’aviez indiquée, monsieur le président. Il faut regarder page…euh…4 et 2 !

-Quoi ? 42 ?…42…42…

Nouveau bruit de feuilles…Bill Derringer sentit l’imminence d’une catastrophe.

-Bill !…En page 42, on fait juste état d’un chien écrasé !!

-Ben oui…Vous m’avez bien demandé de retrouver le tueur du Yorkshire, non ?

Long silence…

-Vous vous foutez de ma gueule, Derringer ?

-Ben oui…enfin non !! Vous remarquerez que faire assassiner mon bras droit parce qu’il a écrabouillé un clébard, c’est un peu rude !

-Je vous demande de faire discrètement disparaître le tueur qui ensanglante le comté du Yorkshire et vous me téléphonez pour me dire que vous avez découvert que votre abruti de nazi a écrasé un putain de clebs ! J’ose espérer que c’est une plaisanterie ! Sachez que je ne l’apprécie pas ! A la prochaine victime de ce tueur, vous sautez Derringer ! Vous me comprenez ? Vous sautez ! LITTERALEMENT !

Et le président raccrocha.

Les cinq agents Smith, qui avaient poussé le professionnalisme jusqu’à mettre leur directeur sur écoute, n’avaient rien perdu de la conversation.
Aucun ne fut capable de se remettre de son fou rire avant une bonne demi-heure…Même et surtout lorsqu’ils entendirent la voix nasillarde de leur directeur filtrer à travers l’interphone :

-Agent Smith, dans mon bureau immédiatement, fit le directeur de la CIA.

-Vous avez pensé à l’os ? demanda l’agent Smith, avant de replonger dans son fou rire…toujours accompagné en cela par ses quatre hommes.

-Qu’il est con !
-Mais qu’il est con !
-Ah ça, vraiment il est con !
-Mais qu’est-ce que c’était que cette histoire de peaux-rouges ?

Une heure durant, les agents Smith discoururent, plaisantèrent, et s’esclaffèrent comme jamais ils n’en avaient eu l’occasion de toute leur longue carrière.
Répondant enfin à l’adage que toute bonne chose doit avoir une fin, leur chef prit la parole pour décider de la suite qu’il convenait de donner à leur… « enquête ».

- Bon, cette fois, je pense qu’il a compris, supposa-t-il devant ses hommes. Quand je pense que je vais devoir aller au rapport devant ce clown, me faire tancer et…
- Dans un sens, on le mérite…Franchement, on aurait dû faire le rapprochement, admit l’agent Smith :
Il nous demande de retrouver l’assassin d’un Yorkshire dans la capitale du comté du même nom…
- Lequel est devenu tristement célèbre depuis un mois en raison des meurtres qui endeuillent son territoire…, continua l’agent Smith.
- Oui…on a vraiment été mauvais…, trancha l’agent Smith..
- On aurait dû comprendre…c’était notre boulot ! En rajouta l’agent Smith.
- Non mais comme vous y allez ! S’insurgea leur jeune supérieur, stupéfait par les déclarations de ses hommes. Comme si on pouvait imaginer une énormité pareille ! Comme si nous devions anticiper sur la stupidité et l’idiotie clairement clinique du nouveau directeur de la CIA !
- Ce qu’il est jeune…, déclara l’agent Smith à ses trois collègues qui hochèrent doucement la tête en un signe muet d’assentiment.
- On aurait dû vous en parler, reprit l’agent Smith en s’adressant cette fois à son supérieur. Anticiper la bêtise, la mégalomanie ou la folie de nos directeurs respectifs, c’est précisément ça notre travail depuis la guerre froide avec l’ancienne URSS.
- Oui…, reprit un agent Smith. Tous les quatre, on a rejoint le bureau successivement à chaque changement de directeur, ce qui fait que l’on a chacun eu notre débile attitré.
- Stop ! les interrompit l’agent Smith. Vous êtes qui au juste, tous les quatre ?
- On vient de te le dire : nous sommes l’hideux complot qui se trame derrière le pouvoir officiel et républicain…Pour empêcher, selon les époques, la guerre nucléaire, la dictature nazie, la théocratie, un génocide, ou encore…
- Mais de quelle autorité relevez-vous ? Pas du président en tout cas, cette affaire le prouve… à moins que vous n’ayez des hommes qui travaillent sur le vrai tueur du Yorkshire, et que vous ne soyez ici que pour vous payer ma tête et celle de notre directeur tandis que nous pataugeons dans une histoire de clebs s’alarma le jeune agent Smith.
- Non non, ce n’est pas bête mais tu nous surestimes ! Non, je t’assure qu’on a rien vu venir cette fois. Et puis je te rappelle que le président actuel a été directeur de la CIA en son temps. Ces gars là ne sont pas du genre à tirer dans les pattes de leur successeur n’est-ce pas Averell ?
- Exact, Joe…c’est même pour cela que je n’ai pas pu empêcher sa réélection, je m’en excuse encore une fois. Mais William avait eu le même problème…Je parie que le nouveau s’en sortira aussi mal avec Derringer. C’est incroyable : plus ils sont cons et plus…
- Averell…Joe…, les interrompit l’agent Smith. Non, mais ne me dites pas que vous vous êtes appelés comme les Dalton ?
- Ben si ! fit Joe. Par ordre d’arrivée à la CIA…
- Un asile de fous ! La CIA est un asile de fous ! Mais qu’est-ce que je vais faire maintenant ? se demanda tout haut le jeune agent passablement désemparé.
- Ben te trouver un nom…cela va être dur…il n’y a pas de place pour un cinquième Dalton…, fit remarquer Joe, pragmatique.
- Je propose « Smith »…Après tout, aucun parmi nous n’a jamais eu le culot d’affirmer à son directeur qu’il s’agissait de son vrai nom, proposa Jack.
- Adopté ! entérina Averell.
- Ca suffit ! explosa l’agent Smith en dégainant son arme. La seule chose de vraie dans toutes les idioties que vous m’avez déblatérées jusque ici, c’est que vous êtes bien à l’origine d’un complot. Que ce soit contre Derringer, le président ou le peuple américain, je n’en sais rien, mais je vous jure que je vais le découvrir.
- Agent Smith au rapport ! Qu’est-ce que vous foutez ? fulmina la voix de Bill Derringer dans l’interphone.
- Tiens…la voix de son maître…, commenta Joe. Qu’est-ce que tu attends pour NE PAS y répondre ? Tu vas quand même pas rejoindre cet abruti, Smith ?
- De toute façon, ce crétin de Derringer a lancé un appel général sur l’interphone : vu le nombre de personnes qui s’appellent Smith ici, je te conseille de prendre un ticket : il doit y avoir une sacrée file d’attente là haut ! Plaisanta Jack.

- Je vous assure que vous allez entendre parler de moi ! Jura l’agent Smith en quittant la pièce.

- J’espère bien qu’on entendra à nouveau parler de lui soupira Jack devant ses collègues et amis.
- Je parie que ce gamin va essayer de résoudre l’affaire du tueur tout seul prédit Joe.
- Faut avouer que coté bizutage, il aurait mieux fait de nous laisser choisir, on aurait jamais été aussi durs fit remarquer William.
- J’espère que tout se passera bien pour lui, je l’aime bien ce petit, s’attendrit Joe. Prions pour lui et sa rédemption…Amen !

- Amen, se recueillit Jack.
- Amen, pria William.
- Puisque je vous dis que je suis athée, putain ! S’insurgea Averell.

Eh bien, comme distraction "légère" que vous annonciez, ça se pose là... Je n'ai pas changé d'avis là-dessus, l'ensemble est vraiment caricatural ! Dommage, parce que l'écriture est vive.