In equo veritas

Ouf, ça réveille ! J'aime beaucoup le dialogue de la fin.

socque a écrit:Ouf, ça réveille ! J'aime beaucoup le dialogue de la fin.

La fin provisoire était évidemment bâclée, du fait de mes tendances ophidiennes; mais vous avez su me piquer au vif, avec vos persiflages sur mes bisounoursages, dont je me fusse fort bien contenté. Je vous suis donc redevable, et ce n'est pas la première fois. Encore merci.

Je pense au proverbe latin : "La Roche Tarpéienne est tout près du Capitole."

J'avais loupé tous les récents ajouts ! La fin en forme de rétribution des excès de Félix est bien vue je pense, surtout le coup de la lanterne oubliée.
Sur le reste, j'ai deux objections :
-tout d'abord la transformation assez radicale de la mère, de paysanne crasseuse à chicots du début à simple provinciale pataude et engoncée lors du voyage à Paris.
-le caractère inoffensif du notaire qu'on aurait aimé plus roué. Je flairais, à tort, une entourloupe, une bonne occasion de filouter la mère...

Malgré tout, j'ai passé un excellent moment de lecture, apprécié la forme et le fond ; j'ai en particulier goûté la sortie contre l'Eglise, brillamment formulée.

Malgré tout, j'ai passé un excellent moment de lecture, apprécié la forme et le fond ; j'ai en particulier goûté la sortie contre l'Eglise, brillamment formulée.[/quote]

Vos objections sont tout à fait fondées, j'aurais dû rendre un peu plus vraisemblable cette transformation; mais vous n'êtes pas sans savoir que les femmes sont expertes en ce genres d'artifices, que de quelques chiffons elles se font une traîne, et que pour masquer les chicots il suffit de tenir le bec clos. J'aurais pu la raser un peu, ça oui.
Le commissaire-priseur n'est pas inoffensif, certes pas. Mais il dépouille les autres. Là, c'est le cas du renard qui ne touche pas aux poules à côté de sa tanière.

J'ai dit notaire ?!!
Merci de cette précision à propos du commissaire-priseur, cela m'éclaire, je n'avais pas saisi toute la nuance de la relation.

Ne sois pas étonnée si je passe sans raison du vous au tu: ne voulant pas violenter socque, j'essaie de ne pas mélanger les registres.
J'ai fait un addendum suite à ta remarque tout à fait judicieuse sur les métamorphose de Fortunée, je la poste en dessous. C'est beaucoup plus explicite ainsi, thanks a million times

Embarquement à Antibes, dans une tenue de combat justifiée par les circonstances: la robe noire, un peu ajustée certes, mais seyante, qu'elle avait achetée pour le mariage d'une cousine, rehaussée d'une veste pimpante d'organdi jaune pâle, avec un joli petit chapeau de paille garni d'un ruban. Souliers vernis, un tressage alterné avec une jolie ganse rouge en guise de bride. Avec la prodigieuse capacité des femmes à revêtir, sans la moindre difficulté, des personnalités différentes, simplement en se vêtant autrement, elle en avait profité pour se faire coiffer par Poupette, qui avait un joli coup de fer à friser, et l'avait épilé avec abnégation. La bouche n'était pas son attrait principal, elle en était consciente, et la tenait bien close, ce qui lui donnait une physionomie sérieuse, mais point déplaisante. Et bien consciente de l'importance des enjeux, avec le sentiment de partir au combat pour les siens, elle avait l'air d'une boutiquière replète de province, à la tranquille aisance.

Le tout début, premier passage, ne m'a pas totalement encouragée à poursuivre ma lecture parce que j'ai trouvé ça très chargé, presque lyrique et trop doux à mon goût. J'ai également trouvé la narration trop descriptive, m'empêchant d'entrer le texte, d'humer les odeurs ou admirer les paysages; tout est là, déjà dit, avec des détails pas forcément tout le temps intéressants.
Toutefois, connaissant la qualité de ta plume, j'ai donc continué et assez rapidement, cette première impression mitigée s'est dissipée.

L'avalanche de détails se fait plus grinçante, je lui trouve une finalité plus pertinente, celle de l'évocation d'un monde loin d'être parfait, avec la juste pointe d'ironie et un rythme vif (pour cela, les longues phrases chargés marchent bien lorsqu'elles sont saccadées à l'intérieur; tu maîtrises bien cette manière de faire).

Puis l'ambiance s'installe, cette Provence décrite en quelques mots, quelques évocations suggestives et cette famille qui crée d'emblée des images fortes.
Oui, ça commence à bien me plaire !

Et ça continue, les chevaux, cette manière d'en parler, attachante et racée avec malgré tout une petite pointe de moquerie dans l'art de considérer cette idôlatrie, puis les soucis familiaux et financiers, le tout déclamé sur un ton grave, presque neutre. Un recul que j'apprécie, cela met de la distance tout en restant au coeur du sujet; pas simple à manier.

La description de Félix m'a bien fait sourire, je l'ai trouvée succulente. Les dialogues sont croustillants, bien rendus, le texte devient chantant; ça met de la vie. Et Siselé.... sourire :-)

Cette verve de qualité se poursuit avec César; j'ai particulièrement apprécié tes digressions, nombreuses mais jamais lourdes, pleins d'infos et donnant de la vigueur au récit, parce qu'il se fait chair, plus palpable.

Petit bémol sur les traductions entre parenthèses, même si je comprends qu'elles peuvent être utiles; j'ai trouvé que ça cassait le rythme et la fluidité du texte. Sans compter qu'ensuite, deux langues se côtoient, pas totalement réussi sur ce point.
Idem pour le dialogue entre Fortunée et Maurice qui traîne un peu en longueur et en sentiments par moments lorsque le passé est évoqué.

L'histoire se poursuit, mon plaisir avec elle, jusqu'à la fin, triste et cruelle et en même temps, en relation avec tout ce qui précède, le malheur et la bonne fortune qui ne sont jamais loin de l'autre. Je crois que je me serais passée, question de goûts, des deux-trois dernières phrases, sentences finales un peu trop marquées mais ça contrinue à clôte tout ceci.

Encore une fois un beau travail d'écriture Silène, dans lequel tu mêles nostagie et ironie et ce, de manière parfaitement équilibrée. C'est triste et drôle à la fois, avec des piqûres de rappel à la réalité lorsque le passé prend le dessus et que la mémoire se perd dans les souvenirs. Belle alternance réussie.