Lettre à S.

Un regard profond. Un sourire sincère et chaleureux. Une main douce, délicate et agréable. J’en demandais encore.
Assise sur ce canapé-lit, à tes côtés, j’étais heureuse, tout simplement.
Heureuse de cette furtive dérivation de l’éternel métro-boulot-dodo, heureuse de cette attention si particulière et inattendue portée à mon égard, heureuse de vivre.
Nous étions comme dans une bulle, malgré les dizaines de personnes qui nous entouraient, reliés par ce tendre effleurement de mains, judicieusement caché aux yeux des autres car à première vue innocent mais malgré tout coupable.
Le fait qu’il était quatre heures du matin et que j’aurais dû être rentrée chez moi depuis un certain temps déjà m’importait à peine.
Je voulais juste que cet instant dure une éternité. Je voulais juste t’apprivoiser, m’envelopper dans la chaleur de tes bras, sentir ton odeur, caresser ta barbe négligemment rasée, passer ma main dans tes belles boucles rousses et m’endormir à tes côtés
Tout cela est onirique à l’excès, penses-tu. Mais toi, que voulais-tu ? N’as-tu pas apprécié ce sympathique moment de répit ?
Était-ce le bouton que j’avais sur le front ? Était-ce le culot que j’ai eu malgré ma timidité maladive ? Profiter d’un simple jeu qui consistait en se tenir la main d’une façon quasi infantile pour―Oui, j’ai été ridicule, mais…
Pourquoi ? Pourquoi ce silence ? Pourquoi ce désintérêt à mon égard à peine le jour levé ?
Le temps passe tellement vite. Les souvenirs, les désirs inachevés, eux, restent longtemps, accablent, jusqu’à en devenir handicapants et douloureux. Le temps du deuil est passé, pas celui de l’incompréhension.
À moins que tout cela ne tienne qu’à une simple raison. Car j’ai seize ans et toi vingt-huit.

Il est un peu maladroit ce texte, on sent que tu es jeune, mais aussi, on sent que tu l'as écrit avec tes tripes, et il me touche.

À moins que tout cela ne tienne qu’à une simple raison. Car j’ai seize ans et toi vingt-huit.

Et si : "À moins que tout cela ne tienne qu’à une simple raison : j’ai seize ans et toi vingt-huit." ?

Epurer... ;-)

C'est cromignon, ça me plait.

Bienvenue ici !

Merci pour vos remarques assez positives, je dois dire que je m'attendais à bien pire.
D'ailleurs, j'ai pas mal hésité avant de le poster car je suis tout à fait consciente qu'il est loin d'être irréprochable et que certaines formulations sont assez maladroites et un peu 'recyclées'...
Mais bon, comme je l'ai dit dans la rubrique 'présentez-vous', je crois qu'il faut un début à tout et je pense que je ne peux que m'améliorer avec le temps.
J'ai déjà apporté aux textes les quelques modifications suggérées et j'en attends d'autres avant d'éventuellement le reposter (en cas de modifications importantes).

Bonne soirée :-)
C.

Un histoire émouvante, dont les tourments sont palpables. Des questions sans réponses, des plus banales (ah ces boutons sur le front !) aux plus douloureuses "pourquoi ce silence".

J'aime beaucoup, c'est simple, concis, mais très évocateur.

Clothilde a écrit:j'ai pas mal hésité avant de le poster car je suis tout à fait consciente qu'il est loin d'être irréprochable.

Aucun texte, ici ni ailleurs, n'est irréprochable.
Il faut essayer de se rapprocher de l'irréprochable.
C'est le but du site, "atelier d'écriture".
Bon courage pour cette évolution.

Bonsoir,

Un regard + 1 adjectif,
Un sourire + 2 adjectifs,
Une main + 3 adjectifs ...
J'aime beaucoup cette richesse et ce type de construction ... dont on peut demander encore plus !
Où se trouve ce canapé-lit pour être entouré de dizaines de personnes ? Si la foule qui isole autant que la solitude est nécessaire, j'aurais plutôt situé la scène sur une banquette d'un wagon de métro.
Quatre fois heureuse en deux lignes : c'est peut-être un effet de style voulu mais je trouve cela dommage après la richesse de la première ligne !
Nous étions ... reliés ... cachés ... innocents ... coupables.
... m'importait peu : c'est une expression consacrée ...
N'as-tu pas apprécié ce moment de bonheur ? Le répit suppose qu'il va y avoir une tâche importante à accomplir ou un grand danger à surmonter, rien ne le laisse entendre ici.
... se tenir la main d'une façon quasi infantile pour (verbe ?)
Le temps du deuil est passé, cette constatation me semble appeler un imparfait dans : j'avais seize ans et toi vingt-huit.
Voilà, quelques remarques. Mais j'ai beaucoup aimé ce texte, original, très riche, très doux et un peu mystérieux.

Amicalement,
midnightrambler

j'imagine bien sur une prélude de bach.

Le texte est touchant par son questionnement sans réponse, ces doutes face au silence, accentués par la douceur des souvenirs.
Et la simplicité des émotions décrites renforce ce sentiment.

Mais certaines phrases manquent de fluidité, sont un peu lourdes ou trop explicatives, ou appliquées. Exemples :
- Heureuse de cette furtive dérivation de l’éternel métro-boulot-dodo, heureuse de cette attention si particulière et inattendue portée à mon égard
- judicieusement caché aux yeux des autres car à première vue innocent mais malgré tout coupable
- Profiter d’un simple jeu qui consistait en se tenir la main d’une façon quasi infantile pour―Oui, j’ai été ridicule, mais…

J’aime beaucoup ce passage, tout simple, attendrissant, il fait plus naturel que certains autres paragraphes, comme si l’émotion passait plus facilement que les descriptions, sortait plus aisément (ce n’est que mon impression à la lecture).
Je voulais juste que cet instant dure une éternité. Je voulais juste t’apprivoiser, m’envelopper dans la chaleur de tes bras, sentir ton odeur, caresser ta barbe négligemment rasée, passer ma main dans tes belles boucles rousses et m’endormir à tes côtés

Bienvenue !

midnightrambler a écrit:Où se trouve ce canapé-lit pour être entouré de dizaines de personnes ?

Perso je l'ai aussitôt imaginé dans un séjour où des jeunes font la teuf en l'absence des parents
;-)

C’est un texte très touchant car il nous renvoie à nos propres souvenirs, à cette époque si complexe, étourdissante et douloureuse. Bravo, tu arrives à faire passer de l’émotion, de la sincérité dans ton récit. C’est une grande qualité.

Pour moi, les maladresses sont :
-la première phrase : « un regard profond » : non, bien trop lu. Imagine-le, ce regard : il n’est pas « simplement » profond, il te dit quelque chose, il te suggère ou te cache… Idem pour le sourire, les adjectifs sont plats.
-« judicieusement caché aux yeux des autres car à première vue innocent mais malgré tout coupable. » : je trouve lourd l’enchainement des propositions.
-« N’as-tu pas apprécié ce sympathique moment de répit ? » sympathique, à mon avis, ne va pas : tu sors du registre de l’émotion pour passer sur une amitié plus distante.

Le passage au présent ne me choque pas. La fin, l’écart d’âge, est superbe dans ce qu’elle signe.

Bienvenue et merci pour cette lecture !

Encore une fois, merci à tous pour vos remarques encourageantes et qui m'aident vraiment.
Alors, en ce qui concerne le lieu, mentor a 'bien' imaginé (en tout cas, situé cette scène dans un salon lors d'une "teuf" était mon intention - à part qu'il n'est pas réellement question de parents absents... ce n'est qu'un détail).
Bon, il se trouve que c'est de l'autofiction. Mais étant donné que je ne donne pas tellement de descriptions ou de détails quant au lieu, chacun est libre d'imaginer un peu ce qu'il souhaite... enfin, je crois.

Mais ce S., ne serait-ce pas le narrateur du "non je ne me laisserai pas damner..." ?

Sinon, j'ai trouvé ce texte frais, tourmenté, touchant jusque dans ses petites maladresses.