Figures de style 4 : Nina
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Figures de style 4 : Nina
Je ne pensais pas revenir un jour.
Et je suis là.
Juste devant le phare Ouest, blanc rouillé sur ciel ardoise, gardien de mon enfance, phallus tutélaire, sa grande ombre allongée sur la lande fourrée !
Le phare Ouest où Nina avait perdu et la tête et son slip par un jour de marée, de vent et de lumière, sous l’œil épieur des goélands argentés - et sans regrets, sauf pour le slip parce que le soutien-gorge, du coup n’était plus assorti à rien… Nous l’avions choisi ensemble, dentelle grise et blanche, à la Fée Minité.
Nina et Paule, seize ans, 85, bonnets B, et tout pareil, jumelles quasiment.
C’était la première fois que j’y revenais, et les embruns, n’est-ce pas …
Ces amitiés d’enfance, qu’on croit coriaces comme la bruyère des landes, et que le vent finit par promener, désolées, dans les bois de pins, avec des bruits plaintifs qui s’essoufflent flou comme un cri de hibou…
Nina, Nina qui sur le ventre t’étais fait tatouer une salamandre, qui te parfumais à la coriandre, quelle salade t’as voulu me vendre ?
Le vent siffle, joue du rasoir et de mes nerfs, le phare qui s’approche commence à me murmurer des souvenirs, m’évoque de grandioses moments d’une indicible banalité, comme quand élève de sixième je me suis cassée la gueule au collège sur une plaque de verglas pour atterrir sur les pieds du plus beau mec de l'école, un grand de troisième, dont j'étais amoureuse of course comme toutes les petites connes du coin, et que je n'osais même pas regarder...ça l'a fait rire lui et ses copains
moi aussi ça me fait rire...aujourd'hui. Enfin non, pas aujourd’hui, justement !
Nina et moi. Il n’y avait pas plus amicale que la haine qui nous avait réunies autour des mêmes objets de détestation : ce bourg plein de bigotes et de ragots, la bouffe de la cantine et …mon père ! Une fois, tu lui avais piqué son couteau, tôt après le repas, pas qu’il s’en aperçoive tout de suite ! Suisse, il était, son couteau. Tu l’as peut-être encore ?
Les comprimés que j’ai pris me rendent vaseuse, j’ai la tête qui tourne, je ne suis pas sûre de pouvoir conduire…
Il va falloir que j’y aille et je ne veux pas.
Pardon, ma belle, mais j’ai pas envie de te voir en dentelle blanche. Grise oui.
C’est pas possible que tu aies eu une idée aussi tordue. La haine c’est comme un élastique, ça s’allonge, ça s’allonge, ça s’amenuise un peu mais ça disparaît pas…
Il va pleuvoir, non, il pleut.
On n’y voit plus à trois pas.
Je me fourre vite fait dans la voiture : mes mousselines sont pitoyables ! Tant mieux, j’aurais un prétexte pour rater ta sortie de l’église !
Au phare Ouest, quand il y a des tempêtes, ça ne plaisante pas !
− Madame, s’il vous plaît …
J’allais pas boucler mes portières !
Paradoxe : c’est l’autostoppeur qui m’a fait redémarrer !
C’est lui qui a conduit - prudemment, je dois le reconnaître.
Jusqu’à l’église.
Là, j’ai avalé ma salive et j’ai félicité Nina et mon père.
Et je suis là.
Juste devant le phare Ouest, blanc rouillé sur ciel ardoise, gardien de mon enfance, phallus tutélaire, sa grande ombre allongée sur la lande fourrée !
Le phare Ouest où Nina avait perdu et la tête et son slip par un jour de marée, de vent et de lumière, sous l’œil épieur des goélands argentés - et sans regrets, sauf pour le slip parce que le soutien-gorge, du coup n’était plus assorti à rien… Nous l’avions choisi ensemble, dentelle grise et blanche, à la Fée Minité.
Nina et Paule, seize ans, 85, bonnets B, et tout pareil, jumelles quasiment.
C’était la première fois que j’y revenais, et les embruns, n’est-ce pas …
Ces amitiés d’enfance, qu’on croit coriaces comme la bruyère des landes, et que le vent finit par promener, désolées, dans les bois de pins, avec des bruits plaintifs qui s’essoufflent flou comme un cri de hibou…
Nina, Nina qui sur le ventre t’étais fait tatouer une salamandre, qui te parfumais à la coriandre, quelle salade t’as voulu me vendre ?
Le vent siffle, joue du rasoir et de mes nerfs, le phare qui s’approche commence à me murmurer des souvenirs, m’évoque de grandioses moments d’une indicible banalité, comme quand élève de sixième je me suis cassée la gueule au collège sur une plaque de verglas pour atterrir sur les pieds du plus beau mec de l'école, un grand de troisième, dont j'étais amoureuse of course comme toutes les petites connes du coin, et que je n'osais même pas regarder...ça l'a fait rire lui et ses copains
moi aussi ça me fait rire...aujourd'hui. Enfin non, pas aujourd’hui, justement !
Nina et moi. Il n’y avait pas plus amicale que la haine qui nous avait réunies autour des mêmes objets de détestation : ce bourg plein de bigotes et de ragots, la bouffe de la cantine et …mon père ! Une fois, tu lui avais piqué son couteau, tôt après le repas, pas qu’il s’en aperçoive tout de suite ! Suisse, il était, son couteau. Tu l’as peut-être encore ?
Les comprimés que j’ai pris me rendent vaseuse, j’ai la tête qui tourne, je ne suis pas sûre de pouvoir conduire…
Il va falloir que j’y aille et je ne veux pas.
Pardon, ma belle, mais j’ai pas envie de te voir en dentelle blanche. Grise oui.
C’est pas possible que tu aies eu une idée aussi tordue. La haine c’est comme un élastique, ça s’allonge, ça s’allonge, ça s’amenuise un peu mais ça disparaît pas…
Il va pleuvoir, non, il pleut.
On n’y voit plus à trois pas.
Je me fourre vite fait dans la voiture : mes mousselines sont pitoyables ! Tant mieux, j’aurais un prétexte pour rater ta sortie de l’église !
Au phare Ouest, quand il y a des tempêtes, ça ne plaisante pas !
− Madame, s’il vous plaît …
J’allais pas boucler mes portières !
Paradoxe : c’est l’autostoppeur qui m’a fait redémarrer !
C’est lui qui a conduit - prudemment, je dois le reconnaître.
Jusqu’à l’église.
Là, j’ai avalé ma salive et j’ai félicité Nina et mon père.
Invité- Invité
Re: Figures de style 4 : Nina
J'adore ! Quelle belle langue mêlée, à la fois drôle et poétique, profonde et naïve, pleine de fraîcheur et de poids !
Les contraintes passent toutes seules (super pour l'anadiplose : pour que la figure ne soit pas trop visible, tu varies le timbre et tu trouves le juste). J'ai aussi beaucoup aimé le zeugme et tu nous en as même gratifiés d'un second ("Le phare Ouest où Nina avait perdu et la tête et son slip par un jour de marée") ! Bon, simplement la prosopopée, quand même un peu détournée... disons que le phare qui murmure me plaît beaucoup, mais la particularité de cette figure c'est souvent que les paroles de l'animal, de l'objet inanimé, de l'abstraction sont souvent concrètes, intégrées pour de bon au texte !
En tout cas, super. Plein d'admiration pour cette gouaille poétique.
Les contraintes passent toutes seules (super pour l'anadiplose : pour que la figure ne soit pas trop visible, tu varies le timbre et tu trouves le juste). J'ai aussi beaucoup aimé le zeugme et tu nous en as même gratifiés d'un second ("Le phare Ouest où Nina avait perdu et la tête et son slip par un jour de marée") ! Bon, simplement la prosopopée, quand même un peu détournée... disons que le phare qui murmure me plaît beaucoup, mais la particularité de cette figure c'est souvent que les paroles de l'animal, de l'objet inanimé, de l'abstraction sont souvent concrètes, intégrées pour de bon au texte !
En tout cas, super. Plein d'admiration pour cette gouaille poétique.
Invité- Invité
Re: Figures de style 4 : Nina
Pardon, je me suis trompé de nom de figure :
"Les contraintes passent toutes seules (super pour l'anadiplose : pour que la figure ne soit pas trop visible, tu varies le timbre et tu trouves le juste)." je voulais dire évidemment : "super pour l'homéotéleute" !
"Les contraintes passent toutes seules (super pour l'anadiplose : pour que la figure ne soit pas trop visible, tu varies le timbre et tu trouves le juste)." je voulais dire évidemment : "super pour l'homéotéleute" !
Invité- Invité
Re: Figures de style 4 : Nina
J'oubliais : l'oxymore n'en est pas vraiment un, il faut techniquement que les deux termes soient juxtaposés, sans quoi c'est une antithèse.
Invité- Invité
Re: Figures de style 4 : Nina
J’aime beaucoup. L’histoire, l’ambiance, ta prose colorée, pleine de vie, de poésie, de profondeur et de folie.
Et particulièrement ceci : « Ces amitiés d’enfance, qu’on croit coriaces comme la bruyère des landes, et que le vent finit par promener, désolées, dans les bois de pins, avec des bruits plaintifs qui s’essoufflent flou comme un cri de hibou… »
Et ça : « La haine c’est comme un élastique, ça s’allonge, ça s’allonge, ça s’amenuise un peu mais ça disparaît pas… »
Techniquement, je m’interroge sur le bénéfice ou pas des changements d’optique de la narratrice qui parle d’abord en « je », puis en « nous », puis en « elles », puis en « tu ». Ça me paraît beaucoup.
Et particulièrement ceci : « Ces amitiés d’enfance, qu’on croit coriaces comme la bruyère des landes, et que le vent finit par promener, désolées, dans les bois de pins, avec des bruits plaintifs qui s’essoufflent flou comme un cri de hibou… »
Et ça : « La haine c’est comme un élastique, ça s’allonge, ça s’allonge, ça s’amenuise un peu mais ça disparaît pas… »
Techniquement, je m’interroge sur le bénéfice ou pas des changements d’optique de la narratrice qui parle d’abord en « je », puis en « nous », puis en « elles », puis en « tu ». Ça me paraît beaucoup.
Kilis- Nombre de messages : 6085
Age : 78
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Figures de style 4 : Nina
ben écoute, tout simplement super; comme d'hab !
nous avons toutes deux usé de haine amicale, il me semble
la chute, parfaite
tout : bien !
nous avons toutes deux usé de haine amicale, il me semble
la chute, parfaite
tout : bien !
Janis- Nombre de messages : 13490
Age : 63
Date d'inscription : 18/09/2011
Re: Figures de style 4 : Nina
Bien aimé ce passage là : Là, j’ai avalé ma salive et j’ai félicité Nina et mon père.
bertrand-môgendre- Nombre de messages : 7526
Age : 104
Date d'inscription : 15/08/2007
Re: Figures de style 4 : Nina
ouah.... ce n'est absolument pas constructif comme remarque. d'une inutilité absolu. Mais ouah...
polgara- Nombre de messages : 1440
Age : 49
Localisation : Tournefeuille, et virevolte aussi
Date d'inscription : 27/02/2012
Re: Figures de style 4 : Nina
Ben que dire ? C'est du Coline D. Un tiers de poésie, un tiers de rosserie, un tiers d'humour et un grand tiers de talent. Ca fait quatre tiers ? Et alors, quand on aime on ne compte pas. Bien aimé le phallus tutélaire et la haine comme un élastique. C'est vrai que c'est comme un élastique, la haine : ça te revient toujours dans la gueule...
Gobu- Nombre de messages : 2400
Age : 70
Date d'inscription : 18/06/2007
Re: Figures de style 4 : Nina
Quelle belle chute, et l’avant n’a rien à lui envier.
Tu parviens à en dire beaucoup en peu de mots, et j’ai aimé les embruns, l’amitié, le lieu, tout donc !
Tu parviens à en dire beaucoup en peu de mots, et j’ai aimé les embruns, l’amitié, le lieu, tout donc !
elea- Nombre de messages : 4894
Age : 51
Localisation : Au bout de mes doigts
Date d'inscription : 09/04/2010
Re: Figures de style 4 : Nina
Comme kilis, tu as un univers fort et bon, qui t’appartient en plein, une vraie poésie qui sert un monde réel, un monde que tu sais rendre réel.
Et que j’aime
Ton style, tes mots, leur sens, leur rythme ont une force inouïe.
Alors, je me demande pourquoi tu utilises tous ces putains de points d’exclamation inutiles.
celui-là, notamment est grotesque
Et que j’aime
Ton style, tes mots, leur sens, leur rythme ont une force inouïe.
Alors, je me demande pourquoi tu utilises tous ces putains de points d’exclamation inutiles.
celui-là, notamment est grotesque
et dieu sait que l'image est bellecoline Dé a écrit:Juste devant le phare Ouest, blanc rouillé sur ciel ardoise, gardien de mon enfance, phallus tutélaire, sa grande ombre allongée sur la lande fourrée !
grieg- Nombre de messages : 6156
Localisation : plus très loin
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Figures de style 4 : Nina
Mon GPS en panne, à la patte d'oie j'ai pris sans le faire exprès l'onglet prose. Ah ! voilà donc le résultat des contraintes dont j'avais lu, sans rien y comprendre, la dénomination absconse. Et du coup Colline D, j'ai eu le loisir, et la curiosité, de parcourir ton texte dont je n'ai perdu aucune miette et qui m'amène à te féliciter pour le bel entrain et la poésie que tu y as mis.
Tollelege- Nombre de messages : 194
Age : 83
Date d'inscription : 27/08/2011
Lecture
Sans génie. Trop verbeux.
Je n'ai pas passé la première ligne.
Carnavale- Nombre de messages : 27
Age : 37
Date d'inscription : 06/03/2012
Re: Figures de style 4 : Nina
Carnavale a écrit:Sans génie. Trop verbeux.
Je n'ai pas passé la première ligne.
:-))) !
Invité- Invité
Re: Figures de style 4 : Nina
Ben quoi :-) ?
On n'a pas le droit de commenter les commentaires ^^.
Carnavale- Nombre de messages : 27
Age : 37
Date d'inscription : 06/03/2012
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