Exo Une image, mille mots : Brocolis killeuse

La terre est rouge comme une tomate et j’ai scié tous les brocolis.

J’aime le dénuement, l’épuration, et ces têtes en bouquets me défrisent. Avec la patience d’un prisonnier acharné sur son barreau, je lime à loisir, bucheronne d’une forêt miniature, provocante de luxure.

Je fais tomber les têtes, une à une, jouissant du bruit mat de chaque décapitée sur la toile cirée. Et m’accorde le pervers plaisir de laisser trois orphelines, nues, épargnées pour mieux les abandonner au milieu d’un bois de troncs blessés, de moignons décharnés.

J’aime entendre la complainte des coupées, le jus suinte des corps étêtés, l’odeur de la chair déchiquetée enivre mes narines posées sur mes doigts assassins.
Mes ongles frémissent d’avoir, impatients, aidés la lime à faire son office, de sanglantes traînées actent encore du crime, s’étalent sur les cimes.

Je croque quelques têtes, en ogresse, et ferme les yeux lorsque mes dents crissent sur le cru, lorsque ma langue goûte l’amertume de leur suc, faisant saliver mes meurtrières papilles.

J’achève certaines agonisantes à la vapeur, fais griller les autres sur le bûcher, avant de les mixer sauvagement.

Je broie les épluchures, composte les restes des corps démembrés, incinère les fanes et les pelures. En économe, je m’entraîne sur tous les légumes.

Mes scènes de crime sont minutieusement nettoyées, aseptisées, toute empreinte effacée avant la prise du cliché. Pour la postérité.

J’aime susciter l’horreur des lecteurs. Mes photos s’étalent à la une, mes larcins apeurent les jardinières, plus un potager n’est laissé sans surveillance, je suis devenue la hantise des maraîchers. Les végétariens se sont formés en milices et me pourchassent, en rondes de nuit dans les jardins privés, sous les serres moites, le long des allées sarclées.

Les plus éminents spécialistes se sont, en vain, penchés sur mes motivations.
Je n’ai qu’un seul alibi : je hais les brocolis.

Excellent ! Et cruauté mentale envers le navet, ça ne te tente pas ?
Je te vois bien dans le rôle, avec ce sadisme effréné et cette plume incisive !
Voire... molaire !

Elea, ne m’en veux pas mais je m’endors, j’ai du mal à tenir ton rythme languissant. Pourtant, je reconnais là une plume pleine de promesses… Je fais encore un effort, je vais le relire encore et encore ce texte interminable. Une minute, s’il te plaît…………… Ça y est je suis réveillé !
Je te donne ma vision : tu les vois ces brocolis élagués ? Alors élaguons davantage ; lorsque nous sentons de dire quatre mots, divisons au moins par deux, synthétisons !

Car, finalement, l'essentiel est que tu hais les brocolis.

Très amicalement
Pascal

si je voulais écrire un poème
je prends toutes ces images et j'en fais du jus en pages
concentré

si je voulais écrire une histoire
je prends toutes ces images et j'ajoute l'arrivée de la peau lisse
pour sauver une belle
avant la fin du massacre..

(je rejoins un petit peu l'avis de Pascal-Claude, donc)

mais ce qui ne m'empèche pas d'aimer le cadrage des photos

Je ne voudrais pour rien au monde être brocoli.
J'adore les trouvailles de chacun.

Je t'aurais bien admirée plus longtemps dans ton rôle de bourreau sadique.

La complainte des têtes coupées selon Elea.
Une bourelle qui prend son temps, jouit de chaque coup de canif et de la mise en scène de son crime ... Glaçant !