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La voix de l'amante

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troupi2
Polixène
Gemüth
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La voix de l'amante Empty La voix de l'amante

Message  Gemüth Ven 6 Sep 2013 - 20:14

La voix de l'amante

I

A la glauque pâleur des crépuscules
Appuyé contre un arbre agonisant,
Il y a cet enfant tout haletant
Qui respire des bouffées minuscules,
La sueur au front, les yeux hébétés,
Une main posée sur son poitrail nu,
Il presse sur son sein le cœur fendu
Et les tessons de sa candeur passée
Font dans sa paume de larges morsures,
Des plaies silencieuses et constellées
Comme celles laissées par de vieux rets
Aux mailles nouées et à la dent dure ;
Et le garçon, son bachi à la main
Regarde, triste, le pompon rougeâtre
Qui semble une tâche de sang folâtre
Sur la toile de son béret marin.

Ce chérubin est un ancien gabier
Qui a mis les océans en poème,
Et l'on voit à ses habits de bohème
Que ses loques sont rongées des marées,
Le sel a taillé le marbre de son
Visage et érodé sa peau d'opale,
Sous les coups lents des lames minérales,
Dans un furieux déluge lacrymal,
Ses yeux bleus ont saigné à l'unisson
Des larmes aiguës comme le regret
Et les perles aux tranchants de poignards
Ont creusé des cicatrices blafardes,
Car l'enfant, flagellé de souvenirs
Inouïs, a dans le cœur quelque chose
Comme un lilas fané, ou une rose,
Qui lui tord la chair et le fait souffrir !

II

Avant, il violait les mers indomptables,
Sûr de sa force et sûr de son courage,
Et il criait à tout son équipage
« L'amour dure ce que dure la rose,
Il n'est pas de maux qui du bien n'éclosent !
Ô matelots, nous sommes l'Ineffable
Liberté ! Nous, les fiers Immaculés,
Les anges abreuvés des aventures,
Nous qui voguons sous de vierges voilures,
Il n'est rien qui nous puisse enchaîner,
Nulle idée, nulle femme, nulle fin,
Nous sommes à la fois le passé et le destin,
Tous nos âges se tiennent par la main,
Et si nous avons soif de tes saveurs
Ô ma vie, c'est que nous voulons mourir
En poètes, sans t'aimer, ni te haïr,
Mais le coeur hilare allumé de pleurs !

Et comme ils faisaient tous cette prière,
Tandis que la nef engageait Messine,
Nul ne prit garde à la belle sibylle  
Qui languissait sur les rivages verts,
Ses cheveux froids comme des serpents noirs
Se balançaient mollement à sa tête,
Leurs fissons frétillant comme des glas
Sifflaient vers eux des paroles secrètes,
Alors l'amour vint souffler sur leurs peaux,
Et le frisson leur pénétra les os !
Car, sous cette vivante chevelure,
Luisaient deux grandes gemmes assassines
Et sous elles, deux lèvres léonines
S'entrouvrirent pour murmurer bientôt
Des madrigaux effrayants de beauté !
Alors, irrésistiblement charmés,
Ils firent voile vers les brisants rouges,
Sans voir que les écueils comme des vouges
Sanguinolaient des chairs déchiquetées

III

Ô ma sirène, ta poitrine crue
Est une nécropole sur la grève,
Où se jettent à mourir tous les rêves
Des hommes ; et nos prières déçues
Font sur ta tête comme une couronne,
Un diadème serti de désespoir,
De fleurs d'écumes et de pleurs barbares
Posés sur ta coiffure de gorgone !
Sublime sorcière, toi qui t'étales
Sur un pare-terre de têtes tranchées,
La plage jonchée de membres épars
Est pour toi un jardin d'enfants cruel,
Tu t'y pares des charognes pastelles
En faisant de leurs peaux d'hideux foulards !
Les vertèbres nues sont ton assemblée,
Les crânes foulés trônent à tes pieds,
Et devant toi les carcasses damnées
Fleurent la mer de senteurs infernales,
Sirène, tu es la Mort faite femme !
Et ta voix un fatal enchantement,
Où rugissent l'Achéron et le Styx,
Mêlant, dans de délicieux hurlements,
Le chant d'Orphée, les larmes d'Eurydice
Et les harmonies déchirées du néant,
Et moi-même, violé par tes éclats
J'ai été happé dans le cauchemar
Des nuits sans fin et des amours miroirs
Où l'on se mire mourant sur la croix !
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Message  Polixène Dim 8 Sep 2013 - 20:01

Ce texte est vraiment très très chargé, et offre au lecteur une imagerie infantile et frelatée. On a l'impression d'une copie de copie d'imitation...C'est que non seulement l'ambiance "noire" est assénée à chaque vers ou presque, mais en plus ton propos n'est pas clair: à la fin de la lecture, on se demande encore où tu veux en venir.
J'ai lu plusieurs fois et j'ai été mal à l'aise à chaque fois, malgré quelques vers un peu plus légers, tels ces deux:
Nous sommes à la fois le passé et le destin,
Tous nos âges se tiennent par la main


Je te suggère, si tu veux que le lecteur accoste à ton rivage, d'élaguer les épines et les broussailles, d'alléger beaucoup , même si tu veux créer une ambiance oppressante,de te méfier des incrustations culturelles et surtout de te poser la question du message que tu veux faire passer.
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Message  Gemüth Dim 8 Sep 2013 - 20:51

Spoiler:

Chère Polixène,

Oui, en effet, c'est un texte extrêmement chargé, qui n'a rien de la légèreté ou de la belle naïveté qui, à ce que je crois, font le miel de beaucoup de lecteurs de VE. Je dis ça sans aucune forme d'hostilité aucune, ni pointe d'ironie, ce qui serait bien malpoli. Simplement, l'univers et les émotions que je connais en ce moment me font croire que l'essentiel n'est pas là, et qu'il y a un ailleurs à oser suggérer, surtout en poésie. C'est un postulat tout à fait subjectif que je n'espère pas imposer. Cet ailleurs dont je voudrais tout de même vous dire deux mots, c'est la souffrance, la solitude, la déception dans ce qu'elles ont d'horreur et de beauté. Je crois, naïvement moi aussi, que l'essentiel de la vie se joue là-dedans, et qu'à bien parler de ces choses qu'on abhorre, on les peut rendre aimables, voire, peut-être, désirables... Bien-sûr, beaucoup de poètes l'ont fait bien avant moi, je n'ai pas du tout la prétention d'inaugurer quoi que ce soit, ni même de me hausser au quart du tiers du commencement de leur talent. On peut même me reprocher d'avoir 150 ans de retard sur notre temps, tant j'ai fait preuve, avec mon petit texte, d'une profession de foi romantique. C'est d'ailleurs peut-être pour ça que vous détectez tant d'artificialité dans ce texte, peut-être porte-t-il trop la marque de certains maîtres qui sentent la poussière, Hugo, Poe et Baudelaire en particulier.

Je rebondis sur votre jolie formule de "copie de copie de l'imitation". Je ne sais pas si vous l'avez fait à dessein, mais cela sonne pour moi comme un écho de Platon. Or précisément, si ce poème est aussi chargé et aussi "broussailleux", c'est parce qu'il a l'ambition (sans doute trop grande) de procéder d'une certaine posture philosophique, du moins de certains partis pris, lesquels commandent eux-même la thématique et le traitement de cette thématique. Peut-être que ce qu'il y a de plus dérangeant dans ce texte, c'est sa charge idéologique, qui est résolument tournée vers une approbation absolue et sans condition de ce que je crois être la noirceur du monde. Tout mon souci est donc de suggérer cet insupportable, et à cet égard, j'essaie moins de plaire que de déranger. Si le texte n'est "pas clair", c'est, précisément, qu'il a pour vocation de dire l'obscurité, si vous voulez... et je crois que l'obscurité ne se voit que lorsqu'il fait sombre. Plus simplement, mon petit projet n'est pas vraiment de donner à voir la noirceur, ce serait, je crois, une terrible faute de méthode, et aussi une faute de goût. C'est pourquoi je cherche plutôt à la suggérer, cette noirceur qui grouille, principalement par un travail sonore qui a pour fonction de créer une ambiance particulière et oppressante. Vous l'avez, je crois, très bien vue, ou entendue, et c'est pour ça que j'apprécie votre critique : je la trouve attentive et lucide.

Si vous voulez, mon ambition, c'est de ne pas faire sens par le mot, de ne pas faire sens par le sens, et encore moins par l'image. Mon idée, c'est de faire sens par le son pur, je veux que la peau vibre avant que les yeux ne s'étonnent. Et là, je suis pris en flagrant délit d'imitateur, car il en est un qui s'y est déjà essayé avant moi, et avec, une fois encore, infiniment plus de talent...

Voilà, j'espère avoir un peu expliqué mes motivations et le pourquoi de cette "pompe" bien étouffante.
Je vous remercie pour votre commentaire si constructif et si consciencieux, cela m'a soulagé de me savoir lu,

Bien à vous,

Ombrageusement,

- Gemüth

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Message  troupi2 Lun 9 Sep 2013 - 5:56

Quelques perles posées ici et là me font lire ce poème comme un fragment de tragédie antique et je serais surpris que l'auteur ait voulu autre chose. Si c'est bien le cas c'est bien écrit, il faut plusieurs lectures pour en venir à bout et encore ce n'est pas certain. J'ai trouvé de très belles images : " les tessons de sa candeur passée" "Nous sommes à la fois le passé et le destin," "Ce chérubin est un ancien gabier Qui a mis les océans en poème," mais il y en a bien d'autres. En résumé un texte assez lourd mais intéressant.

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Message  seyne Lun 9 Sep 2013 - 9:37

Gemüth a écrit:Chère Polixène,

Oui, en effet, c'est un texte extrêmement chargé, qui n'a rien de la légèreté ou de la belle naïveté qui, à ce que je crois, font le miel de beaucoup de lecteurs de VE. Je dis ça sans aucune forme d'hostilité aucune, ni pointe d'ironie, ce qui serait bien malpoli. Simplement, l'univers et les émotions que je connais en ce moment me font croire que l'essentiel n'est pas là, et qu'il y a un ailleurs à oser suggérer, surtout en poésie. C'est un postulat tout à fait subjectif que je n'espère pas imposer. Cet ailleurs dont je voudrais tout de même vous dire deux mots, c'est la souffrance, la solitude, la déception dans ce qu'elles ont d'horreur et de beauté. Je crois, naïvement moi aussi, que l'essentiel de la vie se joue là-dedans, et qu'à bien parler de ces choses qu'on abhorre, on les peut rendre aimables, voire, peut-être, désirables... Bien-sûr, beaucoup de poètes l'ont fait bien avant moi, je n'ai pas du tout la prétention d'inaugurer quoi que ce soit, ni même de me hausser au quart du tiers du commencement de leur talent. On peut même me reprocher d'avoir 150 ans de retard sur notre temps, tant j'ai fait preuve, avec mon petit texte, d'une profession de foi romantique. C'est d'ailleurs peut-être pour ça que vous détectez tant d'artificialité dans ce texte, peut-être porte-t-il trop la marque de certains maîtres qui sentent la poussière, Hugo, Poe et Baudelaire en particulier.

Je rebondis sur votre jolie formule de "copie de copie de l'imitation". Je ne sais pas si vous l'avez fait à dessein, mais cela sonne pour moi comme un écho de Platon. Or précisément, si ce poème est aussi chargé et aussi "broussailleux", c'est parce qu'il a l'ambition (sans doute trop grande) de procéder d'une certaine posture philosophique, du moins de certains partis pris, lesquels commandent eux-même la thématique et le traitement de cette thématique. Peut-être que ce qu'il y a de plus dérangeant dans ce texte, c'est sa charge idéologique, qui est résolument tournée vers une approbation absolue et sans condition de ce que je crois être la noirceur du monde. Tout mon souci est donc de suggérer cet insupportable, et à cet égard, j'essaie moins de plaire que de déranger. Si le texte n'est "pas clair", c'est, précisément, qu'il a pour vocation de dire l'obscurité, si vous voulez... et je crois que l'obscurité ne se voit que lorsqu'il fait sombre. Plus simplement, mon petit projet n'est pas vraiment de donner à voir la noirceur, ce serait, je crois, une terrible faute de méthode, et aussi une faute de goût. C'est pourquoi je cherche plutôt à la suggérer, cette noirceur qui grouille, principalement par un travail sonore qui a pour fonction de créer une ambiance particulière et oppressante. Vous l'avez, je crois, très bien vue, ou entendue, et c'est pour ça que j'apprécie votre critique : je la trouve attentive et lucide.

Si vous voulez, mon ambition, c'est de ne pas faire sens par le mot, de ne pas faire sens par le sens, et encore moins par l'image. Mon idée, c'est de faire sens par le son pur, je veux que la peau vibre avant que les yeux ne s'étonnent. Et là, je suis pris en flagrant délit d'imitateur, car il en est un qui s'y est déjà essayé avant moi, et avec, une fois encore, infiniment plus de talent...

Voilà, j'espère avoir un peu expliqué mes motivations et le pourquoi de cette "pompe" bien étouffante.
Je vous remercie pour votre commentaire si constructif et si consciencieux, cela m'a soulagé de me savoir lu,

Bien à vous,

Ombrageusement,

- Gemüth
Tout ça est bien intéressant. En ce qui me concerne, ce n'est pas du tout le côté sombre qui me gêne, et je partage assez ce que tu en dis. Ce qui me gêne c'est le recours à des mots, un style et des images du XIXème siècle. Pour moi l'art est comme un arbre dont les racines s'enfoncent dans le sol de son époque, dont il témoigne et que peut-être il doit faire évoluer  par son travail, sur la forme et sur le fond. Même si la façon dont il déploie ses branches et ses feuilles renvoie à son essence propre, personnelle, et si l'air et les météores qu'il habite sont éternels, inchangés (quelle belle métaphore !
J'ai le sentiment que le repli vers des formes anciennes c'est un peu une fuite.

Mais je sais que la moitié des gens ici ne seront pas d'accord.

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Message  Frédéric Prunier Lun 9 Sep 2013 - 9:41

j'ai renaclé plusieurs fois avant de lire.... je zap, je zappe, picore sur le site quelques secondes poétiques, et la longueur me faisait peur.

je suis donc revenu
j'ai lu
et ici répondu.. )

je salue le travail, la forme, la facilité donnée au lecteur, la poésie de la phrase et du verbe...
vraiment bien écrit

après, j'ai du mal avec l'image de la salope sirène qui cause la mort du gentil conducteur de hors-bord... persoje, quand je mate au volant, je ralentis... )))... mais ça, c'est sur le fond de l'histoire... et c'est un point de vue perso... )))))))))


bravo pour la poésie du verbe !

amitié
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Message  Jano Lun 9 Sep 2013 - 17:44

Hé ben Gemüth, pour votre retour vous envoyez du lourd ! Trois longues strophes de poésie en décasyllabes, ça commence fort ! Je comprends pourquoi vous parlez de "de la légèreté ou de la belle naïveté" qui règne ici. Je crois surtout que les gens veulent se faire plaisir et n'ont pas trop envie de se lancer dans des oeuvres aussi denses. Des puristes du classique, de l'académisme, il y en a de moins en moins ou alors sur des sites plus spécialisés.
Quant au thème que vous traitez, je n'accroche pas. Ces accents de tragédie grecque ont un parfum suranné qui m'ennuie. Votre message se noie dans l'emphase et l'on ne sait plus trop exactement de quoi vous parlez.
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Message  Polixène Lun 9 Sep 2013 - 20:10

"Mon idée, c'est de faire sens par le son pur, je veux que la peau vibre avant que les yeux ne s'étonnent"
dites-vous...que n'êtes vous musicien! Le hard-rock par exemple. Là oui, la noirceur du monde, son désespoir concentré, la débilité crasse de nos sociétés et le nihilisme trouvent leur pure expression. Et j'aime bien d'ailleurs.
Je confirme, après votre explicitation, ma sensation que vous avez loupé votre objectif. Ce qui n'engage que moi et ne signifie pas que le poème soit raté, ni sans qualité aucune.
Comme vous l'affirmez vous-même, vous nagez en plein romantisme, mais sans grâce. Ce qui ne sert pas votre cause. Quant à votre posture intellectuelle, je ne permets pas de la juger, mais je vous la laisse !
A vous lire, sur un prochain texte mieux-violent !
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Message  Pussicat Sam 14 Sep 2013 - 17:59

comme aurait dit... j'oublie son nom, j'adoooorrrre l'aaaarrrrrt pompier !
votre poème à la forme d'un tronc d'arbre,
j'aime bien les arbres, moi.
on peut s'y abriter, compter fleurette, et si c'est un chêne, trouver des perles noires en grattant un peu.
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Message  Pussicat Sam 14 Sep 2013 - 18:15

deux, trois bricoles me chiffonnent, c'est le son justement, la musique... comme ces répétitions de liaisons é-é :

Aux mailles nouées et à la dent dure ;

Nous sommes à la fois le passé et le destin,


encore ici et l'enjambement que je trouve malheureux :

Le sel a taillé le marbre de son
Visage et érodé sa peau d'opale,


et le recours à "Et" en début de vers, trop facile...

mais je dis ça, c'est en passant...
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