Je suis trop bien pour eux de toute façon

Belle-de-jour, belle-de-nuit, femme de joie ou femme de mauvaise vie. Appelez-la comme vous le voulez, elle n’a pas honte de son métier. La vie est un tissu bourré d’accrocs qu’elle reprise pour une modique somme qui lui achète la satisfaction de savoir qu’elle a su arracher un sourire à un autre homme blasé dans un monde qui en compte déjà beaucoup trop. N’attribuez pas son émancipation à sa vie familiale, ne tirez pas de conclusion hâtive sur sa consommation, inexistante, d’antidépresseurs. Elle est saine d’esprit et ils le sont aussi.

Elle n’est pas assez forte pour s’enrôler dans l’armée et elle aime trop sa liberté pour aller joindre les policiers. Elle se fait la gardienne des rues et des trottoirs, d’abord en revêtant la forme du Sphynx, qui rugit son énigme aux descendants d’Œdipe, puis dans un mélange incroyable de mythes et de légendes, celle d’un Cerbère à trois nichons qui empêche la fuite de ceux qui en connaissent la réponse. Elle se lève chaque matin avec la ferme intention de faire une différence. Elle se couche chaque soir sachant qu’elle y est parvenue.

Son amour du lendemain et du surlendemain l’a conduite ici. Pour la première fois de sa vie, elle n’est pas enthousiasmée à l’idée de faire un pas vers l’avant, mais il est trop tard pour en faire un vers l’arrière. Son terrain de jeu est devenu sa prison, son tombeau. Les murs immaculés de la petite salle où elle est maintenant isolée se referment sur elle. Le rideau allait bientôt être tiré sur le plus grand film jamais tourné : de l’action, du suspense, de la romance et une fin tragique qui ferme la porte à toute suite possible.

Après une attente interminable, un homme pénètre enfin dans la pièce et lui jette un regard vide d’empathie et de compassion qui est habituellement réservé aux condamnés à mort par le juge, le jury et le bourreau.

— J’ai le regret de vous annoncer que vous êtes séropositive.

la rue ne fait pas de cadeaux, encore moins aux femmes et hommes qui vendent un petit moment tarifé, vivre est une farce bien souvent, car la réalité se demande comment la vie peut avoir tant de méchanceté

j'aime bien la construction de ce texte
on se laisse embarquer sur le versant du pourquoi et la fin nous fauche.

Merci Fred

et a moi pas de merci , çà fait plaisir de commenter