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La fourchette à poisson

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Polixène
Vigdys Swamp
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Message  Vigdys Swamp Mar 29 Sep 2015 - 12:08

« Dégagez du plateau, lui dit-il, il faut que je mette une casserole à votre place »
Les Fourmis, Boris Vian.


Je perds mon temps à auditionner un de ces types convaincus qu’un simple haussement d’épaule peut faire décoller une intrigue ; un de ces types gratifiés dès la naissance d’un inestimable talent dramatique. Pauvre cloche. A son crédit, je dois dire qu’il a la tête de l’emploi, suffisamment vague et insignifiante pour incarner l’oncle fleuriste du meilleur ami du premier rôle. Quoi qu’il en soit, son attitude gâche tout. « Le plus simple, ce serait encore de vous montrer ce dont  je suis capable » annonce-t-il  en quittant sa chaise. Le temps de lui répondre qu’il ne s’agit pas de ce genre de casting, l’homme est déjà debout, planté au milieu de mon bureau, de profil, les yeux rivés sur un mur. Immobile et silencieux. Pourquoi ne pas le laisser pratiquer son art ? J’en profite pour lancer une partie de démineur.

Épisodiquement, le comédien avance d’un pas, se racle la gorge, un peu agacé, et jette un œil à une montre imaginaire.  Les cinglés dans son genre, on ne peut même plus les recenser à Hollywood. « On peut savoir ce que vous foutez ? » je finis par lui demander, n’arrivant à rien de concluant, niveau déminage. Il met un temps considérable à sortir de sa torpeur. Pour finir, il expire longuement, sourit d’un air entendu et  se rassoit en face de moi.  « Pas toujours évident de quitter un rôle… » déclare-t-il en s’étirant la nuque.

— Bon. C’était quoi ?
— « Jeune homme en arrière-plan patientant au guichet de la poste ». Citizen Kane, Orson Welles, 1941.

J’imagine que je suis censé fondre en larmes, ou dégringoler de mon fauteuil. Je me contente de ne pas lui lancer au visage  le cendrier en fonte qui traine tout près de ma main droite. Aussi calmement que possible, je continue à faire mon boulot :

— Vous avez déjà tourné ?
— Un Ewok dans Le Retour du Jedi.
— Fantastique, dites m’en plus sans tarder…
— Kazak, membre du conseil des anciens. J’avais douze ans. Premier grand rôle. Je voulais garder le costume. Quand on a eu notre prise, Georges Lucas s’est accroupi face à moi et il a dit « Mon gars, si tous les Ewoks étaient aussi bons que toi, ils ne vivraient plus dans les arbres depuis longtemps… ». Je n’ai jamais oublié.

Le téléphone sonne. Je ne me fais pas prier :

— Jack Purvis, j’écoute.
— Hello Jack. Phil Brown, HBO. Vous me remettez ?
— Phil, bien-sûr. Comment ça se passe ?
— Formidable. Envie de planter les dents dans un stagiaire ou d’émigrer en Iran. Je me tâte…
— Je vous reçois cinq sur cinq, dis-je, jetant un œil sur mon comédien qui figure à présent un lecteur  du Times, dans un coin de la pièce.
— Je vous appelle pour la semaine prochaine…
— Ok. Qu’est-ce que je vous mets ?
— J’aurais besoin de deux pompiers new-yorkais, un vieux garçon de café, un croupier maussade, cinquante vikings, une audience pluriethnique de deux cent personnes, trois nourrissons de moins de six jours, une dizaine de cadavres mutilés et un gérant de drugstore. Albinos, si possible.

J’ai engagé des figurants toute ma vie. Débuté en 1954. Première semaine en agence, mon patron de l’époque, Doug Stanhope, reçoit un coup de fil de la Metro-Goldwin-Mayer. Quand il raccroche, il est blanc comme un linge et il arrive tout juste à articuler : « Ces tarés veulent huit mille potiches. Entre vingt et soixante ans… Ils embauchent pour deux mois. Viennent de recevoir deux cent kilos de cheveux noirs, direct de Naples, juste pour fabriquer les fausses barbes et les perruques. On y est jusqu’au cou…». Huit mille têtes. Insensé. Et nous les avions trouvées. Scène de la course de char, Ben-Hur. Jamais on a refait un coup pareil.

— Ça ira, Jack ?
— Je m’y mets tout de suite.
— Parfait. Au passage, on a eu un petit incident avec une de vos recrues ce matin. Le gars qui jouait les pilotes de grue, vous situez?
— Peter Cushing.
— Me dites pas que vous les connaissez tous par leur nom…
— Ce n’est pas le cas. Que s’est-il passé ?
— Bon. Disons qu’il est bêtement tombé de la nacelle. Quinze mètres. Assez dégueulasse, je dois dire.
— …
— Jack, vous êtes toujours là ?
— Est-ce qu’il va bien ?
— S’il va bien ? S’il va bien ! Vous êtes sérieux ? Une chute d’à peine quinze mètres ! Il est en pleine forme. Vous voulez peut-être lui dire un mot, il est à côté de moi, il me fait de grands signes.
— Phil, j’y pige que dalle…
— Le mec est plus ou moins inanimé à l’heure où je vous parle, mon vieux ! Ok ? Un peu éteint. Raide, quoi. Enfin, merde…  Ajoutez-donc un grutier à votre liste, tant qu’on y est. Un grutier rebondissant, si possible.
— Je vous recontacte dès que j’aurai tout le monde.

Peter Cushing...
Peter avait toujours eu un temps d’avance sur les autres figurants et leur manière de figurer. Au cinéma, quand il tenait une porte, vous entriez. Quand il vous rendait la monnaie, derrière son guichet, c’était tellement bon que vous recomptiez. Il était naturellement doué pour l’ordinaire. Il était bien conscient qu’au cinéma, comme dans la vie d’ailleurs, tout le monde ne peut pas tenir le premier rôle. Peter Cushing n’était pas un jeune premier, ni un second couteau, ni même une putain de fourchette à poisson. Peter était un professionnel, voilà.

Je congédie poliment mon Ewok. J’ai besoin de faire le point.

*
* *
C’est une maison comme n’importe quelle maison sur Alondra Park : borne d’incendie rouge vif, palissade de bois blanc, boite aux lettres en aluminium, allée de garage, pavés autobloquants, minuscule porche, le tout financé par un prêt hypothécaire. Un cube à vivre, au milieu de beaucoup d’autres, rempli de meubles et de souvenirs, plus ou moins bons, plus ou moins les mêmes que tout le monde.
Le jardin de la famille Cushing est piétiné par un panel de scénaristes, d’opérateurs, de metteurs en scène, script-girls, ingénieurs du son, comédiennes avides de buffet d’obsèques et autres acteurs assoiffés de naissance. Aujourd’hui, sur le gazon de la résidence Cushing, il y a assez de gens compétents et de parfaits idiots pour écrire, jouer, réaliser et distribuer un court-métrage indépendant. Le genre de daube poignante, habitée et furieusement drôle qui ferait un carton au Sundance Film Festival.

Et puis, il y a cette pancarte plantée au milieu de la pelouse, sur laquelle on peut lire :

Funérailles de Peter Cushing (1962-2015)
Mari et père.
Artiste de complément
« Il était le dernier d’une espèce : trop bizarre pour vivre mais trop rare pour mourir… »
La citation de Las Vegas Parano me parait tout à fait déplacée.

Personne n’irait jusqu’à dire que tout le septième art est orphelin, mais la disparition accidentelle de Peter provoque malgré tout un sursaut d’émotion au sein du morne paysage hollywoodien. On a l’impression d’enterrer quelque chose de rare, c’est vrai. Peter était parvenu, en dépit d’une discrétion pathologique, à se faire quelques amis.

Il laisse surtout derrière lui une femme et  deux filles de seize et vingt-et-un ans ; une pelouse impeccable et un cabanon en construction. Le tas de planches abandonné dans un coin me flanque instantanément le cafard. Aucun homme ne devrait mourir avant d’avoir terminé son cabanon : les outils bien alignés au mur, suspendus à un clou, bien en face de leur emplacement dessiné au marqueur. C’est ce que je crois.

En chemin vers un saladier de tomates cerises, je percute l’immense Mel Marmoset, responsable de coups d’éclat cinématographiques tels que Turkish Cyborgs, Ninjas contre calamars géants IV ou encore Salade-Tomate-Oignons (une odyssée). La plupart de ses œuvres sont tellement en avance sur leur temps qu’elles sortent directement en DVD. Marmoset prend une place considérable dans le jardin, à tel point qu’on pourrait le confondre avec un de ces châteaux gonflables qu’on loue pour les gouters d’anniversaire. Il mord à belles dents dans un pain de viande de trois kilos. Nous nous serrons la main, c’est-à-dire qu’il fait disparaitre la mienne dans son poing d’obèse. Nous parlons boutique un moment et il finit par annoncer, très solennel, en montrant une fenêtre au premier étage :

« Ce mec, là-haut ; voilà un mec qui savait foutrement figurer ! Je crois que je m’en suis servi dans tous mes films. Enfin, c’est possible… Peut-être pas dans Le Gasoil est toujours trop cher, mais dans la plupart de mes films. Je l’ai repéré dans une scène des Dents de la mer… Il se contentait de jouer au volley-ball en slip de bain sur cette maudite plage mais si l’on visionne attentivement la bande, à la manière dont il rate sa manchette, on comprend déjà le drame qui s’apprête à frapper ces pauvres gens…


Un jour, sur le tournage de Vietcong Boogie, on s’apprêtait à filmer une scène de massacre. On fait un repérage, pour le travelling. Mon assistant me traine à reculons, par la ceinture, à travers le plateau. Tous mes acteurs sont allongés par terre, agonisants ou clamsés. A un moment, je marche sur la gueule d’un type.  Je m’excuse. C’était Cushing, évidemment. Et vous savez ce qu’il me dit ? Il me fait : « Oh, vous en faites pas : je suis déjà mort dans le script ».  C’est pas du professionnalisme, ça ? J’en connais d’autres qui m’auraient collé un procès au cul… "

Au buffet,  je reconnais Sylvia De La Garza. L’actrice a connu un succès très confidentiel dans les années quatre-vingt-dix pour avoir interpréter la femme de Pablo Escobar dans une série B minable. Un type lui tient la jambe. Carrure d’ancien athlète, visiblement reconverti depuis un quart de siècle dans la brasserie artisanale  et les rediffusions nocturnes d’évènements sportifs mineurs. Sa panse à bière ne laisse aucune place au doute mais ses moustaches hurlent encore « Touchdown ». Je l’imagine tout à fait traumatiser une bande de gosses, tous les mercredis, sur un terrain de football. Si l’actrice prête la moindre attention aux propos du coach, cela ne se remarque pas le moins du monde. Je suis à peu près certain qu’elle passe le décor en revue,  à la recherche du prochain endroit où vomir. Lui, témoigne :

« Cushing jouait Outfield. Ça devait être la saison 1982-83. Je venais de reprendre les rênes de l’équipe. Tout était en train de se casser la gueule. Cushing  n’avait rien de flamboyant, non. On peut vraiment pas dire… Mais il faisait le boulot. Au service du collectif. De bonnes passes.  Solide vision du jeu. Jamais d’exploit individuel. Sur le terrain, il avait déjà commencé à faire un peu de figuration, je crois. Un joueur discret. Le genre de type qu’on pouvait oublier sur une aire d’autoroute, quand on était en déplacement. Il me semble que c’est arrivé une fois ou deux.  Un brave gars… Ecoutez, Mademoiselle, faut quand même que je vous dise : anorexique ou non, je vous baiserais volontiers dans un coin. »


*
* *
Le mur des escaliers est recouvert de photographies de familles, exposées dans des cadres de mauvais gout, comme c’est la coutume. Quelque chose me frappe, à tel point que je reste planté entre la sixième et la septième marche : Peter Cushing n’apparait sur aucun des clichés ! A première vue, en tout cas. En y regardant de plus près, je m’aperçois qu’il est bel et bien présent sur les photographies, en arrière-plan. Il ne regarde jamais l’objectif, il est toujours occupé à faire autre chose que poser : remonter un filet de pêche, refaire ses lacets, donner l’heure à un passant. Étrange…

« Étrange et fascinant, n’est-ce pas ? » prononce le type qui se tient en haut des escaliers et m’observe. Milton Ratched. L’éminent psychanalyste low-cost de Los Angeles. Sa clientèle est essentiellement constituée de dialoguistes de sitcoms, de maquilleuses borderline, d’acteurs de complément, de cascadeurs schyzo-affectifs et de pilotes de drones.

— Famille ou proche ? il me demande.
— Agent.
— Je vois, dit-il en me regardant droit dans les yeux, à la recherche de mon âme ; avant de revenir sur les photos accrochées au mur. Tout simplement fascinant, cet homme…  

Ratched descend les escaliers jusqu’à mon niveau, s’assoit sur la huitième marche et se met à déclamer :

Bec inutile, oiseau aptère, je glisse au long de ton visage transparent.
— Je pige pas, je lui fais.
— C’est de Théophile Gaultier et je n’y comprends rien non-plus mais je trouve cette phrase parfaite, pour Peter Cushing. Parfaite, oui… J’ai suivi Peter pendant de nombreuses années. Il souffrait d’un terrible manque d’incarnation. Nous avons beaucoup travaillé ensemble. Nous pratiquions un certain nombre d’exercices destinés à affirmer les contours de son Moi. Je lui recommandais de porter des couleurs vives, de rédiger ses mémoires, de poster des selfie sur Instagram ou encore d’adhérer à un club de fitness… Ca ne fonctionnait pas vraiment. Même nager avec des dauphins s’est révélé décevant, dans le processus d’affirmation de Peter. Un cas stimulant. Nous parlons de quelqu’un qui détestait marcher dans la neige, ou le sable mouillé. Vous le saviez ? Peur de laisser la moindre trace… Presque une aberration à Los Angeles, n’est-ce pas, alors que tout le monde serait prêt à égorger sa mère pour laisser une empreinte sur Hollywood Boulevard. Ah ah, oui…Peter souffrait… Manifestement, un défaut d’allaitement et une sévère carence totémique. Travail de longue haleine. Enfin, nous progressions… Je conçois que ce type de névrose puisse représenter un atout dans la carrière d’un acteur de complément. Toutefois, en ce qui concerne la sphère familiale, hé bien… sans vouloir divulguer la tenue de nos séances, je puis vous assurer que ce rabougrissement du Moi fut à l’origine de nombreuses turbulences domestiques. Vous pourrez facilement le constater en vous entretenant avec les membres de la famille, ici présent. Votre mère vous a-t-elle donné le sein, Monsieur ?
— Jusqu’à plus soif. Passez une bonne journée, ok ?
— Et vous-même.

Je connais déjà l’avis de la famille.

Karen, l’aînée, était occupée à servir le punch dans le jardin. Une cigarette pendait au bord de ses lèvres et la cendre tombait directement dans la bassine. Je me suis présenté et elle a dit :

« Je parie que mon père était une pointure, dans son genre. Il ne parlait pas beaucoup de son travail, mais je veux bien croire qu’il avait la figuration dans le sang. Je voudrais pas trahir sa mémoire ni rien, ok ? Je cherche pas à gâcher la fête non plus mais en tant que père ? C’était un vrai connard. Ca me fout en l’air qu’il soit mort comme ça… Cet accident de grue ? Horrible et vraiment absurde. Mais vous ne savez pas ce que c’est… Grandir avec une sorte de bibelot en guise de modèle masculin de référence. Pour moi, c’était juste un mec un peu glauque qui remplissait mon bol de céréales le matin et qui conduisait la bagnole pour m’emmener en cours. Il ne m’a jamais rien dit de personnel… Il parlait comme un robot, la plupart du temps. Toujours des phrases toutes faites : la météo, le sport, ce genre de conneries.  Jamais un mot plus haut que l’autre. »


Le témoignage absolument pas éploré de Madame Cushing a lui aussi de quoi dresser les cheveux sur la tête :

« Peter était là. Sans vraiment l’être… C’était quelqu’un de très… Volatil. J’avais parfois le sentiment de ne plus le voir pendant des semaines. Je pensais qu’il était en tournage et puis un soir, je remarquais à nouveau sa présence. Je le trouvais dans ma cuisine en train de préparer une vinaigrette. Il n’était allé nulle part. Seulement, on ne le remarquait pas toujours, le pauvre. Ce n’est pas facile de vivre avec quelqu’un comme lui, croyez-moi… »


*
* *
Dans la chambre du premier, le lit a été remplacé par un cercueil à moitié ouvert, monté sur un brancard aux roues en caoutchouc. Le parfum de fleurs coupées me file instantanément la nausée, sans compter les relents de naphtaline. Je n’ai aucune idée de ce qu’il convient de faire. Je n’ai pas l’intention d’embrasser Peter sur le front, ni de fondre en larmes. Je repère une chaise, dans un coin de la pièce, et je m’y assois. Je compte rester deux minutes, le temps de me souvenir d’une anecdote vaguement poignante en rapport avec Peter et puis je rentrerai chez moi au plus vite ; peut-être courir dix kilomètres, ou me saouler au bourbon devant une émission de débat politique. Mais il ne me vient rien de poignant, en présence de cet homme qui ne figurera plus jamais, sauf peut-être dans quelques registres officiels.
Incapable de me concentrer sur Peter, je suis sur le point de me lever et foutre le camp mais il se passe alors une chose extraordinaire. J’entends bouger dans le cercueil. Le mort se pose sur un coude, se redresse complètement, sort une cigarette de la poche de son veston et l’allume, bien assis, un coussin en soie calé derrière les reins.

Le mort fume et il a l’air en pleine forme. Je connais ce type, je l’ai déjà vu quelque part mais il ne s’agit en aucun cas de Peter Cushing. Il finit par remarquer ma présence et il dit : « Vous ne m’avez pas laissé le temps de vous préciser que je joue aussi très bien les dépouilles. On a pu me voir dans Les Incorruptibles, Le Dernier Samouraï ou encore Le retour du roi ».

Bordel… Mon Ewok d’hier. Je suis à deux doigts de me jeter sur lui et de l’étrangler pour de bon.

— Qu’est-ce que vous foutez ici ?
— Je travaille. Qu’est-ce que vous croyez… Juste après notre entretien, je reçois un coup de fil de cette femme, Marlene, elle dit qu’elle roule pour HBO. Elle me fait : « Voilà le topo : un de nos types est tombé d’une grue, la tête la première. Tragique. La famille tient à organiser une veillée à domicile mais le visage de notre homme est en bouillie. Alors une question : combien de temps êtes-vous capable de retenir votre respiration, les yeux fermés, allongé sur le dos, enfermé dans un foutu cercueil ? » Bon… Moi je réponds : je sais pas, disons cinq minutes et alors…
— Mais enfin, c’est complètement idiot. Vous ne lui ressemblez même pas !
— Bah… La famille est au courant et les autres ne sont venus que pour le buffet. Qui se souvient du physique d’un figurant, hein ? Vous êtes bien placé pour connaitre la réponse : personne…

L’Ewok a raison. En y réfléchissant bien, je ne me souviens plus au juste des traits de Peter Cushing, l’homme le moins charismatique d’Hollywood.

Il ne me reste plus qu’à rentrer chez moi. Je trouverai bien une émission politique sur le câble et un fond de whisky dans le bar. Je trouverai bien un autre grutier pour remplacer Peter. Les huit mille figurants de la course de char, ça c’était un défi. Aujourd’hui, grâce aux effets spéciaux, ils sont capables de filmer une vingtaine de personnes, de les cloner digitalement et d’en faire une foule.
Mais ils auront toujours besoin d’un pauvre mec  pour ouvrir la porte à la vedette, ou lui rendre sa monnaie. Au cinéma, comme dans la vie, on ne pourra jamais se passer des seconds couteaux, ni des fourchettes à poisson.

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Message  Polixène Jeu 1 Oct 2015 - 19:18

Un vrai plaisir de retrouver ton style charnu et foutraque, je m'abonne premium.
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Message  Polixène Jeu 1 Oct 2015 - 19:20

et bonus pour le psychanalyste low-cost et sa carence totémique!
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Message  jeanloup Lun 5 Oct 2015 - 23:27

Ça se lit facilement. Le milieu du cinéma ne me passionne pas mais le portrait de cet homme pourtant sans interet est très interessant

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Message  Hop-Frog Mar 20 Oct 2015 - 23:35

Lecture très divertissante. L'humour et la finesse de votre écrit font mouche, et m'ont rappelé les subtilités de David Lodge.

Quelques  petites corrections sur le pouce : manque un point à la fin de l'épigraphe, À son crédit, avoir interprété, je n'y comprends rien non plus.

Bravo pour cette nouvelle et vivement vos prochaines publications.
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Message  Polixène Dim 27 Mar 2016 - 0:19

Hop-Frog a écrit:vivement vos prochaines publications.

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Message  Jand Mar 5 Avr 2016 - 13:12

J'ai beaucoup aimé, il y a quelque chose de fluide et de particulièrement agréable. C'est sympathique de ne pas ressentir le besoin d'extraire le fond, puisque se donnant tout entier à la première lecture.

Jand

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Message  Polixène Jeu 4 Aoû 2016 - 21:32

J'adore ce texte
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Message  hi wen Jeu 4 Aoû 2016 - 23:49

oubien: "Le plus simple, ce serait encore de vous montrer ce dont je suis incapable".

hi wen

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