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Poème

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Message  Art. Ri Sam 10 Déc 2016 - 14:51

le fond de mon coeur est si las
disait un homme qui sentait
du fond des temps besoin de dire
le fond d'un cœur qu'était si las...
au blanc hublot, les vagues passent
sur le reflet de mon visage
et la nuit s'est nette arrêtée
et sur elle les vagues passent...
et sous les vagues l'oeil du temps
s'est grand ouvert qui nous mitraille
et je sens de tout mon dedans
que sur la nuit les vagues passent...
le ciel a de grises manières
d'être si noir – disait notre homme
à la vitre – l'espace tremble
et sur la nuit les vagues passent
suis-je à la cale incarcéré?
à la cale de mon bonheur
au blanc hublot - le vent s'arrête
sur mon malheur, les vagues passent...
et l'homme sur ses talons tourne
à la table de ses cent pas
s'assied muet, cale son pas
sur le pas des vagues qui passent
et dans le lit d'algues du temps
les yeux blottis à son hublot
il se love dans la grand-nuit
qu'usent encor vagues qui passent
Art. Ri
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Message  So-Back Dim 11 Déc 2016 - 19:07

ambiance iodée pour ce poème
ou le flux et le reflux sont synonymes du temps qui passe

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Message  Art. Ri Dim 11 Déc 2016 - 20:36

et du sentiment qu'il ne passe pas
Art. Ri
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Message  teverino Lun 12 Déc 2016 - 1:52

"qu'il ne passe pas" : le temps ou le poème ? En tout cas ce texte passe très bien. Je ne sais pas, ignorant qui s'ignore, si le poème respecte une forme connue ou éprouvée (il me semble emprunter au moins au pantoum et à la fois au rondel) mais Art-RI s'est au minimum imposé un maximum de contraintes dans un exercice non seulement louable mais plutôt selon moi réussi ce qui précisément en efface le caractère d'exercice :

28 vers octosyllabes avec des strophes dissimulées de 4 vers chaque fois terminées par le
tétrasyllbe "les vagues passent".

La seule irrégularité se loge dans les 2 premières shadow-strophes où les vagues passent au 5è vers. A moins qu'il ne faille y voir un lancement en 4 vers dépourvus de les vagues passent puis des pseudo-strophes de 4 vers qui toutes finissent par les vagues passent et dont la première (vers 5 à commence et s'achève par les vagues passent (d'ailleurs ce point est marqué par une ponctuation).

Une contrainte supplémentaire est observée, celle de la répétition fréquente de "segments", répétition qui s'insère ou participe de la césure non rare des octo en 2 tétrasyllabes (sauf au tout début où l'on a deux vers de 5 +3). Ainsi :  et la nuit, et sur elle, et sous les vagues, et je sens,  sur la nuit, à la vitre, à la cale, à la table, sur le pas, sur mon bonheur.

Ces segments, sortes de brins d'ADN du poème, jouent sur 5 principes tels des cellules de base : si / et / sur / sous / à . Le plus beau est que cette strucutre répétitive n'est pas lourde. Sans doute sa brièveté, sa brisure en petits segments et son aspect transformatif fondent cette acceptabilité, lui confèrent justement un aspect suffisamment fondu.

Ce jeu de segments répétés et transformés au cours de la répétition fait penser à celui qu'on fait en linguistique à travers les permutations paradigmatiques et syntagmatiques (si magmatique tique tique du gendarme...). On pourrait parler d'un principe "permutatif" - ou plutôt "permutransformatif" - à la base de ce texte, à sa genèse. Mais peut-être est-ce connu et suis-là entrain d'enoufoncer une porte verte...(si tel est le cas de la biblio je suis le preneur puis une fois en main votre référence je promets qu'aurez ma révérence).

A ce jeu des débuts "permutatifs" s'ajoute la musique d'un semis d'assonnances : au début le ON de fond et de MON, puis le AN de SENTAIS, de TEMPS, de BLANC, de deDANS ou de GRAND ou encore de JE SENS, le UI de NUIT, je SUIS  ou enfin les sons adoucis des voyelles longues avec -yod de OEIL, manIÈres, mitrAILLE, s'assIED voire aussi CIEL, ces dernières plus égrénées, plus rares. Ces syllables miéliphores sont opposées à des brèves qui claquent comme une voile surprise qui nous avertit du vent : nettes, vagues, qui, que sur... Douces au contraire sont, comme les premières, certaines allitérations notamment celle en BL ( blanc hublot, blotti) ou en V (visage, vague, se love). En outre le texte est régulièrement marqué par le susurrement du s intervocalique (diZait, beZoin, viZage etc.) qui fait écho mais adoucit le sifflement du S ( si las, passe, s'est, sur, sous etc.).

Au total un sentiment de douceur ondulante qu'a bien sentie So-back parlant d'ambiance iodée et de flux et reflux.
Ce texte, par exemple dit par Marine, devrait alors encore gagner en expressivité. Il traduit selon moi une belle sensibilité vocalique et aux accentuations des vers.

Une remarque : si je suis sûr (mais si) qu'une présentation en strophe nuirait au texte et à son rythme ondulant incorporant quelques accélérations ou claquements (syllabes brèves, sifflements, dentales) je m'interroge un peu sur sa totale compacité. Mais faute de trouver un moyen terme je la préfère car elle préserve la cohésion où s'exprime, aussi se cachant, le rythme de ce poème. Cette compacité évite ainsi, amenant du liant visuel, cachant les changements de ryhtme, ne téléphonant rien de la suite, que notre oeil ne vienne rythmer les sons voire les images en lieu et place de l'oreille, elle évite que ne soit perçue trop fortement, trop tôt et de manière trop marquée la culture ou la structure à quasi-riournelle. Art-RI a cassé l'ADN suffisamment pour dés-évidencier les retours et répétitions, mais insuffisamment pour que le texte n'explose. Notre cerveau et les rythmes ancestraux ou poétiques appris encore tapis en nous peuvent alors palpiter là, non loin du coeur. Ce poème est une merveille.
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Message  teverino Jeu 22 Déc 2016 - 11:28

Allez on en reprendra bien une 'chtite dose. Mérite d'être relu, voire commenté.
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