Vos écrits
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.
Le Deal du moment : -27%
-27% sur la machine à café Expresso ...
Voir le deal
399.99 €

Quatre saisons

+4
mentor
DK
Yali
Ezdan
8 participants

Aller en bas

Quatre saisons Empty Quatre saisons

Message  Ezdan Sam 2 Aoû 2008 - 19:54

En attendant de réagir sur les textes de chacun, j'apporte ma modeste contribution...

Quatre saisons -Partie 1-

Dans le bruit noir de la pollution, les longs et lourds camions citernes avançaient à pleine allure sur la high way au milieu des voitures aux tôles froissées. Les semi remorques restaient sur la voie de droite tandis que les véhicules, plus légers, zigzaguaient entre les essieux et les cabines des tankers, au gré des opportunités créées par le flux dense du trafique et les singularités de la circulation. Les minibus de marque japonaise suivaient, doublaient puis suivaient à nouveau les bus dont les rideaux sales s’agitaient au vent en claquant à l’extérieur des vitres que les passagers avaient ouvertes ça et là à cause de la chaleur. Des camionnettes vétustes arboraient au-dessus de leur cabine le drapeau du pays, dont les couleurs avaient été peintes à divers endroits sur les pare-chocs ou sur les cages arrières qui étaient remplies à raz bords, de foin vert débordant de part et d’autre, et qui malgré la vitesse, ne s’envolait que rarement sur les voitures poursuivantes. Sur la voie de gauche les voitures poussaient, se frayaient un passage à coups de klaxon ou d’appels de phares. Lorsque qu’un minibus doublait une camionnette réticente, à grands renforts de mîmes et de gestes du conducteur, le bras sortant à travers la vitre, un nuage noir de particules envahissait la vision du véhicule suivant après l’accélération lourde et brusque du conducteur excédé. Chaque véhicule se doublait successivement, sur le même trajet, une fois par la droite, par la gauche et par la droite, chacun se trouvait bloqué une fois sur la voie de gauche par une voiture trop basse, à la banquette arrière surpeuplée, une autre fois sur la voie de droite par un camion en surcharge ou un bus collectif arrêté sur la voie pour faire descendre ou monter un quelconque passager solitaire. Quand un ralentissement faisait se tasser unes à unes les masses complètement hétérogènes des véhicules, d’autres plus rapides venant de l’arrière, s’engageaient plus rusés sur les plates bandes de terre sur la droite, doublant les colonnes de voitures et de camions dans un nuage de poussière suffocant et aveuglant. Après plusieurs minutes, la poussière retombait pour laisser apparaître progressivement une nouvelle file de véhicules immobilisés. C’est comme cela qu’à chaque ralentissement important, les deux fois deux voies de la voie rapide se transformaient, tout naturellement, en deux fois six voies. Quand la circulation reprenait péniblement, toutes les voitures et les minibus et les camions et les quatre-quatre et les semi-remorques repartaient à pleine allure, et à travers le flux est-ouest des tôles métalliques, les silhouettes des piétons s’insinuaient d’un côté ou de l’autre à la perpendiculaire, pour rejoindre le bord opposé de la voie où ils se trouvaient. Les corps se penchaient vers l’avant, les jambes tendues, pour adapter instinctivement leur vitesse au passage des véhicules. Parfois, après avoir évité deux ou trois voitures, ils restaient au milieu de la chaussée, immobiles, voyant qu’ils ne pourraient pas traverser, même en courant, devant le prochain véhicule. La bande centrale de la voie rapide était un trottoir de terre où étaient plantés des palmiers recouverts de la crasse et de la poussière noire de la pollution. Ça et là des barrières métalliques avaient été installées pour obliger les piétons à emprunter les rares passerelles disponibles pour traverser la high way, mais cela était loin d’être efficace, les piétons préférant enjamber la barrière que de rejoindre la seule passerelle disponible et de monter les marches d’escalier pour se retrouver, une fois de l’autre côté, à un endroit trop éloigné de leur trajet quotidien.



Safwan était l’un de ces nombreux piétons qui, chaque matin, devaient se rendre à pieds ou en bus à Amman. Safwan était un jeune homme de vingt-six ans à la silhouette fine, comme la majorité des jeunes d’origine palestinienne nés en Jordanie après que leurs parents eurent immigrés dans ce pays d’accueil pacifié. Il avait trouvé - enfin ! - un job de vendeur de téléphones portables dans l’un de ces immenses et nouveaux centres commerciaux de la capitale. C’était la première fois qu’il travaillait sur Amman, et c’est pour cela qu’il faisait des efforts, depuis déjà deux semaines, en se levant chaque matin à quatre heures et demie, en partant de la maison de ses parents juste après la première prière. Il quittait la maison familiale vers cinq heures trente, tandis que toute sa famille retournait dans leur lit après avoir prié. Safwan habitait Zarqa, l’une des trois plus grandes villes du pays située à vingt-cinq kilomètres de la capitale. Zarqa était la ville industrielle de la Jordanie, les habitants étaient des familles modestes qui travaillaient le plus souvent dans les usines chimiques, à la raffinerie ou à la centrale électrique, quand ils ne travaillaient pas dans les carrosseries et les garages, les boulangeries et les commerces ou dans les deux hôpitaux et les multiples administrations de l’état. Zarqa était la ville pauvre du pays, Safwan le savait bien. Il avait cherché du travail pendant deux ans, et à Amman lors des entretiens, il discernait toujours la même expression dans le regard des responsables, quand il leur disait qu’il vivait à Zarqa. On lui répondait toujours par la même interrogation, mêlée d’étonnement et de condescendance comme le font les princes et les princesses lorsqu’ils réagissent face à la misère, en écoutant un malade leur raconter ses souffrances et les injustices qu’il avait subit avant de se retrouver dans le lit d’hôpital. « Ah, vous habitez Zarqa ?... Ce n’est pas un peu trop loin d’Amman ?» lui demandait-on de peur qu’il arrive en retard au travail. Safwan avait fini par mentir, lors du dernier entretien, répondant qu’il vivait dans la capitale depuis peu. Il aurait voulu habiter dans la capitale, mais le coût de la vie ne cessait d’augmenter, et puis de toute façon ses parents étaient contre, ils avaient trop besoin d’un revenu supplémentaire à la maison. Safwan était l’aîné, il avait trois frères et deux sœurs, la plus petite de la famille ayant seulement dix mois. Lorsqu’il avait décidé qu’il chercherait du travail sur Amman, il s’était acheté une belle veste noire, un beau pantalon assorti, ainsi qu’une belle chemise et une cravate. Il devait avoir l’allure d’un vrai commercial pour convaincre. Ce matin-là, comme tous les matins depuis deux semaines, il avançait le long de la voie rapide. Après une demie heure de marche entre sa maison et la high way, il avait pris l’habitude de boire un turkish coffee, de l’autre côté de la voie, auprès d’un des marchands ambulants qui vendaient du thé et du café aux chauffeurs de camions. Comme la majorité des gens, il traversait les quatre voies directement, sans emprunter la seule et unique passerelle qui enjambait le flux des véhicules. Safwan savait qu’en plus de n’être jamais au bon endroit, deux de ces passerelles en béton avaient été en seulement deux semaines, emportées par la remorque à bascule d’un camion, tuant les piétons qui traversaient dessus et les conducteurs des voitures suivantes. Ces derniers avaient été écrasés par les morceaux de béton tombés sur la chaussée. Un ami lui avait dit que le camion avait fini sa course dans le fond du ravin, quarante mètres en contrebas, Safwan avait vu le résultat sur site le jour suivant. Il n’avait plus le temps, ni l’envie de s’amuser à cela, mais chaque fois qu’il traversait la voie rapide, il repensait à ce qu’ils faisaient jadis avec son copain Rami. Ils avaient entre quinze et dix-sept ans quand, en allant passer tout leur temps, librement, dans les marchés d’Amman, Rami et Safwan traversaient les voies de la high way en restant plusieurs minutes au milieu, entre deux lignes de voitures, remontant face aux masses métalliques lancées à plus de cent kilomètres heure, avec un air calme et sûr, fières de provoquer ces véhicules qui roulaient sans prêter attention à la population. Ces mêmes conducteurs, qui étaient des jordaniens transportant la marchandise d’un petit ou grand patron, de riches entrepreneurs dans leur 4x4 flambant neufs, des étrangers travaillant dans les industries, des représentants de l’état dans leurs imposants véhicules, des camions venant de Syrie, d’Irak ou d’Arabie Saoudite, ils roulaient tous en pensant qu’ils avaient toute priorité sur ces terres, que ces terres n’étaient qu’un endroit de passage voué à accélérer le commerce et les échanges de marchandises. Mais Rami et Safwan, dans ces moments-là, faisaient face au trafic en signe de protestation, ils avançaient fièrement en montrant ostensiblement que des gens vivaient ici, que des familles faisaient leurs provisions, que des enfants allaient à l’école en passant au bord de cette route. Mais aujourd’hui, Safwan avait fini d’errer entre Zarqa et Amman, il avait décroché une place de vendeur et avait un travail, des horaires à respecter et des responsabilités à prendre envers son employeur, ainsi que devant sa famille qui comptait maintenant sur lui.
Aujourd’hui, Safwan irait à son travail conseiller des clients sur des téléphones portables, il ferait de son mieux pour se rendre utile et pour assurer la vente des produits du magasin dont, maintenant, il était l’un des employés. Ce matin il avait l’intention de passer une bonne journée, il était heureux de se rendre à son poste devant le pupitre du magasin, et en rentrant ce soir, il s’arrêtera au marché, sur le trajet, dans la down-town d’Amman, afin d’acheter des cadeaux modestes pour faire plaisir à ses frères et sœurs ainsi qu’à ses parents. De cette manière, ils fêteront, tous ensemble en famille, sa nouvelle situation.
Ezdan
Ezdan

Nombre de messages : 21
Age : 43
Date d'inscription : 02/08/2008

Revenir en haut Aller en bas

Quatre saisons Empty partie 2

Message  Ezdan Sam 2 Aoû 2008 - 19:57

Quatre saisons -Partie 2-


Au volant de sa voiture de marque américaine, Etienne, vers six heures et demie du soir, rentrait de l’usine où il travaillait en tant qu’ingénieur environnement. Le site où il exerçait était situé à un peu moins d’une heure de route d’Amman, sur le grand axe qui montait au nord, plus loin, vers la frontière Syrienne. Etienne connaissait trop bien cette route, il l’avait emprunté deux fois par jour pendant les deux ans - déjà ! - qu’il travaillait en Jordanie en tant qu’expatrié. Le matin, il devait d’abord quitter les bouchons des grands axes de la capitale où les berlines et les 4x4 de luxe se frayaient un passage d’une façon hautaine et effrontée, il redescendait ensuite au niveau de la down-town en suivant la deux fois deux voies, où là, il fallait passer à travers les myriades de piétons qui se rendaient à la station de bus sur la droite de la route. Cet endroit de la ville était un nœud de passage important où se ralliaient les bus, les voitures, les divers véhicules utilitaires et les piétons. Les deux flux majeurs de véhicules qui se rencontraient ici provenaient, l’un du centre de la vieille ville – la down-town –, et l’autre des hauteurs de la ville nouvelle située sur les collines environnantes. A ce point de rencontre, les habitants, les ouvriers, les commerçants, les fonctionnaires, les écoliers se concentraient en une foule éparse et hétérogène qui traversait la deux fois deux voies au hasard, en fonction des circonstances de la circulation, sur un ralentissement, entre deux véhicules mobiles, au moment où un bus, s’arrêtant, empêchait les voitures suivantes de continuer ou lorsqu’un feu rouge créait une file d’attente longue et impatiente. Les coups de frein brusques et appuyés devant la silhouette d’un piéton – qui était bien souvent une femme voilée, un écolier ou une femme portant un nourrisson protégé derrière des couches de tissus – n’étaient que d’habituels effets de la circulation. Cette route était au cœur de la toute première ville historique de la Jordanie, l’actuel quartier d’Ain Ghazal où jadis les Romains avaient érigé les premiers bâtiments de ce qui était devenue, deux millénaires plus tard, Amman, l’actuelle capitale. Etienne l’empruntait tous les matins, il sortait de ce capharnaüm infernal, au volant de la voiture de sa compagnie, pour remonter sur les voies de la high way en direction du nord-est. Le plus dur n’était pas encore passé quand il devait rouler sur cette portion de route où la vitesse était de la partie. Les véhicules avançaient à une allure soutenue mais saccadée, bridée par l’activité de la foule qui se pressait sur des trottoirs inexistants, comme si tout le monde sortait du lit mal réveillé, comme si tout le monde était perpétuellement en retard. Non, ce bouillonnement matinal ne faisait que commencer. Quand Etienne évitait le centre de la ville suivante, Zarqa, après une quinzaine de kilomètres d’autoroute où tout le monde se doublait par la droite ou par la gauche à cent-vingt ou cent-cinquante kilomètres heure, il devait suivre la direction de l’Irak. La première fois qu’il avait lu le nom de ce pays sur le panneau, il avait eu comme une étrange impression, lui, le Français comme ils disaient à l’usine. A ce niveau du trajet, les camions et les semi-remorques devenaient aussi nombreux que le nombre des années de circulation des moteurs et des cabines des tracteurs. Située avant Zarqa, une route venant du sud, en provenance d’Arabie Saoudite, ajoutait au trafique souvent congestionné, une quantité palpable de masses métalliques roulantes qui renvoyaient des nuages noirs dans l’atmosphère déjà saturée en gaz et en particules. Après avoir contourné Zarqa sur plusieurs kilomètres de lignes droites, Etienne reprenait la direction du nord en direction de la Syrie, puis la high way déroulait encore ses plates bandes de tarmac sur quelques kilomètres supplémentaires, et Etienne tournait à gauche au milieu de l’autoroute, afin d’emprunter une route à travers les collines de désert rocailleux, ocre, où au bout de quelques centaines de mètres, il s’aventurait sur une longue piste poussiéreuse qui le menait jusqu’à l’usine.
Mais ce soir, comme souvent, Etienne était fatigué. Il quittait l’usine sans l’envie de prendre le volant et de recommencer la dangereuse mascarade qu’était ce trajet entre l’usine et Amman. Et puis il savait lorsqu’arrivait la nuit, que la route présentait des pièges encore bien plus pénibles. Certains camions, surchargés en marchandises – rochers, fers à béton longs comme des avenues, conduites d’eau, victuailles… -, avançaient rapides comme des tortues, sans phares, et constituaient de soudain murs de métal au milieu de l’étendue bitumeuse de l’autoroute. Des dos-d’âne sans signalisation apparaissaient au beau milieu du faisceau de phares blancs d’Etienne, alors qu’il roulait sur une route en ligne droite ! Cette route traversait une étendue désertique ocre et parsemée de pierres et de cailloux étendus à perte de vue sur un paysage aride, comme si tout, sur cette terre, ne devait rester que minéral. De nombreux bus ou voitures s’engageaient depuis le bord de la route ou stationnaient sur le côté droit, tout feux éteints, d’autres traversaient la high way en coupant par le milieu, tout en s’engageant sur la voie de gauche où les véhicules les plus rapides aimaient à éblouir les autres par de puissants - et répétitifs - appels de phares. Ce qui décidait Etienne à rentrer, ce qui l’empêchait de rester des heures supplémentaires sur l’usine afin de se reposer avant de reprendre la route, c’était de savoir qu’en rentrant dans son appartement d’Amman, il retrouverait sa fille de douze mois, Emilie, et sa jeune femme Sylvie qu’il aimait comme un capitaine de bateau pirate cachait dans les soutes de son navire, le trésor qu’il avait cherché toute sa vie durant. Etienne savait que, lorsqu’il passerait la porte d’entrée, la petite Emilie viendrait à sa rencontre en titubant sur ses premiers pas et se jetterait contre lui, les bras en avant en souriant de ses belles petites dents de lait. Quand son entreprise avait annoncé à Etienne qu’il partirait pour la Jordanie, son manager lui avait présenté le pays comme étant « la Suisse du Moyen-Orient ». Malgré la situation instable de la Région, ce royaume avait su rester un Royaume de paix en dépit du chaos qui régnait au-delà de ses frontières. Etienne avait pris le temps de se renseigner avant d’envisager de s’expatrier avec sa petite famille, et ils ne l’avaient pas regretté – Sylvie et lui -, ils avaient découvert un pays tolérant, respirant un désir de modernité et dont la nature appelait tous ceux qui la contemplaient à la découverte. Etienne était heureux ici avec sa famille, et comme ils l’appréciaient depuis leur arrivée, il s’arrêterait sur la route, dans la down-town, afin d’acheter du pain arabe bien frais et des fruits, comme ils les aimaient tant sa femme et lui.
Ezdan
Ezdan

Nombre de messages : 21
Age : 43
Date d'inscription : 02/08/2008

Revenir en haut Aller en bas

Quatre saisons Empty partie 3

Message  Ezdan Sam 2 Aoû 2008 - 19:59

Quatre saisons -Partie 3-


Mansour errait dans les rues d’Amman coiffé de son keffieh rouge et blanc. Seul, il parcourait les rues du quartier commerçant de Swefyeh, son regard se perdait au bout de la rue, sur les côtés, dans les vitrines des commerces, sur les visages des enfants riches qui buvaient du Pepsi en cannette tout en marchant, levant vers lui leurs yeux d’enfants gâtés, suçant le bout de leur paille avec leurs lèvres charnues et leur surcharge pondérale. Mansour détournait alors son regard des leurs et levait vers le ciel bleu ses yeux noirs fatigués, au-dessus des immeubles aux couleurs blanc et ocre. En voyant les façades des hauts buildings, il se disait pour lui-même qu’il ne supportait plus l’emballement immobilier qui régnait ces dernières années dans Amman. Tous les jours, de nouveaux immeubles en construction poussaient des terrains vagues entre deux bâtiments résidentiels tout juste terminés. Petit à petit, de nouveaux quartiers apparaissaient à l’horizon sur les collines vierges de la ville ; sur d’autres collines, c’étaient des routes que les tractopelles dessinaient au milieu de nulle part, préparant le quadrillage entier d’un nouveau quartier. Et les loyers ne cessaient de grimper, les prix, même dans les marchés de la down-town, ne faisaient qu’augmenter. L’eau, le fuel, la nourriture et les diverses fournitures de la vie quotidienne, tout, ces derniers mois, était chaque jour plus cher. Les nouveaux immeubles des quartiers riches se rapprochaient de plus en plus des tentes de certains bédouins qui élevaient là leurs troupeaux. Côtoyant les berlines et les 4x4 flambants neufs, les moutons traversaient les routes et une circulation toujours plus dense, pour se rendre, suivant leur berger, sur le prochain carré d’herbe disponible. Même Mansour, qui connaissait les terres arides de l’Irak, se demandait comment les bêtes pouvaient vivre en broutant les quatre brins d’herbe qui donnaient, de loin, une légère teinte verte aux terrains pauvres comme des pierriers de montagne. Mansour était venu d’Irak trois ans plus tôt. Il avait quitté son pays complètement excédé, il avait été obligé de partir. Mansour était propriétaire d’un commerce dans Bagdad, il avait une épicerie qui fournissait toute sorte de nourritures, journaux ou matériels aux gens de son quartier. Sa clientèle, comme lui, était des irakiens modestes à très modestes. A cette époque, les riches irakiens avaient déjà déserté le pays et la capitale dès le début de la seconde guerre, ils avaient déjà immigré vers des pays comme la Syrie ou la Jordanie. Mansour était resté à Bagdad lors de la première guerre, il avait tenu son commerce tout le temps du conflit, trouvant des marchandises autant qu’il pouvait, au marché noir ou auprès des rares grossistes encore en activité, les rayons de son magasin étaient néanmoins restés bien vides à cette époque. Son pays avait été attaqué deux fois en l’espace de douze ans, tous les secteurs de l’économie avaient été anéantis par la faute de son dirigeant, tous les intellectuels, les scientifiques, les artistes, les ingénieurs avaient fuit le pays. Seuls les gens modestes et les pauvres étaient restés dans l’enfer de la guerre. Mansour en voulait à Saddam Hussein d’avoir perpétué des génocides envers les Kurdes, de s’être laissé berner par les Américains et d’avoir bêtement envahit le Koweït. Mais cette fois-ci, Mansour n’avait pas pu supporter qu’il y ait une seconde guerre. Il avait tenu bon les deux premières années, avec sa femme et son fils, mais lorsque les massacres intercommunautaires avaient commencés, Mansour, en l’espace d’une après-midi, eut tout perdu. Le commencement de cette seconde guerre et la chute de Saddam avaient eu l’effet d’une allumette jetée sur un tas de foin imbibé d’essence. Toutes les frustrations de chaque communauté, refoulées depuis des décennies et contenues sous le régime autoritaire en place, s’étaient soudain relâchées, comme de fougueux chevaux de courses qui partaient pour un dernier sprint au milieu des flammes, avant la mort et l’effondrement de l’hippodrome. Une voiture piégée avait explosée dans la rue où la femme et le fils de Mansour se trouvaient. L’explosion tua quatorze civils irakiens, des Chi’ites pour la plupart. De sa femme, il ne reconnu que la médaille en or qu’elle portait autour du cou, de son fils, il ne pu reconnaitre que sa taille et sa dentition, son fils mesurait un mètre quarante cinq à douze ans et les canines de sa mâchoire inférieure avaient une forme bien à elles. Après un mois de détresse et de haine, Mansour ferma son magasin et parti pour la Jordanie, le pays voisin. Il fit le voyage en moins de huit heures. Il passa ses premières nuits à Amman dans un camp de réfugiés Palestiniens. Après des jours de désespoir et d’interrogations personnelles, il décida de prendre un appartement grâce à ses économies, il loua un studio pour cinq cents dinars jordaniens mensuels, une fortune pour la taille de l’appartement, à ce prix là il aurait pu louer une grande maison familiale dans les villes ou les villages voisins. Mais aujourd’hui il n’avait plus de famille, il était seul. Mansour était habité par la haine, il en voulait aux Américains d’avoir rasé sa ville et massacré son fils et sa femme !, il en voulait à cette économie galopante dont les vainqueurs affichaient leurs richesses, d’une manière totalement écrasante du haut de leurs quatre-quatre, devant les gens plus pauvres, à ce capitalisme chevauchant et conquérant qui rasait tout sur son passage et qui, au lieu de construire des écoles et des hôpitaux, faisait pousser des hôtels luxuriants dont les buildings, les plus hauts de la villes, surplombaient comme des géants les avenues et les rues, qui ici ou là, renfermaient des enfants et des familles entières faisant les poubelles des quartiers riches, espérant trouver des objets qui amélioreraient tant bien que mal leurs quotidiens. Mansour s’effondra sur le bord d’un terrain vague, les mains sur la tête, accroupi la tête entre ses jambes, il voulait pleurer. Il gémissait toute sa peine, toute sa haine, mais rien de voulait sortir. Son âme était sous pression, tout son corps était enchaîné et ployait sous des chaînes qui ne faisaient que resserrer leur emprise sur un être tendu à l’extrême et qui essayait de s’en échapper. Mansour serrait les dents et crispait ses yeux trop fatigués qui ne pouvaient que regarder le monde sans y voir que des injustices. Il criait de l’intérieur, il voulait pleurer mais il avait trop souvent retenu ses larmes tout au long de sa vie jonchée de malheurs et de tragédies. Il voulait pleurer et puis, quand l’image de son fils et de sa femme lui revinrent en mémoire, il se leva. Désespéré, mais déterminé, il palpa la crosse de l’arme dissimilée sous sa tunique et il avança.
Ezdan
Ezdan

Nombre de messages : 21
Age : 43
Date d'inscription : 02/08/2008

Revenir en haut Aller en bas

Quatre saisons Empty partie 4

Message  Ezdan Sam 2 Aoû 2008 - 20:01

Quatre saisons -Partie 4-


Les trois immenses semi-remorques chargées de longues barres de fer se suivaient les uns après les autres sur la voie de droite de la highway, qui traversait en ligne droite le désert marqué d’étendues de pierres et de collines envahies d’ocre. Le soleil de la fin d’après-midi se rapprochait doucement de l’horizon à l’ouest lorsque Damon dépassait les camions à bonne allure par la voie de gauche, à bord de son quatre-quatre. Les cabines jaunes et arrondies des remorqueurs lui faisaient penser qu’elles avaient été repeintes récemment et que, à voir leur l’état et leur l’allure générale, leur compteur Mercedes devait avoir fait déjà plusieurs tours. Ce qu’il n’aimait pas du tout, ce n’était pas le fait que certains remorqueurs, la nuit venue, roulaient sans feux arrières à des allures si faibles, que même de jour, quand il arrivait à leur hauteur, entre cents vingt et cents cinquante kilomètres heure, il avait l’impression de rentrer dans un mur immobile au milieu de la chaussée. Non, ce qu’il n’aimait pas c’étaient les marchandises que ces camions transportaient. C’étaient toujours des barres de fer rouillées, des poutres et des rouleaux de tôles métalliques et d’énormes rochers en calcaire qu’on venait d’extraire d’une carrière quelconque en plein milieu du désert. Lorsque Damon passait à proximité de ces remorques sur la voie rapide, il se demandait toujours quand est-ce qu’une barre de fer allait glisser sous l’effet d’une quelconque vibration pour rentrer dans son pare-brise et lui transpercer la gorge, le crâne ou la poitrine. Quand il suivait un camion transportant des rochers de plusieurs tonnes qui n’étaient jamais arrimés ou attachés à quoi que ce soit, les remorques s’écrasaient tellement sous le poids de leur charge qu’elles n’étaient même plus à l’horizontale. Alors Damon s’attendait toujours à voir exploser un des nombreux pneus de ces remorques mal équilibrées qui iraient, avec leur marchandise, s’écraser sur son pare-brise. Mais rien de tout cela n’était en train de se produire, Damon rentrait de l’usine comme tous les soirs depuis six mois, et il se rendait à Amman où il avait un appartement loué par sa compagnie. Damon était ingénieur, expert en centrale à gaz productrice d’électricité, il avait passé les vingt dernières années en dehors des Etats-Unis à mettre en route des centrales à charbon ou des turbines à gaz pour son entreprise. Pendant ces longues années en dehors de son pays, Damon avait vu germer et se développer, toujours avec un certain étonnement, un anti-américanisme de plus en plus présent au contact des populations ou des équipes locales auxquelles il avait eut affaire, à peu près sur chacun des cinq continents. Il avait du mal à comprendre ce sentiment souvent superficiel et si souvent malheureux pour la marche du monde. Il n’appréhendait pas les attentats dans les rues à travers le monde, ni il n’avait peur de certaines réactions, ce qu’il craignait le plus, sans cesse en déplacement dans des endroits reculés, c’étaient les conditions de circulation, le plus souvent dangereuses ou déplorables, comme c’était le cas aujourd’hui. La voie rapide traversait en ce moment une zone d’habitation car Damon voyait de petits groupes de femmes voilées de noir, qui discutaient au bord de la route tout en rentrant chez elles à pieds. De nombreux hommes discutaient également sur le bord, tandis que d’autres traversaient devant sa voiture alors qu’il ralentissait pour s’arrêter à un feu rouge situé en bas d’une ligne droite. Un bus, arrêté en face après le feu, se tenait sur la droite où tout un groupe de personnes en descendit. Sur la droite de Damon, une camionnette arriva à sa hauteur puis le dépassa, de sorte qu’il ne pouvait plus voir l’état du feu tricolore. L’arrière de la camionnette était surchargé de toute sorte d’objets en fer, en plastique ou en bois, tout était de la récupération, tout était si mal rangés que ces objets constituaient un tas complètement hétérogène et prêt à s’effondrer d’un instant à l’autre sur la chaussée de la voie rapide. Au son des klaxons et en voyant la camionnette avancer derrière la vitre de sa voiture, Damon comprit que le feu était passé au vert. Alors qu’il accélérait pour ne pas se laisser rattraper par les masses de véhicules nerveux venant de l’arrière, un bus et deux nouvelles camionnettes le doublèrent, un sur la gauche, l’autre sur la droite et vinrent l’obliger à ralentir en s’insinuant juste devant le capot de sa voiture. Il eut droit à suffoquer dans un beau nuage noir lorsque le bus se mit à accélérer vigoureusement.
Malgré la menace terroriste qui était de rigueur dans le monde d’aujourd’hui, Damon n’avait pas peur ici en Jordanie. Le pays était calme et avait des rapports privilégiés avec les Etats-Unis. Ce qui agaçait Damon, c’était l’attitude des pays européens, tels que la France, qui critiquaient sans cesse la politique et le mode de vie américain, quelque soit la situation ou le sujet de discorde, répondant à une obsession anti-américaine presque pathologique. Paradoxalement, Damon avait été contre l’invasion de l’Irak en 2003 par les Etats-Unis, il avait nettement approuvé le discours de la France devant le Conseil des Nations Unies. Mais comme lui-même le ressentait à son niveau, la décision unilatérale des Etats-Unis avait obéit à l’attitude réflexe des Américains, qui étant sans cesse arrosés d’anathèmes par les Européens, étaient partis en guerre sous leur propre impulsion, en pensant – se disait Damon – « Ils nous blâment sans arrêt, pourquoi donc les consulter, nous savons qu’ils vont nous vilipender ». Cette attitude avait selon lui provoqué dans la hâte la guerre en Irak ou le résultat malheureux d’un anti-américanisme simpliste et arrogant de la part des Européens. Damon n’aimait pas son actuel président George W. Bush, il déplorait sa vision réductrice du monde, les sacrifices quotidiens des jeunes soldats américains et les massacres intercommunautaires des populations locales en Irak, et il espérait que la situation s’améliore. Ayant travaillé au Moyen-Orient auparavant, Damon trouvait les Jordaniens souvent mal organisés, pas toujours compétents, mais toujours très sympathiques, il trouvait que ce pays respirait une envie de modernité, d’ouverture et de progrès. A voir la Jordanie se développer à l’image de sa capitale, Damon était satisfait et content du soutien de son pays à un royaume qui allait de l’avant dans un esprit d’ouverture.
Il traversa de nouveau une zone désertique où régulièrement au bord de l’autoroute, des bergers égorgeaient leurs cinq ou six moutons rassemblés dans de petits parcs improvisés. La semaine précédente, un collègue jordanien de l’usine avait dit à Damon que cette année était particulièrement avare en précipitations et que l’été avait été plus sec que d’habitude. Les bédouins étaient forcés de vendre leurs bêtes à des particuliers de passage intéressés par des prix de pièces de boucherie extrêmement bas. L’été était tellement aride que les rares brins d’herbe habituellement disponibles avaient disparus et il était impossible de nourrir tout un troupeau. La vue des carcasses de moutons pendues sur les trépieds de fortune et en pleine chaleur au bord de l’autoroute donnait des nausées à Damon, il détournait son regard d’un geste brusque de la tête tout en tentant d’ôter ces images de son esprit. Et puis quelques minutes plus tard les collines d’Amman, tachetées du blanc des immeubles étaient en vue, les bords de route commençaient à grouiller d’activité et la circulation devint de plus en plus dense. Damon se dit que pour une fois, il s’arrêterait acheter de la nourriture locale dans la down-town. Au lieu de prendre la voie rapide menant vers les hauteurs des beaux quartiers, il continua tout droit pour se diriger directement vers le centre de la ville-basse.




Safwan sortit de son travail vers dix-huit heures. Il prit un taxi afin d’effectuer le trajet entre Swefyeh, le quartier du magasin, et la down-town. Assis à l’arrière dans un de ces taxis jaunes si nombreux dans la capitale, Safwan souriait. Il était fatigué de sa journée, mais il savait que c’était de la bonne fatigue. Aujourd’hui, il avait réalisé la vente de cinq téléphones portables nouvelle génération. Le nouveau magasin faisait fureur depuis l’ouverture. L’intérieur était moderne, les vitrines brillantes de propreté étaient éclairées d’une lumière blanche et intense, diffusée à l’intérieur par de petits spots répartis sur toute la longueur du comptoir. Quand Safwan se présentait en costume devant un client, celui-ci pouvait voir étinceler derrière lui les nouveaux produits dans les vitrines, sur leurs supports en plexiglas. Il était fier de vendre de la marchandise de dernière génération. Son dernier client avait été un expatrié, un anglais travaillant à Amman. Il était venu acheter un téléphone pour sa femme et avait été fort sympathique auprès de Safwan. Safwan avait beaucoup apprécié de pratiquer un peu son anglais scolaire qu’il n’utilisait que trop rarement. Il avait beaucoup aimé l’accent de ce client qui avait vu le vendeur faire des efforts pour bien parler dans sa langue. Quand Safwan eut conclut la vente et que le client était sorti du magasin par la porte en verre, Safwan avait éprouvé un sentiment de fierté. Quand le taxi négocia le virage sur la droite qui devait les mener dans la descente débouchant plus loin sur la down-town, Safwan se tourna vers l’arrière et contempla les derniers immeubles du quartier riche d’Amman. Safwan était fier de travailler dans cette ville, elle représentait à elle seule toute la modernité de son pays, et Safwan, venant d’une ville pauvre et industrielle, vivait pleinement ce désir de modernité et d’ouverture qui caractérisait si bien son roi, Abdallah II de Jordanie.
Il fit arrêter le taxi devant la place, près de l’ancien amphithéâtre Romain. Il régla les un dinar soixante-dix de la course, puis descendit, pour se retrouver dans la rue principale la plus commerçante de la ville-basse. Le bruit de la circulation se mêlait au son du haut-parleur du minaret le plus proche, d’où provenait la voix d’un imam qui récitait des versets du Coran, une récitation qui ressemblait plus à un chant religieux qu’à un discours. Safwan avait fait sa prière de la fin d’après-midi deux heures auparavant, il pouvait donc flâner au marché sans aller à la mosquée la plus proche. A cette heure de la journée, il était toujours sur la route du retour et avait pris l’habitude de prier sur son lieu de travail. Il traversa à pied la circulation, en trottinant sur les voies devant les voitures, afin de se retrouver devant les vitrines des nombreux petits commerces. On trouvait tout dans ce quartier, et tout se vendait à des prix dérisoires. Safwan s’arrêta devant des copies de Dvd disposés sur des planches à tréteaux dans des boîtes à chaussures, devant une boutique. Il fit défiler un à un les disques et trouva un film de Disney pour sa petite sœur. Il paya les cinq dinars au commerçant, qui lui remit une pochette décorée de la jaquette du film, qui était imprimée artisanalement à partir d’un quelconque ordinateur. Il continua ensuite dans la rue où la foule devint de plus en plus dense. Les têtes des hommes et des femmes se mêlaient et bougeaient comme une fine houle à la surface d’une mer, dans une agitation naturelle et permanente. Les têtes des hommes étaient nues ou coiffées de keffiehs, tantôt à carreaux rouges et blancs, tantôt à carreaux noires sur fond blanc. Safwan se sentait bien, il aimait l’ambiance de ce coin de ville, les rues qui grouillaient, le chant d’Allah qui résonnait au loin, il était chez lui, léger, heureux d’être dans la ville où, plus jeune, il avait passé de bons moments.
Passant devant l’étal d’un maraîcher où celui-ci avait mis en évidence de beaux fruits frais provenant de la vallée du Jourdain, Safwan se dirigea vers un disquaire. Etonné, il vit que deux blancs occidentaux discutaient devant la vitrine, des sacs de provision et des CDs à la main. Il était rare de croiser des occidentaux dans ces rues, parfois on pouvait y voir deux ou trois touristes égarés, mais ceci n’était pas commun. Ceux-là ne semblaient pas être des touristes. Safwan s’avança vers eux.
« Hi! You look for some music?, demanda Safwan dans un anglais décontracté.
− Yes, Mah rabat, lui répondit le plus jeune, en anglais puis en arabe.
− You speak english, right?, demanda le plus âgé à Safwan.
− Yes, I do my best, répondit Safwan en souriant ».
L’homme le plus vieux des deux expliqua à Safwan qu’il était Américain, que le collègue à ses côtés était Français et qu’ils cherchaient tous les deux de la musique classique. Il lui précisa que le vendeur de la boutique ne comprenait rien à leur demande. Safwan parcouru rapidement l’étalage du regard et les étiquettes manuscrites de rangement en arabe. Il se mit entre les deux hommes afin de leur désigner les cinq ou six boitiers de CDs qui arboraient des titres de musique classique. « Vous voyez, il y en a peu, mais il y en a » dit Safwan en souriant aux deux occidentaux. Les deux hommes ne répondirent pas, ils regardaient la rue complètement figés. Safwan, surpris, se retourna. Un homme en soutane coiffé d’un keffieh rouge et blanc les menaçait de son arme à feu en les maintenant en joug. Son regard était submergé par la haine. Les trois hommes tendaient leurs bras vers l’avant comme pour vouloir l’arrêter ou le raisonner de loin. Safwan voulu ouvrir la bouche pour lui parler en arabe. Un policier venant du bas de la rue cria en direction de l’agresseur.
Safwan était dans le silence, il voyait la lumière du ciel filtrer entre ses paupières, quelque chose envahissait sa poitrine comme de l’eau filtrant à travers son corps. Il pensait à sa mère et à son père, à ses sœurs et ses frères, il était avec eux, et tous, ils pique-niquaient ensemble sous les arbres dans la nature. Il s’échappait du barbecue une bonne odeur de viande, le parfum des pins se mélangeait à la douce odeur d’un narguilé qu’une famille fumait à proximité paisiblement. Puis la lumière devint floue. Il ferma les yeux.
L’agresseur avait eut le temps de vider son chargeur. Damon et Etienne rouvrirent les yeux doucement. Ils se levèrent ensemble difficilement en grimaçant, tout en s’aidant mutuellement. Damon ressentait une douleur atroce qui s’élançait depuis son bras en sang, blessé au niveau de son biceps. Etienne, la paume de la main sur son épaule, sentait ses os brisés dans sa chair, une balle avait dû traverser son épaule, déchirer ses muscles et faire éclater ses os. Debout, encore sous le choc, ils avaient à leurs pieds deux morts. Le bruit de la rue recommençait à palpiter, les yeux de la foule était fixés sur eux, le policier était venu à eux. Etienne et Damon virent le corps mort de leur agresseur. L’iraquien étendu à terre avait les yeux ouverts. Son visage avait l’air libéré.
Ce soir, Damon et Etienne seront à l’hôpital, ils seront auprès de leur femme, au téléphone ou pour de bon, ils se serreront fort dans leurs bras, et en croisant le regard de leurs enfants, en entendant leurs voix, ils retrouveront vibrer la flamme de l’espoir. Safwan, étendu sur le sol la poitrine en sang, ne sera pas chez lui ce soir.
Ezdan
Ezdan

Nombre de messages : 21
Age : 43
Date d'inscription : 02/08/2008

Revenir en haut Aller en bas

Quatre saisons Empty Re: Quatre saisons

Message  Yali Sam 2 Aoû 2008 - 20:10

Respirer…
Journaliste ?

Yali

Nombre de messages : 8624
Age : 60
Date d'inscription : 12/12/2005

Revenir en haut Aller en bas

Quatre saisons Empty Re: Quatre saisons

Message  DK Sam 2 Aoû 2008 - 20:54

Ouh làààà au premier abord des pavés comme ça, moi ça me fait peur ;o)

Je lirai ça après avoir été la télé, dans le calme et avec à grignoter sous la main ;o)
DK
DK

Nombre de messages : 84
Age : 50
Localisation : Lille
Date d'inscription : 31/07/2008

http://pagesperso-orange.fr/olea/cariboost1/index.html

Revenir en haut Aller en bas

Quatre saisons Empty Re: Quatre saisons

Message  mentor Sam 2 Aoû 2008 - 22:59

moi je lirai ça demain

mentor

Nombre de messages : 20248
Age : 46
Localisation : œ Œ ç Ç à À é É è È æ Æ ù Ù â  ê Ê î Î ô Ô û Û ä Ä ë Ë ï Ï ö Ö ü Ü – — -
Date d'inscription : 12/12/2005

http://www.vosecrits.com

Revenir en haut Aller en bas

Quatre saisons Empty Re: Quatre saisons

Message  Invité Dim 3 Aoû 2008 - 1:11

Il y a quelque fautes comme par exemple:
du trafique. Et surtout beaucoup de redondances sur le thème automobile. Au hasard: 4X4 flambant neuf, 4X4 de luxe. Au point où je me demande si les 4 chapitres ne sont pas rédigés avec une contrainte.

Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

Quatre saisons Empty Re: Quatre saisons

Message  bertrand-môgendre Dim 3 Aoû 2008 - 7:56

Saison un.
Un énorme effort de vocabulaire permet de mesurer l'importance du trafic, sa densité, sa confusion jusqu'à connaitre l'indigestion.
Passe le texte au crible d'un correcteur.
Coupe au couteau certains éléments perturbateurs qui n'apportent rien au récit, sinon des interruptions de trafic.
Quelques incohérences, ou lourdeurs relevées, par exemple :
Quand la circulation reprenait péniblement, toutes les voitures et les minibus et les camions et les quatre-quatre et les semi-remorques repartaient à pleine allure ...
Un bus est toujours collectif non ?
... pour rejoindre le bord opposé de la voie où ils se trouvaient (en principe, c'est bien là l'intention première d'un piéton motivé, non ?).
Ton personnage, volontaire (cinquante kilomètres à pied par jour, chapeau), est noyé dans la masse de ton discours. Sa présentation brouillon, mériterait, un travail de rédaction pour le mettre en valeur, sans toutefois le transformer en héros. Il a du mérite, il est beau dans son costume neuf. Avec son emploi en poche, il détient le pouvoir d'améliorer les conditions de vie de sa famille. L'histoire de son copain, de l'accident de la passerelle, c'est beaucoup de renseignements utiles surement, mais à raconter à un autre moment.
Tu as tant à dire que tu voudrais que le lecteur soit au courant de toute sa vie en moins d'une page.
Prends le temps.
bertrand-môgendre
bertrand-môgendre

Nombre de messages : 7526
Age : 104
Date d'inscription : 15/08/2007

Revenir en haut Aller en bas

Quatre saisons Empty Re: Quatre saisons

Message  Ezdan Dim 3 Aoû 2008 - 11:19

Merci beaucoup pour vos premiers commentaires, vos avis me sont très précieux, autant sur le style et les erreurs que sur l'histoire.

Ezdan à Yali --
Non je ne suis pas journaliste, mais j'aimerais en savoir plus sur ton mystérieux "Respirer..."

Ezdan à DK et mentor --
Votre aide et avis sont les bienvenus

Ezdan à pandaworks --
Merci pour ton retour. La contrainte dont tu parles je me la suis fixée tout seul, j'en ai peut-être fais trop... Je vais voir ça... J'ai voulu placer le trafic au centre du récit, avec chacun des 4 personnages.

Ezdan à bertrand-môgendre --
Merci bcp pour cette critique très précise et très constructive de la "Saison un". Je vais revoir tous les points que tu as soulevé. Tes notes sur la mise en valeur du personnage m'éclairent bcp, je vais retravailler cela. Je recevrais votre critique sur les autres parties avec bcp de plaisir.


Toutes critiques, impressions, notes sur les erreurs ou lourdeurs de style seront les bienvenues.

-Ezdan
Ezdan
Ezdan

Nombre de messages : 21
Age : 43
Date d'inscription : 02/08/2008

Revenir en haut Aller en bas

Quatre saisons Empty Re: Quatre saisons

Message  EmilSinclair Dim 3 Aoû 2008 - 11:51

Je me permets de relever quelques coquilles. Je n’ai pas encore lu les deux dernières parties.

« remplies à raz bord, de foin vert débordant de part et d’autre, et qui malgré la vitesse, ne s’envolait que… » : « remplies à ras bord, le foin vert débordant de part et d’autre, et qui malgré la vitesse, ne s’envolait que… »

« Safwan était un jeune homme de vingt-six ans à la silhouette fine, comme la majorité des jeunes d’origine palestinienne nés en Jordanie après que leurs parents eurent immigrés dans ce pays d’accueil pacifié. » : c’est lourd. Tu veux effectivement dire beaucoup (trop), voire tout dire ; et les informations abondent, sans réelle logique, c’est fouillis… Les exemples de ce genre abondent, personnellement, je ferais du tri…

« il s’était acheté une belle veste noire, un beau pantalon assorti, ainsi qu’une belle chemise et une cravate. » Curieusement, malgré (et à cause de) la densité de ton texte, tout ça n’est pas très varié … L’angoisse de la page blanche ?

« fières de provoquer ces véhicules qui roulaient sans prêter attention à la population. » : « fiers »

« Mais Rami et Safwan, dans ces moments-là, faisaient face au trafic en signe de protestation, ils avançaient fièrement en montrant ostensiblement que des gens vivaient ici, que des familles faisaient leurs provisions, que des enfants allaient à l’école en passant au bord de cette route. » Protestation, je veux bien le croire, mais il est difficile d'imaginer qu’on se livre à ces jeux pour signaler la présence d’enfants au bord de la route… ce serait plutôt pour l’adrénaline, non ?

« Au volant de sa voiture de marque américaine », « au volant de son américaine » plus simplement, ou de sa « muscle car »…

« une file d’attente longue et impatiente », le zeugma peut s’avérer utile, cocasse… mais, ici, il apparaît comme une maladresse, sans réel intérêt, et illustre le fouillis du texte, le manque de logique.

« et sa jeune femme Sylvie qu’il aimait comme un capitaine de bateau pirate cachait dans les soutes de son navire, le trésor qu’il avait cherché toute sa vie durant », cette phrase est à revoir, elle est grammaticalement incorrecte.

Pour le moment, je pense que tu devrais élaguer tout ça. Pour ce qui est de l’histoire, j’attends d’avoir lu la fin. Ceci dit, si tu veux faire de la route le centre du texte, il va falloir trouver un moyen de renouveler le récit, d'éviter les redondances dont parle pandaworks. Bonne jounée.^^

EmilSinclair

Nombre de messages : 68
Age : 36
Date d'inscription : 29/06/2008

Revenir en haut Aller en bas

Quatre saisons Empty Re: Quatre saisons

Message  Ezdan Dim 3 Aoû 2008 - 14:42

EmilSinclair,

Merci pour ces remarques.
J'ai un beau chantier d'élagage en perspective !

Au sujet des informations qui abondent et qui plombent le récit, c'est vrai que dès le départ je m'étais fixé une nouvelle à 5000 mots. Je m'étais fixé environ 1000 mots par personnage et 1000 mots pour intro et conclusion.
Et puis l'écriture m'a amené au-delà assez rapidement lors la description des personnages, trop rapidement. Le texte a atteint les 6300 mots et tout au long de l'écriture je me suis restreint pour rester sur les bases que je m'étais fixées au départ.

Ce processus m'a amené à densifier les informations sur les personnages et a pris le dessus sur la qualité du style. Je ne me fixerai jamais plus de longueurs cibles à atteindre pour mes prochaines nouvelles...
Ezdan
Ezdan

Nombre de messages : 21
Age : 43
Date d'inscription : 02/08/2008

Revenir en haut Aller en bas

Quatre saisons Empty Re: Quatre saisons

Message  Krystelle Dim 3 Aoû 2008 - 14:43

Je ne suis pas allée au bout de ce texte.
J'ai buté sur les innombrables répétitions (cf. au début, les multiples reprises des termes "véhicule", "voie", "droite", "gauche" etc...).
Je me suis également lassée du ton utilisé : "Safwan était ceci", Safwan était cela" etc...
Bref, j'ai trouvé le style peu accrocheur, la forme vraiment trop compacte, pas suffisamment aérée et ça m'a empêché d'aller plus loin, de m'attacher au fond.
Désolée.

Krystelle

Nombre de messages : 7162
Age : 44
Date d'inscription : 12/12/2005

http://fuitedanslesidees.blogspot.com/

Revenir en haut Aller en bas

Quatre saisons Empty Re: Quatre saisons

Message  EmilSinclair Lun 4 Aoû 2008 - 18:50

Lecture des deux dernières parties achevée. Je relève quelques erreurs (ce n’est pas exhaustif, j’ai préféré m’attacher au récit) :

« De sa femme, il ne reconnu que la médaille en or qu’elle portait autour du cou, de son fils, il ne pu reconnaitre que sa taille et sa dentition » :
c’est « reconnut » et « put », à revoir aussi la répétition de reconnaître.

« quatre-quatre » :
tu as aussi écrit « 4×4 », il faut choisir une orthographe et s’y tenir.

« qui ne pouvaient que regarder le monde sans y voir que des injustices » :
« et n’y voir que des injustices » ou « qui ne pouvait regarder le monde sans y voir d’injustices »

« l’arme dissimilée sous sa tunique » :
« dissimulée »

« Les trois immenses semi-remorques chargées » :
« chargés » car tu désignes l’ensemble du camion.

« n’appréhendait pas les attentats dans les rues à travers le monde, ni il n’avait peur de certaines réactions » :
à revoir

« tout était si mal rangés que ces objets » :
« rangé »

Pour ce qui est du récit donc. Ta démarche, ces portraits qui finalement se croisent, est astucieuse – même si déjà vue –, mais, hélas, le texte est vraiment trop peu accrocheur – d’où, à mon avis, la nécessité d’élaguer tout ça.

Vouloir faire de la route le centre de tes écrits n’est pas une contrainte, c’est un projet, un projet ambitieux d’ailleurs. Aussi faut-il savoir se donner les moyens d’y parvenir : quand le lecteur ne peut être porté par l’histoire, il faut le retenir par le style (qui doit être irréprochable). Je pense qu’il faudrait retravailler les images, les sonorités, les mots…

EmilSinclair

Nombre de messages : 68
Age : 36
Date d'inscription : 29/06/2008

Revenir en haut Aller en bas

Quatre saisons Empty Re: Quatre saisons

Message  Sahkti Mer 13 Aoû 2008 - 12:26

Houla, c'est dense! Beaucoup trop pour moi, désolée :-(
J'ai trouvé que les phrases étaient souvent très (trop) longues, que l'action était noyée sous les détails et les répétitions et que cette densité dans l'écriture empêchait complètement l'histoire d'évoluer. Je n'ai pas réussi à accrocher.
Elaguer serait peut-être une piste à suivre pour permettre au lecteur de trouver un chemin.
Sahkti
Sahkti

Nombre de messages : 31659
Age : 50
Localisation : Suisse et Belgique
Date d'inscription : 12/12/2005

Revenir en haut Aller en bas

Quatre saisons Empty Re: Quatre saisons

Message  Invité Mer 13 Aoû 2008 - 15:28

Yali a écrit:Respirer…
Impossible. Des exemples :
Des camionnettes vétustes arboraient au-dessus de leur cabine le drapeau du pays, dont les couleurs avaient été peintes à divers endroits sur les pare-chocs ou sur les cages arrières qui étaient remplies à raz bords, de foin vert débordant de part et d’autre, et qui malgré la vitesse, ne s’envolait que rarement sur les voitures poursuivantes.

Chaque véhicule se doublait successivement, sur le même trajet, une fois par la droite, par la gauche et par la droite, chacun se trouvait bloqué une fois sur la voie de gauche par une voiture trop basse, à la banquette arrière surpeuplée, une autre fois sur la voie de droite par un camion en surcharge ou un bus collectif arrêté sur la voie pour faire descendre ou monter un quelconque passager solitaire.

Ça et là des barrières métalliques avaient été installées pour obliger les piétons à emprunter les rares passerelles disponibles pour traverser la high way, mais cela était loin d’être efficace, les piétons préférant enjamber la barrière que de rejoindre la seule passerelle disponible et de monter les marches d’escalier pour se retrouver, une fois de l’autre côté, à un endroit trop éloigné de leur trajet quotidien.

Tu veux trop en dire, le lecteur étouffe dans un texte dense mais a priori intéressant (lu les 2 premières parties). Coupes sombres STP !

Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

Quatre saisons Empty Re: Quatre saisons

Message  Contenu sponsorisé


Contenu sponsorisé


Revenir en haut Aller en bas

Revenir en haut

- Sujets similaires

 
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum