Exercice en direct : mercredi 15 juillet à 21h

C'était super ce soir là! Ca sifflait dur sur son sous-tif! Ca semblait un souffle silencieux qui susurre ses soupirs! Cesse, sot, si c'est ça!

J'te l'ai déposée comme un laquépem de j'sais pas quoi au mitan de la rue de la Comédie et de la rue aux Putes, même que les Putes c'est le vieux mot pour dire montée , que c'est monsieur Berthot qui l'a dit comme ça l'autre fois, et qu'on a tort de rigoler parce qu'avant, eh ben on disait la Pute-Montmartre et les Putes-Chaumont, du coup c'était mieux puisque comme yen avait plusieurs on avait le choix.

Une fois de plus je me retrouve comme une épave que le reflux abandonne lors du ressac, dans un jaillissement d'écume. Avec, comme à l'accoutumée, la responsabilité, que monsieur, dans sa magnanimité colorée d'humanisme, comme il se plairait à le décrire, s'il avait la plus infinitésimale parcelle de goût, ou de talent, ou de quelque chose, de pourvoir à l'approvisionnement de la horde de lycaons qu'il a eu l'honneur et l'avantage de m'offrir à chaque relevailles. J'eusse dû demeurer couchée, c'eût été plus simple: engrossage sur canapé, grossesse allaitante, un marmot par mamelle, mise bas sur couche, radada, et ça repart.

C'est qu'elle est toujours à se plaindre cte bourge là; et que j'en ai marre de faire des mioches l'un après l'autre, et que ta place c'est d'aller au turbin. Pasque pour madame, lever les couleurs et ramoner Germaine de fond en comble, de face, de profil et de dos, c'est pas du taf, ça. Les allocs, pourtant, ils ont bien l'air de trouver, eusses, que c'est un taf, puisque à chaque lardon ils nous filent plus de fraîche.

Adoncques ma belle enfant, ta haquenée ne t'ayant pas suivi dans ton périple urbain, tu vas devoir traverser, à ton corps défendant, cette ville empuantie et dégoutante, peuplée d'épaves hagardes qui ricaneront dans la fétidité de leur haleine empuantie lors que tu passeras près d'eux, t'efforçant, par ce glacial vent d'est à transpercer les os, de serrer au plus près tes jupons autour de toi, de peur que ce vent fripon ne les soulève.

Ouais, regardez la lady glandouille, une petite trotte de rien du tout jusqu'au Picho de la zone nord faut pas déconner quand même c'est pas grand chose mais quand on se met en tête que c'est loin, bien sûr ça paraît loin. Avec le mauvais esprit qu'elle a tu vas voir qu'elle va dire que j'aurais pu l'amener en voiture: moi je dis c'est mesquin, et même c'est petit. J'aurais pu, si j'aurais voulu. Et je voulais pas, rapport qu'elle commence à me les brouter avec ses commentaires sur comment que j'administre les thunes de la thurne. J'administre: c'est ministre que ça doit lui plaire, à cte pouffe. En plus que j'administre parfaitement très bien: le pastaga manque jamais, on a jamais vu un pote qui repart sur une jambe; le PMU nickel en temps et en heure, qui c'est qui dit mieux?

Il serait souhaitable que j'accélérasse: certes, ces tenanciers ont besoin de travailler, mais il ne faut pas que je m'illusionne, ils ne m'attendront pas, c'est à moi de m'efforcer d'y atteindre dans les temps impartis, autant que faire se peut. Et en l'occurence, qui veut peut. Certes, cela ne s'applique pas à toutes les situations ordinaires: j'ai beau prononcer des malédictions terribles sur sa tête, rien n'y fait: monseigneur va son chemin, patelin et bonhomme.

Sans dec' c'est vrai mémère, elle a toujours un pet dans le barillet; et qui sort pas. Et j'te met des airs pincés pasque je pisse dans le lavabo, soi disant pasqu'elle y avait mis ses culottes à tremper. Faut pas déconner, c'est qui la cochonne, c'est l'endroit pour mettre ses slibards?

Genevieve mon amie, m'est avis que vous vous surpassates. Avec vos petites papattes toutes raplaplattes, ma foi, en rien vous ne dérogeates. Je ne dirai pas que vous m'émerveillates, mais je constate: vous arrivates. Bel endroit vraiment, où j'en suis réduite à venir, ayant arpenté la moitié de la ville, au prétexte que monsieur, ayant organisé une brillante martingale qui allait le couvrir d'or et de gloire, a tout perdu, comme à l'accoutumée, et ne m'a laissé que cette menue monnaie pour acheter, en ce lieu le moins cher de la ville, un paquet de nouilles pour nourrir mes ogrillons. Je le tuerai, je le jure, je le tuerai.

'reusement que j'y ai étouffé un bifton tranquillos, la mégère; ça la f'rait pas chier que j'sois sans un pour me rincer la dalle, cte salope. Ses lardons, ah, ses lardons, là, on sort le tralala: et macaroni par ci, et spaghetti par là, rien n'est trop beau. Et y zont encore le culot de dire encore des pâtes, ces petits enculés, faites des gosses...

Quand il me souvient de mon enfance, et de la manière dont père se comportait avec mère, les larmes m'en viennent aux yeux; toujours prévenant, toujours grand seigneur: quand je pense qu'il avait pris des leçons de créole, quand il a été en poste à la Martinique, pour pouvoir dire Sakawoulé aux petites bonnes avec l'intonation correcte. Bon, encore me faudrait-il, avant que de rentrer, acquérir ce pourquoi je suis venu, voilà le rayon, j'arpente, un peu plus bas, eh bien mais il me semble que je n'ai pas plus de temps qu'il n'en faut, un seul paquet qui reste...

- Madame, je suis au regret de vous déposséder de cet ultime sachet de nouilles, mais vous me pardonnerez, je n'en doute point, quand vous saurez que j'en ai bon besoin pour en nourrir mes chats, qui en raffolent. Je ne doute pas que vous compreniez que ce n'est pas rapt, mais force majeure

- Non mais t'las vu l'bâtard d'sa mère, fils de pute, enculé, pedzouille, tête de noeud. T'vas voir ce qu'vais t'en faire de tes putains de nouilles, j'vais t'les rentrer à poignées dans le trou de ton gros cul de connard et j'te les ferai bouffer après...Casse-toi ou j't'éclate, étron, casse-toi....

Peter Pan a écrit:Ah les salauds, y z'ont zappé Halicante, espèce d'enfoirés ;-) (c.f. South Park)

Tu veux dire la MC de l'exo que t'as pas fini? D'ailleurs qu'est-ce que tu fais debout à cette heure?

Bouh ! Dur dur... fallait me dire de couper mon téléphone.
J'ai fais, je poste. Pas fière de moi.

****
Débandade !

« Hommage tous, tous hommage.
- Hommage Marley, Marley hommage.
- Tiens ! Coldica, bien tu vas en cet espace temps de 4h45 ?
- Marley, bien je vais. Envie j’ai de découvrir des secrets… secrets des anciens.
- Coldica !!! Chut ! Voyons ! Parler des anciens tu ne dois pas ! »

Il lui posa sa paire de mains gantées sur le masque pour qu’elle ne pipe plus mot.

Nous étions en l’an 64 après la quatrième guerre mondiale.
Cet événement terrible dans l’histoire de l’humanité avait vu s’affronter les hommes et les femmes. Entre eux !!!
Les femmes gagnèrent sans casse-tête cet exercice auquel elles étaient pourtant peu habituées par la pratique. Elles assirent une nouvelle loi prônant la supériorité de leur sexe à chaque alinéa et firent nommer à chaque poste important, une chienne de garde, une ni pute ni soumise… féministe dans l’âme et bien plus encore.
Les hommes ne furent pas exclus de cette société d’Amazone, ils pouvaient encore servir.
Qualité de ne rien jeter, celle de garder au cas ou.
Relayés aux tâches ingrates du ménage et de la prostitution, les hommes vécurent ainsi.

Mais, arriva ce qui devait arriver lorsque l’on refuse l’altérité.
Les femmes, bien incapables de faire maitrise de leurs émotions en des circonstances que les hommes qualifieraient de « banales » , ne surent prendre les décisions qui s’imposaient à l’approche d’une poche de gaz menaçant de pénétrer la couche d’ozone.
Après la peur vinrent les pleurs, après les pleurs virent les rires hystériques, après les rires vinrent les réflexions philosophiques, après les réflexions vinrent les testaments anticipés et enfin, la poche de gaz qui s’infiltra à la grande surprise générale dans le ciel de la Grande Bleue ! Déjà ?!!!

Les grands architectes furent sortis du tapin et les écologistes, du Canard WC.
Les autres, servirent à la construction de multiples stations d’accueil dont la célèbre Loutre-NF-5-G.

Loutre-NF-5-G, station spatiale en dérive car, le capitaine n’est autre qu’une certaine Carlita Sarkizoska ! Militaire accomplie et descendante directe de la première Impératrice du Monde Nouveau Evéen (entendez celui qui fût, autant que faire ce peut, rebaptisé ainsi à la victoire féminine.).

Marley relâcha Coldica qui caquetait coquettement calquée derrière son masque quasiment quelconque.

« Boire un café tu veux ?
- Oui Marley, un sucré café… jouer du sakawoulé tu sais ?
- Du saka quoi ?
- Sakawoulé pas marcher ?!!! »

Stupeur ! Eveil ! Brusquerie !

« Monsieur ? Vous allez bien ?
- Hein ?!
- Excusez-moi, manifestement, je vous dérange, là n’était pas mon intention et…
- Je vous demande pardon ?
- Euh… je vous voulais juste savoir… les toilettes je vous prie… s’il vous plait… Monsieur ?
- ‘Tain ! Machine de merde encore en panne !!! Il me faut un putain de café ! Et puis c’est quoi cette histoire de sakawoulé ? Hein ?! Z’êtes qui vous d’abord ?!
- Désolée, je vais trouver toute seule… Merci monsieur…
- Les waters ?! C’est par là ! Allez ! Foncez ! Glissez ! Pissez… mais pas sur la cuvette ! »

silene82 : un feu d'artifice de style(s), mais au détriment de la clarté, selon moi... J'ai eu du mal à suivre. Cela dit, j'ai adoré
"J'eusse dû demeurer couchée, c'eût été plus simple: engrossage sur canapé, grossesse allaitante, un marmot par mamelle, mise bas sur couche, radada, et ça repart."

J'ai zappé l'allitération, désolé c'était la contrainte de trop. Une très bonne organisation sinon, merci!

Ding Dong ! La voix métallisée, plus impersonnelle qu’un formulaire de sécurité sociale, égrena machinalement les formules protocolaires :
« Monsieur Brasey de la Galaxie Formulax B-71, demande permission d’entrer dans la station »
Céline se leva en grognant du canapé en photons rose (une idée du capitaine), et se dirigea vers la console d’accueil.
« Ici Céline Basilix, permission accordée
- Matricule ? demanda la machine, impertubable
- 123rer-T
- T comme Thibault ?
- Non, T comme « tu fais chier »
- Entrée incorrecte
- Bordel.
- Entrée incorrecte.
- T comme Thibault.
- Matricule exact. Accordez vous la permission à M. Brasey de la Galaxie Form…
- Oui
-…ulax B-71 d’entrer dans la station?
- OUI
- Ouverture du sas en cours »
Céline alla s’assoir sur un tabouret gravitationnel, qui flotillait gaiment dans le « salon ». La baie vitrée lui dévoilait ses merveilles lactées de rouge et de bleu, tourbillons de vortex en effervescence.
Elle lui tourna le dos et regarda vers la porte.
Des milliers d’années d’avancées technologiques se déroulaient derrière nous, on était à l’aube du quatrième millénaire, vivre dans l’espace était devenu l’état naturel de l’homme et pourtant on avait toujours des sonnettes qui faisaient : « Ding Dong !». Pathétique.
« M. Brasey de la Galaxie Formulax B-71 demande permission d’ouvrir les portes de l’ascenseur à molécules.
- Permission accordée. »
Les portes s’ouvrirent dans un bruit d’aspirine et l’Officier de l’Inspection Brasey entra dans le salon. Céline se leva.
« Madame Basilix ?
- C’est moi-même.
- Je m’en doute bien. »

Silence.
« Je suppose que vous voulez voir mes papiers.
- S’il vous plait.
- Tenez.
- Votre matricule est bien le 123rer-T ?
- A votre avis ?
- Votre matricule est bien le 123rer-T ?
- Oui. »

Silence. Céline observa ce visage sévère penché sur la liasse de papiers qu’elle lui avait tendu. Son petit crâne chauve reflétait la lumière froide du plafonnier. C’était assez hypnotisant, Céline se demanda ce qu’il dirait si elle lui touchait le crâne. Mais voici que le petit homme s’était arrêté sur un formulaire rose qu’il relisait attentivement.

- Votre attestation de santé physique, paragraphe 4, alinéa b, chiffre 2 : Sexualité/maternité indique que vous êtes stérile de manière incurable. Est-ce toujours le cas ?
- Pardon ?
- Quel mot n’avez-vous pas compris ?
- Tout.
- Êtes-vous toujours stérile de manière incurable, comme l’indique l’attestation de santé physique que voici ?
- Ben oui.
- C’est fâcheux.
- Tu m’étonnes.
- Pardon ?
- C’est fâcheux, en effet. »
L’inspecteur leva les yeux des fascicules et la dévisagea sévèrement.
« Vous savez que vous êtes en contravention avec le règlement 412V de la Commission pour la Maternité, et plus particulièrement son article 121.
- Ah bon ?
- Oui.
- Merde alors.
- Comment comptez-vous y remédier ?
- Autant faire ce que peut. Nan mais sérieusement vous savez lire non ? Si je suis stérile de manière incurable comment voulez vous que j’y « remédie » ?
- Ayez un enfant. »
Céline le regarda, elle avait envie de le gifler. Tout ce que la société avait de pourri se trouvait incarné devant ses yeux. Mais elle aurait des problèmes, elle le sentait bien. Le petit homme posa la liasse de papiers sortit un formulaire de sa poche, le remplit et le lui donna. Une amende. Et gratinée en plus. Génial.
« Vous avez 30 jours de délai pour vous mettre en règle, en cas de contestation de la présente contravention vous avez la possibilité de faire recours au bureau des réclamation du district Oméga 13. Tout est clair ?
- Clair, limpide, transparent.
- Bien, maintenant, si vous le permettez, je vais inspecter le matériel. Les toilettes je vous prie ?
- Au fond à droite.
- Merci. »
Sa serviette sous le bras, l’inspecteur Brasey marcha d’un pas sévère (tout l’était chez ce personnage) en direction des commodités.
Céline s’allongea dans le canapé, elle se sentait un mal de tête latent. Elle réfléchit à l’absurdité de la vie ici. Putain, rien que de sentir le vent sur son visage serait une libération. Pendant ce temps le petit homme déambulait dans la station et s’arrêtait régulièrement, noircissant les pages de son petit carnet bleu. D’après l’expression de son visage, le résultat de l’inspection était aussi positif que le test de grossesse de la doyenne des sœurs d’Afrique. L’oreiller Babar avait particulièrement l’air d’être contraire au règlement, au moins on peut le penser si on considère la moue désapprobatrice dont son inspection fut l’objet. Arrivé devant le plan de travail en orichalque de la cuisine (encore une idée du capitaine) il marqua un temps.
« Votre machine à café est défectueuse ?
- Oui.
- Ah. Comment buvez-vous du café alors ?
- On n’en boit pas.
- C’est contraire au règlement.
- Si vous le dites.
- Je vais devoir le noter au rapport.
- Faites. »
Une fois ses feuillets remplis il tendit le bloc à Céline, qu’elle signa sans un mot. Du papier, pensa-t-elle. Archaïque. Lui tendant la main d’un air obséquieux, l’inspecteur Brasey lui dit :
« Vous recevrez un rapport et des directives d’ici une vingtaine de jours. Au revoir.
(on voyage à la vitesse de la lumière, mais il faut tous de même vingt putain de jours pour envoyer un rapport)
- Au revoir, Inspecteur.
- Oh, vous pouvez m’appeler M. Brasey vous savez, lui répondit-il avant de sortir. On n’est pas des machines. »

socque a écrit:Marrant (un peu court), mais où est la gradation ? Je ne l'ai pas repérée...

Vous m'écoeurez, socque, je vais plus jouer si vous y êtes. Superboulot, comme dab, mais peut-être plus enjoué et réussi que d'habitude. Je suis pas au top le soir, je ne vous en admire que plus.

socque a écrit:

Nath a écrit:Je vous écris une suite de gros mots et vous répondez ok, cet échange bizare me fait rire

Re-OK !! (Allez, j'en mets une, pour une fois : ;-))

Je viens de voir passer des poules avec des dents, pas vous ?

Mure : c'est toujours un peu dommage, je trouve, de terminer par un réveil, genre "oh ! ce n'était qu'un rêve !" Pour moi, ça fait pirouette. Sinon (mais là, vous n'aviez pas le temps, sans doute, de trouver plus astucieux), quand on expose une situation d'emblée au lieu de laisser le lecteur la découvrir peu à peu, ça donne une impression indigeste à mon avis. Les contraintes étaient bien intégrées, je ne les ai pas vues "ressortir".

silene82 a écrit:

Peter Pan a écrit:Ah les salauds, y z'ont zappé Halicante, espèce d'enfoirés ;-) (c.f. South Park)

Tu veux dire la MC de l'exo que t'as pas fini? D'ailleurs qu'est-ce que tu fais debout à cette heure?

Je stagne...

L'un des personnages de mon exo se prénomme Geneviève, tu l'as fait exprès silene82, avoue-le, t'as pris possession de mon ordinateur et tu me voles toutes mes idées parce que t'es jaloux de mon immense talent ! ;-)

Faux frère

Bordel de tête à queue ! Je sais ce que vous allez me dire, ce juron-là n’existe pas, mais c’est mon préféré. Et puis des jurons, on peut en inventer en veux-tu en voilà, n’est-ce pas ?! En tout cas, je m’en souviendrai, moi, de ce 14 juillet de mes deux, bon dieu ! Jamais j’y vais, moi, d’habitude ! Et voilà-t-y pas que mon frère m’appelle, du genre, euh… Salut, on s’est pas parlé depuis trois ans, mais là j’ai une urgence, je suis invité à la garden party du président, tu comprends, alors il me faut quelqu’un pour garder Niniche… (Niniche, c’est pas un caniche, c’est son fils qui s’appelle en réalité Nichelino… une histoire très romantique, il paraît, c’est là-bas, en Italie, qu’il a été conçu, le môme… Mais bon, le romantisme, moi j’veux bien, mais c’est rien qu’une histoire de cul, après tout !) Bref, moi, ce que je comprends surtout, c’est pourquoi je lui ai pas parlé depuis trois ans, à mon frangin ! La garden party du président, et pis quoi encore ?! Pourquoi pas le défilé sur les Champs, tant qu’on y est ?
Bon, toujours est-il que je me suis retrouvé avec le Niniche en question sur les bras, sept ans à peine sonnés… Alors moi, le ptiot, je lui propose d’aller nous faire un bowling, histoire de nous dégourdir un peu les pattes, mais non, lui, ce qu’il veut, c’est aller voir le défilé du 14 juillet. Avec flonflons et fliquettes. Tout ça, quoi. Alors moi je dis, OK, Nichel, on y va, mais on se trouve une place assise quelque part et on bouge plus, hein ? Tout content, le Nichelino, des étoiles dans les yeux et tout, et pas besoin d’une allumette pour les enflammer, ses étoiles, ça non !
Et nous voilà donc à piétiner pathétiquement dans l’hypothétique espoir de progresser dans cette pitoyable marée de piétons…

- J’veux un fanion ! s’écrie le Niniche tout à coup
- Pffff, mais pour quoi faire ? (bordel, mais ça j’l’ai dit dans ma tête) Ca sert à rien, ces machins-là ! Et puis regarde, il faut qu’on traverse toute la foule pour arriver au stand !
- Si, si, oncle Kenny, c’est important, c’est les couleurs de la France, faut les porter haut !

Mouais… Moi, c’que j’en dis, comme dirait ma tante Madeleine, c’est qu’y a anguille sous roche. Ou loutre sous montagne de rochers, si vous préférez. Parce qu’un gamin patriote, comme ça, ça s’invente pas. Ou plutôt si : ça s’imagine, au départ, puis ça se conçoit, ça s’élabore, ça se façonne, ça s’éduque, quoi ! Parce qu’à l’état naturel, on n’en trouve pas, des comme ça !
Alors le gamin, il trépigne, il braille, il finit par hurler et moi, au milieu de cette marée humaine, la honte me prend, vous comprenez, faire hurler un môme, comme ça, c’est pas chrétien, comme dirait Kipling… Alors moi, qu’est-ce que je fais, ben je vais le lui acheter, son fameux fanion français !

- C’est combien, j’ai demandé à la dame
- Sakawoulé, me suis-je entendu répondre… Ah, elle a dû dire « C’est comme vous voulez », je suppose… Du coup, je lui file 25 centimes et j’avance en direction des gradins, le gamin à ma suite, tout fier de porter son fanion façon flon-flon…

Et puis soudain quelqu’un me tire par la manche, je me retourne et la dame aux drapeaux me dit :
- Dites, c’est pas 25 centimes, c’est 3 euros le fanion
- Mais vous m’avez dit que je donnais ce que je voulais…
- Vous avez dû mal comprendre, monsieur, moi je parlais à mon mari, qui voulait mettre de la musique, et je lui ai dit « mets-donc le groupe Sakawoulé ! » Alors j’aimerais bien avoir mes 3 euros maintenant, autant faire ce que peut…
- Autant que faire se peut, je l’ai reprise
- Comme vous voudrez, mais donnez-moi l’argent !

Sur ce, on s’est retrouvés avec le gamin à louvoyer entre les gens pour atteindre les gradins – j’avais un mal de chien aux pieds – et à ce moment-là, Niniche me dit qu’il en a assez de porter son fanion, qu’il a mal au bras et que les couleurs de la France, ça doit se porter haut, au-dessus de la foule pour que ça se voie bien…
Du coup, je me retrouve porteur de drapeau genre flamme olympique en moins glorieux, les boules… J’ai vraiment hâte que tout ça se termine ! Et, tout à coup, mouvement de foule et piétinements intempestifs : paf ! je me retrouve sans drapeau ! Moi, content d’être enfin débarrassé, Niniche piquant une crise de nerfs direct… J’ai juste eu le temps de voir disparaître un type genre mafieux – costard, cigare et lunettes noires – notre fanion à la main… Mais il me rappelait quelqu’un, ce type… pourtant je connais personne dans la mafia… En tout cas, du coup c’était devenu mon affaire aussi, ce fameux fanion ! Affaire de famille, attention ! y’avait le fréro derrière qu’y allait râler si son fiston lui racontait notre aventure et que je l’avais pas défendu tel Zorro fendant la foule…
Tel Zorro, donc, je me frayai un chemin difficilement en criant « arrêtez-le ! Arrêtez ce mécréant ! », Niniche à mes trousses, quand, soudain, je me suis retrouvé nez à nez avec mon patron… Mais c’est bien sûr ! Costard, cigare et lunettes noires, genre mafieux, quoi ! Du coup, je me suis senti tout con, et j’ai rien trouvé d’autre à dire que :

- Ah, monsieur Duchmoll ! Comment allez-vous ? Vous sauriez où se trouvent les toilettes je vous prie ?»

Et le Niniche de se mettre à pleurnicher en lorgnant sur son fanion froissé dans les mains de monsieur Duchmoll.

Saint Georges : excellent ! J'adore ce genre d'ambiance, et bravo pour l'humour. Une belle réussite selon moi.

Mention spéciale pour :
"Des milliers d’années d’avancées technologiques se déroulaient derrière nous, on était à l’aube du quatrième millénaire, vivre dans l’espace était devenu l’état naturel de l’homme et pourtant on avait toujours des sonnettes qui faisaient : « Ding Dong !». Pathétique. (...)
Les portes s’ouvrirent dans un bruit d’aspirine "

Halicante : décidément, défilé = môme chiant + adulte traîné de force ! J'ai bien aimé votre texte, les contraintes sont très naturellement intégrées me semble-t-il.

socque

déjà formulé, mais abondance quand violons sonnent, donc
enlevé, enjoué, rapide, croqué, un sketch excellent

nath

dommage que ç'ait été si court; de fait, mieux vaut parcimonie que déballage, mais on aurait supporté, néanmoins, quelque chose d'un peu plus circonstancié

shako

jolie plume, et l'histoire étant parallèle à celle de socque, qui y a excellé, elle soutient la comparaison, et a sa propre originalité, en plus de son rythme. Good job

easter

honnêtement, je suis déçu. Je conçois que vous ayez participé du bout du clavier, mais nous somme accoutumés à tout autre chose, d'ordinaire. Ca fait un peu riquiqui, et expédié, pour se débarasser

Boc présent !

Tu me donnes quoi comme consigne mon chako ?

choisis au pif...

bon ben le maitre de cérémonie n'étant pas présent...je m'auto-consigne en vert...parce que le noir me serait trop facile...
Putain Jardiland...comment je vais bien pouvoir caser Jardiland...?

socque a écrit:silene82 : un feu d'artifice de style(s), mais au détriment de la clarté, selon moi... J'ai eu du mal à suivre. Cela dit, j'ai adoré
"J'eusse dû demeurer couchée, c'eût été plus simple: engrossage sur canapé, grossesse allaitante, un marmot par mamelle, mise bas sur couche, radada, et ça repart."

Si peu clair, vraiment? Monsieur et madame? Prolo et rupine? Ya pas, faut que j'affûte un peu plus

boc21fr a écrit:bon ben le maitre de cérémonie n'étant pas présent...je m'auto-consigne en vert...parce que le noir me serait trop facile...
Putain Jardiland...comment je vais bien pouvoir caser Jardiland...?

Si si j'suis là! T'as droit au noir si tu veux. Mais en guise d'objet, tu prends un loup.

Euh Chako...tu pourrais me donner un objet ?

Un loup ?
Oki doki...

Peter Pan a écrit:

silene82 a écrit:

Peter Pan a écrit:Ah les salauds, y z'ont zappé Halicante, espèce d'enfoirés ;-) (c.f. South Park)

Tu veux dire la MC de l'exo que t'as pas fini? D'ailleurs qu'est-ce que tu fais debout à cette heure?

Je stagne...

L'un des personnages de mon exo se prénomme Geneviève, tu l'as fait exprès silene82, avoue-le, t'as pris possession de mon ordinateur et tu me voles toutes mes idées parce que t'es jaloux de mon immense talent ! ;-)

Damn! he knows now!

Mure

Féminin, aussi ridicule que cela puisse sembler ainsi posé, c'est féminin. Je veux dire en cela mutin, coquin, habile, limite escroc, comme les pitchounes qui te rackettent ta pelle et ton seau au bac à sable. Toujours un peu limite sur l'écriture pure, mais rattrapé par l'inventivité. Digo yo

St Georges

Sous un tel patronage, on ne peut qu'exceller ou crever. Vous semblez bien vivant. Vous m'avez scotché; ce genre de faribole n'est guère ma tasse de thé, mais je l'ai trouvé troussée de main de maître.

Bonjour !
Je viens de m'inscrire, alléché par l'exercice... Et, si vous me permettez de participer tout de suite...
(J'ai pris les contraintes d'Halicante :
- Animal : loutre.
- Objet : allumette.
- bleu : 14 juillet. Tout semble bien se passer, lorsqu’un individu louche que vous n’aviez pas vu arriver chipe le petit drapeau que vous aviez acheté à l’occasion, ce qui a bien évidemment le don de vous énerver, et d’imaginer de possibles péripéties.)

---

Putain de journée, je vous jure ! Moi qui ne suis pas patriote pour un sou, je me retrouve dans la foule agglutinée sur les champs, à attendre ce con de défilé. Bastien, mon fils, accroché à ma main gauche, Sidonie, ma femme, derrière, à parler avec ses parents… Les beaux parents ! Ah, ils sont beaux les beaux-parents… Je les déteste. Si je suis ici, c’est à cause d’eux, c’est pour montrer, ou faire croire, à beau-papa que je ne suis pas le soixante-huitard attardé que je suis de toute évidence. Mais non, je ne conchie pas l’armée… Mais, oui, je suis tout prêt à inculquer à mon petit ange les bonnes valeurs complètement branque de la grande muette qui ferait bien de le rester au lieu de nous assourdir à grand coups de tsoin-tsoin et de mirage 2000 fendant l’air. Et y’a pas un de ces cons qui pourrait nous faire un beau bang en rase motte, histoire de rendre sourds la moitié des habitants de la capitale ? Non, ils ne peuvent pas.

Bastien, mon fils, accroché à ma main gauche, et ce drapeau ridicule dans ma main droite, à peine levée, discrète, autant que possible. Le vent le fait osciller doucement, plus que les faibles mouvements que j’impulse dans quelques moments d’égarement… Égaré, égaré, je suis dans cette foule, sous ce soleil, dans cette famille de militaires…

Putain de journée, je vous… L’enfoiré ! Une espèce de loutre, nez allongé, oreilles rabattues, vient de faire surface à ma hauteur et s’est emparé de mon con de drapeau. Ça n’a duré qu’une seconde, un souffle, une respiration, puis l’animal s’est immergé dans la foule. Une longue apnée dans la mer humaine, dense. Puis il refait surface, un peu plus loin, prend le temps de me regarder d’un air narquois et replonge. L’enfoiré ! Je ne suis pas patriote, je conchie l’armée et les drapeaux, mais il y a des limites à ne pas dépasser. Ce drapeau est celui de mon fils, et, même s’il l’a dédaigné depuis une bonne heure, même si je l’ai ramassé par terre deux fois parmi les reliefs de pétards et les allumettes brulées avant de, finalement, préférer le garder, il est tout de même sacré. Je suis le gardien du drapeau, et le général en chef Bastien ne me pardonnerait certainement pas de laisser filer ce fier étendard sans risquer ma vie pour le rattraper ! À peine le temps de glisser la mimine du général dans celle de la duchesse en négociation serrée pour nous éviter le bal des pompiers de trifouilli-les-gonesses, et qui me regarde avec une expression de totale incompréhension, et je m’immerge à mon tour, difficilement, dans les flots tumultueux qui dévalent l’avenue. La loutre a une avance certaine, mais mes chances ne sont pas infimes. Elles le sont, de fait, mais un bon soldat ne s’arrête pas à des détails de cet ordre, pourtant de pure logique. Un bon soldat suit les ordres. En l’occurrence, je n’ai pas reçu d’ordre, mais c’est seulement parce que le général en chef n’a que cinq ans et manque encore un peu de réactivité face aux évènements, surtout ceux dont il n’est pas au courant. Du coup, j’improvise. Logique mon général : l’ordre était pensé, ou aurait pu l’être.

La loutre se faufile, sinue, fend les eaux sombres… et sort occasionnellement le museau pour constater que je suis à ses trousses. Moi, je rame. J’avance à grand coups de bras dans la foule, je mouline. Autour de moi, ça crie et ça gémit. La réprobation est palpable. Qu’importe : les ordres sont les ordres, et le non-dit qui plus est. Me voilà aux barrières de sécurité, plus de trace de la loutre. Où ce fada a-t-il bien pu se planquer ? Je m’appuie sur la barrière pour jeter un regard circulaire sur la foule réprobatrice qui me fusille du regard. C’est une image : je ne puis être fusillé vu que je ne fais que mon devoir ! Et je le vois ! La loutre louvoyant au loin… de l’autre côté. Mais comment a-t-il fait ? Amis, nous n’avons pas le choix, quand faut y aller, faut y aller, autant faire ce que peut ! J’escalade la barrière et je me rue sur l’avenue devant les yeux ébaubis de la foule en délire.

Là, j’ai fait une connerie, une grosse connerie, une énorme connerie… monumentale même. Devant moi, un régiment passe en faisant comme si de rien n’était. Derrière des chars. Pour les avions, c’est bon, ils sont passés, mais je n’écarte pas l’hypothèse que quelques hélicoptères puissent encore arriver. Je tente le tout pour le tout : je fonce. Tenter de passer en courant au milieu d’un régiment de fantassins stressés par des mois de répétition de cette bête cérémonie, est une expérience rare et vivifiante. Et la proximité du gradin des huiles, où le gratin huile son entregent, n’arrange pas les choses. En un quart de seconde il y a : trois soldats et un fou furieux affalés sur le sol, trente caméras de télévision tournées et mises au point sur le lieu du drame, cent-cinquante gars en uniformes sortis d’on ne sait où et courant sur l’avenue. Et, au point focal de toutes ces attentions : moi, baignant dans mon sang.

Un gars portant chemise kaki et casquette se pencha vers moi. Quand il vit, sous ma chemise déchirée, le T-Shirt « Ni Dieu ni maître » que j’avais malicieusement mis ce matin, malgré la chaleur torride qui était annoncée, un petit sourire se dessina sur ses lèvres…

Putain de journée. Je n’imagine même pas la tête de beau-papa…

Halicante a écrit:Bonjour !
Je viens de m'inscrire, alléché par l'exercice... Et, si vous me permettez de participer tout de suite...

Désolé, mic-mac d'identifiants, le dernier message d'Halicante... et bien en fait c'est moi qui l'ai posté...

Socque :

Oui, c’est curieux que le quatorze juillet nous évoque les mêmes images, à peu de choses près… J’ai bien aimé l’humour (« Je peux numéroter mes vertèbres, quoi, avec mon dos fragile. », « Y aurait-il des neurones cachés dans ce bloc osseux qui tient lieu de tête à l’étron juvénile ? », « Je rêve de noyades dans les flots javellisés… C’est arrivé, dans les sanisettes, au début, mais à tous les coups ils ont arrangé ça. ») Cruel ! Mais le retournement à la fin semble apaiser le narrateur ;-)

Bon, il semblerait que mon homme ait commis une erreur de connexion... Il vient de s'enregistrer sur le site mais a posté son texte sous mon pseudo !

Halicante

Très bon boulot, alerte, plaisant, inventif. Les contraintes passent comme une lettre à la poste.

Halicante a écrit:Bon, il semblerait que mon homme ait commis une erreur de connexion... Il vient de s'enregistrer sur le site mais a posté son texte sous mon pseudo !

Il y aura peut-être un gentil modérateur pour arranger les choses ?!
Donc : le texte qui commence par "Putain de journée" n'est pas d'Halicante mais de Gév... (hé oui, je fais des émules !)

Easter: l'envolée lyrique Panzani! Sérieux faut que tu bosses dans la pub, envoie-leur un mail avec des propositions de slogan, je suis sûr que t'as une chance ^^ et puis, le Robin des Bois de Champion et autres surnoms, c'est joli aussi. Un peu surpris par la nonchalance du vigile, mais à part ça, ouep, séduit, et bien ri.

Silene: « Pute-Montmartre », ça démarre bien ^^ et pour la suite.. Oui! Souvent j’ai un peu du mal à rentrer dans tes textes à cause du style que je trouve un peu difficile, mais là, j’y suis entré comme dans un bain! Aime beaucoup l’alternance des deux personnages, le prolo et la rupine comme tu dis si bien. Et la fin où, finalement, la bourgeoise devient à l’image de son mari en se confrontant à sa réalité… très bien vu, et bien mené.

Hali: c'est cool, ça! Bienvenue à Gév, donc! Une fois n'est pas coutume, une arrivée en plein exo! Chouette!

J’avais un chouette appartement que je partageais avec Maman, mon lapin nain.
Ah ! En ce temps-là, la vie était si douce… On était bien pépères Maman et moi.On s’entendait bien, on aimait tous les deux les carottes et la tranquillité. Elle alignait ses petites crottes en silence, bien rondes et bien dures pour que je n’aie pas de mal à les ramasser.
Quand il ne pleuvait pas, le dimanche, je l’emmenais au square d’en face, histoire qu’elle voit un peu le monde. Je m’asseyais sur le banc de droite. J’avais mes habitudes. D’ailleurs il n’y avait jamais personnes dans ce square. Les gens passaient devant mais il était rare que quelqu’un s y arrête. Jusqu’au jour…
Elle portait une robe verte, Véronèse, dirais-je et je ne me suis pas méfié. Elle lisait, un manga, je crois. Certes elle était assise sur mon banc et je me trouvais un peu déconcerté. J’ai d’abord pensé prendre place sur celui de gauche, une fois n’est pas coutume, mais le cœur n’y était pas, non vraiment. Alors, je me suis assis à côté de la robe verte. J’ai sorti Maman de sa cage, et comme je lui attachais sa laisse, la robe verte levé les yeux de son livre et s’est écriée « kawai !!! » en souriant de tous les yeux qu’elle avait, deux billes de jais très vivantes sous la peau lisse à peines fendues des paupières. Et j’ai vu qu’elle était belle, élégante et raffinée comme un jardin japonais. Je ne me suis pas méfié. Maman non plus. J’ai même cru l’entendre ronronner sous la main de porcelaine qui la flattait.
Et puis…
Et puis vous savez comme la vie va. Comme on est démuni lorsque le vent se lève. On n’avait pas prévu. On se laisse emporter et l’on déploie ses ailes. On apprend à voler, on se soulève, on décolle on s’élève. On monte , on monte…
On monte l’escalier et on passe la porte. On ouvre grand les fenêtres.On aère le lit.On va on vient : on est hors de soi chez soi. On se dépense sans compter.
Je me demande encore aujourd’hui comment Asiko si menue s’est arrangée pour prendre autant de place en aussi peu de temps. Tout ça rien qu’en restant déployée sur le canapé, me dirigeant comme un orchestre symphonique à moi tout seul, du bout de son éventail caustique.
Elle a tout chamboulé. Elle adorait le vert, elle en voulait partout. Des plantes. Partout. Des fougères, des palmiers, des cocotiers, des cognassiers, des arbousiers...
Des babobabs ?
Oui.
Nains.
Elle a voulu que je me débarrasse de la plupart des meubles pour laisser libre le mur le plus vaste. Elle souhaitait un mur végétal. Je m’y opposai brièvement mais « Allez, allez, ce sera tellement "Kawaï ! » n’arrêtait-elle pas de me tancer en prenant Maman a témoin, laquelle approuvait frénétiquement du nez.
Je ne sais pas combien j’ai fait d’aller-retour à Jardinaland.
Elle a eu son mur végétal.
Elle en a joui quelques heures en modulant de jolis «Kawaï ! ». avant de succomber à une allergie au pollen de Barazinia, une plante exotique qu’elle m’avait fait commander sur le Net et qui m’avait coûté la peau des fesses.

Du coup on se retrouve à nouveau tous les deux, Maman et moi.
Et les feuilles mortes se ramassent à la pelle.

Exo 150709

Contraintes perso :

Station spatiale/panne de cafetière/lampe torche.

Noir c'est noir (surtout dans l'espace)

15 juillet 2019

Faut reconnaître, y a station spatiale et station spatiale. Quand j’ai signé pour deux ans en orbite équatoriale dans le module Timour Lenk IV de l’ A.S.L.(Azerbaïdjan Space Lines), j’aurais peut-être mieux dû lire les petites lettres. Faut dire aussi que le contrat était rédigé en azéri, avec traduction en russe ou chinois sur option. J’ai pas opté. J’ai signé sans lire. J’avais pas non plus vraiment le choix. Le DRH m’avait caressé dans le sens du poil. Avec paquet de charognards que toi traînes à tes baskets, il m’a dit, y a que dans l’espace que toi peux espérer les semer. J’ai poste pile-poil pour toi. Bonne paye, CDD deux ans renouvelables, et totale autonomie de gestion de ton planning de production. Bon…autant faire ce que peut, à défaut de faire ce que veut, hein…

Totale autonomie de gestion de mon planning de prod', moi je veux bien, mais y m’ont quand même collé une assistante technique pas piquée des lombrics ! Pas qu’elle soit moche, Mlle Ozgül, ni bégueule, mais bon ils auraient pu en choisir une plus futée. C’est pas rien, quand même l’élevage de loutres en apesanteur à 3000 kms en rotation au dessus de notre bon vieux planchers des yacks. Pour les loutres, c’est simple. Sur terre, l’usage des loutres à des fins commerciales est strictement prohibé. Mammifère super sympa, espèce protégée, chasse et élevage streng verboten. Seulement voilà, au-delà de 500 bornes d’altitude, tu rentres dans l’espace international. Les lois terrestres, tu peux te les scotcher où tu penses au chatterton épais. En 2014, une résolution solennelle de l’ONU en a décidé ainsi. Votée à l’unanimité, tu penses ! Du coup, en cinq ans, on a expédié plus de mille stations spatiales dans les airs, la plupart juste pour servir de siège social à des entreprises échappant de la sorte à tout contrôle fiscal et étatique. En fait j’aurais pu tomber pire : on dit que pas de mal de ces paradis fiscaux sur orbite appartiennent à la Cosa Nostra, aux cartels colombiens, ou à la mafia russe. Tout des gens avec qui j’ai eu des mots. Des fois, on devrait la fermer avant de l’ouvrir. Comme aurait dit le regretté Pierre Dac.

16 juillet 2019

Aujourd’hui, c’est fiesta. On doit nous livrer le frichti pour les bestioles à fourrure. Une fois par mois, une navette spatiale tirée de Baïkonour nous approvisionne. En plus de 30 tonnes de hareng congelé (c’est que ça bouffe, 200 loutres, en un mois), les copains nous ramènent des douceurs additionnelles. C’est sûr que la gamelle du bord est pas vraiment top. Bouillie d’orge, lait de chamelle aigre et thé noir au beurre rance, on patauge dans le rustique. Mlle Ozgül, élevée dès le biberon à ce régime, ne s’en formalise pas outre mesure, mais mon système digestif, gâté au foie gras des Landes, au caviar bélouga et à la truffe d’Albe, rechigne un peu. Enfin ça vaut toujours mieux que de s’expliquer avec Don Benito « Ketchup » Taraguzzi, de Brooklyn, Ignacio « Loco » Guttierez, de Medellin, ou encore l’ineffable Vladimir Tarassovitch Orloff, d’Odessa, dit Vlad l’Empaleur pour les érudits. Ou ceux qui le connaissent de près. Normalement, code islamique oblige (le Timour Lenk IV est immatriculé dans une République du même nom) c’est tintin côté bibine, mais l’islamisme de la République est soluble dans le bakschich. C’est aussi une République orientale. Moyennant quoi, on a droit à 100 bouteilles de vodka ( de la douce à 60° , on est quand même en mission spatiale) à chaque arrivage de poissecaille. Ca aide à tenir par les nuits, même étoilées comme celles qu’on a. La petite Ozgül, code islamique ou pas, elle bascule pire qu’une sotnia de cosaques, et on en viendrait aux mains pour la dernière boutanche de la journée si j’étais pas un gentleman. Bonne nuit les petits.

17 Juillet 2019

Aujourd’hui c’est galère. Saloperie de station spatiale de ses fesses, sakawoulé ! (moi je te case une allitération et une interjection antillaise dans une seule phrase ; ça s’appelle le métier) Encore la faute de Mlle Ozül. Bon, faut reconnaître qu’au réveil, on avait pas le blanc de l’œil façon Persil. La faute à la quatrième boutanche de vod’ qu’on avait prélevée sur la réserve stratégique qu’on garde des fois que la navette mensuelle aurait du retard. M’enfin c’est quand même elle qu’a mis la cafetière électrique sur la jante. Bon d’accord, la cambuse du bord, elle est pas moins rustique que l’ordinaire, et la cafetière, ils avaient dû l’acheter en palette au Goum de Tachkent un jour de promo. C’est quand même pas une raison pour oublier de mettre de la flotte dans le réservoir. Résultat des courses, non seulement on s’est retrouvés tricards de caoua ce matin, mais on a plus de jus dans toute la station suite au court-circuit provoqué par l’incendie de la machine. Moi quand j’ai pas ma dose de caféine au réveil, je réponds plus de mes nerfs. Je l’ai expliqué à Mlle Ozgül en termes choisis. Dans un manuel d’arts martiaux. Le code islamique ne réprouve pas la fermeté avec les dames, à l’occasion.

Bref pas de café, et fallait réparer la panne dans le noir. Heureusement, ils avaient glissé une lampe torche dans le kit de survie, entre le sérum antirabique et la boîte de préservatifs. Sûr et certain qu’ils l’avaient achetée le même jour et au même endroit que la cafetière tellement elle clignotait, mais bon faudrait faire avec. Le plus urgent : rétablir le courant dans les bacs des loutres. A cinq mille dollars la peau, valait mieux pas qu’elles s’enrhument. Ces stations spatiales d’occase, on peut pas dire que ça tient pas en l’air, mais ça ressemble plus à un HLM volant qu’au Majestic de Cannes. Dans les coursives, t’arrête pas de te cogner le crâne dans un tuyau surbaissé ou de te flinguer le genou dans un boulon qui dépasse. Inutile de te dire que quand on est arrivés au loutrorium, on ressemblait plus à des catastrophes ferroviaires ambulantes qu’à des gravures de mode. J’ai bidouillé le bifulsateur de cornouillance tout en bottant le fireck de Mlle Ozgül rapport à ce qu’elle me passait pas la pince multiprise assez vite, et la lumière fut.

Alors là tu vas pas me croire ! Ca grouillait, ça frétillait, ça débordait et ça se répandait de tous les bacs. On avait pas dû étudier d’assez près les effets de la gravitation zéro sur la reproduction des mustélidés en milieu clos, mais toujours est-il que ces saloperies de bestiole s’étaient multipliées comme des lapins dans un chapeau de magicien. On en a retrouvé dans la console de pilotage, sous les draps de nos couchettes, dans les frigos de la cambuse et jusque dans la tinette des chiottes. Maintenant restait à savoir comment on allait nourrir ce beau monde jusqu’à la prochaine navette. Je t’avais bien dit qu’y avait station spatiale et station spatiale...Enfin tant qu'on avait de la vodka

Gobu

Nath :
Bien vu, le « micro-satellite autour de la Terre », et la référence à Clooney, et puis les contraintes passent nickel… J’aurais juste aimé en avoir un peu plus !

Pour le reste, je commenterai demain !
Buona notte a tutti ! (Orthographe incertaine... Mes cours d'italien sont loin, très loin...), mais j'aime bien le dire en italien, ça sautille !
Et merci à toi, Chako, j'ai bien aimé les contraintes !
(même si, au début, j'ai pensé que ça faisait beaucoup... Finalement je les ai digérées !)

Socque: très juste, j'ai trouvé que l'ensemble était vraiment réussi. Certes, pas de feux d'artifices, mais cela sied si bien à ce 14 juillet là!

Mure: quel dommage que cette fin! Déçu par le réveil, pourtant j’aimais bien le début, un vrai décor de SF! (ça a du plaire à socque, ça! ^^) Retenu ça: Mort de rire ^^

Saint Georges: ça commence bien… ça commence très très bien… waow! Une horreur! Vraiment excellent! Là, là, je dis, chako bas. « On n’est pas des machines », impeccable, propre, et net. Cynique à souhait.

Bon et bien les enfants, Chako fatigue un brin, alors dodo, lirai la suite après. En attendant bravo à tous, ce que j'ai lu m'a déjà beaucoup plu. Un grand merci à tous les participants, donc, et à demain!

Chako Noir a écrit:Mure: quel dommage que cette fin! Déçu par le réveil, pourtant j’aimais bien le début, un vrai décor de SF! (ça a du plaire à socque, ça! ^^)

oups, un oubli.. je reprends.
ai retenu ça:

Mure a écrit:Les grands architectes furent sortis du tapin et les écologistes, du Canard WC.
Les autres, servirent à la construction de multiples stations d’accueil dont la célèbre Loutre-NF-5-G.

voâââlà, c'est mieux =)

Gév : marrant et bien vu, pour moi. Bon, rien à faire, dans l'imaginaire de Vos Ecrits, il faut des mômes dans le défilé du 14 juillet.

Pili : remarquable ! J'ai beaucoup aimé cette douce cruauté. J'ai eu l'impression que les contraintes n'y étaient pas vraiment, mais, en l'occurrence, je m'en fiche, pour moi le texte est excellent.

Gobu : oui, beaucoup d'allure ! J'ai un bémol sur l'aparté au lecteur, inutile selon moi, trop appuyé : "(moi je te case une allitération et une interjection antillaise dans une seule phrase ; ça s’appelle le métier)".

Je suis sûr qu'on dit "autant que faire se peut", mais l'expression imposée donne un effet assez intéressant. Notamment dans votre texte, Chako noir.

Nath: plaisant, un peu court

Chako Noir: dommage que les seringues sortent un peu de nulle part (c'était votre objet non? je n'ai pas vérifié). J'ai bien aimé le "fallacieuse enflure"

Easter Island: bien écrit, dommage que vous n'ayez pas plus développé!

Incroyable...je suis super inspiré ce soir...z'allez vous marrer....

Je vais me coucher, je pense. Grand merci au Maître de Cérémonie !

ça vient, ça démarre, ça part, ça arrache, ça fuse, ça décolle, ça arrache...Jolly ho !
super cool les contraintes ce soir !