Un temps
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Saint Georges
mitsouko
Arielle
Manu(manisa06)
mentor
Tristan
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Un temps
Comment ne pas y penser alors ? Comment ne pas y opposer la seule réponse juste, frémissante et signifiante : tout brûler, d’un seul geste, puis cracher sur les cendres froides qui s’entassent. Tout reprendre depuis le début.
Plus je te cherche, et moins j’y vois. Il y a ce désordre, cette incohérence de nos rythmes respectifs. Systole-diastole. Diastole-systole. Chacun apprend à respirer, à sa manière. On ne fait que singer la vie. On s’y perd.
Le creuset de la poitrine, ébranlé jusque dans les fondations du jour : pas un mot, le corps tressé de silences. J’invente ta présence dans ses moindres particules, sans vraiment y croire. Méandres de tes sons qui voudraient résonner forts. Ça palpite, un instant.
Existence saoûle, matins qui trébuchent, ratés de la voix, le cœur acide, les mains calleuses, défroque de la nuit au bout du regard : c’est là, pourtant. Ça continue à bouger, plus loin que nous, que la parole silencieuse qui nous traîne sur ces sentiers remplis de pierres sans vraiment.
Un simple affaissement du monde dans l’enclave de la pièce, sa lenteur.
Puis le silence s’installa entre chaque mot. Dans la faiblesse du dire le souffle nidifia la vie. Plus je me tais, et plus je t’aperçois.
Le vin faisait encore son effet. L’instant tituba nauséeux, sans que l’on eût pour autant la force de le retenir. Ça vint tout de même, ton cœur appuyé à ma bouche, alourdie de lenteurs.
Ça vint. On crut, l’espace d’un son, au geste. Le signe était là, le papier noirci, la main en suspens prise dans la flagrance de l’acte. On crut un instant tromper la mort. Ce n’était que le commencement.
Tout se résorba aux premières lueurs. Ce ne fut, pourtant, pas faute d’avoir espéré, la tête tranchée de sommeil, le corps poisseux d’ennui.
Un temps la parole fut là, blottie en creux. Il était facile de la deviner, à ses renflements dans l’espace. Mais la pièce redevint pesante, le bois froid, la fenêtre opaque. Comment s’esquisser alors.
Un temps on y crut.
Plus je te cherche, et moins j’y vois. Il y a ce désordre, cette incohérence de nos rythmes respectifs. Systole-diastole. Diastole-systole. Chacun apprend à respirer, à sa manière. On ne fait que singer la vie. On s’y perd.
Le creuset de la poitrine, ébranlé jusque dans les fondations du jour : pas un mot, le corps tressé de silences. J’invente ta présence dans ses moindres particules, sans vraiment y croire. Méandres de tes sons qui voudraient résonner forts. Ça palpite, un instant.
Existence saoûle, matins qui trébuchent, ratés de la voix, le cœur acide, les mains calleuses, défroque de la nuit au bout du regard : c’est là, pourtant. Ça continue à bouger, plus loin que nous, que la parole silencieuse qui nous traîne sur ces sentiers remplis de pierres sans vraiment.
Un simple affaissement du monde dans l’enclave de la pièce, sa lenteur.
***
Puis le silence s’installa entre chaque mot. Dans la faiblesse du dire le souffle nidifia la vie. Plus je me tais, et plus je t’aperçois.
Le vin faisait encore son effet. L’instant tituba nauséeux, sans que l’on eût pour autant la force de le retenir. Ça vint tout de même, ton cœur appuyé à ma bouche, alourdie de lenteurs.
Ça vint. On crut, l’espace d’un son, au geste. Le signe était là, le papier noirci, la main en suspens prise dans la flagrance de l’acte. On crut un instant tromper la mort. Ce n’était que le commencement.
Tout se résorba aux premières lueurs. Ce ne fut, pourtant, pas faute d’avoir espéré, la tête tranchée de sommeil, le corps poisseux d’ennui.
Un temps la parole fut là, blottie en creux. Il était facile de la deviner, à ses renflements dans l’espace. Mais la pièce redevint pesante, le bois froid, la fenêtre opaque. Comment s’esquisser alors.
Un temps on y crut.
Re: Un temps
le titre d'un album de Peter Gabriel.mentor a écrit:up
Ce texte m'a rappelé des souvenirs mauvais donc bon texte.
Manu(manisa06)- Nombre de messages : 1928
Age : 54
Localisation : Côte d'usure
Date d'inscription : 11/04/2008
Re: Un temps
Quelle atmosphère merdasse, diantre, heureusement , à un moment ils y crurent, à la bonne heure. C'est réussi oui, la poésie finit par ne plus être assez forte pour masquer la tension.
Invité- Invité
Re: Un temps
Après avoir lu ton texte, Tristan, il m'est venu l'envie de reprendre "Une saison en enfer" ...
Moi ! moi qui me suis dit mage ou ange, dispensé de toute morale, je suis rendu au sol, avec un devoir à chercher, et la réalité rugueuse à étreindre ! Paysan !
Troublant !
Le pouvoir des mots, il me semble qu'il faut y croire jusqu'à son dernier souffle, même quand ils font silence.
Moi ! moi qui me suis dit mage ou ange, dispensé de toute morale, je suis rendu au sol, avec un devoir à chercher, et la réalité rugueuse à étreindre ! Paysan !
Troublant !
Le pouvoir des mots, il me semble qu'il faut y croire jusqu'à son dernier souffle, même quand ils font silence.
Re: Un temps
ces mots qui cheminent au bord du précipice
et cette force vive qui soulève la phrase
c'est très beau
et cette force vive qui soulève la phrase
c'est très beau
mitsouko- Nombre de messages : 560
Age : 64
Localisation : Paris
Date d'inscription : 08/11/2008
Re: Un temps
Il y a quelque chose de complètement éthéré dans cette ambiance pourtant lourde, qui m'aimante et m'émeut. De la force de ce qui aurait pu. On s'y retrouve, indéniablement.
Invité- Invité
Re: Un temps
Je ne sais pas ce qui me gêne, un je ne sais quoi dans des passages comme celui-ci:
ou celui-là
Et pourtant, il y a là une puissance de l'écriture d'une très grande qualité :
ou encore
Troublant.
Plus je te cherche, et moins j’y vois
ou celui-là
On crut un instant tromper la mort
Et pourtant, il y a là une puissance de l'écriture d'une très grande qualité :
Existence saoûle, matins qui trébuchent, ratés de la voix, le cœur acide, les mains calleuses, défroque de la nuit au bout du regard : c’est là, pourtant.
ou encore
L’instant tituba nauséeux, sans que l’on eût pour autant la force de le retenir
Troublant.
Saint Georges- Nombre de messages : 174
Age : 36
Localisation : Suisse et France
Date d'inscription : 23/06/2009
Re: Un temps
Ça touche juste. On se prend ça de plein fouet, d'autant plus fort que c'est retenu.
Invité- Invité
Re: Un temps
j'ai relu plusieurs fois. L'écriture traduit bien l'atmosphère, lourde, étouffante et le malaise ainsi que la progression. L'émotion est là, palpable. C'est un texte qui sait toucher et m'a beaucoup plu.
demi-lune- Nombre de messages : 795
Age : 64
Localisation : Tarn
Date d'inscription : 07/11/2009
Re: Un temps
Que te dire Tristan, si ce n'est que j'ai apprécié la dramatique lourdeur de l'ensemble, cette violence qui jaillit des mots et cette construction qui peu à peu s'élève sous nos yeux. De manière assez terrible d'ailleurs, parce que juste et bien menée. La tension va crescendo, l'horreur est tapie prête à bondir, la peur se reprise... autant d'émotions fortes qui rythment le texte.
D'autant plus que tu as réussi, à mes yeux, à ne pas en faire trop, à employer des idées fortes sans les vêtir d'emballages inutiles; le format choisi convient à cette façon de faire.
D'autant plus que tu as réussi, à mes yeux, à ne pas en faire trop, à employer des idées fortes sans les vêtir d'emballages inutiles; le format choisi convient à cette façon de faire.
Sahkti- Nombre de messages : 31659
Age : 50
Localisation : Suisse et Belgique
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: Un temps
merci tout plein, sahkti. c'est tiré d'un recueil (La Métamort) qui, après corrections, trouvera, je l'espère, un éditeur.
Re: Un temps
Mais ta mort, amor, me met à mal et même mord: aïe.
Très beau.
Très beau.
Chako Noir- Nombre de messages : 5442
Age : 34
Localisation : Neverland
Date d'inscription : 08/04/2008
Re: Un temps
Je trouve ce texte absolument remarquable. Que dire de plus ? Les mots sont bien choisis ...
"Chacun apprend à respirer, à sa manière. On ne fait que singer la vie. On s’y perd."
Juste pour ce passage je me permets de proposer
"On ne fait pas que singer la vie : ( ou une , ) on ( ou On ) s'y perd"
Je trouve que c'est mieux au niveau rythme, tout simplement parce que la phrase précédente est un alexandrin et donc cela rajouterai une syllabe qui ferait de celle ci un alexandrin également. On ne le voit pas mais on le sent.
"Chacun apprend à respirer, à sa manière. On ne fait que singer la vie. On s’y perd."
Juste pour ce passage je me permets de proposer
"On ne fait pas que singer la vie : ( ou une , ) on ( ou On ) s'y perd"
Je trouve que c'est mieux au niveau rythme, tout simplement parce que la phrase précédente est un alexandrin et donc cela rajouterai une syllabe qui ferait de celle ci un alexandrin également. On ne le voit pas mais on le sent.
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