Le ciel bleu

Dans la campagne européenne, aux abords d'un petit village calme et ensoleillé se trouve une école. Dans cette école, dont le pourtour est fait d'arbres se tenant mollement dans le sol vert, se trouve un petit garçon assis en classe, entouré d'autres élèves et d'un instituteur. Alors que ceux-ci écrivent avec application, en de belles lettres épaisses et rondes, la leçon que l'instituteur copie au tableau, lui fait tourner son crayon entre ses doigts. De sa main libre, il soutient sa tête et fixe le ciel bleu par la fenêtre, les paupières mi-closes. Quelquefois, des oiseaux agités planent d'un arbre à l'autre en répondant au chant de ses camarades. L'enfant soupire.

A quelques milliers de kilomètres de là, dans la chaleur étouffante du désert, dans une mer de sable brûlante, des hommes s'affrontent. L'un d'eux, caché derrière une carcasse de voiture, à l'ombre d'un immeuble poussiéreux, boit les dernières gouttes d'eau gisant dans sa gourde. Autour de lui, les coups de feu claquent violemment dans l'air, se répercutent sur les murs de la ville déserte, parcourent les rues mortes. Parfois, il jette un œil par dessus sa cachette et aperçois quelques ennemis courant au loin, puis guettent ses camarades à quelques mètres de lui. Il serre les dents, charge son arme en un bruit sec et métallique et respire un grand coup. Il n'y a aucun nuage dans le ciel.

L'enfant est las. L'école n'est pas pour lui, il aurait aimé voir le monde, voyager bien au-delà des mers et gravir des sommets inconnus. Il guide son crayon sur sa feuille blanche et dessine quelques lignes hasardeuses et abstraites, pour ensuite les gommer et recommencer. Finalement, il dessine un arbre, surplombé d'un petit soleil près duquel volent des oiseaux en « v ». Derrière l'arbre, il dessine alors un soldat, puis plus loin, un autre, et tous les deux se tirent dessus sans jamais se toucher. L'enfant redresse la tête pour jeter un œil à la grosse horloge blanche au fond de la classe puis replonge dans son dessin.

Partout, le sol étincelle et l'air s'embrase du souffle des balles. Le claquement rude des tirs martèle les oreilles de l'homme, tirant à l'aveuglette dans la direction opposée. Ses oreilles sifflent et ses bras le fatiguent à force de retenir le recul de l'arme. De temps à autre, il recharge son arme, laissant tomber au sol dans un bruit clair l'ancien chargeur. Il transpire, il a chaud; il a peur.

L'enfant griffonne sur son papier. Des hommes se battent, il trace de longs traits rouges au sol, comme des coulées de sang.

Aux pieds de l'homme roule un objet rond et vert. Quelques secondes où le bruit s'évanouit, puis un énorme souffle, puis plus rien.

La sonnerie de l'école retentit. L'enfant se lève en trainant comme les autres élèves, se prépare à rentrer chez lui où un repas l'attends sûrement, ainsi que sa famille. Il regarde le ciel parfaitement bleu par la fenêtre avant de partir.

Dans la poussière de la rue dévastée, parmi les tirs, est allongé l'homme, une main sur le ventre, couverte de sang. En fermant doucement les paupières, dans un dernier souffle, il regarde le ciel bleu.

Joli parallèle, un peu naïf à mon goût. Une belle fin, je trouve.

Mes remarques :
« des oiseaux agités planent d'un arbre à l'autre en répondant au chant de leurs camarades »
« il jette un œil par dessus sa cachette et aperçois quelques ennemis courant au loin, puis guette (s’il s’agit du gars qui jette un œil, et non guettent, ou guettant s’il s’agit des ennemis) ses camarades à quelques mètres de lui »
« à force de retenir le recul de l'arme. De temps à autre, il recharge son arme » : la répétition se voit, je trouve
« il a chaud; il a peur » : typographie, une espace avant le point-virgule
« un repas l'attend (et non l’attends) sûrement »

et aperçoiT
puis guettE
Quelques maladresses comme "les gouttes d'eau gisant dans sa gourde", le mot est mal choisi, je trouve

Le parallèle des 2 scènes, un peu du déjà vu, mais c'est pas mal mené, et ça laisse la porte ouverte à l'imagination par rapport au futur de cet enfant rêveur
Et le ciel est bleu un peu partout dans le monde alors que des scènes si différentes se passent en dessous

Tu aimes écrire et ça se ressent.
A te relire

Une bonne idée, une tentative louable et pas mal réussie ; attention à ne pas trop tomber dans les clichés pseudo humanistes.
Une chose à laquelle j'objecte un peu ici : "L'enfant est las. L'école n'est pas pour lui, il aurait aimé voir le monde, voyager bien au-delà des mers et gravir des sommets inconnus."
Alors que je conçois fort bien qu'un enfant n'aime pas l'école, n'ait pas envie de s'y trouver, je ne suis pas sûre qu'à cet âge (si jeune) il ait déjà pu formuler consciemment l'envie de courir le vaste monde.

Contente de te relire redstar.
Une bonne idée que ces deux vies en parallèle et bien traitées. C’est agréable à lire et bien tourné. Il y a juste une image qui m’a semblé trop forcée :

est fait d'arbres se tenant mollement dans le sol vert

, j’ai du mal à visualiser ce que peuvent être des arbres se tenant mollement.

J'ai beaucoup aimé. La candeur, l'ingénuité du parallèle, ne peut l'en rendre que plus savoureux.
Un joli texte, bien écrit de surcroît.

Merci,

J'aimerais répondre à vos commentaires mais impossible de trouver le sujet des réponses...

Si la modération pouvait m'aider,

Amicalement,
redstar

Désormais, tu dois présenter tes réponses aux commentaires dans ce même fil, redstar. Le sujet "réponses aux commentaires" a été fermé.

Oh, parfait. Cela me plaît bien mieux. Puis-je demander pourquoi? Curiosité.

En ce qui concerne mon texte j'avoue qu'après relecture le terme "gisant" pour la goutte d'eau est très laid. J'ai modifié.

J'aime bien l'image des arbres plantés mollement dans le sol vert, en ce qui me concerne. J'imagine un sol touffu, humide et épais dans lequel des arbres tordus, vieux etc poussent. C'est une image que j'ai du mal à expliquer, navré qu'elle choque.

J'ai été ravi en voyant vos commentaires très gentil et suis désolé pour les fautes à nouveau. J'avais peur que ce texte soit mal jugé, plus le temps passe et plus j'ai l'impression de mal écrire ou de faire de la merde. Bref.

Au plaisir,
L

redstar a écrit:Oh, parfait. Cela me plaît bien mieux. Puis-je demander pourquoi? Curiosité.

En ce qui concerne mon texte j'avoue qu'après relecture le terme "gisant" pour la goutte d'eau est très laid. J'ai modifié.

J'aime bien l'image des arbres plantés mollement dans le sol vert, en ce qui me concerne. J'imagine un sol touffu, humide et épais dans lequel des arbres tordus, vieux etc poussent. C'est une image que j'ai du mal à expliquer, navré qu'elle choque.

J'ai été ravi en voyant vos commentaires très gentil et suis désolé pour les fautes à nouveau. J'avais peur que ce texte soit mal jugé, plus le temps passe et plus j'ai l'impression de mal écrire ou de faire de la merde. Bref.

Au plaisir,
L

Et j'ai honte de la laideur de ce message ainsi que des fautes. Fatigue, mea culpa

Il a été jugé finalement que ce fil était inapproprié car trop fouillis, ou en tout cas favorisait des polémiques dérangeantes et qui troublaient le climat convivial du forum.

Je me dois de réagir à ton commentaire, et plus particulièrement à ceci :
"J'ai été ravi en voyant vos commentaires très gentil et suis désolé pour les fautes à nouveau. J'avais peur que ce texte soit mal jugé, plus le temps passe et plus j'ai l'impression de mal écrire ou de faire de la merde. Bref."

D'une chose l'une : tu n'écris pas "de la merde", et ce n'est pas pour te flatter que je le dis. Cela fait plusieurs fois que je te lis et si tes productions ne me plaisent pas toujours, je leur reconnais des qualités certaines. D'ailleurs, si tu postes tes textes ici, c'est avant tout dans l'optique de progresser et de te surpasser, non ?
C'est "marrant", mais je me reconnais plutôt dans ton cas : j'ai une forte propension à me déprécier et à penser que mes textes sont systématiquement nuls. Ce n'est pas nécessairement le cas. Alors surtout, ne te ravise pas à l'avenir si tu as ce sentiment !

Je dois dire que l'image des arbres plantés mollement me plaît assez également.

A bientôt,

Merci, c'est rassurant d'être compris. Il est parfois cependant difficile de travailler correctement avec ce sentiment.

Oui, je poste ici pour cela. Je suis d'ailleurs assez content sur ce texte.

Au plaisir,

Je ne sais pas pourquoi ça m'a rappelé le cancre de Prévert, combat symbolique pour la liberté peut-être, en tous cas je ne trouve pas mièvre votre parallèle.

Trés joli triste et évocateur...Construction qui donne un relief vraiment intéressant.

Très intéressant...
Il y aurait une habile variation à mener sur ce thème entre des soldats s'ennuyant et jouant aux cartes et des enfants s'entretuant dans les cours d'écoles...
Désolé

Je le trouve sympa aussi ce texte.
Il pourrait continuer encore, rebondir...
J'aurais mis "planque" au lieu de "cachette"

lol Boc

J'ai trouvé ça pas mal.
Un côté naïf a dit quelqu'un, je le dirais aussi mais dans un sens non péjoratif. Car ça aurait pu être lourdingue, avec des travers plus ou moins didactiques ou moralisateurs ou autres, alors que ça reste assez aérien à mon goût, et coloré.
J'ai donc finalement très vite accepté de voyager avec ce petit texte en le situant dans le champ de l'art naïf, et ce parti pris accepté (et donc aussi provision faite d'une certaine forme d'indulgence) me suis laissé entraîner depuis l'espace jusqu'à cette école, et ensuite encore transporter avec un certain plaisir vers un ailleurs qui n'en est pas vraiment un, d'ailleurs.

Bon, sinon de mon point de vue, le sentiment de mal écrire indique en général une forme de lucidité et d'exigence bien naturelle qui permet de progresser.

Pas un peu, plus que vu.
Cela dit, c'est tout à fait gentiment et proprement écrit. Tout dépend de ce que sont vos ambitions ; vous craignez d'écrire de la merde. Louable inquiétude, mais très sincèrement, quelle est la grille de décodage utilisée ?
Si vous concourrez dans le cadre d'un exercice ou d'un concours francophone organisé aux Maldives, votre texte est proche du sublime : au royaume des aveugles...vous complèterez sans peine.
A quelle aune voulez-vous être jugé ? Céline - pour faire consensuel, perso, il me gonfle - ou Marc Levy ? Stendhal ou Pancoll ?
Si c'est pour écrire "mieux", c'est-à-dire en respectant les règles admises de la construction phraséologique en français, pas de souci, de rédaction en rédaction, même les cancres s'améliorent. Et vous êtes tout de même nettement mieux classé...
Alors quoi ? Utilisant le registre fini commun de tout le monde, la syntaxe et le vocabulaire français, on en fait quoi ? Une démonstration de correction stylistique, ou un laboratoire tentant de retranscrire par la finitude de formes quasi figées l'infinie mouvance du monde ?
Vous êtes à l'âge où, sauf génie encombrant, et ils sont rares, les lionceaux gratouillent de leurs papattes et leurs griffettes, tout esbaubis d'arriver à extraire la moelle de l'os qu'a explosé, d'un coup définitif, leur très vénérable Seigneur Père, le Lion régnant.
Donc courage, écrivons ! le thème n'est pas neuf, le traitement non plus, qu'importe, faire œuvre littéraire, c'est donner à voir à travers son regard et son ton propre.
A vous relire.

Je vous remercie tous de vos commentaires et de votre implication quelle qu'elle soit. Le ton naïf est à nouveau voulu. La plupart de mes textes sont ainsi.

Silene, je vous remercie également pour vos conseils et votre éclaircissement sur le sujet. J'avoue avec honte que j'ai parfois du mal à comprendre vos très jolies phrases. Si j'ai bien tout saisi, écrire bien n'est qu'une chose relative à chacun, pour faire grossier.

Lucas

Silène dit qu'il a vraiment aimé et qu'il t'encourage à continuer.
J'ai apprécié le texte aussi, par ailleurs. Il va bien.

Très bien...
Merci à tous

Hello,

Personnellement, j'aurais aimé voir un lien plus direct entre la main de l'enfant et le corps du soldat. Mais peut-être que finalement c'est tout aussi bien comme ça.
Après, des maladresses, mais qui n'en commet pas ?
Bon, vu que les autres ont pris la peine de dire quoi, je ne vais pas redonder.

En tous cas, c'est intéressant, l'idée des imbrications d'univers. Moi j'aime bien.

A suivre,

Ubik.