Exo live mercredi 26 janvier à 21h00

Halloween, c'est vraiment une fête de con. Des appareils dentaires sur pattes qui tambourinent aux maisons et empêchent les gens de regarder leur feuilleton tant qu'ils n'ont pas reçu un tas de bonbons. Et encore, des bonbons... la plupart veulent du pognon maintenant, sans doute pour aller se droguer ou acheter des capotes.
Ils n'ont qu'à travailler ces vauriens au lieu de venir empoisonner la vie des honnêtes citoyens avec des chansons stupides et des déguisements qui le sont encore plus. Marre de voir débarquer devant la porte des draps de lit déchirés avec des yeux même pas en face des trous.

C'était un peu - même beaucoup - ce que Juliette se racontait ce soir en pensant au lendemain et à la horde de nains bruyants qui allaient envahir sa maison.
L'an passé, elle s'était cachée, n'avait pas ouvert la porte mais ces gamins de malheur avaient étalé de la crotte de chien sur les boiseries pour bien lui montrer qu'à Halloween, on donne des bonbons – non... des sous - ou est bon pour acheter un flacon de Monsieur Propre. Avec les sous que justement on n'a pas donnés.
L'année avant, encore pire, elle était carrément partie se planquer en voiture sur le parking d'un fast-food désert. Quand elle était rentrée, elle avait retrouvé l'équivalent de trois tonnes de papier WC dans sa pelouse et sur son arbre. Et il pleuvait à verse quand elle avait voulu ramasser tout ça.

Alors cette année, pas question de se laisser avoir. Elle se montrerait, ouvrirait gentiment sa porte, sourire aux lèvres – heu, non... quand même pas, faut pas pousser non plus – et leur filerait des bonbons.
Sauf qu'elle n'avait vraiment pas envie de faire ça et que des bonbons, elle n'en avait pas.
Sophie se donna deux heures pour réfléchir à la situation et trouver l'arme de guerre fatale qui la sauverait de ces démons païens.

Le lendemain matin, Sophie était joyeuse. Le sourire aux lèvres, ha ça pour sûr, elle l'arborait bel et bien !
Un voisin un peu curieux – mais ça, ça n'existe pas, tout le monde le sait - l'aurait entendue rigoler toute seule dans sa cuisine, en même temps qu'un petit bruit de papier froissé. Le genre de papier que fait un bonbon à sucer quand on le déballe; ça crissait, ça craquait...et ça faisait trente minutes que ça durait.
Ha oui, y avait pas à dire, Sophie se marrait bien.

Elle regarda les heures passer, attendant avec une certaine impatience que les premiers mômes braillards arrivent. Elle avait mis une jolie robe, une décoration de circonstance à l'entrée de la maison; il ne manquait que les enfants, qui finirent par se pointer.
Un vrai bonheur en plus, il y avait six gamins dans le premier groupe. Mal éduqués de surcroît, ils ne souriaient pas, récitèrent leur truc nul pour avoir des bonbons sans grand entrain mais quand elle leur présenta un panier rempli de sucreries emballées dans des papiers brillants, ils se ruèrent là-dessus comme des puces sur un chat.
Elle dût les freiner, il fallait qu'il en reste pour les autres.
Les autres qui ne tardèrent pas et en moins d'une heure, elle avait épuisé ses stocks.
Non sans avoir connu quelques fous rires silencieux.

C'est qu'à un moment ou à un autre, il y avait toujours bien un gourmand dans la bande qui déballait le bonbon – et pan, prends le papier par terre devant la porte, Sophie – et l'enfournait en regardant à peine à quoi ça ressemblait.
Le triturait dans sa bouche afin de savoir quel goût ce truc tout blanc pouvait avoir.
Puis faisant une affreuse grimace avant de cracher le tout – mais ça, ce n'était pas grave, Sophie était prête à ramasser tous les résidus baveux du monde en échange de la vengeance procurée.

Pastille au goût de menthe qui rapidement se transformait en bonbon diffuseur d'odeur (et de saveur !) d'aisselles pas fraîches. Le gars du magasin de farces et attrapes lui avait garanti un résultat sans failles.
Il ne lui avait pas menti.
Finalement, Halloween, c'était pas si mal que ça !