Un camarade d'école
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Un camarade d'école
Ses longues mains effilées étaient ornées de bagues bizarres et belles. Sa voix un peu flûtée oxygénait l’espace autour de lui. Ses grandes lunettes rougeâtres, ses oreilles fines et ovales, ses cheveux ondoyants, brillaient au soleil. Sa dégaine altière, son cou long et nu, aimantaient le regard. Sa conversation, inintéressante au possible, avait l’avantage de ne pas détourner l’attention de l’essentiel : on se laissait volontiers bercer par la rumeur de sa voix souple et régulière. Sa bouche large, ses yeux rieurs, irradiaient loin autour de lui, et semblaient une niche où on pouvait s’abriter des platitudes du monde. Il était un antre de sensualité.
Comme une vague prête à éclater sur le rivage, son large sourire restait souvent suspendu.
Quand le rire enfin éclatait, on éprouvait le même soulagement bienfaisant que celui que peut apporter un orage de fin d’après-midi. Quand il glissait ses mains dans ses poches et promenait son regard calme et ferme sur les feuillages de l’automne ou sur les étoiles argentées, on se prenait à rêver à quelque western léonien où il tiendrait le rôle du héros.
Il aimait, à l’occasion, toucher physiquement les gens ; et, avec le sourire malicieux d’un roturier qui, par malice ou par hasard, se serait fait passer pour un roi thaumaturge, il posait parfois sa paume tiède sur une de mes épaules.
Son attention aux autres pouvait sembler parcimonieuse, aléatoire, et intermittente. On n’en était que plus agréablement surpris, comme miraculeusement tiré de la masse des anonymes, quand il montrait, par tel geste délicat, qu’on était pour lui, non pas n’importe qui, mais au contraire un membre à part entière de l’univers bizarre et luxuriant où il promenait sereinement sa malice, son intelligence, et sa gentillesse.
Quand il était amené à griffonner un mot quelconque, on était saisi par l’élégance des lettres qu’il avait formées. Le plus trivial de ses post-it rutilait comme un Miro, et les alinéas de la moindre de ses listes de courses formaient comme une superbe juxtaposition de mauves vaguelettes océanes.
A son contact, on se croyait soi-même beau. Il ne touchait pas à grand-chose – à part à la drogue. Mais ce qu’il touchait, il en faisait de l’or.
Comme une vague prête à éclater sur le rivage, son large sourire restait souvent suspendu.
Quand le rire enfin éclatait, on éprouvait le même soulagement bienfaisant que celui que peut apporter un orage de fin d’après-midi. Quand il glissait ses mains dans ses poches et promenait son regard calme et ferme sur les feuillages de l’automne ou sur les étoiles argentées, on se prenait à rêver à quelque western léonien où il tiendrait le rôle du héros.
Il aimait, à l’occasion, toucher physiquement les gens ; et, avec le sourire malicieux d’un roturier qui, par malice ou par hasard, se serait fait passer pour un roi thaumaturge, il posait parfois sa paume tiède sur une de mes épaules.
Son attention aux autres pouvait sembler parcimonieuse, aléatoire, et intermittente. On n’en était que plus agréablement surpris, comme miraculeusement tiré de la masse des anonymes, quand il montrait, par tel geste délicat, qu’on était pour lui, non pas n’importe qui, mais au contraire un membre à part entière de l’univers bizarre et luxuriant où il promenait sereinement sa malice, son intelligence, et sa gentillesse.
Quand il était amené à griffonner un mot quelconque, on était saisi par l’élégance des lettres qu’il avait formées. Le plus trivial de ses post-it rutilait comme un Miro, et les alinéas de la moindre de ses listes de courses formaient comme une superbe juxtaposition de mauves vaguelettes océanes.
A son contact, on se croyait soi-même beau. Il ne touchait pas à grand-chose – à part à la drogue. Mais ce qu’il touchait, il en faisait de l’or.
Meilhac- Nombre de messages : 49
Age : 48
Date d'inscription : 25/09/2011
Re: Un camarade d'école
Mmh je n'arrive pas à saisir le narrateur de ce texte : est-il sérieux ? La description du premier paragraphe est singulière, je ne saisis pas ce qu'il pense vraiment.
J'aime bien ce passage : "Il aimait, à l’occasion, toucher physiquement les gens ; et, avec le sourire malicieux d’un roturier qui, par malice ou par hasard, se serait fait passer pour un roi thaumaturge, il posait parfois sa paume tiède sur une de mes épaules. "
Un texte à l'ambiguïté intéressante en tout cas !
J'aime bien ce passage : "Il aimait, à l’occasion, toucher physiquement les gens ; et, avec le sourire malicieux d’un roturier qui, par malice ou par hasard, se serait fait passer pour un roi thaumaturge, il posait parfois sa paume tiède sur une de mes épaules. "
Un texte à l'ambiguïté intéressante en tout cas !
Lifewithwords- Nombre de messages : 785
Age : 32
Localisation : Hauts de Seine
Date d'inscription : 27/08/2007
Re: Un camarade d'école
Une description libellée avec préciosité. J'aurais préféré un style plus simple.
Un détail m'étonne : comment un être qui promène sereinement sa malice, son intelligence et sa gentillesse peut-il avoir une conversation "inintéressante au possible" ? (mais peut-être après tout...)
Un détail m'étonne : comment un être qui promène sereinement sa malice, son intelligence et sa gentillesse peut-il avoir une conversation "inintéressante au possible" ? (mais peut-être après tout...)
Invité- Invité
Re: Un camarade d'école
Pour moi, une belle description. Mais après ?
- « parcimonieuse, aléatoire, et intermittente. » : la virgule après « aléatoire » est superflue.
- « sa malice, son intelligence, et sa gentillesse. » : idem, la virgule après « intelligence » est superflue.
- « A son contact » : accentuation des majuscules, « À » (Alt + 0192 ou mon profil).
- « parcimonieuse, aléatoire, et intermittente. » : la virgule après « aléatoire » est superflue.
- « sa malice, son intelligence, et sa gentillesse. » : idem, la virgule après « intelligence » est superflue.
- « A son contact » : accentuation des majuscules, « À » (Alt + 0192 ou mon profil).
Invité- Invité
Re: Un camarade d'école
merci à tous pour vos lectures. effectivement, il faut que je perde ma sale habitude de mettre une virgule en trop entre le dernier terme d'une énumération et le verbe (ou le "et").
je suis d'accord aussi quant au fait que par endroits c'est un peu trop "précieux" effectivement. et oui effectivement y a une contradiction entre la conversation inintéressante du début et l'intelligence de la fin.
pour préciser les choses: c'était un texte écrit dans le cadre d'un atelier : il fallait présenter un personnage de manière à ce qu'il plaise au lecteur. j'avais failli mettre un titre du genre "admiration".
je suis d'accord aussi quant au fait que par endroits c'est un peu trop "précieux" effectivement. et oui effectivement y a une contradiction entre la conversation inintéressante du début et l'intelligence de la fin.
pour préciser les choses: c'était un texte écrit dans le cadre d'un atelier : il fallait présenter un personnage de manière à ce qu'il plaise au lecteur. j'avais failli mettre un titre du genre "admiration".
Meilhac- Nombre de messages : 49
Age : 48
Date d'inscription : 25/09/2011
Re: Un camarade d'école
Ce que j'apprécie ici, c'est la richesse, la diversité et la précision du lexique.
Invité- Invité
Re: Un camarade d'école
Un portrait un petit peu inégal pour moi : j’ai beaucoup aimé la fin qui se tourne plus vers la personnalité ; le début sur l’apparence est plus chargé je trouve, un peu lourd pour démarrer.
Je suis ainsi passée, au fil de la lecture, de l’indifférence à l’attachement pour le personnage.
Il y a de belles images, par exemple : semblaient une niche où on pouvait s’abriter des platitudes du monde
Et quelques phrases un peu « too much » comme celle-ci : les alinéas de la moindre de ses listes de courses formaient comme une superbe juxtaposition de mauves vaguelettes océanes
Admiration eut été un bon titre, elle transparait parfaitement dans le portrait, qui est d’un ciselé empreint de respect je trouve. Comme s’il avait fallut chercher le mot juste, beau, adéquat au personnage et à l’admiration qu’il suscite chez le narrateur.
Je suis ainsi passée, au fil de la lecture, de l’indifférence à l’attachement pour le personnage.
Il y a de belles images, par exemple : semblaient une niche où on pouvait s’abriter des platitudes du monde
Et quelques phrases un peu « too much » comme celle-ci : les alinéas de la moindre de ses listes de courses formaient comme une superbe juxtaposition de mauves vaguelettes océanes
Admiration eut été un bon titre, elle transparait parfaitement dans le portrait, qui est d’un ciselé empreint de respect je trouve. Comme s’il avait fallut chercher le mot juste, beau, adéquat au personnage et à l’admiration qu’il suscite chez le narrateur.
elea- Nombre de messages : 4894
Age : 51
Localisation : Au bout de mes doigts
Date d'inscription : 09/04/2010
Re: Un camarade d'école
Bien sûr la fragrance du grand Meaulnes est venue entre ces lignes...
Lointaine pourtant.
Lointaine pourtant.
Ba- Nombre de messages : 4855
Age : 71
Localisation : Promenade bleue, blanc, rouge
Date d'inscription : 08/02/2009
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