Exo musique : Au 81 de la rue Grand-Pont

aaaaaaaaaaEst-ce que…

Lent
aaaaSur la toile, géante, éclaboussée de lumière tombe
aaaaLa nuit.
aaaaS’élèvent la musique, le brouhaha des voix, les oh! Les ah!
aaaaPuis, creusant l’ombre du bout des doigts, la mémoire déchirée libère
aaaaSATIE

aaaaaaaaaaaaaaaaaaa…tu…

Très luisant
aaaaLe grand oiseau Piano
aaaaUne boucle et des b
aaaaDes F, des P,
aaaaUne oreille qui écoute
aaaaEt, partout, des petits points blancs

aaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa…entends ?

Questionnez
Est-ce que tu entends ? Tu écoutes ? Qu’est-ce que tu fais, à la fin ?

Du bout de la pensée
aaaaEt la dame d’élever son bras, de poser son pouce contre son front, de le laisser glisser le long de son visage
aaaaet
aaaade
aaaafaire
aaaaun pied de nez.

Postulez en vous-même
aaaaCe doigt, petit, trouve sa place sur la blanche
aaaaLa main se déplace et la musique prend vie
aaaaD’oubliée à cadencée

aaaaaaaaaaTu écoutes ?

aaaaL’autre bras

aaaaaaaaaaMaman ! Elle entend rien.

aaaaCorps scindé. Défiguré.

aaaaaaaaaaElle sait plus jouer. Elle a oublié.

Pas à pas
aaaaLes doigts, d’une note à une autre, de glisser

Sur la langue
aaaaJusqu’à ce que la mémoire, à nouveau, se voile dans l’épaisseur de l’oubli.


Télévision. Feuilleton. Ennui. Seule dans son fauteuil, la vieille dame n’en finit plus d’oublier, jusqu’à ce que les mots de Lucy Crale ne viennent déterrer certains souvenirs enfouis.
Ce que dit Lucy : « Le passé ne me laisse pas en paix. Il me hante sans arrêt. Et tant que ces fantômes ne seront réduits au silence, je ne pourrai pas m’en libérer. »
Et la vieille dame de se lever et de poser ses mains sur le clavier blanc et noir et de jouer.

Une interprétation mélodramatique de Gnossienne très originale
On dirait une impro réalisée par un descendant de Mozart doué du solfège
ou une leçon de piano
où Lucy
s'ennuie
où... je crois...

Je ne sais, moi, comment interpréter les soupirs b F P sur la portée mais peu importe... un trémolo ?

Silence
sur les souvenirs

J'ai beaucoup aimé

J'ai bien aimé le texte qui plane douloureusement, mais discrètement, jusqu'à "l'épaisseur de l'oubli."

Hélas la dernière strophe "Télévision..." me paraît destructrice.
Après que tombe le voile de l'oubli, on se tait. Mais non, on se trouve ramené au niveau de l'anecdote la plus insignifiante. De plus la forme "jusqu’à ce que les mots de Lucy Crale ne viennent déterrer" me semble bancale, sans que je puisse affirmer qu'elle est incorrecte.
A la rigueur, si vous y tenez vraiment, la seule citation "Ce que dit Lucy : « Le passé ne me laisse pas en paix. Il me hante sans arrêt. Et tant que ces fantômes ne seront réduits au silence, je ne pourrai pas m’en libérer. »" me paraît suffisante.

Lever le voile de l'ennui le voile de l'oubli, la musique comme réminiscence d'une vie.
Une idée trés jolie.
Parfois on est un peu destabilisé cependant, la fin obscurcit le cheminement de la pensée je ne sais plus qui est qui qui parle qui est Lucy Crale je suis un peu perdue j'aurai aimé une ligne un peu plus claire.

un peu comme rebecca, je suis embêtée par la fin
j'ai apprécié la mise en page pensée et les mots légers
je n'aurais peut-être pas mis en gras si appuyé, ça accroche un peu trop l'œil au dépens du reste

Lucy !
C'est toujours la même plume, un univers qui me fait penser à David Lynch, avec des déboîtements, des glissades...
Et j'aime ça !

J'aime bien ces différents niveaux de lecture dans lesquels on peu grapiller suivant sa fantaisie pour faire naître sa propre histoire. J'aime ces indications en gras qui ressemblent à celles que donnait Satie pour jouer sa musique, j'aime te retrouver Lucy avec ta verve, ta malice de lutine qui m'ont manqué

J'ai beaucoup aimé ; le retour vers le réel gâche un peu la fête à la fin du texte.

Visuellement en ouvrant la page, j'aime beaucoup.

J'ai lu les autres commentaires, j'avoue.
Je suis passée par google pour Lucy Crale (Agatha Christie ? est-ce bien ça ?)

Tu (vous ?) te proposais de faire une prose , il me semble.
Ce texte est bien entre le poème et la prose.
Je le lis comme une suite de flashs dans le temps et l'espace, et qui ne laisse pas le lecteur souffler, mais l'oblige à suivre ce "chaos".
La mélancolie du regard final sur cette femme seule me ramène au morceau choisi pour l'exercice.