A toi qui as eu le courage de continuer
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A toi qui as eu le courage de continuer
Ceci est davantage un besoin de poser une émotion qu'une création littéraire. Un sentiment d'inutilité à canaliser face à tout cela et une peur grandissante pour quelqu'un du même sang que moi...
Dans ma tête résonne encore le bruit des tam-tam. Ceux qui ont accompagné ton départ. Ceux qui ont suivi ton premier retour, avant de te voir à nouveau monter dans cet avion te portant vers le malheur. Mille morts par jour me dis-tu en pleurant, trois millions depuis que tu es là et personne n'en parle. Nulle part. Toi tu les vois, tu les entends, tu les respires. Cette mort, elle te traverse la peau, elle fait désormais partie de toi et tu ne pourras plus jamais vivre comme avant.
Modestement planquée derrière mon écran, je poursuis le travail, je transfère, je communique, j'envoie et je lis, je découvre, je regarde, hébétée, frissonnant d'horreur devant ces corps entassés et ces visages terrorisés. Je revois le visage d'Azrani, morte pour m'avoir souri, exécutée pour avoir fait briller son regard l'espace d'une seconde. A des milliers de kilomètres de toi. Dans ton nouveau pays, on ne meurt pas parce qu'on regarde les autres en leur souriant. On meurt parce qu'on a le tort d'exister. De respirer le même air que les autres. De ne pas avoir le droit de porter la même peau noire et le même regard tourmenté. On meurt parce qu'on a volé un pain, exténué à force d'avoir faim et de manger de l'herbe. On meurt comme un voleur, la main coupée et la gorge tranchée. A dix ans ou à cinquante. L'âge ne compte pas, seule la violence a droit de cité. La violence et la désillusion. Ces utopies perdues que nous avions voulu restaurer, chacune de notre côté, avec notre coeur et notre maladresse d'éponges à émotions. La brousse et la savane ont su te capturer, le régime des barbus a calmé toutes mes ardeurs. Nos chemins humanitaires se sont décroisés. Le mien se poursuit désormais à l'ombre de la sécurité, le tien a un goût de sang et de peur collée au ventre.
Je sais que tu n'abandonneras pas. Tes mots "je n'en dormirai plus" restent gravés en moi. La vie des autres est à ce prix, la tienne aussi.
Tiens bon...
Dans ma tête résonne encore le bruit des tam-tam. Ceux qui ont accompagné ton départ. Ceux qui ont suivi ton premier retour, avant de te voir à nouveau monter dans cet avion te portant vers le malheur. Mille morts par jour me dis-tu en pleurant, trois millions depuis que tu es là et personne n'en parle. Nulle part. Toi tu les vois, tu les entends, tu les respires. Cette mort, elle te traverse la peau, elle fait désormais partie de toi et tu ne pourras plus jamais vivre comme avant.
Modestement planquée derrière mon écran, je poursuis le travail, je transfère, je communique, j'envoie et je lis, je découvre, je regarde, hébétée, frissonnant d'horreur devant ces corps entassés et ces visages terrorisés. Je revois le visage d'Azrani, morte pour m'avoir souri, exécutée pour avoir fait briller son regard l'espace d'une seconde. A des milliers de kilomètres de toi. Dans ton nouveau pays, on ne meurt pas parce qu'on regarde les autres en leur souriant. On meurt parce qu'on a le tort d'exister. De respirer le même air que les autres. De ne pas avoir le droit de porter la même peau noire et le même regard tourmenté. On meurt parce qu'on a volé un pain, exténué à force d'avoir faim et de manger de l'herbe. On meurt comme un voleur, la main coupée et la gorge tranchée. A dix ans ou à cinquante. L'âge ne compte pas, seule la violence a droit de cité. La violence et la désillusion. Ces utopies perdues que nous avions voulu restaurer, chacune de notre côté, avec notre coeur et notre maladresse d'éponges à émotions. La brousse et la savane ont su te capturer, le régime des barbus a calmé toutes mes ardeurs. Nos chemins humanitaires se sont décroisés. Le mien se poursuit désormais à l'ombre de la sécurité, le tien a un goût de sang et de peur collée au ventre.
Je sais que tu n'abandonneras pas. Tes mots "je n'en dormirai plus" restent gravés en moi. La vie des autres est à ce prix, la tienne aussi.
Tiens bon...
Sahkti- Nombre de messages : 31659
Age : 50
Localisation : Suisse et Belgique
Date d'inscription : 12/12/2005
Re: A toi qui as eu le courage de continuer
Très beau texte, Sakhti, merci...
Je suis volontaire dans une ONG, et je retrouve ici des sensations que j'ai éprouvé sur le terrain plus d'une fois. Tu as mis les bons mots là où ça fait mal, j'en suis encore retrourné.
Que dire d'autre, sinon "merci" encore une fois...
Je suis volontaire dans une ONG, et je retrouve ici des sensations que j'ai éprouvé sur le terrain plus d'une fois. Tu as mis les bons mots là où ça fait mal, j'en suis encore retrourné.
Que dire d'autre, sinon "merci" encore une fois...
eriquito- Nombre de messages : 3
Date d'inscription : 25/05/2007
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