Variations normandes
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Ariel
obi
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Variations normandes
Mémoire de sel
Juin. Dans le silence unique d’un ciel à l’amarre, des milliers de bois blancs scrutent obstinément le jour. Un vent libre du large s’entête à dessein, fouaillant les plages.
Cependant, la glaise a collé depuis bien loin les champs aux bottes de ses paysans. Des contours de bateaux glissent parfois derrière les brumes d’océan.
Alors, pour toujours, c’est peut-être la fin.
Stoïque sous l’herbe rase, la terre attend, trouée de roses à la nuque raide ; d’étranges dormeurs, gonflés de sel, y soupirent sans nulle retenue. La pluie s’est étranglée dans de tout jeunes cyprès. Calme écume du brouillard, les mouettes vont, telles un sommeil qui s’épanche. Sur des heures fébrilement arrêtées, les falaises retissent une impatience à perpétuité. Même, les bois clouent de la terre qui voudrait s’échapper ; chaque rai de lumière fait espérer.
Rien ne console d’un rivage oublié.
Là-bas, les pommiers sont en fleurs. Et sur les haies, le soleil monte, à souffles courts, infiniment las.
Vers Avranches
Non loin des plages, dans la mémoire apaisée de profonds ciels d’eau, c’est au pays des pommiers. Là d’où je vous parle, le vent arrête sa course à la grille, chemine en souffles retenus au pied de chaque bois blanc. Des brumes océanes y viennent pleurer les reflux du silence. Sur des nues impavides les cyprès aiguisent infiniment leurs branches, infiniment labourent l’oubli du sable.
Bosselé de pas d’enfants immémorieux, il geint parfois , roule sur les tertres que d’anciens capitaines ont échoués.
Les mouettes si vives n’y vont plus.
Là, même en rêve, on n’a jamais du jour qu’un matin presque d’été et glisse s’éteindre dans de vagues brouillards.
Inflexibles, tant de croix rangées implorent la clémence d’un vent qui démêle toujours ses toiles aux clochers des églises.
C’est là-bas, tout près des plages, entre la mer et des pommiers, vers Avranches.
Juin. Dans le silence unique d’un ciel à l’amarre, des milliers de bois blancs scrutent obstinément le jour. Un vent libre du large s’entête à dessein, fouaillant les plages.
Cependant, la glaise a collé depuis bien loin les champs aux bottes de ses paysans. Des contours de bateaux glissent parfois derrière les brumes d’océan.
Alors, pour toujours, c’est peut-être la fin.
Stoïque sous l’herbe rase, la terre attend, trouée de roses à la nuque raide ; d’étranges dormeurs, gonflés de sel, y soupirent sans nulle retenue. La pluie s’est étranglée dans de tout jeunes cyprès. Calme écume du brouillard, les mouettes vont, telles un sommeil qui s’épanche. Sur des heures fébrilement arrêtées, les falaises retissent une impatience à perpétuité. Même, les bois clouent de la terre qui voudrait s’échapper ; chaque rai de lumière fait espérer.
Rien ne console d’un rivage oublié.
Là-bas, les pommiers sont en fleurs. Et sur les haies, le soleil monte, à souffles courts, infiniment las.
Vers Avranches
Non loin des plages, dans la mémoire apaisée de profonds ciels d’eau, c’est au pays des pommiers. Là d’où je vous parle, le vent arrête sa course à la grille, chemine en souffles retenus au pied de chaque bois blanc. Des brumes océanes y viennent pleurer les reflux du silence. Sur des nues impavides les cyprès aiguisent infiniment leurs branches, infiniment labourent l’oubli du sable.
Bosselé de pas d’enfants immémorieux, il geint parfois , roule sur les tertres que d’anciens capitaines ont échoués.
Les mouettes si vives n’y vont plus.
Là, même en rêve, on n’a jamais du jour qu’un matin presque d’été et glisse s’éteindre dans de vagues brouillards.
Inflexibles, tant de croix rangées implorent la clémence d’un vent qui démêle toujours ses toiles aux clochers des églises.
C’est là-bas, tout près des plages, entre la mer et des pommiers, vers Avranches.
obi- Nombre de messages : 575
Date d'inscription : 24/02/2013
Re: Variations normandes
Revenu et relu avant de commenter.
Ton texte me parle parce que je vois à peu près de quoi tu veux parler, de quelle "campagne" il s'agit.
Et ça me parle parce que ton traitement est personnel, imagé, créatif. On s'arrête, on relit, on réfléchit. C'est bon signe.
Un petit bémol sur le dernier paragraphe. Il se tient, mais il y a quelques phrases qui comme certains parachutes, partent en drapeau.
Rien de bien méchant, rien qu'on ne pourrait corriger soi-même, presque.
Ton texte me parle parce que je vois à peu près de quoi tu veux parler, de quelle "campagne" il s'agit.
Et ça me parle parce que ton traitement est personnel, imagé, créatif. On s'arrête, on relit, on réfléchit. C'est bon signe.
Un petit bémol sur le dernier paragraphe. Il se tient, mais il y a quelques phrases qui comme certains parachutes, partent en drapeau.
Rien de bien méchant, rien qu'on ne pourrait corriger soi-même, presque.
Ariel- Nombre de messages : 160
Age : 68
Localisation : Finistère, ascendant CévennE
Date d'inscription : 03/10/2011
Re: Variations normandes
Un beau texte, trop ignoré aussi...
Je l'ai lu et relu avec plaisir. De belles images.
juste celle-ci, pour exemple :
"Là-bas, les pommiers sont en fleurs. Et sur les haies, le soleil monte, à souffles courts, infiniment las."
Je l'ai lu et relu avec plaisir. De belles images.
juste celle-ci, pour exemple :
"Là-bas, les pommiers sont en fleurs. Et sur les haies, le soleil monte, à souffles courts, infiniment las."
Invité- Invité
Re: Variations normandes
Des paysages qui gardent tant en mémoire et des mots où malgré tout transparaît la beauté.
Le gluau de la vie ne retient pas la lumière et les pommiers sont en fleurs !
Le gluau de la vie ne retient pas la lumière et les pommiers sont en fleurs !
Carmen P.- Nombre de messages : 537
Age : 70
Localisation : Ouest
Date d'inscription : 23/04/2010
Re: Variations normandes
Je préfère la première version, super (je vois là deux versions d'un même texte).
Et j'aime aussi la mise en page dont les lignes rappellent les paysages de marée basse.
Invité- Invité
Re: Variations normandes
Merci de vos lectures.
Effectivement, il s'agit d'une variation sur une même idée. J'avais pensé entrelacer les deux textes qui me paraissaient se compléter l'un l'autre et finalement, j'ai laissé à chacun son identité. Le premier a été plus travaillé, plus laborieux à obtenir que le second.
Effectivement, il s'agit d'une variation sur une même idée. J'avais pensé entrelacer les deux textes qui me paraissaient se compléter l'un l'autre et finalement, j'ai laissé à chacun son identité. Le premier a été plus travaillé, plus laborieux à obtenir que le second.
obi- Nombre de messages : 575
Date d'inscription : 24/02/2013
Re: Variations normandes
je viens tardivement saluer ce texte qui m'avait échappé...et obi, décidément...bienvenue à toi.
Invité- Invité
Re: Variations normandes
j'aime bien, on y "est" vraiment. Un bémol pour les adverbes qui me semblent un tantinet lourdingues, inutiles.
Re: Variations normandes
Bien joli poème pour des jours et des lieux qui ne le furent pas.
J'aime tout particulièrement les paysages " Calme écume du brouillard, les mouettes vont, telles un sommeil qui s’épanche."
J'aime tout particulièrement les paysages " Calme écume du brouillard, les mouettes vont, telles un sommeil qui s’épanche."
Annie- Nombre de messages : 1452
Age : 74
Date d'inscription : 07/07/2010
Re: Variations normandes
"Là, même en rêve, on n’a jamais du jour qu’un matin presque d’été et glisse s’éteindre dans de vagues brouillards."
Il semble manquer un "qui"...
"Là, même en rêve, on n’a jamais du jour qu’un matin presque d’été et qui glisse s’éteindre dans de vagues brouillards."
Un paysage sur lequel tu as su, par l'apport de vigoureuses personnifications, par une thématique marine obsédante, faire s'entremêler les écheveaux du temps, faire planer le douloureux poids de "l'histoire avec sa grande hache", pour reprendre l'expression de Pérec.
Merci pour le voyage !
Il semble manquer un "qui"...
"Là, même en rêve, on n’a jamais du jour qu’un matin presque d’été et qui glisse s’éteindre dans de vagues brouillards."
Un paysage sur lequel tu as su, par l'apport de vigoureuses personnifications, par une thématique marine obsédante, faire s'entremêler les écheveaux du temps, faire planer le douloureux poids de "l'histoire avec sa grande hache", pour reprendre l'expression de Pérec.
Merci pour le voyage !
jfmoods- Nombre de messages : 692
Age : 59
Localisation : jfmoods@yahoo.fr
Date d'inscription : 16/07/2013
Re: Variations normandes
C'était voulu jfmoods, pour "l'indéfinition."
on 1-n'a jamais du jour
2-glisse s'éteindre
mais peut-être serait-ce mieux (plus assumé) avec:
"on n'a jamais du jour qu'un matin presque l'été (et?) glisse s'éteindre..."
merci de ta lecture
on 1-n'a jamais du jour
2-glisse s'éteindre
mais peut-être serait-ce mieux (plus assumé) avec:
"on n'a jamais du jour qu'un matin presque l'été (et?) glisse s'éteindre..."
merci de ta lecture
obi- Nombre de messages : 575
Date d'inscription : 24/02/2013
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