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Message  Invité Mer 8 Oct 2014 - 18:31

C'est la minute,

la révérence,

tête posée comme l'oiseau sur le piquet,

entouré d'huîtres.


Un édifice est achevé.


Vient le geste, dernier,

souffle à la surface.


Le visage empreint.


                         Assumeras-tu ce portrait pétrifié?


Les doutes s'enfuient.

Mort.


Avènement : l'effacement.

Retour aux innombrables

d'une personne,

disparue soudain,

expirée.


Elle le sait, déjà trop oubliée.

Elle se compacte, là

où elle disparaît d'elle-même.



Derrière la haie,

elle sait à quel horizon elle s'agglomère.



Se pleure-t-elle lorsqu'elle se sent partir ?

Tragiquement, cela n'a plus aucune importance.

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Message  Polixène Jeu 9 Oct 2014 - 12:02

J'aime particulièrement "les innombrables d'une personne"
et l'ensemble, à la fois léger et rugueux, s'accorde à ton propos (à mon sens il s'agit d'un enterrement) ; je te conteste l'utilisation du mot "mort", dont je ne vois pas l'utilité.
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Message  Ba Jeu 9 Oct 2014 - 13:21

Atmosphère de syncope, " tête d'oiseau sur piquet". Bien posés ces instants...
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Message  jfmoods Jeu 9 Oct 2014 - 19:09

Au-delà de quelques éléments qui comptent parmi les plus représentatifs de cet univers (un penchant affirmé pour le paradoxe, les verbes pronominaux, une brièveté conquise de haute lutte), c'est cette thématique de l'eau, allusive ou moins allusive sur l'ensemble des textes (postés sur VE... et ailleurs), qui intrigue le plus. Il faudrait pouvoir en dégager les perspectives.
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Message  Invité Ven 10 Oct 2014 - 21:20

d'assister à la mort de quelqu'un que l'on aime par-dessus tout et de se remémorer sa vie à travers ses facettes et ses relations innombrables (merci Polixène) qui, qu'en sait-on, ont ou non une importance pour celui qui expire et qui va "savoir" si oui ou non...

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Message  Pussicat Dim 12 Oct 2014 - 17:28

Un texte dur, âpre et léger à la fois dans sa forme... on a l'impression qu'une vague, un coup de vent suffiraient à l'emporter... c'est sa force.
Je rejoins Polixène, l'évocation est suffisamment puissante pour ne pas utiliser le mot "Mort"... il agit comme un grigri, comme si il retirait soudain toute sa force au texte.
Le titre est bien choisi,
J'aime !




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Message  Invité Dim 12 Oct 2014 - 17:37

je supprime la mort...

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Message  jfmoods Dim 4 Jan 2015 - 16:36

Le jeu des déictiques (indices personnels : « tu », « elle » x 6, indices spatio-temporels : « là », « derrière la haie », indices de monstration : « cet instant », « la minute ») définit le cadre fermé de la narration. Le présentatif de l'entame (« C'est ») appuie sur le caractère solennel du moment que l'on vit, sur l'hommage que l'on s'apprête à rendre (« révérence »). Le champ lexical du décès (« Mort », « disparue », « expirée », « disparaît »), secondé par la périphrase (« portrait pétrifié »), dessine les contours de l'événement. Par le jeu de l'animalisation (« oiseau », « huîtres »), le locuteur signale la mise à distance du cérémonial funèbre auquel il assiste. À ce stade, deux éléments – d'un abord déroutant mais se répondant – attirent immanquablement l'attention du lecteur. Il s'agit, d'abord, de l'assimilation de cette mort à la construction d'un ouvrage (« édifice »), à une sorte d'accomplissement pour la personne décédée. La forme passive de la phrase laisse toutefois planer le doute sur le caractère véritablement décisionnaire de la démarche. En effet, c'est « on » qui est sujet réel de cette phrase, un « on » dont il n'est pas possible de préciser l'identité. L'autre élément est le paradoxe (« Avènement :  effacement ») qui place la disparition comme incompréhensible figure tutélaire de cette vie-là. L'inversion du sujet (« Vient le geste ») ainsi que la mise en incise de l'adjectif (« dernier ») entendent marquer l'importance du moment précis de l'adieu. Dans un jeu d'intertextualité surgit, avec la notion générale de « surface » , l'eau comme élément constitutif de cet univers. Suggestion d'un abandon à l'eau, pendant que la « poulie d'obscur », ailleurs dans l'oeuvre, tracte le seau qui ravivera douloureusement le souvenir. « Le visage empreint. ». La phrase, particulièrement elliptique, ne manque pas de déconcerter le lecteur car elle marque une impuissance fondamentale à entamer le déchiffrage des arcanes d'un mystère. La question qui suit, c'est à lui-même que le locuteur la pose. Ce temps qui vient, cette route que l'on doit continuer seul, permettront-ils de faire la part des choses, de lisser, de pacifier l'opacifié, ce rapport à l'énigme que constituait l'autre ? Cependant, avec cette cérémonie qui manifeste la disparition officielle de l'aimée, une évidence se fait : celle de l'absence définitive que confère la tombe (« Mort.»). La métonymie (« innombrables d'une personne ») renvoie alors, avec la violence de l'arrachement subi (« soudain »), à la pléthore d'images contradictoires qui fixent les strates d'une identité. L'anaphore (« Elle le sait », « elle sait ») montre à quel point, par-delà la mort, le locuteur prête à l'aimée une intention obstinée : celle de continuer, coûte que coûte, à se rapetisser, à occuper un espace de plus en plus restreint (forme pronominale : « d'elle même », verbes pronominaux : « se compacte », « s'agglomère »). Le lecteur pressent alors que derrière cette image de soi dégradée se dresse l'entourage immédiat de la défunte, un entourage qui n'a pas su, pas voulu véritablement l'aimer pour elle-même (participe passé : « oubliée », adverbe « déjà » marquant la brièveté, adverbe « trop » marquant l'intensité). Au-delà du sentiment de perte irréparable qui pèse sur lui, le locuteur ne peut que s'interroger sur les derniers instants de la disparue (verbe pronominal : « se sent partir »), sur sa capacité finale à éprouver le poids de son malheur («verbe pronominal : « se pleure »), à reconnaître ce dernier comme élément mortifère de sa véritable identité avortée.

Merci pour ce partage !
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